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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/364/2025

JTAPI/638/2025 du 12.06.2025 ( LCI ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : AMENDE;SANCTION ADMINISTRATIVE;RÉCIDIVE(INFRACTION);REMISE EN L'ÉTAT;OBJET DU LITIGE;RÉTABLISSEMENT DE L'ÉTAT ANTÉRIEUR;PRINCIPE DE LA BONNE FOI
Normes : LCI.137.al1.letc; LCI.129; Cst.29
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/364/2025 LCI

JTAPI/638/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 12 juin 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______ est nu-propriétaire depuis 2015 de la parcelle n° 1______ de la commune de ______[GE], située en zone de développement industriel et artisanal. Sa mère, Madame B______ en est l'usufruitière.

2.             Par courrier du 17 juillet 2019, le département du territoire (ci-après : DT ou le département) a informé M. A______ avoir été saisi d’une dénonciation accompagnée d’un reportage photographique desquels il ressortait que de nombreux véhicules étaient stationnés sur sa parcelle, sur laquelle la présence de dépôts, de divers containers et d’un couvert avaient par ailleurs été constatée. Un délai de 10 jours lui était imparti pour faire part de ses observations et explications éventuelles quant aux faits constatés.

Un dossier d'infraction I 2______ était ouvert.

3.             Par courriers des 26 juillet et 9 août 2019, M. A______ a expliqué au département que les dépôts, couvert et containers avaient été autorisés par APA 3______, APA 4______ et APA 5______. Quant aux véhicules stationnés, ils appartenaient à C______ SARL qui avait signé un contrat de bail avec l'usufruitière de la parcelle. Il l’invitait dès lors à s’adresser aux représentants de la société précitée.

4.             Par courrier du 29 août 2019, le département a pris bonne note des explications de M. A______, lui précisant que les éléments présents sur sa parcelle n'étaient au bénéfice d'aucune autorisation valable puisque les APA mentionnées étaient soit en cours d'instruction, soit caduques, soit renvoyées. Un délai de 10 jours lui était imparti pour fournir d'éventuelles explications quant à la modification du sol entre 2012 et 2015. Il l’informait par ailleurs interpeller ce jour C______ SARL afin qu’elle puisse exercer son droit d’être entendue. Toutes mesures et sanctions demeuraient pour le surplus réservées.

5.             Le 21 juillet 2021, une demande d'autorisation de construire a été déposée par M. A______ auprès du département pour tenter de régulariser, en partie, l'infraction I 2______ (APA 6______). La demande portait sur l'installation temporaire de véhicules sur la parcelle et le déplacement de conteneurs et modules.

6.             Dans le cadre de l’instruction de cette demande, l'office de l'urbanisme (ci-après : OU) a notamment évoqué la question de la mise en œuvre du Plan directeur de zone de développement industriel et artisanal (PDZIA) D______, lequel a été adopté par le Conseil d'Etat le ______ 2022.

7.             Le ______ 2022, le département a délivré l’autorisation de construire APA 6______ sollicitée pour une durée provisoire de 5 ans.

8.             Par décision du ______ 2022, en force, le département, faisant suite à la délivrance de l'APA 6______ précitée, a infligé à M. A______ une amende de CHF 1'000.-, relevant que les éléments considérés, dont notamment l’installation et/ou le maintien de dépôts, de containers et d’un couvert, avaient été engagés sans autorisation.

En outre, il lui était ordonné de mettre en conformité sa parcelle, dans un délai de 3 mois, en procédant à la réalisation des travaux conformément à l'autorisation délivrée, soit en déplaçant les dépôts, containers et le couvert aux emplacements autorisés, en supprimant et évacuant toutes les autres constructions et/ou installations non régularisées par l’APA 6______ et en stockant les véhicules aux endroits prévus par les plans de ladite APA. Un reportage photographique ainsi que l'attestation globale de conformité accompagnée des plans conformes à exécution devraient lui parvenir dans ce même délai.

Il était pour le surplus précisé que l'autorisation de construire ayant été délivrée pour une période de 5 ans, la remise en état totale de la parcelle devrait intervenir au plus tard fin mars 2027.

En l’état, toutes autres mesures et/ou sanction justifiées par la situation demeuraient réservées.

