Skip to main content

Décisions | Chambre civile

1 resultats
C/30770/2010

ACJC/1473/2022 du 03.11.2022 sur JTPI/15387/2017 ( OO ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 21.12.2022, rendu le 27.11.2023, CONFIRME, 5A_985/2022
Normes : LPC.267; CC.779.al1; CC.675; CC.738.al1
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/30770/2010 ACJC/1473/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du jEUDI 3 NOVEMBRE 2022

Entre

Hoirie de feu Monsieur A______ soit :

1) Monsieur B______, domicilié ______ (GE),

2) Monsieur C______, domicilié ______ (GE),

3) Madame D______, domiciliée ______ (Canada),

4) Madame E______, domiciliée ______ (GE),

appelants et intimés sur appel joint, comparant par Me F______, avocate,

et

Hoirie de feue Madame G______ soit :

1) Monsieur H______, domicilié ______ (GE),

2) Monsieur I______, domicilié ______ (GE),

3) Madame J______, domiciliée ______ (GE),

4) Monsieur K______, domicilié ______ (GE),

5) Monsieur L______, domicilié ______ (Portugal),

6) Monsieur M______, domicilié ______ [GE],

intimés et appelants sur appel joint, comparant par Me N______, avocat,


Le présent arrêt est communiqué aux parties par plis recommandés du 15 novembre 2022.


EN FAIT

A. a. O______, dit O______, était propriétaire de plusieurs parcelles formant un grand domaine sur le coteau de P______, à Genève.

A son décès, survenu le ______ 1949, il a laissé huit héritiers, soit sa veuve Q______ et leurs sept enfants, R______, S______, G______, T______, U______, V______ et A______.

Une convention générale de partage passée devant notaire les 20 et 25 janvier 1960, complétée par plusieurs conventions et actes de partage, a été établie par les héritiers en vue de l'attribution des parcelles de la succession.

b. En janvier 1960, G______ est ainsi devenue propriétaire de la parcelle n° 1______ (antérieurement parcelles nos 2______ et 3______) de la commune de W______ (Genève) sur laquelle sont érigés une maison de maître (bâtiment n° 4______), une orangerie (bâtiment n° 5______) et une serre (bâtiment n° 6______), le tout également appelé "X______".

c. Selon la convention générale de partage, il a été convenu de constituer au profit de T______, A______ et R______ (frère et sœurs de G______) une servitude de superficie sur "X______".

Dite convention définissait ce droit comme une " servitude personnelle sur les bâtiments nos 4______, 5______ et 6______ sis sur la parcelle 2______, ainsi que sur toutes canalisations desservant lesdits bâtiments". Il était, en outre, expressément convenu que "ces bâtiments sont la propriété de Madame G______, Mademoiselle R______, Madame T______ et Monsieur A______ chacun pour un quart."

d. La servitude au profit de R______, T______ et A______ a été inscrite au Registre foncier le ______ 1960 sous référence 7______, n° RF 8______. L'inscription mentionne le terme "Superficie", sans autre indication.

e. Par acte notarié des 21 février et 6 mars 1968, il a été prévu que cette servitude de superficie serait strictement personnelle et incessible concernant R______ et T______, alors que la même servitude, qui profitait à A______ personnellement devait passer à ses héritiers.

f. Les parties ont, par ailleurs, convenu d'un retour des constructions au(x) propriétaire(s) du fond sans indemnisation (principe de la "valeur zéro"). Il ressort en effet de la convention générale de partage que les bâtiments nos 4______, 5______ et 6______ faisant l'objet de la servitude de superficie ont été comptabilisés à une valeur de zéro. Le chiffre 4 de l'acte notarié des 21 février et 6 mars 1968 stipule pour sa part : "Il est rappelé qu'aux termes de l'acte de partage susvisé, les bâtiments nos 4______, 5______ et 6______ ont été comptés pour zéro à cause des charges qui incombent à leurs propriétaires et qu'en conséquence, lors d'un partage ultérieur, il ne pourra être réclamé par quiconque une somme basée sur la valeur desdits bâtiments".

g. Au fil des années, les droits relatifs aux fonds nos 4______, 5______ et 6______ et à la servitude de superficie y relative sont passés entre différentes mains.

g.a G______ est décédée le ______ 1985, laissant pour héritiers son époux, Y______, ainsi que ses trois fils, H______, I______ et Z______.

Le 27 juin 1986, Y______ a déclaré renoncer à la succession de feue son épouse.

Z______ est décédé le ______ 2020, laissant pour héritiers sa veuve, J______, et leurs trois enfants, K______, L______ et M______.

Les droits de G______ sont ainsi passés à ses héritiers, à savoir H______, I______, J______, K______, L______ et M______ (ci-après également : les consorts G______).

g.b R______ est décédée le ______ 1996, ne laissant aucun héritier.

g.c A______ est décédé le ______ 2003, laissant pour héritiers sa veuve, AA______, décédée par la suite en ______ 2009, et leurs quatre enfants, D______, E______, B______ et C______ (ci-après également : les consorts A______).

g.d T______ est décédée le ______ 2012, sans que ses descendants ne lui succèdent dans les droits de superficie qu'elle possédait sur les bâtiments nos 4______, 5______ et 6______ (cf. let. B.d infra).

h. A la fin des années nonante, un premier litige est survenu entre les membres de la famille concernant la part de chacun d'entre eux sur "X______", ainsi que sur sa valeur.

De son vivant, A______ avait introduit, en septembre 2002, une action tendant notamment à ce qu'il soit constaté que G______, puis ses héritiers, avaient été indûment inscrits au Registre foncier comme titulaires d'un droit de superficie sur les bâtiments nos 4______, 5______ et 6______, ainsi qu'à la nullité, voire l'annulation de toutes dispositions contractuelles attribuant à G______, puis à ses héritiers, un droit de copropriété sur les bâtiments précités.

Les membres de l'hoirie de feu A______, qui avaient repris la procédure à la suite du décès de ce dernier, ont été déboutés de toutes leurs conclusions, par jugement du Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) du 7 septembre 2005, arrêt de la Cour de justice du 18 mai 2006 et arrêt du Tribunal fédéral 5C_165/2006 du 8 mars 2007 (publié aux ATF 133 III 311).

Dans le cadre de cette procédure, il a notamment été relevé par les différentes instances que, lors du partage de 1960, il n'avait été prévu ni durée contractuelle, ni rente de superficie pour le droit de superficie grevant la parcelle attribuée à G______, qui supportait déjà les bâtiments litigieux. Cette dernière avait donc accepté, pour une durée indéterminée et sans aucune contre-prestation, une entrave importante à son droit de propriété, dès lors qu'il lui était impossible de profiter seule de sa parcelle, par des ventes, locations, constructions ou autres mises en valeur, voire simplement par une utilisation exclusive pour ses propres besoins. Tant l'acte de 1960 que celui de 1968 prévoyaient le principe de la "valeur zéro" du droit de superficie. Il apparaissait ainsi que la volonté réelle et concordante des parties était d'exclure toute indemnité de retour à la charge de la propriétaire de la parcelle (ou de ses ayants droit).

B. a. Le 23 décembre 2010, les membres de l'hoirie de feue G______ ont formé une action en partage à l'encontre de T______ et des membres de l'hoirie de feu A______ en vue de la dissolution du droit de superficie portant sur les bâtiments nos 4______, 5______ et 6______ de la parcelle n° 1______ de la commune de W______.

Ils ont conclu à ce que leur droit de récupérer les bâtiments litigieux sans indemnité en faveur de leurs parties adverses soit constaté, subsidiairement à ce qu'une vente aux enchères privées entre les parties ou étendue aux seuls descendants de O______ soit organisée.

b. T______ et les membres de l'hoirie de feu A______ ont conclu au déboutement de leurs parties adverses, alléguant que les conditions du partage n'étaient pas réunies.

c. Dans le cadre d'un second échange d'écritures, les consorts G______ ont précisé que le partage en nature de la copropriété était exclu et que seule une vente aux enchères privées respecterait la volonté des parties de préserver les bâtiments en mains des héritiers de feu O______. Les consorts A______ ont répliqué que des enchères privées les contraindraient à se rendre acquéreurs, de sorte qu'il se justifiait d'ordonner des enchères publiques pour leur garantir un meilleur prix de vente.

d. L'instance a été suspendue pendant plus de deux ans en raison d'abord du décès de T______, puis à la requête commune des parties, qui avaient indiqué être en pourparlers.

e. Par jugement du 14 mars 2014, le Tribunal a constaté la reprise de l'instance.

Un litige est survenu sur la question de savoir si les descendants de feue T______ disposaient de la qualité pour agir. Le Tribunal a considéré que tel n'était pas le cas car ces derniers n'avaient pas succédé dans les droits de superficie que détenait leur défunte mère, compte tenu de leur nature strictement personnelle et incessible.

