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Décisions | Chambre civile

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C/6831/2020

ACJC/702/2022 du 24.05.2022 sur JTPI/8054/2021 ( OO ) , JUGE

Normes : CO.158; CO.162; CO.163.al3
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6831/2020 ACJC/702/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mardi 24 mai 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 22ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 21 juin 2021, comparant par Me Rachel DUC, avocate, Interdroit avocat-e-s Sàrl, boulevard de Saint-Georges 72, case postale, 1211 Genève 8, en l'Étude de laquelle il fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, comparant par
Me Catarina MONTEIRO SANTOS, avocate, BST Avocats, boulevard des Tranchées 4, 1205 Genève, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 

 

 


EN FAIT

A. a. B______ est titulaire de l'entreprise individuelle "C______, B______", qui a pour but social l'exploitation d'une épicerie et tea-room.

En 2019, elle louait à cet effet un local commercial situé au rez-de-chaussée de l'immeuble sis 1______ [GE].

b. En février 2019, B______ a informé D______, directrice de la Régie E______ (ci-après : la Régie) en charge de la gestion de l'immeuble, de son intention de remettre son arcade à A______, qui avait précédemment pris contact avec elle, ayant appris qu'elle souhaitait vendre son fonds de commerce.

c. Quelques jours plus tard, la Régie a porté à la connaissance de B______ et A______ que la propriétaire de l'immeuble avait pour projet de réunir le local occupé par B______ avec le local adjacent, puis de conclure avec le repreneur un seul et unique contrat de bail à loyer portant sur les deux locaux. Elle a précisé que le local voisin serait en principe libéré au 31 mars 2019.

d. A une date indéterminée, A______ a déposé son dossier de candidature auprès de la Régie afin de devenir locataire des deux locaux une fois ceux-ci réunis.

e. Dans le courant du mois de mars 2019, la Régie a confirmé par courriel au précité que son dossier avait été accepté par la propriétaire; elle le priait d'entreprendre les démarches nécessaires pour "être prêt pour le 1er avril 2019".

f. Le 29 mars 2019, B______, en qualité de vendeuse, et A______, en qualité d'acheteur, ont conclu une "convention de remise de commerce" portant sur le "fonds de commerce de l'épicerie C______".

Le prix de vente a été fixé à 80'000 fr., cette somme couvrant notamment "le transfert du bail en faveur de l'acheteur" (art. 1 let. a).

A teneur de l'art. 5 de la convention, intitulé "modalités, termes et conditions de vente du fonds de commerce", un montant de 30'000 fr. était dû par l'acheteur au jour de la signature de la convention, à titre de paiement de la reprise du fonds de commerce (let. a). Le solde de 50'000 fr. devait être versé en treize mensualités selon un échéancier de paiement convenu entre les parties, soit 10'000 fr. au 5 avril 2019 et 3'333 fr. 35 le 10 de chaque mois dès le 10 mai 2019 (let. b). En cas de non-paiement de ces mensualités, la convention de remise de commerce deviendrait nulle et sans objet. B______ reprendrait le fonds de commerce à son nom tout en conservant les sommes payées jusque-là, qui lui seraient acquises de plein droit, à titre de dédit et/ou d'arrhes (let. c).

L'art. 5 let. d de la convention était rédigé comme suit : "La date de prise de possession des locaux dépend en dernier lieu de la Régie qui assure la gérance de l'immeuble où se trouve le fonds de commerce, des propriétaires ou des ayants droit de l'immeuble. Dans la mesure du possible, la date de prise de possession des locaux est fixée au 15 avril 2019".

En outre, l'art. 6 let. c de la convention, intitulé "bail", stipulait ce qui suit : "Au cas où la régie n'accorde pas la cession ou la création du bail au nom de l'acheteur, la présente convention devient nulle et sans objet. Dans cette hypothèse, le vendeur s'engage à restituer immédiatement à l'acheteur la somme qu'il aura versée jusqu'alors".

g. En application de cette convention, A______ a versé un montant total de 35'000 fr. à B______. Les parties divergent sur la question de savoir à quelle date et selon quelles modalités cette somme a été versée.

h. Par courrier du 16 mai 2019, la Régie a indiqué à A______ que le local adjacent n'avait pas été libéré comme prévu au 31 mars 2019, que la propriétaire allait requérir l'évacuation dudit local par la voie judiciaire et qu'il pourrait prendre possession des deux locaux, qui seraient réunis en un seul local commercial, dès qu'elle aurait récupéré les clés du local voisin.

i. Par courrier du 2 septembre 2019, A______ a interpellé la Régie pour connaître l'état d'avancement de la procédure d'évacuation initiée à l'encontre de la locataire du local voisin.

j. Par courrier du 30 septembre 2019, A______ a informé B______ qu'il avait appris que le local adjacent serait bientôt restitué par la locataire. Il lui a demandé de lui confirmer que, dans ce cas, elle remettrait les clés de son arcade à la Régie afin que celle-ci les lui transmette.