9.             Par décision du ______ 2022, constatant qu'aucune suite n'avait été donnée à son ordre du ______ 2022, le département a infligé à M. A______ une amende de CHF 500.-. Un nouveau délai de 30 jours lui était imparti pour fournir le reportage photographique et l'attestation globale de conformité requis dans son ordre précité.

Il lui était rappelé qu'en cas de non-respect de son ordre et/ou sans nouvelles de sa part dans le délai imparti, il s’exposait à toutes nouvelles mesures et/ou sanction justifiées par la situation et précisé que, s’agissant d’une mesure d'exécution d’une décision en force, la présente ne pouvait faire l'objet d'un recours. L'amende pouvait en revanche faire l’objet d'un recours au Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI ou le tribunal) dans un délai de 30 jours dès sa notification.

10.         Par courrier du 25 juillet 2022, M. A______ a informé le département que les dépôts, containers et couverts avaient été déplacés et que les autres constructions avaient été supprimées, ainsi que constaté lors de la visite du 5 juillet précédant. Pour le reste, le délai de 3 mois initialement imparti n’était pas suffisant pour tout finaliser. Dans le meilleur des cas, les travaux se finaliseraient courant 2023.

11.         Le 26 août 2022, le département a accordé à M. A______ une prolongation de délai à fin avril 2023 pour lui communiquer la preuve de la mise en conformité (nouveau reportage photographique) et lui communiquer l'attestation globale de conformité.

Toutes mesures et sanctions étaient réservées en cas de non-respect de l'ordre ou sans nouvelles dans le délai.

12.         Par courrier du 30 avril 2023, M. A______ a informé le département avoir pris du retard dans la mise en œuvre de son ordre du ______ 2022 et espérer à tout le moins avoir rempli les conditions de ce dernier.

13.         Par décision du ______ 2024, n’ayant toujours pas obtenu les preuves de l'exécution de son ordre du ______ 2022, le département a infligé une amende de CHF 1'000.- à M. A______. Un nouveau délai au 5 juillet 2024 lui était imparti pour lui fournir le reportage photographique et l'attestation globale de conformité requis.

En cas de non-respect de l'ordre ou sans nouvelles dans le nouveau délai imparti, il s’exposait à de nouvelles mesures et/ou sanctions. Par ailleurs, seule l’amende pouvait faire l’objet d’un recours au TAPI.

14.         Le 6 juin 2024, le département a été informé que M. A______ était en train de poser des barrières sur sa parcelle et que des nouveaux éléments y avaient par ailleurs pris place.

15.         Par décision du ______ 2024, le département a infligé une nouvelle amende de CHF 1'500.- à M. A______ pour ne pas s'être conformé à son ordre du ______ 2022 et à ses relances des 15 juillet, 26 août 2022 et ______ 2024.

Un nouveau délai au 31 octobre 2024 lui était fixé pour fournir le reportage photographique et l'attestation globale de conformité requis. Sans nouvelles dans le délai imparti, un contrôle sur place serait effectué par un collaborateur de l'office des autorisations de construire (ci-après : OAC) et, à défaut d'exécution de son ordre, il s'exposait à toutes autres mesures et/ou sanctions justifiées par la situation.

Pour les motifs déjà évoqués, seule l’amende pouvait faire l’objet d’un recours au TAPI.

16.         Par courrier du 11 novembre 2024, M. A______ a interpellé la Fondation pour les terrains industriels de Genève (FTI) s’agissant de l’accord de médiation du ______ 2019 passé entre cette dernière, Mme E______ et Monsieur F______ et l’OU, dans lequel la cession de sa parcelle était notamment évoquée.

17.         Le 26 novembre 2024, un contrôle a été réalisé par un collaborateur de l’OAC sur la parcelle n° 1______ et un reportage photographique a été réalisé à cette occasion.

18.         Par courrier recommandé du ______ 2024, faisant suite à la visite et au constat précités, le département, constatant que son ordre du ______ 2022 n'avait toujours pas été exécuté malgré ses diverses relances, a infligé à M. A______ une amende de CHF 5000.-, lui ordonnant par ailleurs, à nouveau, de fournir le reportage photographique et l'attestation globale de conformité attestant de la bonne exécution de la totalité de son ordre, d’ici au 31 janvier 2025.

