Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/1139/2024 du 18.11.2024 ( OCPM ) , REJETE
ATTAQUE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 18 novembre 2024
|
dans la cause
Monsieur A______, représenté par Me Lida LAVI, avocate, avec élection de domicile
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS
1. Monsieur A______, né le ______ 1985, est ressortissant français.
2. En date du 2 juillet 2024, M. A______ a déposé auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une demande d'autorisation de séjour en vue de son mariage avec Madame B______, ressortissante française au bénéfice d'une autorisation de séjour en Suisse.
3. Par décision du 8 juillet 2024, exécutoire nonobstant recours, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur la demande précitée au motif que M. A______ faisait l'objet d'une mesure d'expulsion de Suisse, entrée en force, prononcée le 30 août 2019 pour une durée de dix ans par le Tribunal correctionnel, en application de l'art. 66a al. 1 let. h du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0).
4. Par acte du 14 août 2024, M. A______, sous la plume de son conseil, a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), contre la décision précitée, concluant à son annulation et à ce que le dossier soit renvoyé à l'OCPM pour nouvelle décision, sous suite de frais et dépens.
Préalablement, il a sollicité, à titre de mesure provisionnelle, la restitution de l'effet suspensif.
Le couple avait initié une procédure auprès de l'office de l'État civil en vue de mariage. L'OCPM avait rendu sa décision sans l'avoir invité à se déterminer dans le cadre de son droit d'être entendu. La décision querellée contrevenait aux art. 8 et 12 CEDH et l'OCPM avait fait preuve d'arbitraire, de sorte qu'elle devait être annulée.
Concernant la restitution de l'effet suspensif, il n'existait aucun intérêt public prépondérant à son expulsion immédiate. Au contraire, et compte tenu des circonstances, l'intérêt public commandait de surseoir à l'exécution de son expulsion jusqu'à droit connu sur le sort du présent recours. À défaut, il serait amené à devoir quitter le territoire suisse sans délai, ce qui pourrait lui causer un dommage irréparable ainsi qu'à sa future épouse. Par ailleurs, il avait déposé en date du 14 août 2024, une demande en vue du report de l'expulsion obligatoire auprès de l'OCPM.
5. En date du 22 août 2024, l'OCPM a conclu au rejet du recours et s'est opposé à la restitution de l'effet suspensif.
Le recourant faisait l'objet d'une expulsion pénale pour une durée de dix ans en application de l'art. 66a al. 1 let. h CP. Or cette mesure entraînait la perte du titre de séjour et de tous les droits à séjourner en Suisse, l'obligation de quitter le pays et une interdiction d'entrée sur le territoire pour une certaine durée. L'autorisation de séjour prenait fin lorsque l'expulsion au sens de la disposition précitée entrait en force. De la même manière, le fait d'être frappé d'une expulsion obligatoire excluait d'emblée le droit à toute autorisation de séjour. Partant, il ne pouvait pas entrer en matière sur la demande d'autorisation de séjour de courte durée déposée par le recourant en vue de la célébration de son mariage en Suisse. En outre, le dépôt d'une demande de report de l'expulsion judiciaire n'avait aucune incidence sur ce qui précédait.
6. Le 2 septembre 2024, le recourant a répliqué sur la question de l'effet suspensif.
Jusqu'à droit connu sur sa demande de report de l'exécution de l'expulsion judiciaire, actuellement pendante auprès de l'OCPM, aucun motif ne s'opposait à ce qu'il puisse bénéficier de l'effet suspensif attaché au recours.
7. Par décision du 6 septembre 2024, le tribunal a rejeté la demande d'effet suspensif et de mesures provisionnelles au recours formée par M. A______.
8. Un recours contre cette décision a été interjeté auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), lequel est actuellement pendant.
9. En date du 16 septembre 20024, M. A______ a répliqué sur le fond.
Sa demande tendait à obtenir une autorisation en vue du mariage et non pas une autorisation de séjour. Contrairement une demande d'autorisation de séjour, la demande d'autorisation en vue du mariage relevait du droit du mariage et du droit à la vie privée au sens des art. 8 par. 1 et 12 CEDH. Le refus d'octroyer une autorisation en vue du mariage empêchait l'exercice de ses droits. L'autorité n'avait par ailleurs procédé à aucune pesée des intérêts en jeu. De surcroît, contrairement à ce que soutenait l'OCPM, sa demande de report de l'expulsion judiciaire tendait précisément à reporter l'exécution de cette mesure jusqu'à la célébration du mariage du recourant en Suisse.