k. Le 1er octobre 2019, la Régie s'est étonnée auprès de A______ de la teneur de sa lettre du 2 septembre 2019. En effet, suite au courrier du 16 mai 2019, le précité avait téléphoné à la Régie pour l'informer que si le local voisin n'était pas libéré, il se retirerait de l'affaire et prendrait une autre arcade pour réaliser son projet. La Régie lui avait alors indiqué que le local adjacent était toujours occupé de manière illicite et qu'elle était dans l'incapacité de lui garantir une date précise à laquelle la propriétaire pourrait le récupérer. Elle lui avait dès lors recommandé de chercher une autre surface commerciale. Sur la base de cette conversation, la Régie était partie du principe que A______ avait abandonné toute idée de reprendre les deux arcades pour réaliser son projet. Sans nouvelle de l'intéressé suite à cet échange, la Régie avait clos son dossier.

l. A______ n'a pas répondu à ce courrier, ni repris contact avec la Régie par la suite.

m. L'arcade adjacente a été libérée le 31 octobre 2019 et les travaux visant à réunir les deux locaux ont débuté peu après. En novembre 2019, la Régie a proposé à B______ de conclure un nouveau contrat de bail portant sur les deux locaux réunis, ce que celle-ci a accepté.

n. Le 30 avril 2020, sur réquisition de A______, un commandement de payer, poursuite n° 1______, a été notifié à B______, pour les sommes de 35'000 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 29 mars 2019, au titre du "remboursement de l'acompte suite à la nullité de la convention de remise de commerce signée le 29 mars 2019", et de 10'000 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 9 décembre 2019, au titre de "dommages-intérêts dus à la non-restitution de l'acompte".

Cette poursuite a été frappée d'opposition totale.

o. Par demande introduite devant le Tribunal de première instance le 2 novembre 2020 et amplifiée le 26 avril 2021, A______ a assigné B______ en paiement des sommes suivantes : 35'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 29 mars 2019, 1'500 fr., avec intérêts à 5% dès le 1er octobre 2019, à titre de dommages-intérêts, et 5'693 fr. à titre de frais et dépens.

En substance, A______ a fait valoir que dans la mesure où aucun contrat de bail n'avait été conclu, la convention du 29 mars 2019 était devenue nulle et sans objet, de sorte qu'il avait droit au remboursement de ses acomptes. Il a allégué que l'accord des parties prévoyait uniquement la reprise par lui-même du contrat de bail de B______, lequel portait sur la seule arcade de l'épicerie. Il avait accepté de devenir locataire de l'arcade élargie (une fois les deux locaux réunis), ce qui n'était pas prévu par la convention, car il pensait que le bail y relatif serait conclu rapidement, soit en avril 2019. En juin 2019, voyant que rien ne se passait, il avait demandé à B______ de lui transférer son bail comme stipulé dans la convention; en parallèle, il avait demandé à la Régie de conclure un bail portant sur la seule arcade de B______, puisque le local adjacent n'était pas encore disponible. Toutes deux avaient refusé : la première au motif qu'elle venait juste de refaire son stock, la seconde au motif qu'elle souhaitait signer un bail portant sur les deux locaux réunis.

p. Par réponse du 1er mars 2021, complétée le 10 mai 2021, B______ a conclu au déboutement de A______, sous suite de frais et dépens.

Elle a allégué, en substance, que la convention de remise de commerce prévoyait uniquement le transfert du bail de l'épicerie à A______. Le local voisin n'était pas inclus dans la convention, puisqu'elle n'en était pas locataire et qu'il n'était pas certain que ce local puisse être libéré d'ici le 31 mars 2019. Alors que la Régie était prête à transférer le bail de l'épicerie à A______, celui-ci avait refusé et décidé de "se retirer de l'affaire" car il exigeait de pouvoir louer de suite les deux arcades. B______ a également fait valoir que A______ avait cessé de payer les mensualités visées à l'art. 5 de la convention, de sorte que le montant déjà payé lui était acquis.

q. Lors de l'audience du 31 mai 2021, le précité a modifié ses conclusions, en ce sens que le montant réclamé à titre de dépens s'élevait à 5'931 fr. 04 TTC. Le Tribunal a procédé à l'interrogatoire des parties et à l'audition de D______ en qualité de témoin.

q.a A______ a déclaré que la convention du 29 mars 2019 avait été rédigée par l'avocate de B______. Les mensualités stipulées dans la convention devaient être versées une fois qu'il serait "entré" dans les locaux et aurait débuté son activité, étant précisé qu'il n'avait pas de fortune personnelle. Son projet initial portait uniquement sur la reprise de l'arcade de B______. Toutefois, lors d'une rencontre sur place, la Régie l'avait informé que le local voisin serait prochainement disponible et que la propriétaire souhaitait réunir ces deux locaux en une seule arcade. Il avait alors confirmé son intérêt à louer les deux surfaces commerciales. Il avait effectué toutes les démarches utiles auprès du Registre du commerce afin d'être prêt à ouvrir son commerce à compter du 1er avril 2019, date retenue par la Régie pour lui transférer le bail des deux arcades. Contrairement à ce que celle-ci indiquait dans son courrier du 1er octobre 2019, il n'avait jamais déclaré renoncer à son projet de reprendre les deux locaux réunis. En juin-juillet 2019, il s'était rendu dans l'arcade de B______ pour l'informer que compte tenu des circonstances (soit la procédure d'évacuation en cours s'agissant du local adjacent), il souhaitait "à tout le moins pouvoir déjà récupérer son local". Elle lui avait répondu que cela n'était plus possible car elle venait de refaire son stock. Il n'avait pas pris l'initiative de solliciter la clé du local occupé par B______ auprès de la Régie, dans la mesure où cette dernière avait toujours "invoqué un bail pour les deux locaux". Il avait trouvé un nouveau local commercial à la rue 2______ en mars 2020 et les clés lui avaient été remises en juillet 2020.