Les consorts A______ ont interjeté recours contre ce jugement, déclaré irrecevable par arrêts rendus les 17 décembre 2014 et 2 mars 2015 par la Cour de justice, respectivement le Tribunal fédéral, l'existence d'un préjudice difficilement réparable n'étant pas donnée.

La procédure s'est donc poursuivie entre l'hoirie de feue G______ et l'hoirie de feu A______.

f. Le 4 mai 2015, les parties se sont accordées pour que le Tribunal limite dans un premier temps la procédure sur le fond à la question des quotes-parts du droit de superficie.

Par jugement du 17 août 2015, le Tribunal a constaté que les droits de co-superficiaire que possédait feue T______ s'étaient éteints à son décès avec pour conséquence d'accroître, dans une mesure équivalente, la part des co-superficiaires restants. Les droits de superficie étaient ainsi désormais détenus à hauteur de 50% par les hoirs de feue G______ et de 50% par les hoirs de feu A______.

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour de justice du 22 avril 2016 et arrêt du Tribunal fédéral du 5 septembre 2016.

g. A réception de l'arrêt du 5 septembre 2016 du Tribunal fédéral, la cause a été reprise par le Tribunal.

Par écritures du 18 janvier 2017, les hoirs de feue G______ ont persisté dans leurs conclusions en partage tendant à récupérer les bâtiments litigieux sans indemnité à verser, subsidiairement à la mise en place d'une vente aux enchères privées pour le rachat du droit de superficie. Ils ne se sont pas opposés à la tenue d'une expertise de la valeur du droit de superficie litigieux.

Par écritures du même jour, les hoirs de feu A______ se sont opposés au partage, considérant que leur droit de superficie devait être maintenu. Subsidiairement, au cas où le Tribunal ne maintiendrait pas le contrat de superficie, ils ont sollicité, reconventionnellement, des dommages et intérêts pour le préjudice subi résultant, selon eux, du profit que la réunification générerait pour les consorts G______. Dans cette hypothèse, ils ont sollicité une expertise pour déterminer la valeur vénale de la parcelle n° 1______ grevée du droit de superficie et celle de la même parcelle libérée dudit droit en vue d'évaluer leur préjudice. Ils se sont par ailleurs opposés aux enchères privées, dans la mesure où ils ne souhaitaient pas se porter acquéreurs du droit de superficie; une vente aux enchères publiques serait en outre, selon eux, inutile puisque des tiers ne seraient pas intéressés à racheter un tel droit.

h. Les parties ont encore déposé des écritures le 27 septembre 2017, persistant dans leurs précédentes conclusions et s'opposant, notamment, sur la portée d'une éventuelle expertise, les consorts G______ considérant qu'elle devrait porter sur la valeur du droit de superficie litigieux en tant que tel tandis que les consorts A______ estimaient qu'elle devait déterminer la valeur vénale de la parcelle n° 1______ avec et sans droit de superficie.

i. Par jugement du 24 novembre 2017, le Tribunal a notamment ordonné la vente aux enchères privées entre les hoirs de feue G______ et les hoirs de feu A______ de la servitude inscrite au Registre foncier le ______ 1960 sous référence 7______, n° RF 8______ sur la parcelle n°1______ de la Commune de W______ (Genève), désigné Me AB______, notaire, à cette fin et dit que le produit net de la vente aux enchères privées serait partagé par moitié entre les hoirs de feue G______ et les hoirs de feu A______.

Sur demande reconventionnelle, le Tribunal a débouté les consorts A______ de leurs conclusions en indemnisation.

j. Statuant sur appel, la Cour a, par arrêt (ACJC/1503/2018) du 5 octobre 2018, modifié le jugement du 24 novembre 2017 en ce sens que la vente ordonnée serait une vente aux enchères publiques et renvoyé la cause au Tribunal pour qu'il complète le jugement en ce sens.

Après avoir confirmé que les conditions pour demander le partage du droit de superficie étaient remplies, la Cour de justice a retenu que la vente aux enchères entre copropriétaires proposée par le premier juge présentait certes l'avantage de maintenir les bâtiments au sein de la famille de feu O______. Cela étant, dans la mesure où les hoirs de feu A______ avaient clairement signifié qu'ils ne souhaitaient pas s'en porter acquéreurs, la situation revenait à laisser aux hoirs de feue G______ la possibilité de déterminer, d'entente entre eux, le prix d'adjudication du droit de superficie, ce qui désavantagerait significativement leurs parties adverses. Dans ces conditions, il se justifiait d'ordonner le partage de la copropriété par une vente aux enchères publiques.

La Cour a encore relevé qu'il se justifiait de faire procéder à une expertise pour déterminer la mise à prix, qui constituait un élément essentiel, tout en relevant que ladite expertise n'avait qu'une valeur d'estimation, sans aucun caractère contraignant.

C. a. La cause a été reprise par le Tribunal par ordonnance du 14 janvier 2019.

b. Les 26 et 27 février 2019, les parties se sont exprimées par écrit sur les questions susceptibles d'être posées à un expert.

Les consorts G______ ont demandé que l'expert détermine "la valeur actualisée de X______" en tenant compte notamment de la valeur locative, des charges d'entretien qui pouvaient être anticipées d'ici 2060 et de l'absence d'indemnité pour le retour du bâtiment au superficiant en application de la clause "valeur zéro".

Les consorts A______ ont demandé que l'expert détermine "au moyen de la méthode de la valeur intrinsèque actuelle la valeur vénale du droit de superficie", étant précisé que ce droit "confère la jouissance de la surface non bâtie du terrain aménagée pour servir ses bâtiments, à savoir le chemin d'accès menant de la route 9______ à la cour intérieure et à ses places de parc à voitures, les allées desservant toutes les issues des bâtiments et la terrasse/jardin desservant l'escalier monumental au perron, sur le devant de la maison".

c. Par ordonnance du 21 mai 2019, le Tribunal a ordonné une expertise visant à estimer la valeur vénale du droit de superficie portant sur les bâtiments 4______, 5______ et 6______ sis sur la parcelle n° 1______ de W______ (Genève) ainsi que sur toutes les canalisations desservant lesdits bâtiments, inscrit au Registre foncier le ______ 1960 sous référence 7______, n° RF 8______.

Il a commis à cette fin AC______, architecte, avec pour mission de répondre aux questions suivantes :

-          Déterminer la/les méthode(s) pertinente(s) pour estimer la valeur vénale du droit de superficie portant sur les bâtiments nos 4______, 5______ et 6______ sis sur la parcelle n° 1______ de W______ ainsi que sur toutes canalisations desservant lesdits bâtiments et justifier ce(s) choix (ch. 3.5).

-          Déterminer, en tant que de besoin, le montant moyen des charges d'entretien et de fonctionnement courantes annuelles de "X______" et déterminer, en tant que de besoin, le montant des travaux d'entretien de "X______" qui peuvent être anticipés d'ici à l'an 2060 (ch. 3.6).

-          Estimer la valeur vénale du droit de superficie portant sur les bâtiments nos 4______, 5______ et 6______ sis sur la parcelle n° 1______ de W______ ainsi que sur toutes canalisations desservant lesdits bâtiments selon trois hypothèses :

1) en tenant compte d'un droit d'accès menant de la route 9______ à la cour intérieure et à ses places de parc à voitures seulement,

2) en tenant compte d'un droit d'accès s'étendant également aux allées desservant toutes les issues des bâtiments et à la terrasse/jardin desservant l'escalier monumental du perron sur le devant de la maison et

3) en tenant compte d'un droit d'accès s'étendant en outre au parc ou jardin entourant "X______" (ch. 3.7).

L'ordonnance précise que pour procéder aux estimations, l'expert doit tenir compte du fait que le droit de superficie arrivera à échéance le 12 février 2060, qu'à l'échéance dudit droit, le superficiaire ne touchera aucune indemnité et que les bâtiments concernés sont inscrits à l'inventaire et font l'objet d'une procédure de classement.

L'ordonnance indique enfin que la question de l'étendue du droit de superficie (droits d'accès) sera résolue lors du prononcé du jugement définitif, si les parties ne s'entendent pas sur ce point.

d. L'expert a rendu son rapport d'expertise le 21 décembre 2019.

Il ressort de cette expertise que le Conseil d'Etat a classé l'ancien domaine A______ en date du 21 juin 2017.

S'agissant de la méthode pertinente devant être utilisée, l'expert indique que le calcul de la valeur intrinsèque ne se justifie pas dans la mesure ou à l'échéance du droit de superficie, il n'y a pas d'indemnité à verser.

