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Décisions | Chambre civile

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C/17520/2020

ACJC/760/2022 du 01.06.2022 ( ADOPT ) , ADMIS

En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/17520/2020 ACJC/760/2022

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MERCREDI 1ER JUIN 2022

 

Requête (C/17520/2020) formée le 15 juillet 2020 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), comparant en personne, tendant à l'adoption de B______, née le ______ 2003.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier du 7 juin 2022 à :

- Madame A______
______, ______.

- Madame B______
______, ______.

- Madame C______
______, ______.

- AUTORITE CENTRALE CANTONALE EN MATIERE D'ADOPTION
Rue des Granges 7, 1204 Genève.

- DIRECTION CANTONALE DE L'ETAT CIVIL
Route de Chancy 88, 1213 Onex (dispositif uniquement).


EN FAIT

A.           a) Le ______ 2003, C______, née le ______ 1982 au Canada, de nationalité canadienne, a donné naissance en D______ (Canada) à l'enfant B______, également de nationalité canadienne.

Aucun père n'a été inscrit à l'état civil, le donneur du matériel génétique étant anonyme.

b) Le ______ 2016 à E______ (Canada), C______ a épousé A______, née le ______ 1987 à F______ (Genève), originaire de G______ (Genève).

Cet acte figure dans les registres de l'état civil suisse comme un partenariat enregistré.

B.            a) Par requête du 15 juillet 2020 adressée à la Cour de justice, A______ a sollicité le prononcé de l'adoption, par elle-même, de l'enfant de sa partenaire, B______. Elle a exposé avoir fait la connaissance de C______ et de B______ en 2016 et avoir rapidement entretenu une relation proche avec l'enfant; elle était là pour elle dans toutes les situations de la vie quotidienne. C______ et B______ avaient emménagé avec elle à Genève le 4 juillet 2017. B______ avait ainsi dû s'habituer à un nouveau pays, une nouvelle langue et ce alors qu'elle entrait dans la période de l'adolescence. Leur relation n'avait toutefois fait que se renforcer. Toutes deux avaient de nombreux points communs, notamment leur amour pour les animaux et la nature; elles cultivaient un potager, dont elles s'occupaient quotidiennement. Elle considérait et traitait B______ comme sa propre fille et souhaitait que leur relation prenne une réalité juridique, d'une part pour des motifs de sécurité, et d'autre part pour symboliser le lien très fort les unissant. Elle a enfin demandé que B______ puisse porter le nom de famille [de] A______.

A______ a joint à sa requête diverses photographies de moments partagés avec B______ et C______.

b) B______ a confirmé, par courrier du 15 juillet 2020 à l'attention de la Cour, vouloir être adoptée par A______. Elle a exposé avoir une très bonne "connexion" avec elle et avoir l'impression de la connaître depuis sa naissance. Elle se considérait déjà comme sa fille, "sauf légalement" et souhaitait porter son nom.

c) Par courrier du 15 juillet 2020, C______ a confirmé son accord avec l'adoption de sa fille par A______. Cette dernière avait pris le rôle de parent à ses côtés, ce qui avait permis à B______ de s'épanouir. Le prononcé de l'adoption était important pour elle, car elle ajouterait la composante légale et une certaine légitimité au rôle que A______ remplissait déjà et offrirait également à B______ une sécurité supplémentaire en cas de situation d'urgence.

d) Le 3 mars 2022, le Service d'autorisation et de surveillance des lieux de placement a rendu un rapport, préavisant favorablement l'adoption de B______ (devenue majeure le ______ 2021) par A______.

Il a été relevé que la famille partageait un appartement de quatre pièces sis dans une grande maison familiale à H______ [GE]. A______ exerçait la profession de médecin, chef de clinique au sein des I______. C______ gérait, en tant qu'indépendante, une start-up de ______. B______ a été décrite comme étant une jeune fille intelligente, sensible et attachante, dont le parcours scolaire avait été difficile; elle avait eu besoin de beaucoup de soutien durant ces dernières années. Un diagnostic de trouble du spectre de l'autisme avait été posé et avait permis de mieux l'accompagner; elle bénéficiait d'une structure et d'aides adéquates et A______ avait été un immense soutien durant cette période. B______, qui n'avait pratiquement pas de contact avec sa famille au Canada, avait été bien accueillie et intégrée dans la famille de A______. B______ a été entendue personnellement et a confirmé son souhait d'être adoptée par A______.

Etait joint au rapport d'évaluation un document signé par l'adoptante, la candidate à l'adoption et la mère de celle-ci, mentionnant la volonté de B______ de porter le nom B______ après son adoption.

EN DROIT

1.             1.1 La cause présente des éléments d'extranéité en raison de la nationalité étrangère de la candidate à l'adoption.

La Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale (CLaH, RS 0.211.221.311), à laquelle tant la Suisse que le Canada sont parties, n'est pas applicable, puisqu'elle concerne les déplacements d'enfants d'un pays à un autre en vue de leur adoption, cas de figure différent de la situation faisant l'objet de la présente procédure.

1.2 L'adoption est prononcée par l'autorité judiciaire ou administrative suisse du domicile de l'adoptant ou des époux adoptants (art. 75 al. 1 LDIP).

En l'espèce, l'adoptante, de même que l’adoptée, sont domiciliées à Genève.

