Skip to main content

Décisions | Chambre civile

1 resultats
C/15023/2024

ACJC/1202/2025 du 26.08.2025 sur JTPI/15559/2024 ( SDF ) , MODIFIE

Normes : CC.176
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/15023/2024 ACJC/1202/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 26 AOÙT 2025

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 4ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 4 décembre 2024, représenté par Me Stéphane REY, avocat, rue Michel-Chauvet 3, case postale 477,
1211 Genève 12,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, représentée par Me Virginie JAQUIERY, avocate, Renold & Associé.e.s, boulevard des Philosophes 15, 1205 Genève.

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/15559/2024 du 4 décembre 2024, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a donné acte aux époux A______ et B______ de ce qu'ils s'étaient séparés en décembre 2023 (chiffre 1 du dispositif), attribué à B______ la jouissance exclusive du domicile conjugal (ch. 2), instauré une garde alternée sur les enfants mineurs C______, D______ et E______ (ch. 3), dit que le domicile légal des enfants serait auprès de leur mère (ch. 4), donné acte à A______ de son engagement à verser à B______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de chacun des enfants, la somme de 250 fr. (ch. 5), dit que les éventuels frais extraordinaires des enfants seraient partagés par moitié entre les parents, ceci après discussion et accord préalable (ch. 6) et condamné A______ à payer à B______, à titre de contribution à son entretien, 1'600 fr. du 1er janvier 2024 jusqu'au 31 mai 2025 et 700 fr. à compter du 1er juin 2025 (ch. 7), ces mesures ayant été prononcées pour une durée indéterminée (ch. 8). Le Tribunal a encore arrêté les frais judiciaires à 400 fr., les a répartis par moitié entre les parties (ch. 9), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 10) et condamné les parties à respecter et à exécuter les dispositions du jugement (ch. 11), les déboutant de toutes autres conclusions (ch. 12).

B.            a. Par acte expédié le 17 décembre 2024 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a appelé de ce jugement, qu'il a reçu le 9 décembre 2024. Il a conclu à l'annulation du chiffre 7 de son dispositif et, cela fait, à ce qu'il soit constaté qu'aucune contribution d'entretien entre époux n'était due, les frais judiciaires devant être partagés par moitié entre les parties et les dépens compensés.

Il a préalablement conclu à la restitution de l'effet suspensif relativement au chiffre 7 du dispositif du jugement attaqué.

b. Par décision du 10 janvier 2025, la Cour a suspendu le caractère exécutoire attaché au chiffre 7 du dispositif du jugement en tant qu'il portait sur les contributions d'entretien dues pour la période allant du 1er janvier au 30 novembre 2024, a rejeté la requête pour le surplus et dit qu'il serait statué sur les frais liés à la décision dans l'arrêt au fond.

c. Dans sa réponse du 16 janvier 2025, B______ a conclu à la confirmation du jugement, sous suite de frais et dépens.

Elle a produit des pièces nouvelles, soit des versements en faveur de la société F______ [compagnie d’assurances] datés des 6 mai et 5 novembre 2024, des factures SIG émises les 2 février, 3 avril, 24 mai, 6 août et 5 décembre 2024, un récapitulatif de paiements effectués en 2024 et des décomptes de primes d'assurance-maladie pour le mois de janvier 2025.

d. Dans leurs réplique et duplique, et dans leurs écritures ultérieures, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

B______ a encore produit une facture datée du 26 mars 2025, un échange de messages du 21 mars 2025, une réservation de vacances pour le mois de juillet 2025 et son relevé bancaire pour le mois de mars 2025.

A______ a produit des captures d'écran de téléphone, un courrier du 28 août 2023 et un échange de messages daté du 19 juin 2023.

e. Les parties ont été informées par avis du greffe de la Cour du 17 juin 2025 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les éléments pertinents suivants résultent de la procédure :

a. B______, née le ______ 1988, et A______, né le ______ 1987, se sont mariés le ______ 2018 à G______ (Genève).