Il explique dès lors qu'il "fera intervenir la valeur intrinsèque selon les besoins spécifiques qui sont présents, directement ou indirectement, notamment dans la valeur locative, les frais d'entretien réguliers, la valeur finale" et qu'il "estimera les avantages financiers sur la durée restante dont jouira le bénéficiaire du droit de superficie". Il expose que la valeur d'un droit de superficie, pour le superficiaire, s'estime par le cumul des avantages financiers (valeur locative) pour la durée restante jusqu'à l'échéance, y compris les conditions de retour et que la valeur du droit de superficie, pour le superficiant, est l'actualisation du rendement qui sera obtenu pendant la durée du droit et du retour obtenu à l'échéance. Il relève, en outre, que les conditions du droit de superficie sont en l'occurrence "atypiques et inhabituelles" dans la mesure où il n'y a "pas de rente", "pas d'indemnité à l'échéance" et qu'il n'y a "pas de valeur définie pour les constructions existantes au moment de sa constitution".

L'expert a, par ailleurs, établi trois variantes conformément aux indications contenues dans l'ordonnance d'expertise, la première correspondant à un droit de superficie avec un usage limité aux constructions et un accès restreint à celles-ci par la cour nord, la deuxième en étendant ce droit aux cheminements (allées en gravier) entourant les bâtiments ainsi qu'à la terrasse (partie plate d'environ 700 m2) et la troisième avec l'accès étendu au parc entourant "X______".

Dans son expertise, l'expert estime la surface brute pertinente des bâtiments à 1'590 m2, en tenant compte notamment d'une surpondération de 10% pour les pièces du rez-de-chaussée et sans tenir compte de la verrière d'entrée de 15 m2, soit 1'535 m2 pour "X______" (bâtiment 4______), 2 m2 pour la serre (bâtiment 6______) et 53 m2 pour la dépendance (bâtiment 5______).

Il estime le taux de vétusté des bâtiments à 60% dont 47% de vétusté calculée avec un âge apparent de 64 ans et 13% d'obsolescence fonctionnelle. Il expose que même si l'état général de la structure et des éléments porteurs semble bon, de l'humidité apparaît au sous-sol, la tour a fait l'objet d'une réfection mais le solde de la toiture a besoin d'une réhabilitation, les ferblanteries deviennent poreuses, la verrière doit être révisée, les fonds sont à vérifier, les éléments en pierre sont à nettoyer et les menuiseries extérieures sont dégradées et doivent être réhabilitées et améliorées sur le plan thermique. Concernant les installations CVSE (chauffage, ventilation, sanitaire, électricité), il indique que la chaudière installée en 1972 est en fin de vie et que la distribution de chaleur semble partiellement ou totalement désaffectée; il n'y a pas de ventilation mécanique, les installations sanitaires, en nombre insuffisant pour être adapté au marché locatif, sont désuètes, la cuisine originelle n'est plus utilisée et des installations de cuisine apparaissaient çà et là, la dernière, sommaire ayant été installée à la fin des années 90. Quant à l'électricité, il indique qu'elle est en ordre mais qu'elle n'a pas la puissance souhaitée pour un usage moderne et que le courant faible (pour la téléphonie, internet, alarme, etc.) n'est pas installé; la séparation des eaux usées et des eaux de pluie a été réalisée en 1986. Il termine par les finitions intérieures qui sont "à l'abandon" mais qui, par chance, sont seulement légèrement dégradées.

Il chiffre la valeur marchande des bâtiments, en l'état, à 8'250'000 fr. Ce montant correspond à la valeur de la propriété rénovée chiffrée à 40'000'000 fr. dans sa totalité, déduction faite de la part du terrain qui représente 60%, soit 24'000'000 fr., et des travaux de rénovation estimés à 7'750'000 fr.

Compte tenu de ces éléments, il chiffre les charges d'entretien et de fonctionnement courantes annuelles à 57'700 fr. dont 17'700 fr. de frais d'entretien et de consommation (chauffage, électricité, téléphone, etc.) et 40'000 fr. de provision pour travaux de rénovation des installations et de l'enveloppe et les charges d'assurances. Il précise qu'en sus des charges susmentionnées, un investissement minimum de 500'000 fr. est nécessaire pour respecter les obligations d'entretien d'une construction classée.

L'expert a encore estimé le droit de superficie selon l'ampleur des travaux envisagés. En cas de travaux lourds (estimés à 7'750'000 fr.), il évalue ledit droit à un montant négatif de quelque 213'500 fr. pour la variante 1, à un montant positif de quelque 315'000 fr. pour la variante 2 et à un montant positif de quelque 1'370'000 fr. pour la variante 3. En cas de travaux minimaux, l'expert chiffre la valeur vénale du droit de superficie pour le superficiaire à respectivement 1'274'082 fr. pour la variante 1, 1'304'612 fr. pour la variante 2 et 1'365'671 fr. pour la variante 3. Ces derniers montants tiennent compte de revenus futurs estimés à respectivement 1'831'783 fr. pour la variante 1, 1'863'312 fr. pour la variante 2 et 1'923'372 fr. pour la variante 3, ainsi que des déductions de 500'000 fr. à titre de travaux indispensables à effectuer et de 57'700 fr. à titre de charges et d'entretien courant.

En conclusion, l'expert retient comme valeur vénale du droit de superficie les montants calculés en tenant compte de travaux minimes, soit les montants arrondis à 1'270'000 fr. pour la variante 1, 1'300'000 fr. pour la variante 2 et 1'370'000 fr. pour la variante 3.

e. L'expert a été entendu lors de l'audience du 15 juin 2020. Il a confirmé les termes et conclusions de son rapport.

Il a indiqué qu'il manquait, dans son rapport d'expertise, des indications concernant les facteurs de la valeur réelle et exposé qu'il était d'accord de le compléter sur ce point, tout en confirmant que le facteur d'actualisation à prendre en considération était de 25,44 en cas de travaux légers.

Il a exposé que la surpondération de 10% du rez-de-chaussée était due au fait qu'il contient une salle d'apparat prestigieuse en relation avec un jardin et une terrasse et que ce facteur est usuellement utilisé pour la pondération des valeurs dans les propriétés par étage. La verrière avait été pondérée à 0 car elle n'avait, selon lui, pas d'influence.

S'agissant du taux de vétusté, et plus précisément de l'âge apparent, il a expliqué avoir utilisé la méthode de calcul de l'Union Suisse des experts en assurance incendie et d'avoir tenu compte de l'obsolescence fonctionnelle.

Il a exposé avoir tenu compte des cinq places de parking présentes à l'entrée de la parcelle ainsi que du fait qu'il s'agit d'un objet exceptionnel pour fixer la valeur locative. Il a précisé que pour fixer le revenu locatif après travaux lourds, il avait contacté deux régies de la place qui ont l'habitude de louer des objets de luxe.

Il a indiqué que pour calculer une valeur de rendement, il y avait lieu d'utiliser la totalité des travaux à effectuer y compris les travaux de rénovation.

Enfin, il a exposé que, dans les trois variantes, il n'avait pas tenu compte des surfaces en m2. Il avait pris en compte plutôt un sentiment, en tenant compte de l'hypothèse où on avait le droit d'utiliser la maison plus le parking arrière et les bâtiments adjacents, l'hypothèse où on avait le droit d'aller dans les chemins qui environnaient la maison et, enfin, l'hypothèse où on bénéficiait d'une surface plus étendue sans préciser si on pouvait accéder à la totalité ou une partie du jardin. Selon lui, dans les trois variantes, c'était le sentiment subjectif qui devait primer et non le nombre de m2.

f. Par ordonnance du 18 septembre 2020, le Tribunal a, à la demande de l'hoirie de feu A______, invité l'expert à compléter son rapport s'agissant du facteur d'actualisation appliqué et à le préciser s'agissant du nombre de m2 concernés pour les 3 variantes.

g. L'expert a rendu son complément d'expertise en date du 12 mars 2021. Il y explicite le facteur d'actualisation retenu (calcul) et estime la surface pour l'accès au parking (variante 1) à 475 m2, la surface d'accès au parking, aux allées et à la terrasse en gravier (variante 2) à 1'028 m2 et la surface d'accès au parking, aux allées, à la terrasse en gravier et au parc entourant "X______" jusqu'au chemin de gravier menant au jardin du bas (variante 3) à 3'100 m2.

h. Les parties ont déposé des conclusions motivées sur expertise le 28 avril 2021.

h.a Les hoirs de G______ ont conclu à ce que le Tribunal ordonne la vente aux enchère publiques de la servitude de superficie avec une mise à prix indicative de 1'270'000 fr. et dise que le produit net de la vente aux enchères publiques sera partagé à raison de la moitié pour les hoirs de G______ et de la moitié pour les hoirs de A______.

Ils ont exposé en substance qu'il n'appartenait pas au Tribunal d'interpréter le droit de superficie pour en fixer l'assiette (cf. variantes 1, 2 ou 3) et que la mise à prix dudit droit de superficie devait être fixée au montant minimum fixé par l'expert, soit 1'270'000 fr.

h.b Les hoirs de A______ ont conclu à ce que le Tribunal écarte le rapport d'expertise et le complément d'expertise de la procédure et ordonne une nouvelle expertise avec mission, pour le nouvel expert, d'estimer la valeur du droit de superficie, d'utiliser sa seule valeur réelle, de tenir compte d'un droit de superficie portant sur la totalité de la parcelle 1______ et d'une indemnité de retour non nulle.

i. Lors de l'audience de plaidoiries du 3 mai 2021, les hoirs de feue G______ se sont opposés à l'établissement d'une contre-expertise et ont persisté dans leurs conclusions.