La Chambre civile de la Cour de céans est en conséquence compétente, tant ratione loci que ratione materiae (art. 268 al. 1 CC et art. 120 al. 1 let. c LOJ).

1.3.1 En application de l'art. 77 al. 1 LDIP, les conditions d'une adoption prononcée en Suisse sont régies par le droit suisse, soit par les art. 264 ss CC.

2. Dans le cas d'espèce, l'enfant à adopter, née le ______ 2003, était mineure au moment du dépôt de la requête mais est devenue majeure en cours de procédure.

2.1.1 Selon l'art. 268 al. 4 CC, lorsque l'enfant devient majeur après le dépôt de la requête, les dispositions sur l'adoption du mineur restent applicables si les conditions étaient réalisées auparavant, ce à l'exclusion du consentement des parents biologiques qui n'est plus nécessaire (ATF 137 III 1).

2.1.2 Un enfant mineur peut être adopté si le ou les adoptants lui ont fourni des soins et ont pourvu à son éducation pendant au moins un an et si toutes les circonstances permettent de prévoir que l'établissement d'un lien de filiation servira le bien de l'enfant sans porter une atteinte inéquitable à la situation d'autres enfants du ou des adoptants (art. 264 al.1 CC).

Une personne peut adopter l'enfant de son partenaire enregistré (art. 264c al. 1 ch. 2 CC). Le couple doit faire ménage commun depuis au moins trois ans (art. 264c al. 2 CC).

La différence d'âge entre l'enfant et le ou les adoptants ne peut pas être inférieure à 16 ans ni supérieure à 45 ans (art. 264d al. 1 CC).

Si l'enfant est capable de discernement, son consentement à l'adoption est requis (art. 265 al. 1 CC).

2.2 En l'espèce, l'adoptante vit avec sa partenaire enregistrée depuis l'été 2017, soit depuis plus de trois ans. Elle a, depuis lors, pris soin de B______ et s'est occupée de son éducation, au même titre que sa mère biologique. La différence d'âge entre l'adoptante et l'adoptée est d'un peu plus de 16 ans, de sorte que la condition de l'art. 264d al. 1 CC est remplie.

Il est également établi que le prononcé de l'adoption est dans l'intérêt de l'adoptée, laquelle sera protégée par un double lien de filiation et ne fera qu'entériner une situation de fait déjà existante. Au vu de ce qui précède, l'adoption de B______ par la requérante sera prononcée.

Les liens de filiation de l'adoptée avec sa mère biologique ne seront pas rompus (art. 267 al. 3 ch. 2 CC).

3.             3.1.1 Un nouveau prénom peut être donné à l'enfant mineur lors de l'adoption conjointe ou de l'adoption par une personne seule s'il existe des motifs légitimes (art. 267a al. 1 CC).

Le nom de l'enfant est déterminé par les dispositions relatives aux effets de la filiation. Celles-ci s'appliquent par analogie en cas d'adoption de l'enfant par le partenaire enregistré de sa mère ou de son père (art. 267a al. 2 CC).

L'enfant de conjoints qui portent des noms différents acquiert celui de leurs deux noms de célibataire qu'ils ont choisi de donner à leurs enfants communs lors de la conclusion du mariage (art. 270 al. 1 CC).

3.1.2 L'enfant étranger mineur adopté par un Suisse acquiert le droit de cité cantonal et communal de l'adoptant et par là même la nationalité suisse (art. 4 Loi sur la nationalité suisse).

3.2.1 En l'espèce, il ne sera pas fait droit à la requête de changement de prénom de l'adoptée. Un changement de prénom implique en effet l'existence de motifs légitimes. Or, le document annexé au rapport d'évaluation ne mentionne que le souhait de l'adoptée de changer de prénom, sans faire état d'aucun motif légitime au sens de l'art. 267a al. 1 CC permettant de justifier un tel changement. La seule volonté de changer de prénom ne constituant pas un motif légitime, il ne sera pas donné suite à cette requête.

3.2.2 L'adoptée portera désormais le nom de A______ en lieu et place [de celui de] C______.

3.3 L'adoptée deviendra enfin originaire de G______ (Genève), comme l’adoptante, étant relevé que la requête d’adoption a été déposée alors que l’adoptée était encore mineure.

4.             Les frais de la procédure, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la requérante; ils sont entièrement couverts par l'avance de frais de même montant, laquelle est acquise à l'Etat de Genève (art. 2 RTFMC; art. 98, 101 et 111 CPC).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


Prononce l'adoption de B______, née le ______ 2003 en D______ (Canada), de nationalité canadienne, par A______, née le ______ 1987 à F______ (Genève), originaire de G______ (Genève).

Dit que les liens de filiation entre B______ et sa mère, C______, née le ______ 1982 au Canada, de nationalité canadienne, ne sont pas rompus.

Dit que l'adoptée portera désormais le nom de A______ en lieu et place [de celui de] C______ et qu’elle sera originaire de G______ (Genève).

Arrête les frais de la procédure à 1'000 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de frais versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 308 ss du code de procédure civile (CPC), la présente décision peut faire l'objet d'un appel par-devant la Chambre de surveillance de la Cour de justice dans les 10 jours qui suivent sa notification.

 

L'appel doit être adressé à la Cour de justice, place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, 1211 Genève 3.

 

Annexes pour le Service de l'état civil :

Pièces déposées par les requérants.