Ils sont les parents de C______, née le ______ 2017 ainsi que de D______ et de E______, nés le ______ 2021.

b. Les parties vivent séparées depuis le 23 décembre 2023. Un système de garde alternée a été mis en place par les parents pour les trois enfants mineurs.

c. Par requête déposée le 1er juillet 2024 au Tribunal, A______ a sollicité le prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale. Il a conclu à ce qu'il soit dit que les époux étaient séparés depuis décembre 2023, à ce qu'ils soient autorisés à vivre séparés, à l'instauration d'une garde alternée sur les trois enfants mineurs, à ce que la résidence des enfants soit fixée au domicile de leur mère, à ce qu'il soit donné acte aux parties de ce que les frais courants, non couverts par les allocations familiales et les rentes AI et LPP perçues par B______ pour les enfants, seraient partagés par moitié, à ce qu'il soit donné acte aux parties de ce que les éventuels frais extraordinaires des trois enfants mineurs, notamment frais d'orthodontie, camps de vacances, nounou, seraient partagés par moitié, après discussion et accord préalable, à ce qu'il soit dit et constaté que les allocations familiales seraient attribuées à B______ et à ce que la jouissance exclusive du domicile conjugal soit attribuée à B______.

d. Lors de l'audience du Tribunal du 11 novembre 2024, les parties se sont accordées sur le principe de la séparation, l'attribution du domicile conjugal, la garde alternée et la résidence principale des enfants. En revanche, elles ne sont pas parvenues à un accord sur les aspects financiers du litige, B______ sollicitant le versement d'une contribution à l'entretien des enfants ainsi qu'à elle-même.

e. Lors de l'audience du Tribunal du 25 novembre 2024, A______ a modifié ses conclusions, proposant de verser en mains de son épouse, 250 fr. par mois à titre de contribution à l'entretien de chacun des enfants, allocations familiales non comprises.

B______ a conclu à ce que A______ soit condamné à lui verser 200 fr. par mois et par enfant depuis la séparation effective des parties, le 23 décembre 2023, sous déduction des montants déjà versés à ce titre, à ce que les frais extraordinaires des enfants soient répartis entre les parents à raison de 40% pour elle-même et 60% pour le père et à ce que A______ soit condamné à lui verser 1'635 fr. par mois, à titre de contribution à son propre entretien, depuis le 23 décembre 2023.

Elle a notamment allégué que, du temps de la vie commune, les frais du logement familial étaient composés des assurances et des frais de SIG.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

D. Dans la décision querellée, le Tribunal a retenu que les revenus de C______, liés à l'invalidité de sa mère et perçus par cette dernière, étaient de 1'222 fr., allocations familiales comprises. Ses charges mensuelles étaient de 957 fr., comprenant son entretien de base selon les normes OP (400 fr.), la prime d'assurance maladie (137 fr.), le piano (180 fr.), le cirque (100 fr.), la danse (80 fr.) et le GIAP (60 fr.). Elle disposait ainsi d'un excédent de 265 fr. par mois. Les revenus de D______ et E______ étaient de 1'222 fr. par enfant, et leurs charges mensuelles étaient de 1'478 fr., comprenant leur minimum vital selon les normes OP (400 fr.), les frais de crèche (941 fr.) et les primes d'assurance-maladie, subsides déduits (137 fr.). Leur déficit mensuel était ainsi de 256 fr. Dans la mesure où les parents exerçaient une garde alternée sur leurs enfants, le minimum vital de ceux-ci, de 400 fr. par enfant, devait être divisé par deux, la moitié étant à la charge de chacun des parents. Le montant de 250 fr. proposé par le père permettait de couvrir les déficits de D______ et E______, tout en leur laissant une part d'excédent.

A______ réalisait un revenu mensuel net moyen de 7'972 fr. Ses charges mensuelles étaient de 6'169 fr., comprenant le loyer (2'000 fr.), la prime d'assurance-maladie de base (605 fr. 65), les frais médicaux non couverts (100 fr.), les acomptes d'impôts (800 fr.), les arriérés d'impôts (675 fr.), les frais de transport (70 fr.) et l'entretien de base selon les normes OP (1'350 fr.). Il n'a pas été tenu compte de ses versements au 3ème pilier A dès lors qu'ils ne pouvaient pas être pris en compte dans le budget du minimum vital. Après acquittement des contributions aux entretiens des enfants, il disposait d'un solde de 1'622 fr. (7'972 fr. – 5'600 fr. – 3 x 250 fr.).