Les hoirs de feu A______ ont plaidé et persisté dans leurs conclusions sur expertise.

j. Par jugement JTPI/13444/2021 du 20 octobre 2021 - dont est appel -, le Tribunal a ordonné la vente aux enchères publiques de la servitude inscrite au Registre foncier le ______ 1960 sous référence 7______, n° RF 8______ sur la parcelle n°1______ de la Commune de W______ (Genève) (chiffre 3 du dispositif), fixé la mise à prix de ladite servitude à 1'331'082 fr. 60, en précisant que celle-ci supprime tout droit du superficiaire à une indemnité à l'échéance du droit, en dérogation à l'article 779d al. 1 CC (ch. 3a), désigné Me AB______, notaire, aux fins de procéder à toutes les opérations utiles à l'exécution du partage, notamment celles destinées à la vente aux enchères (ch. 4), dit que le produit net de la vente aux enchères publiques serait partagé à raison de la moitié pour les hoirs de feue G______ et de la moitié pour les hoirs de feu A______ (ch. 5), dit que la rémunération de Me AB______ ainsi que les frais d'exécution du partage seraient déduits et prélevés en priorité sur le produit brut de la vente (ch. 6), condamné les hoirs de feu A______, conjointement et solidairement, à verser un émolument complémentaire de 17'500 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 7), ainsi que 20'000 fr. à ses parties adverses à titre de participation aux honoraires d'avocat (ch. 8) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 9).

En substance, le Tribunal a rejeté la requête tendant à l'établissement d'une nouvelle expertise, considérant qu'il n'existait aucun doute sérieux quant au bien-fondé de l'expertise judiciaire réalisée. Il a ensuite fixé la mise à prix de la servitude litigieuse à 1'331'082 fr. 60, conformément au montant retenu par l'expert dans sa variante 1, avec prise en considération de la clause valeur "0", et sous déduction de 500'000 fr. de travaux absolument nécessaires (soit 1'831'782 fr. 60 - 500'000 fr.).

D. a. Par acte du 24 novembre 2021, les membres de l'hoirie de feu A______ soit B______, C______, D______ et E______ forment appel contre ce jugement, dont ils sollicitent l'annulation.

Ils concluent à ce que le rapport d'expertise du 21 décembre 2019 et son complément soient écartés de la procédure et au renvoi de la cause au Tribunal pour qu'il ordonne une nouvelle expertise portant sur la valeur vénale de la parcelle n° 1______ de la commune de W______.

Ils estiment que l'expertise judiciaire n'est pas concluante car elle reposerait sur une méthode d'évaluation inadéquate. Ils ont, par ailleurs, allégué l'existence d'erreurs dans l'expertise elle-même (notamment des surfaces mal évaluées, taux de vétusté trop élevé, surpondération incorrecte, charges largement surévaluées, prise en compte de la clause "zéro").

A l'appui de son appel, l'hoirie de feu A______ produit un chargé de pièces lesquelles figurent toutefois déjà dans le dossier.

b. Dans leur réponse du 10 février 2022, les membres de l'hoirie de feue G______ concluent au déboutement de leurs parties adverses de toutes leurs conclusions et forment, par ailleurs, un appel joint concluant à ce que la mise à prix de la servitude de superficie soit fixée à 1'270'000 fr. afin de tenir compte des dépenses d'entretien.

c. Le 25 avril 2022, l'hoirie de feu A______ a répliqué sur appel principal et persisté dans ses conclusions. Sur appel joint, elle a conclu au rejet des conclusions de ses parties adverses.

d. L'hoirie de feue G______ a dupliqué sur appel principal et répliqué sur appel joint, persistant dans ses conclusions.

e. Les parties se sont encore déterminées par écrit les 3 juin, 11 juillet et 26 juillet 2022.

f. Par avis du greffe de la Cour du 17 août 2022, elles ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

Les hoirs A______ seront désignés ci-après comme les appelants, les hoirs G______ comme les intimés.

EN DROIT

1. 1.1 La présente procédure a été introduite le 23 décembre 2010, soit sous l'empire de l'ancienne Loi genevoise de procédure civile du 10 avril 1987 (LPC).

Le jugement querellé a été notifié aux parties le 25 octobre 2021, de sorte que le Code de procédure civile entré en vigueur au 1er janvier 2011 (CPC) est applicable en seconde instance (art. 405 al. 1 CPC). La procédure de première instance reste quant à elle régie par introduite l'ancienne loi de procédure (art. 404 al. 1 CPC).

1.2 La voie de l'appel est ouverte contre les décisions finales de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), dans les causes patrimoniales dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

En l'occurrence, le litige porte sur le partage du droit de superficie des appelants, qui, dans un précédent arrêt de la Cour rendu dans la même procédure, avait été estimé à plusieurs centaines de milliers de francs. La valeur litigieuse est, par conséquent, largement supérieure à 10'000 fr. et ouvre la voie de l'appel.

Interjetés en temps utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 142 al. 3, 311 et 313 al. 1 CPC), l'appel principal et l'appel joint sont recevables. Il en va de même des écritures subséquentes des parties, déposées dans les délais impartis à cette fin ou résultant de leur droit de réplique (ATF 139 I 189 consid. 3.2; 138 I 484 consid. 2.1; 137 I 195 consid. 2).

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

2. Le litige oppose les parties depuis 2010 et a déjà fait l'objet de plusieurs décisions judiciaires. Ainsi, les quotes-parts de chacune des parties relatives au droit de superficie, le principe du partage, les modalités de celui-ci, dont la mise en œuvre d'une vente aux enchères publiques, ainsi que les prétentions reconventionnelles des appelants en indemnisation ont déjà été tranchés.

A ce stade, seules sont contestées l'expertise réalisée le 21 décembre 2019 et le montant de la mise à prix du droit de superficie fixée par le Tribunal sur la base de l'expertise contestée.

3. Les appelants reprochent au Tribunal d'avoir refusé leur demande tendant à la mise en œuvre d'une nouvelle expertise. Selon eux, l'expertise judiciaire reposerait sur une méthode inappropriée et des critères erronés, de sorte qu'elle ne serait pas concluante. Ils concluent au renvoi de la cause au Tribunal pour qu'une nouvelle expertise soit ordonnée.

La procédure de première instance étant soumise à l'ancienne loi de procédure civile, c'est à l'aune de ses dispositions qu'il convient d'examiner les griefs des appelants sur ce point.

3.1 Selon l'article 267 LPC, si le juge n'est pas suffisamment éclairé par le rapport de l'expert, il peut en ordonner un nouveau par le même ou par un autre expert.

Cet article peut servir de fondement à l'ordonnance d'une contre-expertise ou d'une expertise nouvelle (Bertossa/Gaillard/Guyet, Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, n. 2 ad art. 267 LPC).

Une contre-expertise a pour objet de faire vérifier par un autre technicien la conformité des résultats auxquels le premier est parvenu; il n'y sera recouru que si des doutes sérieux apparaissent sur le bien-fondé des conclusions du premier expert, par exemple sur des points théoriques controversés. Une contre-expertise ne saurait par contre être ordonnée au seul motif qu'une partie critique l'opinion du premier expert (cf. SJ 1963 p. 328) (Bertossa/Gaillard/Guyet, op. cit, ibidem).

Une expertise nouvelle tend à éclaircir les mêmes problèmes que ceux qui faisaient l'objet de la première mission; il y sera recouru lorsque le premier spécialiste mis en œuvre apparaît incompétent ou peu digne de confiance et que son rapport ne saurait servir de fondement sérieux au jugement de la cause (Bertossa/Gaillard/Guyet, op. cit., ibidem).

Lorsque les conclusions de l'expertise judiciaire se révèlent douteuses sur des points essentiels, le juge doit recueillir des preuves supplémentaires. Il dispose d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 136 II 539 consid. 3.2; 133 II 384 consid. 4.2.3, JT 2008 I 451; 130 I 337 consid. 5.4.2, JT 2005 I 95; 128 I 81 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_696/2012 du 19 février 2013 consid. 4.1; 4A_204/2010 du 29 juin 2010 consid. 3.1.1; 4P_47/2006 du 2 juin 2006 consid. 2.2.1).

Les expertises privées ont valeur d'allégué de la partie qui les produit. L'avis des spécialistes mandatés par les parties pourra parfois "ébranler" la conviction du juge quant à l'exactitude du rapport établi par l'expert judiciaire et il pourra y être fait référence pour s'écarter de celui-ci (SJ 1952 p. 409; Bertossa/Gaillard/ Guyet, op.cit, n. 2 ad art. 255).