De son côté, B______ a déclaré que A______ était venu la voir en juin 2019, respectivement à fin juillet-début août 2019, pour lui proposer de reprendre son arcade "en sous-main", de sorte qu'elle continuerait d'apparaître officiellement comme la locataire et la gérante de l'épicerie. Elle avait refusé cette proposition, car elle souhaitait remettre son commerce en vue de quitter la Suisse et estimait que ce projet n'était pas compatible avec la solution proposée par A______. Son refus n'avait rien à voir avec le renouvellement de son stock, étant précisé qu'elle le renouvelait en permanence et non de façon périodique. Elle avait proposé à plusieurs reprises à A______ de reprendre son bail et son local et de patienter pour le local voisin, ce qu'il avait refusé au motif que son projet visait à reprendre les deux locaux. Elle ajouté que le non-respect de la convention avait eu de profonds impacts sur sa vie privée et professionnelle : son projet de quitter la Suisse avait été "chamboulé", elle avait perdu son logement après avoir résilié son bail dans la perspective de son départ et avait essuyé des pertes financières. Lorsqu'elle avait appris que le local adjacent ne serait pas libéré à la date prévue, elle s'était adressée à la Régie pour lui demander de transférer le bail de son arcade à A______. Toutefois, la Régie lui avait répondu que le précité était d'accord de signer un contrat de bail uniquement s'il portait sur les deux locaux.

q.b D______ a déclaré avoir appris début février 2019 que B______ souhaitait remettre son arcade à A______. Lors d'une rencontre qui avait eu lieu au cours du même mois, elle avait informé les parties que la propriétaire de l'immeuble avait l'intention de réunir l'arcade de B______ avec le local voisin et, cela fait, de louer l'arcade élargie au même locataire. Lors de cet entretien, elle avait précisé que pour la propriétaire, "le transfert des deux baux à un seul et unique locataire après leur réunion était une condition sine qua non à la reprise, de sorte qu'un bail ne serait établi qu'après la réunion des deux locaux". Toutefois, la Régie n'était pas opposée à effectuer ce transfert en deux temps en fonction de la libération effective du second local. Selon ses souvenirs, A______, qui travaillait dans un restaurant, était intéressé à reprendre les deux locaux pour son épouse, "en commençant de suite par le local de B______ et d'attendre la libération du second".

En mars-avril 2019, compte tenu du souhait de B______ de transférer son bail dans les meilleurs délais pour pouvoir quitter la Suisse, d'une part, et de la procédure en cours pour évacuer la locataire de l'arcade voisine, d'autre part, la Régie avait proposé aux parties de se mettre d'accord pour que A______ puisse "reprendre le local qui resterait au nom de B______" – ce que cette dernière avait refusé. La Régie avait ensuite proposé de transférer le bail de la précitée à A______ jusqu'à la libération du local voisin, transfert conditionné à la conclusion d'un nouveau bail portant sur les deux arcades une fois celles-ci réunies. B______ était d'accord avec cette proposition, de même que A______, du moins dans un premier temps. Toutefois, à une date dont elle ne se souvenait plus, ce dernier avait changé d'avis et refusé ce transfert de bail "partiel" car il souhaitait obtenir les deux locaux et craignait que tel ne fût pas le cas à terme. Par la suite, A______ l'avait appelée pour lui réclamer les clés des deux locaux. Elle lui avait répondu qu'elle n'avait pas la clé du second local qui n'avait toujours pas été libéré. Le précité lui avait alors indiqué qu'il avait "une autre affaire en vue" et qu'il renonçait dès lors à ce projet. Toutefois, quelques mois plus tard, en septembre 2019, A______ l'avait rappelée pour lui faire part de son insatisfaction et lui demander de pouvoir reprendre le bail de B______. Elle en avait été étonnée, car pour la Régie le dossier était clos, le précité s'étant retiré de l'affaire.

D______ a confirmé qu'à fin mars 2019, A______ pouvait s'il le souhaitait reprendre la seule arcade de B______; cette dernière avait d'ailleurs expressément demandé à la Régie de transférer son bail en faveur de l'intéressé.

q.c Le Tribunal a gardé la cause à juger au terme de cette audience.