10. En date du 7 octobre 2024, l'OCPM a dupliqué, précisant qu'il n'avait pas d'observations complémentaires à formuler.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Le recourant reproche à l’OCPM d’avoir violé son droit d’être entendu en ne l'invitant pas à se déterminer avant de prononcer la décision litigieuse.
4. Selon l'art. 41 LPA, les parties ont le droit d'être entendues par l'autorité compétente avant que ne soit prise une décision. Elles ne peuvent cependant prétendre à une audition verbale sauf dispositions légales contraires.
5. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse, du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, de produire des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (cf. ATF 142 II 218 consid. 2.3 et 140 I 285 consid. 6.3.1).
Il s'agit avant tout du droit des parties de faire valoir leur point de vue avant qu'une décision ne soit prise à leur détriment. Dans une procédure initiée sur requête d'un administré, celui-ci est censé motiver sa requête en apportant tous les éléments pertinents ; il n'a donc pas un droit à être encore entendu avant que l'autorité ne prenne sa décision, afin de pouvoir présenter des observations complémentaires (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème édition n° 1530 ss, p. 519 s ; ATA/523/2016 du 21 juin 2016 consid. 2b).
6. En l'espèce, il ressort du dossier qu’en date du 2 juillet 2024, le recourant, sous la plume de son conseil, a déposé une demande d’autorisation en vue du mariage à laquelle était joint un chargé de pièces. Il a donc eu l’occasion de motiver sa requête et partant de faire valoir son point de vue avant que l’OCPM ne prononce la décision contestée, étant rappelé qu'il lui appartenait à ce stade de fournir spontanément à l'autorité tous les éléments permettant à cette dernière de statuer sur sa demande. De plus, il apparaît que les éléments en possession de l'autorité intimée lui ont permis de former sa conviction et que cette dernière n’a pas estimé nécessaire de l’interpeller avant la prise de décision, étant rappelé que le recourant ne pouvait prétendre à son audition verbale, conformément à l’art. 41, 2ème phrase LPA.
Partant, ce grief sera rejeté.
7. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.
8. Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).
9. Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).
10. Le litige porte sur le refus de l'autorité intimée d'octroyer au recourant une autorisation de séjour temporaire en vue de son mariage avec une ressortissante française au bénéfice d'une autorisation de séjour en Suisse.
11. Selon l'art. 98 al. 4 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC; RS 210), les fiancés qui ne sont pas citoyens suisses doivent établir la légalité de leur séjour en Suisse au cours de la procédure préparatoire du mariage.
12. Il résulte dans ce cadre des art. 66 al. 2 let. e et 67 al. 3 de l'ordonnance fédérale du 21 avril 2004 sur l'état civil (OEC – RS 211.112.2) que l'office de l'état civil refuse de célébrer le mariage notamment si les fiancés qui ne sont pas citoyens suisses n'ont pas établi la légalité de leur séjour en Suisse.
13. L'entrée en vigueur de l’art. 98 al. 4 CC n’a pas entraîné de modification de la LEI et de ses ordonnances d'exécution, notamment l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative, du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), qui règlent l'entrée, le séjour et la sortie de Suisse des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI).
14. De nationalité française, le recourant est ressortissant communautaire. Toutefois, la LEI s'applique aux ressortissants des États membres de l'Union européenne lorsque l’Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP – RS 0.142.112.681) n’en dispose pas autrement ou lorsqu'elle prévoit des dispositions plus favorables (art. 2 al. 2 LEI).
15. Le recourant ne se prévaut ni d’un droit de demeurer (art. 4 annexe I ALCP), ni d’un droit au séjour sans exercice d’une activité économique (art. 24 par. 1 annexe I ALCP). Il invoque son droit à séjourner en Suisse pour y contracter mariage avec une ressortissante française au bénéfice d'une autorisation de séjour et vivre à ses côtés. Or, l’ALCP ne lui confère aucun droit à cet égard.
Partant, les dispositions de la LEI lui sont applicables.
16. À teneur de l'art. 17 LEI, l’étranger entré légalement en Suisse pour un séjour temporaire et qui dépose ultérieurement une autorisation de séjour durable doit attendre la délivrance de celle-ci à l’étranger (al. 1). L’autorité cantonale peut cependant l’autoriser à rester en Suisse durant la procédure si les conditions d’entrée sont manifestement remplies (al. 2).
17. Les art. 14 Cst et 12 de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH; RS 0.101) garantissent en principe le droit au mariage à toute personne physique majeure, quelle que soit sa nationalité – y compris les apatrides – et sa religion (ATF 138 I 41 consid. 4, 137 I 351 consid. 3.5 et les références). Dans la perspective d'une application de l'art. 98 al. 4 CC conforme à la Constitution et au droit conventionnel, les autorités de police des étrangers sont ainsi tenues de délivrer un titre de séjour en vue du mariage lorsqu'il n'y a pas d'indice que l'étranger entende, par cet acte, invoquer abusivement les règles sur le regroupement familial, et qu'il apparaît clairement que l'intéressé remplira les conditions d'une admission en Suisse après son union (cf. art. 17 al. 2 LEI). Il faut que les chances que l'autorisation soit délivrée apparaissent significativement plus élevées que celles qu'elle soit refusée (cf. ATF 139 I 37 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 2D_74/2015 du 28 avril 2016 consid. 2.2 et 2C_76/2013 du 23 mai 2013 consid. 2.3.2). Dans un tel cas, il serait disproportionné d'exiger de l'étranger qu'il rentre dans son pays pour s'y marier ou pour y engager à distance une procédure en vue d'obtenir le droit de revenir en Suisse pour se marier. En revanche, si, en raison des circonstances – notamment de la situation personnelle de l'étranger –, il apparaît d'emblée que ce dernier ne pourra pas, même une fois marié, être admis à séjourner en Suisse, l'autorité de police des étrangers peut renoncer à lui délivrer une autorisation de séjour provisoire en vue du mariage; il n'y a en effet pas de raison de lui permettre de prolonger son séjour en Suisse pour s'y marier alors qu'il ne pourra de toute façon pas, par la suite, y vivre avec son conjoint (cf. ATF 139 I 37 consid. 3.5.2 p. 48; 138 I 41 consid. 4 p. 46 s.; 137 I 351 consid. 3.7 p. 360; aussi arrêts 2C_107/2018 du 19 septembre 2018 consid. 4.3 et 2C_386/2018 du 15 juin 2018 consid. 3.3).
18. Ceci conduit nécessairement à se demander si les conditions de fond qui président à l’octroi d’une autorisation de séjour « ordinaire », c’est-à-dire d’un titre non limité à la préparation et la célébration du mariage, seraient réunies en cas de mariage (arrêt du Tribunal fédéral 2C_950/2014 du 9 juillet 2015 consid. 4.2 et les références citées).
Si en raison des circonstances, notamment de la situation personnelle de l’étranger, il apparaît d’emblée que ce dernier ne pourra pas, même une fois marié, être admis à séjourner en Suisse, les autorités compétentes en matière de migration renonceront à délivrer une autorisation de séjour provisoire en vue du mariage (arrêt 2C_977/2012 du 15 mars 2013 consid. 3.1).
19. Par ailleurs, l'art. 30 al. 1 let. b LEI – en relation avec l'art. 31 OASA – prévoit qu'il est possible de déroger aux conditions d'admission (art. 18 à 29) dans le but de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité. Cette disposition permet également de délivrer une autorisation de séjour en vue de préparer le mariage, aux conditions indiquées au paragraphe précédent. En particulier, les conditions du regroupement familial ultérieur doivent être remplies (par exemples moyens financiers suffisants, absence d’indices de mariage de complaisance, aucun motif d’expulsion (cf. ch. 5.6.5 des Directives et commentaires édictés par le Secrétariat d'État aux migrations dans le domaine des étrangers [Directives LEI], dans leur version actualisée au 1er juin 2024). Au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, une dérogation peut en outre être accordée et une autorisation de séjour délivrée à un étranger en concubinage pour autant qu'il démontre une relation stable d'une certaine durée. Sous cet angle également, il ne doit toutefois exister aucune violation de l'ordre public par analogie avec l'art. 51 LEI (arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud, PE.2023.0135 du 20 février 2024 consid. 3b et les références citées).
20. La jurisprudence relative au droit et au respect de la vie privée et familiale (art. 13 Cst. et 8 par. 1 CEDH) permet, à certaines conditions, à un célibataire étranger de déduire un droit à une autorisation de séjour en présence d'indices concrets d'un mariage sérieusement voulu et imminent avec une personne ayant le droit de résider durablement en Suisse (cf. ATF 137 I 351 consid. 3.2 ; arrêts du TF 2C_97/2010 du 4 novembre 2010 consid. 3.1 et 2C_25/2010 du 2 novembre 2010 consid. 6.1 et les références citées).
Les relations familiales protégées par l'art. 8 par. 1 CEDH sont avant tout les rapports entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant ensemble (cf. ATF 127 II 60 consid. 1d/aa). Les fiancés ou les concubins ne sont en principe pas habilités à invoquer l'art. 8 CEDH ; ainsi, l'étranger fiancé à une personne ayant le droit de s'établir en Suisse ne peut, en règle générale, pas prétendre à une autorisation de séjour, à moins que le couple n'entretienne depuis longtemps des relations étroites et effectivement vécues et qu'il n'existe des indices concrets d'un mariage sérieusement voulu et imminent (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_220/2014 du 4 juillet 2014 consid. 3.1 et 2C_792/2012 du 6 juin 2013 consid. 4).
Il n'y a pas d'atteinte à la vie familiale si l'on peut attendre des membres de la famille qu'ils réalisent leur vie de famille à l'étranger, l'art. 8 CEDH n'étant pas a priori violé si le membre de la famille jouissant d'un droit de présence en Suisse peut quitter ce pays sans difficultés avec l'étranger auquel une autorisation a été refusée (ATF 140 I 145 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 2C_165/2014 du 18 juillet 2014 consid. 4.1). En revanche, si le départ du membre de la famille pouvant rester en Suisse ne peut d'emblée être exigé sans autres difficultés, il convient de procéder à la pesée des intérêts prévue par l'art. 8 par. 2 CEDH, en tenant compte de l'ensemble des circonstances et de mettre en balance l'intérêt privé à l'obtention d'un titre de séjour et l'intérêt public à son refus (ATF 140 I 145 consid. 3.1; arrêts du Tribunal fédéral 2C_797/2014 du 13 février 2015 consid. 4.1; 2C_165/2014 précité consid. 4.1; ATA/345/2015 du 14 avril 2015 consid. 6.c).
21. Une ingérence dans l'exercice du droit au respect de sa vie privée et familiale est possible, selon l'art. 8 par. 2 CEDH pour autant qu'une telle mesure soit notamment nécessaire à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, ce qui implique une pesée des intérêts en présence et l'examen de la proportionnalité de la mesure (ATF 135 II 377 consid. 4.3; 135 I 153 consid. 2.1 et 2.2; ATA/345/2015 du 14 avril 2015 consid. 6.d).
22. L'art. 61 al. 1 let. e LEI prévoit que l'autorisation de séjour de l'étranger prend fin lorsque l'expulsion au sens de l'art. 66a CP ou 49a du Code pénal militaire du 13 juin 1927 (CPM - RS 321.0) entre en force.
De la même manière, le fait d'être frappé d'une expulsion obligatoire exclut d'emblée l'octroi de toute autorisation de séjour (Arrêt du Tribunal fédéral 6B_884/2022 du 20 décembre 2022 consid. 3.1).
23. Selon l'art. 66d al. 1 CP, l'exécution de l'expulsion obligatoire selon l'art. 66a CP peut être reportée lorsque des règles impératives du droit international s'opposent à l'expulsion.
À ce propos, le législateur était conscient du fait que les étrangers expulsés du pays ne disposent plus d'un droit de séjour, même en cas de report de l'exécution (Message du Conseil fédéral 26 juin 2013 concernant une modification du code pénal et du code pénal militaire [Mise en oeuvre de l'art. 121, al. 3 à 6, Cst. relatif au renvoi des étrangers criminels], in FF 2013 5373, ch. 1.2.10 p. 5403 s.). Il a été considéré que cette situation était une conséquence directe de la nouvelle disposition constitutionnelle (art. 121 al. 3 à 6 Cst.) et que rien ne justifiait de privilégier les personnes frappées d'une expulsion par rapport à celles auxquelles une admission provisoire avait été refusée en vertu de l'art. 83 al. 7 LEI (Message précité, ch. 1.2.10 p. 5403 s.).
24. Aux termes de l'art. 96 al. 1 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son intégration.
25. Traditionnellement, le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance (rapport raisonnable) les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 126 I 219 consid. 2c ; 125 I 474 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P. 269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/1395/2019 du 17 septembre 2019 consid. 5b ; ATA/735/2013 du 5 novembre 2013 consid. 11).
26. En l’espèce, les conditions légales précitées qui permettraient au recourant de séjourner en Suisse – même temporairement en vue du mariage – ne sont manifestement pas remplies, le recourant étant privé de tout titre de séjour et de tout droit à séjourner en Suisse. Le fait qu'une demande de report d'expulsion soit en cours n'y change rien. En effet, l'expulsion obligatoire entrée en force – dont il fait l'objet depuis 2019 – empêche l'octroi de tout titre de séjour en sa faveur. Il ne revient au demeurant ni à l'autorité intimée ni au tribunal de céans de remettre en cause le jugement du Tribunal correctionnel ordonnant son expulsion. Il s’ensuit que le recourant ne peut dans le cas d’espèce se prévaloir de l’art. 14 Cst. pour obtenir une autorisation de séjour temporaire en vue de mariage, dès lors qu’il ne pourra séjourner durablement dans le pays.
Compte tenu de ce qui précède, c’est à juste titre que l’autorité intimée a retenu que les conditions de la délivrance d’une autorisation en vue de mariage au recourant au sens des art. 30 let. b LEI en relation avec l’art. 31 OASA n’étaient pas remplies.
En lien avec les art. 12 CEDH et 14 Cst., le refus d'autorisation de séjour en vue de mariage prononcé par les autorités cantonales ne porte enfin pas une atteinte disproportionnée au droit au mariage du recourant, quoi qu'il prétende dans ses écritures. En effet, rien n'indique que les démarches en vue du mariage ne pourraient pas être poursuivies depuis la France ou que le couple n'aurait aucune possibilité juridique de se marier dans un pays autre que la Suisse, notamment en France. On ne se trouve dès lors pas dans une situation où une éventuelle tolérance de séjour en vue du mariage indépendamment du point de savoir si les futurs époux auraient ensuite le droit de mener leur vie conjugale ou familiale en Suisse devrait être envisagée, afin que soit garantie la substance du droit au mariage (cf. sur ce cas de figure, arrêts 2C_107/2018 du 19 septembre 2018 consid. 4.9; 2C_950/2014 du 9 juillet 2015 consid. 6.2 et 6.4; 2C_962/2013 du 13 février 2015 consid. 3).
L'examen du cas sous l'angle de l'art. 8 CEDH conduit à la même conclusion, cette disposition ne conférant notamment pas un droit à séjourner dans un État déterminé (ATF 139 I 330 consid. 2.1 ; 135 I 143 consid. 1.3.1 ; 135 I 153 consid. 2.1 ; cf. également JTAPI/1310/2023 précité consid. 30 et ss les concernant). D'ailleurs, rien n'empêche le recourant et sa compagne, tous deux originaires de France de réaliser leur vie de couple dans ce pays, étant au surplus relevé que la compagne du recourant ne pouvait ignorer la mesure dont celui-ci faisait l'objet, et devait à tout le moins s'attendre à ce que leur vie ensemble ne se poursuive pas en Suisse.
27. Partant, c'est conformément au droit, y compris au droit constitutionnel et à la CEDH, que l'OCPM a refusé de leur délivrer une autorisation de séjour en vue du mariage. Ce faisant, il n’a pas abusé ni mésusé de son pouvoir d'appréciation, ni encore violé le principe de proportionnalité.
28. En conséquence, mal fondé, le recours sera rejeté et la décision attaquée confirmée.
29. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 650.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
30. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 15 août 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 8 juillet 2024 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge du recourant, un émolument de CHF 650.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.
Genève, le |
| La greffière |