3.2 En l'espèce, l'expert - dont la désignation n'a pas été contestée par les parties lors de sa nomination - a répondu aux questions qui lui ont été posées dans le cadre de l'ordonnance du 21 mai 2019 de manière complète et détaillée.

Concernant la méthodologie, elle relève à juste titre de la mission confiée à l'expert (cf. ordonnance du 21 mai 2019, ch. 3.5). En effet, la question de savoir quelle méthode appliquer pour fixer la valeur du droit de superficie litigieux revêt, au vu des spécificités du cas d'espèce, une certaine complexité nécessitant des connaissances techniques spécifiques. L'expert a estimé que la méthode de la valeur intrinsèque préconisée par les appelants ne se justifiait pas en l'espèce en raison de la durée du droit de superficie et des conditions atypiques et inhabituelles de ce droit, telles que l'absence de rente, l'absence d'indemnité à l'échéance et l'absence de valeur définie pour les constructions existantes au moment de sa constitution. Il a précisé avoir fait intervenir la valeur intrinsèque selon les besoins spécifiques, directement ou indirectement, notamment dans la valeur locative, les frais d'entretien réguliers et la valeur finale. Le choix de la méthode retenue par l'expert repose ainsi sur une justification solide et crédible, qui tient compte des circonstances spécifiques du cas d'espèce. Nonobstant les contestations soulevées par les appelants, qui ont été portées à la connaissance de l'expert, ce dernier a confirmé son choix quant à la méthode applicable tant dans son rapport que lors de son audition devant le Tribunal. Les appelants ne sauraient substituer leur propre avis, ni le résultat d'une expertise privée, aux conclusions de l'expert pour fonder la mise en œuvre d'une nouvelle expertise en vue de faire application d'une autre méthode.

Contrairement à l'avis des appelants, le fait que le rapport fasse référence, par endroits, à une "valeur d'usage" ou un "droit d'usage" alors que le droit de superficie confère un droit de propriété n'est pas de nature à remettre en question les conclusions de l'expert. En effet, à la lecture du rapport d'expertise, il apparaît que l'expert a correctement saisi les enjeux et les contours du droit de superficie litigieux. Il n'a en aucun cas limité le droit des appelants à un simple usage pour en déterminer la valeur, prenant en considération notamment le cumul des avantages financiers (dont la valeur locative) pour la durée restante jusqu'à l'échéance.

Les appelants ne peuvent pas non plus reprocher à l'expert d'avoir estimé et tenu compte d'éventuels travaux d'entretien de "X______" qui pouvaient être anticipés d'ici l'an 2060, correspondant à la fin du droit de superficie, ni de la clause dit "zéro" puisque ces éléments ressortent expressément de sa mission découlant de l'ordonnance du 21 mai 2019.

Quoi qu'en disent les appelants, les constatations de l'expert concernant l'étendue du droit de servitude ne sont pas contradictoires, ni arbitraires. A cet égard, l'expert a établi trois variantes; la première correspondant à un droit de superficie avec un usage limité aux constructions et à l'accès à celles-ci à travers et avec l'usage de la cour nord, la deuxième en étendant ce droit aux cheminements (allées en gravier) entourant les bâtiments ainsi qu'à la terrasse (partie plate d'environ 700 m2) devant l'escalier menant au perron et la troisième avec l'accès étendu au parc entourant "X______". Bien que certains termes puissent légèrement varier (par exemple, "terrasse", "terrasse-jardin" ou "terrasse-jardin (en gravier)"), ces variantes correspondent et répondent aux exigences de l'ordonnance d'expertise, et ne diffèrent pas de celles figurant dans le rapport complémentaire du 12 mars 2021, qui ne fait qu'en préciser les surfaces en m2. Dans la mesure où ces trois variantes ont pour but de permettre trois évaluations du droit de superficie selon son étendue et que ces évaluations ne sont que des estimations en vue de la vente aux enchères à venir, il ne revenait pas à l'expert de délimiter chaque hypothèse de manière plus précise. A cet égard, les griefs des appelants quant au mesurage des surfaces en m2 effectué par l'expert tombent à faux dès lors que l'expert a indiqué en audience ne pas avoir tenu compte, dans les trois variantes, des surfaces exactes en m2. Selon lui, il convenait davantage de prendre en considération une appréciation subjective que procuraient les trois différentes variantes, le nombre de m2 étant relégué au second plan.

C'est également en vain que les appelants critiquent le taux de la surpondération et le taux de vétusté retenus par l'expert, dès lors que, selon les explications fournies par ce dernier devant le Tribunal, les valeurs retenues se fondent sur des facteurs et méthodes usuellement appliqués en la matière. On ne saurait en particulier reprocher à l'expert d'avoir privilégié le taux de la surpondération correspondant à une propriété par étage en lieu et place de celui applicable à une maison individuelle, compte tenu des nombreuses particularités du cas d'espèce à prendre en compte et dont l'expert est le plus à même d'apprécier la pertinence en vue de déterminer le taux adéquat. Le fait que la verrière ait été pondérée à 0 n'est pas non plus critiquable dans la mesure où l'expert a expliqué, de manière convaincante, qu'elle n'avait pas d'influence sur les surfaces en m2. Quant à la vétusté des lieux, les valeurs retenues reposent sur les constatations de l'expert lui-même, effectuées lors d'une visite sur place. Ses explications sont détaillées, puisqu'elles passent en revue l'ensemble de la structure des bâtiments (éléments porteurs, toiture, murs et menuiseries, installations techniques et sanitaires, système électrique, éléments de cuisine et réseaux d'évacuation d'eau de pluie et d'eaux usées) lesquelles prennent également en considération l'obsolescence fonctionnelle. Le fait que l'arrêté de classement du 21 juin 2017 retienne, selon une notice historique de 2009, un "remarquable état de conservation" sans se prononcer davantage sur ce point, notamment sur les aspects techniques, n'est pas suffisant pour remettre en cause les conclusions plus précises et développées de l'expert.

Il ressort ainsi de ce qui précède que le rapport d'expertise repose sur une analyse approfondie et détaillée et aboutit à des conclusions formulées de manière claire et complète, sans que les griefs des appelants ne parviennent à susciter un doute sérieux quant à son bien-fondé. Partant, c'est à bon droit que le premier juge a refusé d'ordonner une nouvelle expertise.

Ce grief sera dès lors rejeté. 

4. Les appelants reprochent ensuite au Tribunal d'avoir retenu la variante 1 figurant dans l'expertise, soit celle qui comprend un droit de superficie de moindre étendue. Selon eux, leur droit de superficie s'étendrait sur l'entier de la parcelle n° 1______ de la commune de W______.

4.1.1 En vertu d'une servitude de superficie, le propriétaire d'un fonds confère à un tiers (le superficiaire) le droit d'y avoir ou d'y faire des constructions (art. 779 al. 1 CC).

L'art. 675 CC prévoit ce qu'il faut entendre par construction, à savoir toutes constructions ou tous autres ouvrages établis au-dessus ou au-dessous d'un fonds ou unis avec lui de quelque autre manière durable (Ruedin, Le droit réel de superficie, 1969, p. 119 et 120).

L'ouvrage est une notion plus large que celle de construction. Elle comprend tout ce qui, composé de matériau, est lié durablement avec le fond. Les ouvrages doivent ainsi se distinguer du sol afin que la séparation de la propriété sur le fonds et la construction, raison d'être du droit de superficie, puisse avoir lieu, Ainsi, un terrain simplement travaillé, par exemple marqué comme chemin de terre battue, ne peut appartenir au contenu d'un droit de superficie. Cette notion peut également englober certaines dépendances notamment les cours et les jardins, la condition étant que la construction reste la chose principale au sens économique. Ainsi, lors de la construction d'une maison locative on prévoit sur le fonds une place de parc pour 6 voitures, elle rentre dans la notion de dépendance de la maison mais non pas si elle peut recevoir 100 voitures (Ruedin, op.cit., ibidem).

Sauf convention contraire, toute la surface de l'immeuble grevée peut être bâtie. L'exercice du droit de superficie est cependant souvent limité par l'acte constitutif à une partie déterminée de l'immeuble grevé (Steinauer, Les Droits réels, t. III, 5ème éd., 2021, n. 3837).

Le droit du superficiaire permet ainsi à son titulaire d'être propriétaire des constructions et autres ouvrages qui existent sur le fonds grevé. Le superficiaire peut également utiliser le sol avoisinant la construction et prendre les mesures sans lesquelles l'exercice du droit ne serait pas possible et qui sont ainsi implicitement comprises dans l'octroi du droit (adminicula servitutis) (arrêt du Tribunal fédéral 5A/766/2016 du 5 avril 2017 consid. 4.2 et les références citées; Steinauer, op. cit, tome III, n. 3837 et nbp. 63; Ballif, Le droit de superficie, éléments réels, obligations propter rem et droits personnels annotés, 2004, n. 189, 268-269).