B. Par jugement JTPI/8054/2021 du 21 juin 2021, reçu le 28 juin 2021 par A______, le Tribunal a débouté le précité de toutes ses conclusions (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 3'200 fr., compensés avec l'avance fournie à hauteur de 200 fr. et mis à la charge de A______, condamné celui-ci à verser 3'000 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 2) et 3'150 fr. TTC à B______ à titre de dépens (ch. 3), et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

Le Tribunal a retenu qu'il ressortait du témoignage de D______ que la possibilité de conclure un contrat de bail portant sur les deux locaux réunis avait été retardée en raison de la procédure judiciaire que la propriétaire de l'immeuble avait dû intenter pour récupérer le local jouxtant l'arcade de B______. Dès que cette problématique avait été communiquée aux parties, la précitée était intervenue auprès de la Régie pour demander qu'un transfert de bail puisse intervenir pour son seul local. Cette proposition avait tout d'abord été acceptée par A______. Celui-ci avait ensuite changé d'avis, car il craignait à terme d'être uniquement le locataire de l'arcade de B______. La volonté de la précitée de remettre son commerce était corroborée par le projet qui était le sien de quitter la Suisse, projet qui ne pouvait souffrir d'aucun retard puisqu'elle avait déjà résilié le bail de son appartement. Il s'ensuivait que ce n'était pas la Régie mais A______ qui avait refusé le transfert du bail afférent à l'arcade de B______. Partant, cette dernière pouvait conserver l'acompte de 35'000 fr. déjà versé, en vertu de l'art. 6 de la convention.

C. a. Par acte expédié au greffe de la Cour de justice le 30 août 2021, A______ a fait appel de ce jugement, dont il a sollicité l'annulation. Cela fait, il a conclu, principalement, à ce que B______ soit condamnée à lui verser la somme de 35'000 fr., avec intérêt à 5% l'an dès le 29 mars 2019, subsidiairement, à ce que B______ soit condamnée à lui verser la somme de 30'000 fr., avec intérêt à 5% l'an dès le 29 mars 2019, le tout sous suite de frais de première instance et d'appel, dont 5'931 fr. 04 à titre de dépens de première instance.

b. Dans sa réponse du 11 novembre 2021, B______ a conclu, sous suite de frais, à l'irrecevabilité de l'appel, respectivement à son rejet et à la confirmation du jugement entrepris.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions respectives.

d. Par avis du 9 décembre 2021, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable contre les décisions finales si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 et 2 CPC).

En l'espèce, les conclusions principales prises en dernier lieu par l'appelant devant le Tribunal s'élevaient à 35'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 L'appel a été interjeté dans le délai de trente jours (art. 311 al. 1, 142 al. 3 et 145 al. 1 let. b CPC) et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable sous cet angle.

1.3.1 Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, l'appel doit être motivé. Pour satisfaire à cette obligation de motivation, l'appelant doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_356/2020 du 9 juillet 2020 consid. 3.2).

1.3.2 En l'espèce, l'appelant reproche au Tribunal d'avoir mal interprété la convention de remise de commerce. Subsidiairement, il lui fait grief de ne pas avoir examiné le caractère excessif de la peine conventionnelle encaissée par l'intimée (à savoir l'acompte de 35'000 fr. versé à celle-ci) et de ne pas l'avoir réduite conformément à l'art. 163 al. 3 CO. A la lecture de l'appel, l'on comprend sur quels points de fait et de droit l'appelant critique le jugement entrepris. Les allégations de fait sont en outre étayées par des renvois aux actes et pièces de la procédure. L'appel respecte ainsi les impératifs de forme fixés à l'art. 311 al. 1 CPC, de sorte qu'il est recevable, contrairement à ce que soutient l'intimée.

1.4 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF
138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

La maxime des débats et le principe de disposition (art. 55 al. 1 et 58 al. 1 CPC) sont applicables au présent litige.

Dans le cadre de la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC), les parties ont l'obligation d'alléguer les faits à l'appui de leurs prétentions et d'offrir les preuves permettant d'établir ces faits. La conséquence et la sanction de cette obligation résident dans le fait que le tribunal ne pourra pas tenir compte dans son jugement des faits qui ne sont pas allégués et prouvés (ATF 142 III 462, SJ 2016 I 429); il faut à tout le moins que ces faits entrent dans le cadre des allégations formulées (ATF 142 III 462, SJ 2016 I 429); le juge tiendra compte des faits allégués et prouvés ou admis même s'il s'agit de faits allégués par la partie adverse (Haldy, CR CPC, 2e édition, 2019, n. 3 ad art. 55 et les références citées).

2. Dans un premier moyen, l'appelant reproche au Tribunal d'avoir mal interprété la convention signée par les parties le 29 mars 2019, soit en particulier son art. 6 let. c. Il soutient que la remise du fonds de commerce était subordonnée à l'octroi par la Régie d'un bail portant sur les deux arcades réunies – et non sur la seule arcade de l'intimée ainsi que l'a retenu le premier juge.

2.1 Pour qualifier un contrat comme pour l'interpréter, le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO; ATF 131 III 606 consid. 4.1; 128 III 419 consid. 2.2). La recherche de la volonté réelle des parties est qualifiée d'interprétation subjective (ATF 131 III 606 consid. 4.1; 125 III 305 consid. 2b). Le cas échéant, le juge devra procéder empiriquement, sur la base d'indices (ATF 132 III 268 consid. 2.3.2; 131 III 606 consid. 4.1). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales – mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2).

L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait. Si sa recherche aboutit à un résultat positif, le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises (arrêt du Tribunal fédéral 4A_186/2017 du 4 décembre 2017 consid. 4.2.2).

Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties – parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes – ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat – ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves –, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. Il s'agit d'une interprétation selon le principe de la confiance (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 et les arrêts cités).