B______ était bénéficiaire d'une rente invalidité (1'960 fr.) et d'une rente de prévoyance professionnelle entière (1'301 fr.), de sorte que ses revenus s'élevaient à 3'262 fr. par mois. Ses charges mensuelles étaient de 4'976 fr., comprenant les frais de la maison, étant donné qu'elle ne payait pas de loyer (1'500 fr.), les primes d'assurance-maladie de base et complémentaire (649 fr. 15), les frais médicaux non couverts (256 fr.), les acomptes d'impôts (221 fr.), la dette auprès du Service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) jusqu'au mois de mai 2025 (1'000 fr.) et son entretien de base selon les normes OP (1'350 fr.). Son déficit jusqu'au mois de mai 2025 serait ainsi de 1'715 fr., puis de 715 fr.

A______ disposant d'un solde mensuel de 1'622 fr. par mois, il était en mesure de verser une contribution d'entretien de 1'600 fr. par mois à son épouse dès le 1er janvier 2024, puis de 700 fr. par mois.

E. a. A teneur de son avis de taxation fiscale pour l'année 2022, A______ a effectué un versement de 6'816 fr. à son 3ème pilier A. Selon sa déclaration fiscale, 5'680 fr. ont été versés à ce titre en 2023.

b. B______ réside dans un logement appartenant à sa famille pour lequel elle ne paie aucun loyer.

Les frais de gaz et d'électricité relatifs à cette habitation se sont élevés à 2'398 fr. 25 (682 fr. 90 + 990 fr. 60 + 724 fr. 75) entre le 1er février et le 31 juillet 2023 et entre le 1er octobre et le 30 novembre 2023. Les factures intermédiaires (pour les deux étages) se sont élevées à 873 fr. 30 (214 fr. 85 + 658 fr. 45) pour les mois d'octobre et novembre 2024.

c. La prime d'assurance maladie de base de B______ était de 572 fr. 55 en 2024 et s'élève à 615 fr. 05 en 2025. Sa prime d'assurance-maladie complémentaire était de 31 fr. 35 en 2024.

d. Par pli du 2 octobre 2020, le SPC a informé B______ que le solde de sa dette s'élevait à 41'112 fr. 50. Il lui a confirmé avoir accepté sa proposition de remboursement à raison de mensualités de 500 fr. entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2022, de 1'000 fr. du 1er janvier 2023 au mois de mai 2025, et d'une dernière mensualité de 112 fr. 50 pour solde de tout compte en juin 2025. Un contrordre avait été donné à la poursuite engagée à son encontre, ainsi qu'à celle engagée contre son époux.

B______ a prouvé avoir versé au SPC 1'250 fr. en novembre et décembre 2023 et 1'000 fr. par mois entre janvier et avril 2024.


 

EN DROIT

1.             Le jugement entrepris ayant été communiqué aux parties avant le 1er janvier 2025, la présente procédure d'appel demeure régie par l'ancien droit de procédure (art. 404 al. 1 et 405 al. 1 CPC), sous réserve des dispositions d'application immédiate énumérées à l'art. 407f CPC.

2.             2.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices de l'union conjugale, considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC (ATF 137 III 475 consid. 4.1), dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

En l'espèce, en appel le litige porte exclusivement sur la contribution à l'entretien de l'épouse, soit une affaire de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_344/2022 du 31 août 2022 consid. 1), dont la valeur litigieuse requise est atteinte, compte tenu de la capitalisation des montants litigieux selon l'art. 92 al. 2 CPC.

2.2 Interjeté dans le délai utile de dix jours dès la notification du jugement (art. 142 al. 1, 143 al. 1, 271 lit. a et 314 al. 1 CPC) et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

Le mémoire de réponse est recevable pour avoir été déposé dans le délai et la forme prescrits par la loi (art. 312 al. 2 CPC) ainsi que les mémoires de réplique et de duplique, et les écritures spontanées, déposés par les parties.

Cela étant, la motivation de l'appel doit être entièrement contenue dans le mémoire d'appel lui-même. Elle ne peut être complétée ou corrigée ultérieurement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_959/2023 du 23 janvier 2024 consid. 3.2. et les références citées). Par conséquent, seuls seront examinés les griefs soulevés par l'appelant dans son acte du 16 décembre 2024 et par l'intimée dans sa réponse du 16 janvier 2025.