4.1.2 Pour déterminer le contenu d'une servitude, il faut se reporter en priorité à l'inscription au Registre foncier, en tant qu'elle désigne clairement les droits et obligations dérivant de la servitude (art. 738 al. 1 CC).

Si l'inscription n'est pas claire, il faut remonter au fondement de l'acquisition, c'est-à-dire au contrat constitutif de la servitude. Si le titre d'acquisition n'est pas concluant, le contenu de la servitude peut être déterminé par la manière dont la servitude a été exercée pendant longtemps, paisiblement et de bonne foi (art. 738 al. 2 CC; ATF 137 III 145 consid. 3.1; 132 III 651 consid. 8; 131 III 345 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_458/2019 du 30 janvier 2020 consid. 3.3.).

Si l'inscription au Registre foncier ne contient qu'un mot clé (droit de source, droit de passage, etc.), elle est en général trop sommaire pour qu'il en résulte clairement les droits et obligations. Dans ce cas, il faut se référer à l'acte constitutif ou à la façon dont la servitude a été exercée pendant longtemps, paisiblement et de bonne foi (ATF 131 III 345 consid. 1.1 et 1.2).

L'acte constitutif doit être interprété selon la réelle et commune intention des parties (art. 18 CC), respectivement selon les règles de la bonne foi lorsque cette volonté ne peut être établie. Toutefois, à l'égard de tiers qui n'étaient pas parties au contrat constitutif, ces règles d'interprétation sont limitées par la foi publique du Registre foncier qui comprend non seulement le grand livre mais aussi les pièces justificatives dans la mesure où elles précisent la portée de l'inscription. Ce principe interdit de tenir compte de circonstances et de motifs personnels qui ont été déterminants dans la formation de la volonté des parties primitives. En tant qu'ils ne ressortent pas de l'acte constitutif, ils ne sont donc pas opposables au tiers qui s'est fondé de bonne foi sur le Registre foncier (ATF 139 III 404 consid. 7.1; 137 III 145 consid. 3.2.1; 130 III 554 in JdT 2004 I 245, arrêt du Tribunal fédéral 5A_470/2021 du 20 janvier 2022 consid. 3.1.2).

Lorsque l'inscription au Registre foncier et l'acte constitutif sont clairs, la manière d'exercer la servitude ne modifie en rien son contenu et son étendue de sorte que la façon dont la servitude a été exercée pendant longtemps ne peut conduire à une extension de la servitude par prescription acquisitive (ATF 131 III 345 consid. 2.3.2 et les références citées).

Toute servitude doit être interprétée restrictivement et ne doit limiter les droits du propriétaire du fonds servant que dans la mesure nécessaire à son exercice normal (ATF 113 II 506 consid. 8b; 109 II 412 consid. 3 et les références citées; arrêts du Tribunal fédéral 5A_691/2019 du 16 avril 2020 consid. 3.3; 5A_872/2011 du 13 février 2012 consid. 3.2).

4.2 En l'espèce, l'expert a estimé la valeur du droit de superficie à 1'270'000 fr. dans l'hypothèse où la servitude était limitée aux constructions et à l'accès à celles-ci par la cour nord (variante 1), à 1'300'000 fr. si elle comprenait, en sus, les cheminements (allées en gravier) entourant les bâtiments ainsi que la terrasse-jardin (variante 2) et à 1'370'000 fr. si elle s'étendait au parc entourant "X______" (variante 3).

Contrairement à ce que soutiennent les intimés, c'est à bon droit que le Tribunal s'est prononcé sur l'étendue du droit de superficie dans la mesure où celle-ci est de nature à influencer la valeur dudit droit et, partant, le montant de la mise à prix qu'il revenait de déterminer. Bien que la mise à prix ne représente qu'une estimation du bien à vendre, il convient néanmoins de déterminer son montant de la manière la plus juste possible, en tenant compte de tous les paramètres disponibles.

A cet égard, l'inscription au Registre foncier mentionne uniquement le terme "Superficie", sans autre indication. Comme l'a retenu à juste titre le Tribunal, cette inscription est trop sommaire pour qu'il en résulte clairement les droits et obligations des superficiaires. Les appelants ne peuvent être suivis lorsqu'ils déduisent de cette simple inscription un droit de superficie général pouvant être exercé sur l'ensemble de la parcelle grevée. Ce faisant, les appelants se livrent à leur propre interprétation, qui va en outre à l'encontre des règles susmentionnées en matière d'interprétation des servitudes, lesquelles prévoient expressément de se référer, dans un tel cas, à l'acte constitutif.

La convention générale de partage, qui constitue le droit de superficie litigieux, en fixe les contours en indiquant la constitution d'une "servitude personnelle de superficie sur les bâtiments 4______, 5______ et 6______ sis sur la parcelle 2______, ainsi que toutes les canalisations desservant lesdits bâtiments". Elle définit ainsi de manière claire et sans équivoque les bâtiments et les canalisations y relatives uniquement. A contrario, il n'est pas fait mention du jardin, du parc ou encore des chemins et allées. L'objet de la servitude a ainsi été restreint aux bâtiments sis sur la parcelle et aux canalisations y relatives. Si d'une manière générale, les parcs, cours, parkings et jardins peuvent certes faire l'objet d'un droit de superficie, ils doivent néanmoins être définis comme tels, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence.

Les appelants soutiennent que l'exercice de leur droit implique l'utilisation, en sus de la route d'accès et de la cour de stationnement, des allées et du jardin en tant qu'autres dépendances indispensables aux bâtiments. Or, seuls le sol avoisinant la construction et surfaces strictement nécessaires, sans lesquelles l'exercice du droit ne serait pas possible, peuvent implicitement découler de la servitude en tant que "adminicula servitutis". Eu égard au principe de l'interprétation restrictive des servitudes, on ne saurait élargir par ce biais l'objet de la servitude au détriment des propriétaires grevés. L'accès accordé par le Tribunal compris dans la variante 1, soit l'usage de la route d'accès menant à la cour intérieure sur laquelle sont situées les places de parking, dont la surface a été estimée par l'expert à 475 m2, est suffisant pour permettre aux appelants d'accéder aux bâtiments 4______, 5______ et 6______, objet de la servitude, ce qu'ils ne contestent pas. Ces derniers ne parviennent, par ailleurs pas à démontrer que les allées et le jardin seraient indispensables à l'utilisation des bâtiments précités. Il n'y a dès lors pas lieu d'étendre le droit d'accès à un périmètre plus large.

En définitive, le Tribunal était fondé à retenir la variante 1 pour la fixation de la mise à prix, comprenant un droit limité aux bâtiments nos 4______, 5______ et 6______ avec accès à ceux-ci par la cour nord et aux canalisations y relatives.

Ce grief sera rejeté.

5. Les appelants reprochent ensuite au Tribunal d'avoir pris en compte la clause "zéro", qui prévoit une indemnité de retour de valeur nulle, dans la détermination de la valeur de la mise à prix. Ils soutiennent que cette clause ne serait pas opposable aux futurs acquéreurs de bonne foi.

5.1.1 L'art. 779d al. 1 CC prévoit que pour les constructions lui faisant retour, le propriétaire du fonds verse au superficiaire une indemnité équitable.

Le retour des constructions au propriétaire de l'immeuble entraine pour celui-ci un avantage patrimonial, du moins dans le cas normal où c'est le superficiaire qui a financé ces constructions. C'est pourquoi, quel que soit le type de droit de superficie, la loi impose en principe à ce propriétaire de verser au superficiaire une indemnité équitable pour ces constructions. C'est aussi une façon d'encourager le superficiaire à entretenir convenablement les constructions qu'il a réalisées, dans l'idée que l'indemnité qu'il recevra sera mesurée en fonction de la valeur effective des constructions (Steinauer, Retour anticipé et extinction du droit de superficie, in Droit de superficie et leasing immobilier, 2011, p. 76).

Cet article s'applique également aux droits de superficie constitués avant 1965 (art. 17 al. 2 Tit. fin. CC).

L'obligation du propriétaire foncier d'indemniser le superficiaire à l'échéance du droit de superficie constitue une restriction légale à la propriété foncière rattachée de façon propter rem à la propriété du bien-fonds grevé du droit de superficie (Ballif, op. cit., n. 3 ad. art. 779d).

5.1.2 L'ancien art. 779e aCC prévoyait expressément la possibilité de déroger à la réglementation légale en permettant notamment de supprimer tout droit du superficiaire à une indemnité à l'échéance du droit. L'art. 779e CC a été supprimé par la révision du Code civil du 11 décembre 2009 et remplacé par l'art. 779b al. 2 CC - entré en vigueur au 1er janvier 2012 - qui permet l'annotation au Registre foncier de toute clause contractuelle en rapport avec le droit de superficie.