A défaut, il s'exposait à toutes autres mesures et/ou sanctions justifiées par la situation, étant pour le surplus rappelé que seule l’amende pouvait faire l’objet d’un recours au TAPI.

19.         Par acte du 27 janvier 2025, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI ou le tribunal) contre la décision susmentionnée, reçue en mains propres, au département, le ______ 2025.

Après avoir notamment rappelé l’historique des différents aménagements sur sa parcelle et l’existence de l’accord de médiation du ______ 2019, il a conclu à l’annulation de la décision du ______ 2024, nonobstant l’art. 59 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10). Préalablement, il a requis son audition ainsi que celle de Monsieur G______, responsable pour la FTI de la zone H______ nord de la commune de ______[GE], parcelle n° 7______, et de E______. L’effet suspensif devait être restitué au recours.

En substance, vu cet accord, dont il n’avait pas eu connaissance avant fin octobre 2024, des contraintes et obligations coûteuses lui avaient abusivement été imposées, ainsi notamment le dépôt de l’APA 6______, alors même que la cession de la partie sud de sa parcelle était envisagée. Il devait être ordonné au département et à la FTI de formuler des propositions d’indemnisation équitable en sa faveur compte tenu des circonstances et du tort subi. La décision du département était arbitraire et violait l’interdiction de l’abus de droit. Son droit d’être entendu avait par ailleurs été violé en l’absence de réponse du département à son courrier du 11 novembre 2024.

Il a joint un chargé de pièces, dont des plans et photographies de sa parcelle, l’accord de médiation du ______ 2019 et son courrier du 11 novembre 2024 à la FTI.

20.         Le DT s'est déterminé sur le recours le 14 avril 2025, concluant sous suite de frais et dépens, à son rejet.

En substance, le recourant estimait qu’il aurait commis un abus de droit et violé le principe de la bonne foi en rendant sa décision du ______ 2024, au vu de l’accord de médiation du ______ 2019 et de l'absence de réponse de l'État à son courrier du 11 novembre 2024.

Or, en premier lieu, le recours ne pouvait porter que sur l'amende infligée, puisque le nouveau délai fixé au 31 janvier 2025 pour produire les preuves attestant de la bonne exécution de son ordre du ______ 2022 et l'attestation globale de conformité ne représentait qu'une mesure d'exécution de sa décision du ______ 2022, entrée en force et ne pouvant dès lors plus être contestée en justice.

Pour le surplus, ses griefs étaient infondés. En effet, l’accord précité faisait suite à une médiation entre les époux D______ et E______, la FTI et l'OU afin de réfléchir à la mise en œuvre future du D______, notamment en ce qui concernait la création d'une route de desserte sur la parcelle de ces derniers. Il s'agissait donc de discussions quant à la conformité des constructions envisagées par les époux D______ et E______ avec les aménagements du plan directeur et quant à la recherche de solutions futures qui pourraient être envisagées pour trouver un terrain d'entente qui satisfasse les trois parties. Les points mentionnés par la FTI – laquelle ne faisait pas partie du département – notamment quant à la cession d'une partie de la parcelle n° 1______ de M. A______ aux époux D______ et E______ – s'inscrivaient dans un futur plus ou moins proche, pour autant bien évidemment que la FTI ou l'Etat acquière ladite parcelle. Aucune vente n'étant en l'état prévue, le recourant n’était, d’aucune manière, dépossédé de sa parcelle, en gardant au contraire la maîtrise. Il ne voyait ainsi pas l’utilité de l’audition de M. G______ (FTI) pour la résolution du litige.

Par ailleurs, la DD 8______ déposée par les époux D______ et E______ ne portait aucunement sur sa parcelle. Dès lors, rien ne l'empêchait de mettre enfin en œuvre complètement son ordre et de lui apporter les preuves demandées.

Quant au courrier du 11 novembre 2024, ayant été adressé à la FTI, aucune réponse ne pouvait être attendue de sa part. Aucune violation du principe de la bonne foi n’était partant à déplorer.