2.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

Hormis les cas de vices manifestes, la Cour doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).

2.4 Les mesures protectrices de l'union conjugale étant soumises à la procédure sommaire (art. 271 let. a CPC), l'autorité peut se limiter à la vraisemblance des faits et à l'examen sommaire du droit, en se fondant sur les moyens de preuve immédiatement disponibles, tout en ayant l'obligation de peser les intérêts respectifs des parties (ATF 139 III 86 consid. 4.2; 131 III 473 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_916/2019 du 12 mars 2020 consid. 3.4).

2.5 En tant qu'elle porte sur la question de la contribution à l'entretien de l'épouse, la cause est soumise à la maxime de disposition (art. 58 al. 1 CPC) et à la maxime inquisitoire limitée (art. 55 al. 2, 277 et 272 CPC), de sorte que le Tribunal ne peut accorder à une partie ni plus ni autre chose que ce qui est demandé, ni moins que ce qui est reconnu par la partie adverse (arrêt du Tribunal fédéral 5A_751/2019 du 25 février 2020 consid. 5.1).

3. Les parties ont allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles devant la Cour.

3.1 L'art. 317 al. 1 CPC prévoit que les faits et moyens de preuve nouveaux sont admissibles en appel pour autant qu'ils soient invoqués ou produits sans retard (let. a) et qu'ils n'aient pas pu l'être en première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

S'agissant des vrais nova ("echte Noven"), la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée. En ce qui concerne les pseudo nova ("unechte Noven"), il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être produit en première instance (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

3.2 En l'espèce, la facture SIG du mois de décembre 2024, la facture de prime d'assurance-maladie de l'intimée pour l'année 2025, la facture du 26 mars 2025, les échanges de messages de mars 2025 et le relevé de compte de l'intimée du mois de mars 2025 sont recevables dès lors qu'ils se rapportent à des faits survenus après le 25 novembre 2024, date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger.

Les autres pièces produites par les parties sont irrecevables car elles se rapportent à des faits survenus avant que le Tribunal ait gardé la cause à juger, et les parties n'expliquent pas pourquoi elles n'auraient pas été en mesure de les produire devant le Tribunal.

4. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir mal évalué les charges de chacune des parties, de ne pas avoir tenu compte que l'intimée exerçait une activité indépendante et de l'avoir ainsi condamné à verser une contribution à l'entretien de son épouse.

4.1.1 Selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, le juge fixe, sur requête, la contribution d'entretien à verser à un époux si la suspension de la vie commune est fondée.

Le principe et le montant de la contribution d'entretien due au conjoint selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC se déterminent en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux.

Tant que l'union conjugale n'est pas dissoute, les époux conservent, même après leur séparation, un droit égal de conserver leur train de vie antérieur, en application des art. 163 et 164 CC. Quand il n'est pas possible de conserver ce niveau de vie, les conjoints ont droit à un train de vie semblable. Le train de vie mené jusqu'à la cessation de la vie commune constitue la limite supérieure du droit à l'entretien (ATF 147 III 293 consid. 4.4; arrêts du Tribunal fédéral 5A_935/2021 du 19 décembre 2022 consid. 3.1; 5A_409/2021 du 4 mars 2022 consid. 3.5.1 et les références citées).

Dans tous les cas, le minimum vital du droit des poursuites du débirentier doit être préservé (ATF 147 III 265 consid. 7.3).

4.1.2 Le Tribunal fédéral a posé, pour toute la Suisse, une méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille, soit la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent, dite en deux étapes (ATF 147 III 265, in SJ 2021 I 316; ATF 147 III 293 et ATF 147 III 301).

Selon cette méthode, on examine les ressources – en prenant en considération tous les revenus du travail, de la fortune et les prestations de prévoyance, ainsi que le revenu hypothétique éventuel – et les besoins des personnes intéressées, puis les ressources sont réparties entre les membres de la famille concernés de manière à couvrir, dans un certain ordre, le minimum vital du droit des poursuites ou, si les ressources sont suffisantes, le minimum vital élargi du droit de la famille, puis l'excédent éventuel (ATF 147 III 265 consid. 7).

Seules les charges effectives, à savoir celles qui sont réellement acquittées, peuvent être incluses pour le calcul de la contribution d'entretien, à l'exclusion de dépenses hypothétiques dont on ne sait si elles existeront finalement – et à concurrence de quel montant – ni si elles seront en définitive assumées (arrêt du Tribunal fédéral 5A_378/2021 du 7 septembre 2022 consid. 7.3 et les réf. cit.).

4.1.3 Pour un salarié, les cotisations des assurances de troisième pilier n'ont pas à être prises en compte dans le calcul du minimum vital. En tant que ces assurances servent à la constitution d'une épargne, il peut néanmoins en être tenu compte au moment de répartir l'excédent (arrêt du Tribunal fédéral 5A_447/2023 du 16 juillet 2024 consid. 9 et les arrêts cités).

Si les moyens financiers des époux le permettent, l'amortissement de dettes peut être comptabilisé dans le minimum vital du droit de la famille pour autant que des paiements pour amortir la dette aient déjà été effectués régulièrement avant la fin de la vie commune et que la dette ait été contractée pour le bénéfice de la famille, décidée en commun ou que les époux en soient débiteurs solidaires (ATF 127 III 289 consid. 2a/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_221/2024 du 5 mai 2025 consid. 5.2 et les arrêts cités).

4.2.1 En l'espèce, l'appelant n'a pas rendu vraisemblable que l'intimée exercerait une activité lucrative indépendante qui lui procurerait des revenus, le seul élément qu'il a produit étant une capture d'écran d'un site internet indiquant "vidéo non disponible". L'appelant se prévaut du fait que l'on pourrait constater sur les nombreuses pages internet de l'intimée que celle-ci propose des prestations contre rémunération sans toutefois en apporter la preuve. Par conséquent, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que les revenus de l'intimée n'étaient constitués que de ses rentes.

4.2.2 C'est également à juste titre que le premier juge n'a pas tenu compte des versements effectués par l'appelant à son 3ème pilier puisqu'il s'agit non pas d'une charge mais d'une épargne. En outre, ceux-ci n'étant pas du même montant pour les années 2022 et 2023, ils ont vraisemblablement été effectués sur un compte de libre passage, de sorte que l'appelant n'est pas dans l'obligation de les effectuer chaque année, contrairement à une police d'assurance-vie qui le contraindrait à verser une prime annuelle fixe.

En revanche, dans son calcul, le premier juge a oublié de prendre en considération que l'appelant devait non seulement s'acquitter des contributions à l'entretien des trois enfants (250 fr. par enfant), qui sont prioritaires à celle de l'intimée (art. 276a al. 1 CC), mais également subvenir à leur besoin lorsqu'il en a la garde, qui est partagée, ce qui représente un coût de 200 fr. par mois et par enfant, soit 600 fr.

Par conséquent, le solde mensuel de l'appelant s'élève à 1'021 fr. (7'971 fr. – 5'600 fr. – 750 fr. – 600 fr.).

4.2.3 L'appelant reproche au Tribunal d'avoir arrêté les frais de logement de l'intimée à 1'500 fr. par mois alors qu'il résulte des pièces produites que ceux-ci ne dépassent pas 500 fr. par mois pour les mois d'hiver. L'intimée n'a pas prouvé s'acquitter d'une prime d'assurance bâtiment. Elle n'a également pas établi verser une prime d'assurance RC-ménage. Il est en outre vraisemblable que l'appelant doit assumer une charge identique. Aussi par égalité de traitement cette charge ne sera prise en compte pour aucune des parties.

En revanche, il y a lieu de tenir compte de la dette de l'intimée envers le SPC dès lors qu'il a été rendu vraisemblable qu'il s'agit d'une dette dont les parties sont solidairement responsables. En effet, les poursuites avaient été intentées par les autorités à l'encontre des deux époux avant d'être retirées compte tenu de l'accord de remboursement. En outre, cette dette a été remboursée en grande partie du temps de la vie commune, entre 2020 et 2023.

Au vu de ce qui précède, les charges de l'intimée s'élèvent à 3'990 fr., comprenant les charges de logement (500 fr.), les primes d'assurance-maladie de base et complémentaire (615 fr. + 31 fr., l'intimée n'ayant pas établi une augmentation de sa prime d'assurance complémentaire), les frais médicaux non couverts (256 fr.), les acomptes d'impôts (221 fr.), le remboursement au SPC (1'000 fr.), les frais de transport (17 fr., 200 fr. / 12, compte tenu de la subvention de l'Etat) et son entretien de base selon les normes OP (1'350 fr.).