A la lecture des travaux préparatoires de la loi, il y a lieu d'admettre que la suppression du droit du superficiaire à être indemnisé à l'échéance du droit de superficie est toujours possible, les clauses y relatives pouvant, cas échéant, être annotées au Registre foncier en vertu de l'art. 779b al. 2 CC avec les mêmes effets qu'auparavant (Ballif, op. cit., n. 2 ad art. 779d; Ballif, in Commentaire romand CC II, n. 24 ad art. 779b CC).

En application de l'art. 21 al. 2 Tit. Fin. CC, les obligations liées accessoirement à des servitudes qui ont été créées avant l'entrée en vigueur de la modification du 11 décembre 2009 et qui n'apparaissent que dans les pièces justificatives au Registre foncier restent opposables aux tiers de bonne foi. En d'autres termes, toutes les écritures antérieures à 2012 continuent donc à être opposables aux tiers de bonne foi avant comme après 2012, sans limite dans le temps à l'avenir. Il n'y a ainsi aucune modification matérielle du droit antérieur (Piottet, in Commentaire romand CC II, n. 3 ad art. 21 Tit. fin CC).

5.2 En l'espèce, il ressort du texte des conventions de 1960 et 1968, aussi bien que de l'ensemble des circonstances, que la volonté réelle et concordante des parties au moment du partage était d'exclure toute indemnité de retour à la charge de la propriétaire de la parcelle, ou de ses ayants droit (cf. arrêt du Tribunal fédéral 5C_165/2006 du 8 mars 2007 consid. F.f et arrêt de la Cour de justice du 5 octobre 2018 consid. 4.2 précédemment rendus dans le cadre de la procédure).

La validité de cette clause dite "zéro" a été admise par la Cour dans ses arrêts des 18 mai 2006 et 22 avril 2016, ainsi que par le Tribunal fédéral dans son arrêt 5C_165/2006 (consid. 5) et n'est, à juste titre, plus remise en cause.

Le droit à une indemnité de retour à l'échéance du droit de superficie a donc été valablement supprimé en 1968, sous l'égide de l'ancien droit. Cette clause figure dans l'acte notarié daté des 21 février et 6 mars 1968, remis au bureau du Registre foncier pour justifier les diverses réquisitions inscrites au Grand Livre. Comme l'a relevé le Tribunal, elle apparaît ainsi dans les pièces justificatives, ce qui n'est pas contesté.

Au vu de la date à laquelle la clause "zéro" a été adoptée, il convient d'appliquer l'ancien droit, respectivement les normes de droit transitoire, ce d'autant plus que la demande en partage a été introduite en 2010 sous l'ancien droit également. Par conséquent, bien qu'aucune annotation n'ait été portée au Registre foncier, cette clause demeure opposable aux tiers de bonne foi dès lors qu'elle se rattache accessoirement à la servitude de superficie, conformément aux art. 779e aCC et 21 al. 2 Tit. fin. CC. C'est en vain que les appelants tentent de se prévaloir des nouvelles dispositions, entrées en vigueur en 2012, pour exiger son annotation au Registre foncier pour la rendre opposable aux tiers dans la mesure où la révision de 2009 ne s'applique que pour le nouveau droit, soit pour les seules écritures passées après 2012 dans le Grand livre ou les pièces justificatives.

Pour le surplus, afin d'éviter tout litige sur ce point, le Tribunal a assorti la mise à prix du droit de superficie d'une référence précisant expressément l'absence d'indemnité de retour. Ainsi, la clause "zéro" telle qu'initialement prévue, sera respectée et les potentiels acquéreurs seront dument informés de l'absence d'indemnité de retour, de sorte qu'ils pourront se positionner en conséquence.

Le jugement entrepris ne prête dès lors pas le flanc à la critique et sera confirmé sur ce point.

6. Les parties critiquent les frais d'entretien retenus par le Tribunal lors de la fixation du montant de la mise à prix relative au droit de superficie.

Les appelants considèrent que le montant de la mise à prix ne doit tenir compte d'aucun frais d'entretien dès lors que les superficiaires n'ont pas l'obligation de les assumer, tandis que les intimés estiment, pour leur part, que l'ensemble des frais d'investissement et d'entretien courant doit être pris en compte.

6.1 La répartition des charges entre le superficiaire et le propriétaire n'est pas régie par la loi. Il va de soi que le superficiaire supporte tous les frais liés à la construction et à l'entretien des bâtiments et ouvrages dont il est propriétaire ainsi qu'à l'utilisation des surfaces non bâties dont il fait usage (Steinauer, Les droits réels, tome III, op. cit., n. 3843).

Cela étant, le droit de superficie ne fait pas naître, de par la loi, un rapport d'obligation qui s'ajoute au droit réel tel qu'il est défini par la loi et l'acte constitutif. Ainsi, le superficiaire n'a pas le devoir d'entretenir l'ouvrage, ni celui de l'assurer (Steinauer, Les droits réels, tome III, op. cit., n. 3839).

Mais il a naturellement intérêt à le faire, d'une part, en raison de la contre-prestation qu'il devra généralement fournir en échange de son droit (telle une rente de superficie) et, d'autre part, en raison de l'indemnité que le propriétaire devra en principe lui verser, à l'extinction du droit, pour les constructions qui existent sur l'immeuble (Steinauer, Les droits réels, tome III, op. cit., n. 3840).

En vertu de l'art. 19 al. 1 de la loi cantonale sur la protection des monuments, de la nature et des site (LPMNS; L 4 05), les immeubles classés doivent être entretenus par leur propriétaire, sous réserve d'une participation financière de l'Etat. Si besoin est, l'autorité compétente fixe un délai convenable au propriétaire pour exécuter les travaux d'entretien nécessaires (al. 2) et s'il ne s'exécute pas, effectue les travaux aux frais du propriétaire (al. 3).

6.2 En l'espèce, l'expert a estimé la valeur du droit de servitude à 1'831'782 fr. pour la variante 1, dont il a déduit 500'000 fr. à titre de travaux minimum d'investissement ainsi que 57'700 fr. à titre de frais d'entretien courant et de fonctionnement, parvenant ainsi à une estimation finale de 1'274'082 fr.

Le Tribunal a maintenu la déduction des 500'000 fr. en raison de leur caractère contraignant. Il est en effet acquis que les bâtiments constituant "X______" sont classés à l'inventaire selon la LPMNS et il ressort de l'expertise que le montant de 500'000 fr. comprend les travaux minimaux nécessaires pour respecter les obligations d'entretien d'une construction figurant à l'inventaire des bâtiments protégés. Partant, il existe une obligation légale d'entretenir les bâtiments grevés du droit de superficie et donc d'assumer les travaux indispensables tels qu'estimés par l'expert, obligation qui incombe au superficiaire en sa qualité de propriétaire desdits bâtiments. C'est donc à bon droit que le Tribunal a tenu compte de la déduction des 500'000 fr.

En revanche, le Tribunal n'a pas retenu les dépenses d'entretien courant et de fonctionnement dans la mesure où il n'existe à cet égard aucune obligation légale à charge du ou des superficiaires, actuels ou futurs. Les intimés soutiennent que malgré l'absence d'obligation légale, le superficiaire devra néanmoins assumer ces charges d'entretien dès lors qu'il ne peut pas s'en décharger sur une tierce personne. S'il est certes dans l'intérêt du superficiaire d'entretenir l'ouvrage et de l'assurer, il demeure libre de le faire et de déterminer dans quelle mesure il souhaite participer à ces frais. De plus, l'intérêt du superficiaire à entretenir l'ouvrage est de moindre importance dans le cas d'espèce dès lors qu'il n'est prévu ni rente de superficie ni indemnité de retour. Il n'existe ainsi ni obligation légale ni garantie quant à la prise en charge des frais d'entretien courant. Dans ces circonstances, il se justifie de ne pas retenir ces frais dans l'estimation du droit de superficie.

Partant, la décision du Tribunal sera également confirmée en tant qu'elle porte sur la question des frais d'entretien.

7. Au vu de ce qui précède, le jugement entrepris sera confirmé en tant qu'il fixe la mise à prix du droit de superficie des appelants à 1'331'082 fr. 60, correspondant au montant estimé par l'expert dans sa variante 1, avec prise en considération de la clause "zéro" et de la déduction des seuls travaux absolument nécessaires (1'831'782 fr. - 500'000 fr.).

Comme l'a rappelé le Tribunal, il ne s'agit que d'une estimation quant au produit prévisible de la vente. Elle ne préjuge en rien du prix qui sera effectivement obtenu lors des enchères; tout au plus peut-elle fournir aux enchérisseurs un point de repère quant à l'offre envisageable (cf. arrêt du Tribunal fédéral 5A_421/2018 consid. 6.2.2).

8. En dernier lieu, les appelants contestent les frais judiciaires et dépens de première instance, entièrement mis à leur charge.