Enfin, même si le recourant ne la contestait pas directement dans son recours, il fallait retenir que la décision querellée, dont seule l’amende pouvait faire l’objet d’un recours, était parfaitement fondée, le recourant ne contestant pas ne pas lui avoir communiqué les preuves de la réalisation de la bonne exécution de son ordre du ______ 2022. Le montant de l’amende, de CHF 5'000.-, était par ailleurs non seulement nécessaire et adéquat mais également proportionné, vu la persistance de l'intéressé à ne pas vouloir se conformer à ses ordres et relances. Par conséquent, il se devait de faire preuve de sévérité.

Il rappelait enfin que le recours avait un effet suspensif ex lege.

21.         Invité à dupliquer par courrier du tribunal du 16 avril 2025, le recourant n’a pas donné suite.

 

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 3a ; ATA/242/2020 du 3 mars 2020 consid. 2a). La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer.

4.             Dès qu'elle n'est plus susceptible d'un recours ordinaire - soit que le délai de recours est échu sans avoir été utilisé, soit que l'autorité de dernière instance s'est prononcée définitivement -, une décision bénéficie de la force de chose décidée, l'application du régime qu'elle établit étant - sous réserve des cas de nullité - censée conforme à l'ordre juridique, même si, en réalité, cette décision est viciée (cf. not. ATF 138 III 49 consid. 4.4.3 ; 130 II 249 consid. 2.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_20/2020 du 6 avril 2020 consid. 1.1.2 ; 1C_620/2013 du 3 avril 2014 consid. 5.1 ; 9C_333/2007 du 24 juillet 2008 consid. 2.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 866 p. 308).

5.             En l'occurrence, l’objet du litige se circonscrit à la contestation de la décision du ______ 2024 du département infligeant au recourant une amende de CHF 5'000.- pour ne pas s’être conformé à ses ordres. La présente procédure ne saurait en revanche être l'occasion, pour le recourant, de remettre en cause l’ordre initial du ______ 2022 et, partant, se voir restituer les droits auxquels il a renoncé en omettant de recourir contre ce dernier, en force.

A toutes fins utiles, il sera encore relevé que l’examen du dossier ne permet pas de retenir la nullité de plein droit de la décision du ______ 2022.

6.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

7.             Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 179 n. 515).

8.             À titre préalable, le recourant sollicite son audition ainsi que celle de M. G______ et E______, sans toutefois véritablement motiver sa requête.

9.             Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_539/2019 du 19 mars 2020 consid. 3.1 ; 2C_203/2019 du 4 juillet 2019 consid. 2.1 et les arrêts cités). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 5.1.1 ; 2C_203/2019 du 4 juillet 2019 consid. 2.1 ; ATA/631/2020 du 30 juin 2020 consid. 2 a et les arrêts cités). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 141 III 28 consid. 3.2.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_245/2020 du 12 juin 2020 consid. 3.2.1 ; ATA/631/2020 du 30 juin 2020 consid. 2a).

10.         En l'espèce, le recourant a pu exposer ses arguments de façon détaillée dans son recours et produire toute pièces utiles. Le département s’est déterminé sur le recours et a transmis son dossier. Invité à répliquer, le recourant n’a pas donné suite. La procédure contient par ailleurs toutes les pièces utiles. Dès lors, l'acte d’instruction demandé n'apparait pas nécessaire à la solution du litige, comme cela ressort également des considérants qui suivent. Partant, il ne sera pas donné suite à la demande d’acte d’instruction formulée, en soit non obligatoire.

11.         Le recourant allègue que le département aurait commis un abus de droit et violé le principe de la bonne foi et son droit d’être entendu en rendant sa décision du ______ 2024, au vu de l’accord de médiation du ______ 2019 et l'absence de réponse de l'État à son courrier du 11 novembre 2024.

Il ne conteste pas en tant que telle l’amende de CHF 5'000.- infligée par le département.

12.         Valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de toute attitude propre à tromper l'administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 129 I 161 consid. 4 p. 170 ; 129 II 361 consid. 7.1 p. 381 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_534/2009 du 2 juin 2010 consid. 2.2 ; 9C_115/2007 du 22 janvier 2008 consid. 4.2 ; ATA/700/2014 précité consid. 4a ; ATA/141/2012 du 13 mars 2012 consid. 4 ; T. TANQUEREL, op. cit., p. 193 n. 568).