La détermination de la volonté objective des parties, selon le principe de la confiance, est une question de droit; pour la trancher, il faut cependant se fonder sur le contenu des manifestations de volonté et sur les circonstances, lesquelles relèvent du fait. Les circonstances déterminantes à cet égard sont uniquement celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté, mais non pas les événements postérieurs (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 133 III 61 consid. 2.2.1 et les arrêts cités).

2.2 En l'espèce, il ressort des déclarations concordantes des parties et du témoin D______ qu'en février 2019, l'intimée a pris contact avec la Régie pour l'informer de sa volonté de remettre son fonds de commerce à l'appelant, ce qui impliquait que son contrat de bail – portant sur la seule arcade de l'épicerie – puisse être transféré au nom de ce dernier. Il n'est du reste pas contesté qu'au moment de la signature de la convention, l'intimée ne pouvait prendre d'engagement qu'en relation avec l'arcade qu'elle louait, à l'exclusion du local voisin, dont elle n'avait pas la jouissance. Informée de ce projet, la Régie a signifié aux parties, lors d'une réunion qui s'était tenue en février 2019, l'intention de la propriétaire de réunir l'arcade louée par l'intimée avec le local adjacent, puis, une fois les locaux réunis, de conclure un nouveau contrat de bail pour l'arcade élargie avec un seul et même locataire. Compte tenu de ce projet, la propriétaire était d'accord de transférer le bail de l'intimée en faveur de l'appelant, pour autant que celui-ci accepte ensuite de conclure un nouveau bail pour l'arcade élargie.

Cette proposition a été acceptée par l'appelant qui a déposé son dossier de candidature auprès de la Régie, en vue de devenir locataire des deux locaux, peu de temps avant que les parties ne signent la convention le 29 mars 2019. Le témoin D______ a ajouté qu'à ce moment-là, l'appelant avait manifesté son intérêt à pouvoir "reprendre" aussitôt l'arcade de l'intimée dans l'attente que le local adjacent se libère. Elle a en outre affirmé que la propriétaire n'était pas opposée à ce que la remise des locaux à l'appelant (incluant le transfert du bail de l'intimée) intervienne de façon échelonnée, en fonction de la libération effective du deuxième local. Dans la mesure où l'arcade voisine était (encore) occupée par un tiers à la date du 29 mars 2019, il existait en effet une incertitude sur ce point – ce que les parties ont exprimé à l'art. 5 let. d de la convention, en stipulant que la date de prise de possession des locaux "dépend[ait] en dernier lieu de la régie ( ), des propriétaires ou des ayants droit de l'immeuble", de sorte que cette prise de possession était fixée, "dans la mesure du possible", au 15 avril 2019. Contrairement à ce que soutient l'appelant, il ne ressort pas du dossier que les parties auraient subordonné la remise du fonds de commerce à la condition que l'appelant se voie attribuer la jouissance des locaux de façon simultanée. Outre le fait que la convention ne fixait aucune date butoir pour la remise du local voisin (celui-ci étant occupé par un tiers), l'appelant a lui-même contacté la Régie et l'intimée en septembre 2019 – après les avoir informées qu'il se retirait de l'affaire (cf. infra) – pour savoir où en était la procédure d'évacuation, respectivement pour demander la clé du local de l'épicerie.

Les éléments qui précèdent permettent de retenir que les parties, en signant la convention, ont exprimé leur volonté réelle et commune de subordonner la remise du commerce (i) au transfert du bail de l'intimée en faveur de l'appelant, dans un premier temps, puis (ii) à la conclusion d'un bail portant sur l'arcade élargie, une fois les locaux réunis en un seul, dans un deuxième temps. Or, la Régie a expressément confirmé à l'appelant (à plusieurs reprises) que la propriétaire de l'immeuble était d'accord de lui transférer le bail de l'intimée, à compter du 1er avril 2019, puis de lui remettre l'arcade élargie en location, dès que le local adjacent aurait été libéré. A l'instar de la déclaration de l'intimée, le témoin D______ a déclaré que c'était l'appelant – et non la Régie – qui avait refusé les propositions qui lui étaient faites d'obtenir le transfert du bail de l'intimée et, dans un deuxième temps, de conclure le bail relatif à l'arcade élargie. Le témoin D______ a souligné que l'appelant avait adopté une attitude contradictoire au fil des mois, puisqu'il avait informé la Régie qu'il se retirait de l'affaire (au printemps 2019), au motif que le local adjacent n'avait pas été libéré et qu'il avait "une autre affaire en vue", pour la relancer subitement en septembre 2019 – alors qu'il n'avait donné aucune nouvelle pendant plusieurs mois – au sujet de l'état d'avancement de la procédure en évacuation. Il résulte d'ailleurs du courrier du 1er octobre 2019 de la Régie que celle-ci s'est étonnée de cette attitude, en précisant que, pour elle, l'appelant avait abandonné toute idée de reprendre les deux arcades pour réaliser son projet, de sorte qu'elle avait clos son dossier. A réception de ce courrier, l'appelant n'a pas répondu ni repris contact avec la Régie et/ou l'intimée, de sorte que celles-ci pouvaient en inférer de bonne foi qu'il avait définitivement renoncé à conclure le bail portant sur l'arcade élargie.