Dans la mesure où la totalité des besoins des enfants sont couverts par les rentes invalidités complémentaires, les allocations familiales et les contributions d'entretien versées par l'appelant, le déficit de l'intimée s'élève à 728 fr. (3'262 fr. – 3'990 fr.). L'appelant, qui dispose d'un solde mensuel de 1'021 fr., après couverture de ses charges et celles des enfants, est donc en mesure de couvrir le déficit de son épouse.

Dès le mois de juin 2025, date du dernier remboursement au SPC, l'intimée bénéficiera d'un solde de 272 fr. (3'262 fr. – 2'990 fr.).

4.2.4 L'excédent des parties jusqu'au 31 mai 2025 s'élevait à 293 fr. (1'021 fr.
– 728 fr.), de sorte que l'intimée est en droit de prétendre au versement d'une contribution à son entretien de 874 fr. 50 (1/2 de 293 fr. + 728 fr.), montant qui sera arrondi à 875 fr., étant relevé que le dies a quo du versement fixé au 1er janvier 2024 n'a pas été critiqué par l'appelant.

Dès le mois de juin 2025, l'excédent des parties sera de 1'293 fr. (1'021 fr. + 272 fr.), de sorte que la contribution à l'entretien de l'intimée sera fixée à 374 fr. 50 (1'293 fr. / 2 – 272 fr.), arrondi à 375 fr. par mois.

4.2.5 Le chiffre 7 du dispositif du jugement sera dès lors annulé et il sera statué à nouveau (art. 327 al. 3 let. b CPC), en ce sens que l'appelant sera condamné à verser à l'intimée une contribution mensuelle à son entretien de 875 fr. du 1er janvier 2024 au 31 mai 2025, puis de 375 fr. dès le 1er juin 2025.

5. 5.1 La modification du jugement entrepris ne commande pas de revoir la décision du Tribunal sur les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC), laquelle ne fait l'objet d'aucun grief et est conforme aux normes applicables (art. 31 RTFMC; art. 107 al. 1 let c CPC).

5.2 Les frais judiciaires des appels seront fixés à 1'000 fr. au total, comprenant l'émolument de décision sur effet suspensif (art. 95 al. 1 let. a et al. 2, 96, 104 al. 1 et 105 al. 1 CPC; art. 31 et 37 RTFMC), et compensés à concurrence de 500 fr. avec l'avance de frais de 1'000 fr. effectuée par l'appelant, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). Ils seront mis à la charge des parties pour moitié chacune, compte tenu de la nature familiale du litige (art. 107 al. 1 let. c CPC) et du fait qu'aucune d'elles n'obtient entièrement gain de cause en seconde instance (art. 106 al. 1 CPC). Les Services financiers du Pouvoir judiciaire seront invités à restituer à l'appelant la somme de 500 fr. versée à titre d'avance de frais (1'000 fr. – 500 fr.). L'intimée plaidant au bénéfice de l'assistance judiciaire, sa part des frais sera provisoirement laissée à la charge de l'Etat de Genève.

Pour les mêmes motifs d'équité liés à la nature du litige, les parties conserveront à leur charge leurs propres dépens d'appel.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 17 décembre 2024 par A______ contre le jugement JTPI/15559/2024 rendu le 4 décembre 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/15023/2024.

Au fond :

Annule le chiffre 7 du dispositif de ce jugement et, statuant à nouveau sur ce point :

Condamne A______ à payer à B______, à titre de contribution à son entretien, par mois et d'avance, 875 fr. du 1er janvier 2024 au 31 mai 2025, puis 375 fr. dès le 1er juin 2025.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr. et dit qu'ils sont compensés à hauteur de 500 fr. avec l'avance de frais fournies par A______, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Met les frais judiciaires d'appel à la charge de A______ à hauteur de 500 fr. et à la charge de B______ à hauteur de 500 fr.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer 500 fr. à A______.

Laisse provisoirement la part des frais de B______ de 500 fr. à la charge de l'Etat de Genève.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges;
Madame Camille LESTEVEN, greffière.


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile, les moyens étant limités selon
l'art. 98 LTF. Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.