13.         Le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 p. 193 ; 137 I 69 consid. 2.5.1 p. 72 s. ; 131 II 627 consid. 6.1 p. 637 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_151/2012 du 5 juillet 2012 consid. 4.2.1 et 2C_1023/2011 du 10 mai 2012 consid. 5).

14.         L'abus de droit consiste notamment à utiliser une institution juridique à des fins étrangères au but même de la disposition légale qui la consacre, de telle sorte que l'écart entre le droit exercé et l'intérêt qu'il est censé protéger soit manifeste (ATF 138 III 401 consid. 2.2 ; 137 III 625 consid. 4.3 ; 135 III 162 consid. 3.3.1 ; 132 I 249 consid. 5 ; 129 III 493 consid. 5.1).

Ce principe lie également les administrés. Ceux-ci ne doivent pas abuser d'une faculté que leur confère la loi en l'utilisant à des fins pour lesquelles elle n'a pas été prévue. Ce faisant, ils ne violent certes pas la loi, mais ils s'en servent pour atteindre un but qui n'est pas digne de protection (ATA/500/2011 du 27 juillet 2011 et les références citées).

15.         L’art. 137 al. 1 LCI prévoit qu’est passible d’une amende administrative de CHF 100.- à CHF 150'000.- tout contrevenant à la présente loi (let. a), aux règlements et arrêtés édictés en vertu de la présente loi (let. b), aux ordres donnés par le département dans les limites de la présente loi et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci (let. c).

Il est tenu compte, dans la fixation du montant de l’amende, du degré de gravité de l’infraction. Constituent notamment des circonstances aggravantes la violation de la loi par cupidité, les cas de récidive et l’établissement, par le mandataire professionnellement qualifié ou le requérant, d’une attestation au sens de l’art. 7 LCI non conforme à la réalité (art. 137 al. 3 LCI). La poursuite et la sanction administrative se prescrivent par sept ans (art. 137 al. 5 LCI).

16.         L’art. 137 al. 1 LCI érige la contravention aux ordres donnés par le département (let. c) en infraction distincte de la contravention à la LCI et à ses règlements d'application (let. a et b). De par sa nature, cette infraction est très proche de celle visée par l'art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP – RS 311.0) (insoumission à une décision de l'autorité). À l'instar de cette disposition pénale, la condamnation de l'auteur pour infraction à l'art. 137 al. 1 let. a LCI n'a pas pour effet de le libérer du devoir de se soumettre à la décision de l'autorité. S'il persiste dans son action ou son omission coupables, il peut être condamné plusieurs fois pour infraction à l'art. 137 al. 1 let. c LCI, sans pouvoir invoquer le principe ne bis in idem, dès lors que l'on réprime à chaque fois une autre période d'action ou d'omission coupables (Bernard CORBOZ, Les infractions en droit suisse, 3ème éd., 2010, vol. 2, n. 32 ad art. 292 CP p. 551). De plus, la sanction de l'insoumission peut être augmentée chaque fois qu'une menace de l'appliquer est restée sans effet (Blaise KNAPP, Précis de droit administratif, 4ème éd., 1991, n. 1'721 et les références citées ; ATA/147/2014 du 11 mars 2014 consid. 11).

17.         Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C'est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/263/2016 du 22 mars 2016 ; ATA/163/2014 du 18 mars 2014 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, 2011, p. 160 s. ch. 1.4.5.5).

18.         En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006
(LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du CP s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif, sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/611/2016 du 12 juillet 2016 consid. 10c et les références citées).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d'une simple négligence (ATA/886/2014 du 11 novembre 2014 ; ATA/147/2014 du 11 mars 2014).

19.         Selon la jurisprudence constante, l'administration doit faire preuve de sévérité afin d'assurer le respect de la loi et jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour infliger une amende, de sorte que le juge ne la censure qu'en cas d'excès (ATA/611/2016 précité ; ATA/824/2015 du 11 août 2015 ; ATA/147/2014 du 11 mars 2014).

20.         L'autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d'une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l'auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/611/2016 précité consid. 10c et les références citées ; ATA/824/2015 du 11 août 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_412/2014 du 27 janvier 2015 consid. 2.1 et les arrêts cités).