8.1 L'examen des frais fixés par le premier juge est soumis à l'ancien droit de procédure applicable, ce droit ayant régi la procédure en première instance jusqu'à la clôture de l'instance (art. 404 al. 1 CPC).

Sous le régime de la aLPC, les dépens comprennent les frais exposés dans la cause et une indemnité de procédure (art. 181 al. 1 aLPC).

8.1.1 Selon l'art. 176 al. 1 aLPC, les dépens sont mis à charge de la partie qui succombe. Si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, le juge décide si elles doivent se rembourser leurs dépens et, dans l'affirmative, dans quelle proportion (art. 178 aLPC).

Si aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans la répartition des dépens et il en fera application en choisissant la solution la plus équitable eu égard à l'issue de la cause. Il tiendra compte en particulier des frais exposés pour l'instruction des différents postes du litige (Bertossa/Gaillard/ Guyet/Schmidt, op.cit., n. 1 ad art. 178 aLPC).

8.1.2 A teneur de l'art. 181 al. 3 aLPC, l'indemnité de procédure est fixée en équité par le juge, en tenant compte notamment de l'importance de la cause, de ses difficultés, de l'ampleur de la procédure.

Dès lors que les honoraires d'avocat ne font pas l'objet d'un tarif, le juge doit statuer sur l'indemnité de procédure en équité, en s'inspirant des critères reconnus en la matière (Bertossa/Gaillard/ Guyet/Schmidt, op. cit., n. 4 ad art. 181 aLPC). Les critères évoqués à l'art. 181 al. 3 LPC ne sont pas exhaustifs (arrêt du Tribunal fédéral 4P_128/2002 du 12 novembre 2002, in SJ 2003 p. 363 consid. 3.2 in fine). Ils correspondent à ceux issus de la jurisprudence fédérale. Selon cette dernière, le juge, qui dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour fixer l'indemnité de procédure, doit en particulier tenir compte de la complexité et de l'importance de la cause (ATF 114 V 83 consid. 4b), laquelle, pour les affaires pécuniaires, est fonction de la valeur litigieuse, qui accroît la responsabilité assumée par l'avocat (arrêt du Tribunal fédéral 4P_140/2002 du 17 septembre 2002 consid. 2.2; cf. également ATF 117 II 282 consid. 4c). De même, il doit estimer l'ampleur du travail fourni et le temps consacré par le mandataire professionnel, mais sans tenir compte des procédés inutiles ou superflus (arrêt du Tribunal fédéral 1P.642/1998 du 26 janvier 1999, consid. 3c).

La détermination du montant de l'indemnité de procédure relevant avant tout de la libre appréciation du juge, sa décision ne sera revue qu'en cas d'usage arbitraire de cette faculté, à savoir en cas de violation grave d'une norme ou d'un principe juridique clair et indiscuté ou d'atteinte choquante au sentiment de la justice et de l'équité (Bertossa/Gaillard/ Guyet/Schmidt, op. cit., n. 4 ad art. 181 aLPC; ACJC/633/2005; ATF 132 III 209 consid. 2.1.; arrêt du Tribunal fédéral 4P_342/2006 du 5 mars 2007 consid. 4.1.; arrêt du Tribunal fédéral 4P_116/2006 du 6 juillet 2006 consid. 3.1).

8.2 En l'espèce, le Tribunal a condamné les appelants à un émolument complémentaire de 17'500 fr., ainsi qu'à une indemnité de 20'000 fr. valant participation aux honoraires d'avocat de leurs parties adverses, considérant qu'ils avaient succombé dans l'essentiel de leurs conclusions.

Les appelants allèguent que les intimés auraient eux aussi succombé dans une partie de leurs conclusions, à savoir sur les questions liées aux modalités de partage, et auraient inutilement provoqué la procédure d'appel à l'encontre du jugement du 24 novembre 2017. Ils concluent à une répartition par moitié des frais de justice, à ce que les frais d'expertise soient mis à la charge des intimés et à la réduction de l'indemnité octroyée à ces derniers pour les honoraires d'avocat.

8.2.1 Concernant les frais de justice, l'émolument complémentaire n'est pas contesté dans son montant, qui s'avère, au demeurant, adéquat et justifié compte tenu de l'ampleur de la procédure, des intérêts en jeu et de la complexité de la cause. Le montant de 17'500 fr. sera donc confirmé.

A l'issue du litige, les appelants succombent dans le principe du partage, dans la détermination des quotes-parts impliquant une répartition du prix d'adjudication de manière égale entre les parties, dans l'entier de leurs conclusions reconventionnelles en indemnisation et dans l'ensemble de leurs griefs élevés à l'encontre de l'expertise judiciaire. Ils n'obtiennent gain de cause que dans une mesure subsidiaire et très limitée concernant les modalités de partage en ce sens que celui-ci aura lieu par le biais d'une vente aux enchères publiques et non privées. Ce point ne justifie toutefois pas de s'écarter de la répartition opérée par le premier juge, compte tenu du litige dans son ensemble et des nombreuses autres questions soulevées, dans lesquelles les appelants succombent. De plus, dans son arrêt du 5 octobre 2018, la Cour a déjà tenu compte de ce résultat en répartissant les frais judicaires d'appel, arrêtés à 15'000 fr., à raison de 90% à la charge des appelants et à raison de 10% à la charge des intimés.

Par ailleurs, les appelants ne peuvent être suivis lorsqu'ils prétendent que les intimés auraient inutilement provoqué la procédure d'appel contre le jugement du 24 novembre 2017, puisqu'ils ont eux-mêmes interjeté appel au sujet de la détermination des quotes-parts, de la résolution du contrat de copropriété et de leurs prétentions en dommages et intérêts et qu'ils ont succombé dans l'intégralité de ces points.

Au vu de ce qui précède, c'est à bon droit que le Tribunal a mis l'émolument complémentaire à la charge des appelants au motif que ces derniers succombaient dans l'essentiel de leurs conclusions. Il n'y pas lieu de statuer différemment s'agissant des frais d'expertise, lesquels constituent des frais de justice qui suivent le sort de la cause.

8.2.2 Quant à l'indemnité valant participation aux honoraires d'avocat des intimés, le Tribunal l'avait fixée à 15'000 fr. lors de son jugement du 24 novembre 2017 et l'a augmentée à 20'000 fr. au terme du jugement entrepris. Ces montants paraissent adéquats au vu de la valeur litigieuse de l'affaire, de sa complexité et de l'importance du travail fourni. Ils n'ont en tous cas rien d'arbitraire. En effet, la cause, instruite depuis plusieurs années, a porté sur de nombreux points, aussi bien juridiques que techniques, ayant une certaine complexité (comprenant le principe du partage, la détermination des quotes-parts et le bien-fondé de l'expertise judiciaire). Elle a nécessité le dépôt de nombreuses écritures par les parties et la tenue de plusieurs audiences.

Le Tribunal n'a ainsi pas excédé son pouvoir d'appréciation en fixant l'indemnité de procédure en faveur des intimés à 20'000 fr.

8.3 En définitive, compte tenu des motifs qui précèdent, les frais judiciaires et dépens de première instance seront confirmés.

9. Les frais judiciaires de la procédure d'appel seront arrêtés à 15'000 fr. pour l'appel principal et à 4'800 fr. pour l'appel joint (art. 13, 17 et 37 RTFMC) et seront entièrement compensés avec les avances de frais de mêmes montants fournies par les parties, lesquelles restent acquises à l'Etat de Genève à due concurrence (art. 111 al. 1 CPC).

Dans la mesure où les parties succombent dans leurs appels respectifs, elles en supporteront les frais y relatifs.

Au vu de l'issue du litige, au terme duquel les appelants succombent dans l'essentiel des griefs portés devant la Cour, ces derniers seront condamnés aux dépens de leurs parties adverses, fixés à 12'000 fr. (art. 84, 85 et 90 RTFMC).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevables l'appel interjeté le 24 novembre 2021 par l'hoirie de feu A______, soit B______, C______, D______ et E______, ainsi que l'appel joint interjeté le 10 février 2022 par l'hoirie de feue G______, soit H______, I______, J______, K______, L______ et M______ contre le jugement JTPI/1344472021 rendu le 20 octobre 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/30770/2010.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais d'appel :

Arrête les frais d'appel à 15'000 fr. et ceux d'appel joint à 4'800 fr. et dit qu'ils sont entièrement compensés par les avances de frais fournies par les parties, qui restent acquises à l'Etat de Genève à due concurrence.

Met ces frais à la charge solidaire de B______, C______, D______ et E______ à raison de 15'000 fr. et à la charge solidaire de H______, I______, J______, K______, L______ et M______ à raison de 4'800 fr.

Condamne B______, C______, D______ et E______, pris solidairement, à verser 12'000 fr. à H______, I______, J______, K______, L______ et M______, pris solidairement, à titre de dépens d'appel.

 

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Pauline ERARD,
Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

Le président :

Cédric-Laurent MICHEL

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.