Rien ne permet de remettre en doute le témoignage du témoin D______ qui est cohérent au regard des pièces produites et des déclarations de l'intimée. Il sera encore relevé qu'il était indifférent pour la Régie de conclure un nouveau bail avec l'une ou l'autre des parties.

Il suit de là que l'hypothèse visée à l'art. 6 de la convention ne s'est pas réalisée, la Régie ayant expressément consenti à "la cession ou la création du bail au nom de l'acheteur", de sorte que l'appelant ne saurait se fonder sur cette disposition pour obtenir la restitution de la somme de 35'000 fr. qu'il avait versée à l'intimée.

L'appel est infondé sur ce point.

3. Dans un moyen subsidiaire, l'appelant – qui soutient que l'intimée a encaissé la somme de 35'000 fr. à titre de peine conventionnelle – reproche au Tribunal de ne pas avoir examiné le caractère excessif de cette peine sous l'angle de l'art. 163 al. 3 CO. Il conclut à ce que la peine conventionnelle soit réduite à 5'000 fr., le solde devant lui être remboursé.

3.1.1 A teneur de l'art. 160 al. 1 CO, lorsqu'une peine a été stipulée en vue de l'inexécution ou de l'exécution imparfaite du contrat, le créancier ne peut, sauf convention contraire, demander que l'exécution ou la peine convenue. Selon l'art. 163 al. 1 CO, les parties fixent librement le montant de la peine.

La clause pénale prévue aux art. 160 à 163 CO est une convention accessoire par laquelle le débiteur promet au créancier une prestation (la peine conventionnelle) pour le cas où il n'exécuterait pas ou n'exécuterait qu'imparfaitement une prestation déterminée (Mooser, CR-CO I, 3e édition, 2021, n. 6 ad intro. art. 158-163 CO).

Celui qui donne des arrhes est réputé les donner en signe de la conclusion du contrat, et non à titre de dédit (art. 158 al. 1 CO). Lorsqu'un dédit a été stipulé, chacun des contractants est censé pouvoir se départir du contrat, celui qui a versé la somme en l'abandonnant, celui qui l'a reçue en la restituant au double (art. 158 al. 3 CO).

Les arrhes qui peuvent être conservées par celui qui les a reçues, en cas d'inexécution du contrat, remplissent la fonction d'une peine conventionnelle. On ne peut parler d'arrhes que si la prestation doit être effectuée au moment de la conclusion du contrat. A ce défaut, on a affaire à un versement partiel, auquel les dispositions concernant la clause pénale sont également applicables en vertu du renvoi de l'art. 162 CO (ATF 133 III 43 consid. 3.2, JdT 2007 I 226).

Cette disposition stipule en effet que les dispositions concernant la clause pénale sont applicables à la convention par laquelle les versements partiels effectués restent, en cas de résiliation, acquis au créancier (art. 162 CO).

3.1.2 Aux termes de l'art. 163 al. 3 CO, le juge doit réduire les peines qu'il estime excessives.

Si la jurisprudence a admis qu'il s'agit d'une norme d'ordre public (destinée à protéger la partie faible contre les abus de l'autre partie), que celle-ci est impérative (ce qui signifie que les parties ne peuvent y renoncer), que la réduction d'une peine conventionnelle est un cas d'application du principe général de l'interdiction de l'abus de droit, et que le débiteur n'a pas à prendre de conclusions spécifiques en réduction lorsqu'il conclut au rejet total de la peine – car celui qui demande le rejet total conclut implicitement à la réduction (conclusions implicites) –, elle a toujours imposé au débiteur, et non au créancier, d'alléguer et de prouver les conditions de fait d'une réduction et, partant, la disproportion par rapport au dommage causé. Cela signifie que le débiteur supporte le fardeau de l'allégation objectif et le fardeau de la preuve (art. 8 CC) des conditions de la réduction, en ce sens qu'il supporte les conséquences de l'absence d'allégation de ces conditions, respectivement celles de l'absence de preuve de celles-ci. Même si, sous l'empire de la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC), qui réglemente les rôles respectifs du juge et des parties dans le rassemblement des faits, la personne de l'allégant importe peu, puisqu'il suffit que les faits fassent partie du cadre du procès pour que le juge puisse en tenir compte, le débiteur a toujours intérêt à alléguer lui-même les faits justifiant la réduction, ainsi qu'à indiquer au juge les moyens propres à les établir. S'agissant d'appliquer l'art. 163 al. 3 CO, il s'impose de ne pas se montrer trop formaliste dans l'examen des exigences d'allégation pesant sur le débiteur. Il suffit qu'il résulte de ses écritures qu'il conteste la peine conventionnelle en considérant que son montant est trop élevé (ATF 143 III 1 consid. 4.1 et les références citées).

Dans son application de l'art. 163 al. 3 CO, le juge doit observer une certaine réserve, car les parties sont libres de fixer le montant de la peine et les contrats doivent en principe être respectés; une intervention du juge n'est nécessaire que si le montant fixé est si élevé qu'il dépasse toute mesure raisonnable, au point de n'être plus compatible avec le droit et l'équité (ATF 133 III 201 consid. 5.2 et la jurisprudence citée).

Pour dire si une peine conventionnelle est ou non excessive, il faut l'apprécier de manière concrète au moment de la violation de l'obligation contractuelle, en tenant compte de la nature et de la durée du contrat, de la gravité de la violation et de la faute commise, de l'intérêt économique du créancier au respect de l'obligation ainsi que de la situation respective des parties (arrêt du Tribunal fédéral 4A_656/2012 précité consid. 2.3). Si le juge reconnait que la peine est excessive, il doit en principe seulement la réduire pour qu'elle ne le soit plus. Autrement dit, il ne doit pas la fixer au montant qu'il estimerait correct (ATF 133 III 201 consid. 5.2 et les références citées).

A plusieurs reprises, le Tribunal fédéral a jugé qu'une peine conventionnelle représentant 10% du prix fixé dans le contrat de vente ou la promesse de vente n'était pas excessive (ATF 133 III 201 consid. 5.5 et les références citées; arrêts du Tribunal fédéral 4A_536/2016 du 26 octobre 2016 consid. 4.3.2; 4C_178/1993 du 8 septembre 1993 consid. 3c; 4C_96/1993 du 19 juillet 1993 consid. 3).

Une peine de 20% n'est pas inhabituelle mais une réduction peut se justifier pour d'autres motifs tels que la faute du débiteur et le montant du dommage subi par le créancier (arrêt du Tribunal fédéral 4A_268/2016 du 14 décembre 2016 consid. 5.1; Mooser, CR-CO I, 3e édition, 2021, n. 9 ad art. 163 CO)

Une peine conventionnelle déjà acquittée peut être réduite lorsque les circonstances de l'espèce ne permettent pas de déduire du paiement que le débiteur a reconnu que la peine était due intégralement (ATF 133 III 43 consid. 3, JdT 2007 I 226).

3.2.1 En l'espèce, il convient de déterminer, à titre préalable, si la somme de 35'000 fr. versée par l'appelant peut être qualifiée de peine conventionnelle.

Les parties ont prévu, à l'art. 5 let. c de la convention, qu'en cas de non-paiement des mensualités dues par l'appelant, l'intimée reprendrait le fonds de commerce à son nom et pourrait conserver les sommes versées jusque-là à titre de dédit et/ou d'arrhes.

Bien que l'expression "dédit" ait été utilisée par les parties, la convention ne prévoit pas la possibilité de résoudre la vente de manière unilatérale en s'acquittant d'une somme d'argent. La clause précitée visait ainsi à renforcer l'exécution de la vente et n'avait pas pour fonction de permettre à l'acquéreur de se dédire.

En revanche, la Cour n'est pas en mesure de déterminer si le montant de 35'000 fr. versé par l'appelant constitue des arrhes remplissant la fonction de peine conventionnelle et/ou des versements partiels pouvant être conservés en cas d'inexécution, dès lors que l'on ignore à quelle date quel montant a été versé, l'intimée ayant uniquement admis avoir reçu la somme de 35'000 fr. Cela n'emporte toutefois pas conséquence, dès lors que dans les deux cas de figure, les dispositions de la clause pénale sont applicables.

Ainsi, l'acompte de 35'000 fr. versé par l'appelant, qui a cessé de payer les mensualités stipulées dans la convention, correspond à une peine conventionnelle (respectivement à un versement partiel) au sens évoqué ci-dessus.

3.2.2 Il convient ensuite de déterminer si le Tribunal devait examiner le caractère excessif de l'acompte encaissé par l'intimée à l'aune des règles applicables à la clause pénale, respectivement s'il devait en réduire la quotité, même en l'absence de conclusions spécifiques de l'appelant en ce sens.

En première instance, l'appelant a conclu au remboursement de 35'000 fr. sur la base de l'art. 6 let. c de la convention, qui n'institue pas de peine conventionnelle. Il n'a pas discuté du montant de l'acompte payé à l'intimée ni de son caractère excessif. Cependant, il a conclu au remboursement total de la somme versée, de sorte que l'on pouvait en inférer qu'il concluait subsidiairement à un remboursement partiel, soit à une réduction judiciaire de cette somme. De son côté, l'intimée a fait valoir, dans sa réponse du 1er mars 2021, que l'appelant avait cessé de verser les mensualités stipulées à l'art. 5 de la convention et que le montant déjà versé lui était acquis pour cette raison. En outre, chacune des parties a allégué, en première instance, des faits propres à justifier une réduction de l'acompte versé sur la base de l'art. 163 al. 3 CO (cf. infra consid. 3.2.3).

Aussi, l'appelant a implicitement manifesté sa volonté de voir la peine conventionnelle réduite, pour le cas où elle ne devrait pas être totalement remboursée, tandis que les parties ont régulièrement allégué des faits susceptibles de légitimer une réduction de la peine conventionnelle. Il s'ensuit que le Tribunal a été valablement saisi de cette question et qu'il lui appartenait d'examiner en droit si une réduction de l'acompte versé se justifiait en application de l'art. 163 al. 3 CO.

En tout état, même à admettre l'inverse, il apparaît que l'appelant a expressément conclu à titre subsidiaire devant la Cour à ce que le montant de la peine conventionnelle soit réduit et l'intimée condamnée à lui rembourser 30'000 fr. Bien que l'appelant fasse état d'une argumentation juridique différente de celle plaidée en première instance s'agissant de cette conclusion subsidiaire, les faits sur lesquels ses prétentions se fondent ont été allégués en première instance déjà, de sorte qu'il ne s'agit pas d'une conclusion nouvelle et qu'elle peut être traitée au stade de l'appel (ATF 136 III 341 consid. 4; 136 V 362 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_621/2012 du 20 mars 2013 consid. 4.3.2 et les références citées).

3.2.3 Il convient dès lors de déterminer si la peine conventionnelle est excessive et si elle doit être réduite comme le soutient l'appelant.

Il sera tout d'abord relevé que l'art. 5 let c de la convention ne prévoyait pas de plafond s'agissant du montant pouvant être conservé par l'intimée à titre d'arrhes valant peine conventionnelle, ce qui était susceptible de conduire à un résultat inéquitable en fonction des sommes déjà versées par l'appelant comme c'est le cas en l'occurrence.

Sur la base de cette disposition l'appelant a ainsi versé 35'000 fr. à l'intimée, ce qui représente 44% de 80'000 fr., soit le prix auquel il s'était engagé à acquérir le commerce de l'intimée.

Or, une peine dépassant le 40% du prix d'achat fixé est inhabituelle et apparaît disproportionnée au regard de la jurisprudence précitée et des données de l'espèce. En effet, les versements prévus par l'art. 5 reposaient sur le fondement que l'appelant allait prendre possession du local de l'intimée, devenir propriétaire du fonds de commerce et débuter son activité commerciale. L'appelant a allégué que les revenus de l'exploitation de l'épicerie devaient ainsi lui permettre de payer les mensualités convenues, précisant qu'il ne disposait pas de fortune personnelle. Il n'a finalement pas pris possession du local de l'intimée, notamment en raison de la procédure en évacuation que la propriétaire de l'immeuble a été contrainte d'initier afin de récupérer le local voisin. A cela s'ajoute que la convention ne fixait pas de date précise de prise de possession du local par l'appelant et/ou de transfert des risques.

De son côté, l'intimée n'a pas remis son commerce à un autre acquéreur et a poursuivi son activité dans les deux arcades réunies, de sorte que la rupture de l'accord ne l'a pas exposée à un préjudice financier important.

Enfin, les parties sont deux personnes physiques, dont il n'est pas établi qu'elles disposeraient d'une fortune particulière.

Compte tenu de l'ensemble des circonstances, la Cour considère que l'acompte de 35'000 fr. conservé par l'intimée constitue une peine conventionnelle manifestement déraisonnable, qu'il se justifie de réduire – afin qu'elle ne soit plus excessive, sans qu'il ne soit porté atteinte à la liberté contractuelle des parties – à 20% du prix d'achat fixé, soit à la somme de 16'000 fr.

Il s'ensuit que l'intimée, qui a conservé l'acompte de 35'000 fr. à titre de peine conventionnelle, devra restituer à l'appelant la somme de 19'000 fr. (35'000 fr.
- 16'000 fr.). Cette somme portera intérêts à 5% l'an dès le 29 mars 2019, le dies a quo de l'intérêt moratoire n'ayant pas été remis en cause par l'intimée.

3.2.4 Le jugement entrepris sera par conséquent annulé et il sera statué à nouveau dans le sens de ce qui précède.

4. 4.1 Si l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC). Conformément à l'art. 106 CPC, les frais sont mis à la charge de la partie succombante (al. 1). Lorsqu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (al. 2).

En l'espèce, la quotité des frais judiciaires de première instance, arrêtés à 3'200 fr., n'est pas contestée et a été fixée conformément à la loi (art. 17 et 35 RTFMC), de sorte qu'elle sera confirmée.

Les frais judicaires seront mis à charge des parties à raison de la moitié chacune, dans la mesure où l'intimée a obtenu gain de cause sur le principe de ses conclusions, tandis que l'appelant se voit allouer approximativement la moitié de la somme réclamée en première instance.

Ils seront compensés à hauteur de 200 fr. avec l'avance de frais versée par ce dernier, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). En outre, l'appelant et l'intimée seront respectivement condamnés à payer 1'400 fr. et 1'600 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Vu l'issue du litige, chacune des parties supportera ses propres dépens de première instance.

4.2 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 2'700 fr. (art. 17 et 35 RTFMC), compensés avec l'avance fournie par l'appelant, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC), et répartis par moitié entre les parties pour les motifs exposés ci-avant (art. 106 al. 2 CPC). L'intimée sera condamnée à verser 1'350 fr. à l'appelant (art. 111 al. 2 CPC).

Vu l'issue du litige, chaque partie supportera ses propres dépens d'appel.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 30 août 2021 par A______ contre le jugement JTPI/8054/2021 rendu le 21 juin 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/6831/2020.

Au fond :

Annule le jugement entrepris et, statuant à nouveau :

Condamne B______ à payer à A______ la somme de 19'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 29 mars 2019.

Arrête les frais de judiciaires de première instance à 3'200 fr., les met à la charge des parties à raison de la moitié chacune et les compense partiellement avec l'avance versée par A______, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser 1'400 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Condamne B______ à verser 1'600 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens de première instance.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 2'700 fr., les met à la charge des parties à raison de la moitié chacune et les compense avec l'avance versée par A______, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne en conséquence B______ à verser 1'350 fr. à A______.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur
Jean REYMOND, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.