21.         L'amende doit faire l'objet d'une évaluation globale, dans laquelle l'autorité administrative qui sanctionne - partant le juge qui contrôle sa décision - doit prendre en compte, dans un calcul d'ensemble, la nature, la gravité et la fréquence des infractions (ATA/886/2014 du 11 novembre 2014 ; ATA/558/2013 du 27 août 2013 ; Günter STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrecht - Allgemeiner Teil II : Strafen und Massnahmen, 2ème éd., 2006, p. 75 § 75 ; Sandro CHIMICHELLA, Die Geldstrafe in Schweizer Strafrecht, 2006, p. 39).

22.         Enfin, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité garanti par l'art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
(Cst. - RS 101 ; cf. ATA/313/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/871/2015 du 25 août 2015 ; ATA/824/2015 du 11 août 2015), lequel commande que la mesure étatique soit nécessaire et apte à atteindre le but prévu et qu'elle soit raisonnable pour la personne concernée (cf. ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2 ; 139 I 218 consid. 4.3).

23.         En l'occurrence, le recourant ne conteste pas n’avoir pas respecté l’ordre du département du ______ 2022 et ses relances subséquentes, en ne fournissant pas le reportage photographique et l’attestation globale de conformité accompagnée des plans conformes à l’exécution, pour l’APA 6______, attestant de la bonne exécution de la totalité dudit ordre, dans le délai au 31 octobre 2024 imparti.

Son comportement est en soi objectivement constitutif de l'infraction réprimée par l'art. 137 al. 1 let. c LCI et peut donc donner lieu au prononcé d'une amende. Il résulte en outre des différents évènements précités que c'est assurément avec conscience et volonté qu’il n'a pas obtempéré dans le délai aux ordres du département, alors même que la décision y relative était entrée en force.

Le recourant se prévaut en vain de l’accord de médiation du ______ 2019 pour justifier son inaction. En effet, ainsi que l’a très justement relevé le département, cet accord ne concerne pas en tant que telle sa parcelle, se contentant d’envisager la cession d’une partie de celle-ci aux époux D______ et E______, si elle devait être mise en vente et pour autant que la FTI ou l'Etat l’acquière, ce qui ne s’est pas réalisé jusqu’alors et ne semble pas non plus être d’actualité. Dans ces conditions, le recourant en garde toujours la maîtrise (à tout le moins de fait) avec, notamment, les obligations en découlant en termes de respect des prescriptions du droit de la construction et de l’aménagement du territoire (perturbateur a minima par comportement), quand bien même il n’en est que nu-propriétaire. Dès lors, le département pouvait parfaitement exiger du recourant qu’il mette en œuvre complètement son ordre et lui apporte les preuves demandées. Il n’avait enfin pas à répondre à son courrier du 11 novembre 2024 qui ne lui était pas même adressé.

Partant, l’amende litigieuse doit être confirmée dans son principe.

S’agissant enfin de sa quotité, fixée à CHF 5'000.- et en soi pas contestée, le tribunal relève que le recourant a déjà été amendé à trois reprises pour ne pas s’être conformé à l’ordre du ______ 2022. Ces précédentes sanctions de CHF 500.-, 1'000.- et 1'500.- n’ont toutefois pas été en mesure de lui faire changer son comportement et se soumettre à la décision. C’est donc à juste titre que le département lui a infligé une amende supérieure à celle précédemment infligée, étant relevé que le montant fixé reste néanmoins tout à fait proportionné à la situation qui perdure depuis plus de trois ans à ce jour. Enfin, si le recourant indique certes être à l’assurance-invalidité, il ne démontre pas que le paiement de cette amende l’exposerait à des difficultés financières particulières.

24.         Au vu de ce qui précède, mal fondé, le recours sera rejeté.

25.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Le solde de cette avance en CHF 200.- lui sera restitué.

26.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.      déclare recevable le recours interjeté le 27 janvier 2025 par Monsieur A______ contre la décision du département du territoire du ______ 2024 ;

2.      le rejette ;

3.      met à la charge du recourant un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.      ordonne la restitution au recourant du solde de son avance de frais en CHF 200.- ;

5.      dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

6.      dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Julien PACOT et Oleg CALAME, juges assesseurs

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier