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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/923/2022

ATA/1230/2022 du 06.12.2022 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/923/2022-FORMA ATA/1230/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 6 décembre 2022

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

SERVICE DES BOURSES ET PRÊTS D'ÉTUDES

 



EN FAIT

1) Le 13 août 2021, Madame A______, née le ______ 1967, a formé auprès du service des bourses et prêts d'études (ci-après : SBPE) une demande de bourse ou prêt d'études pour l'année scolaire 2021/2022.

La formation concernée par la demande était un baccalauréat universitaire (ci-après : BU) en sciences économiques à B______ (ci-après : B______), sise au Tessin. Mme A______ a aussi coché les cases « à plein temps » et « reconversion professionnelle ». Elle était déjà immatriculée à B______ et inscrite à la formation précitée.

Dans la rubrique « Vos formations », elle a mentionné avoir obtenu en 2002 un brevet fédéral de dessinatrice en bâtiment en Italie, et en 2017 un « Master conception BIM », aussi en Italie. Dans la rubrique « Vos activités professionnelles », elle a détaillé les cinq périodes d'emploi qu'elle avait eues entre septembre 2009 et juin 2020, soit deux ans dans une entreprise immobilière, deux mois dans un bureau d'ingénieurs, deux ans et onze mois dans un cabinet d'architectes, six mois dans un second bureau d'ingénieurs, et deux ans et dix mois dans une bibliothèque municipale.

2) Dans un courriel du 17 août 2021 adressé au SBPE, Mme A______ a expliqué en détail pourquoi elle voulait étudier à B______ et pourquoi elle ne trouvait pas de travail dans sa branche et s'était décidée à effectuer une reconversion professionnelle.

3) Par courriel du 19 août 2021, le SBPE a indiqué à Mme A______ qu'il refuserait d'entrer en matière sur le financement de sa formation au titre de la reconversion professionnelle.

4) Par décision du 3 décembre 2021, le SBPE a alloué à Mme A______ une bourse de CHF 20'000.- pour l'année académique, en deux tranches égales.

5) Le 31 décembre 2021, Mme A______ a formé réclamation contre la décision précitée. Elle avait sollicité une bourse pour reconversion professionnelle, laquelle se montait à CHF 40'000.-.

6) Par décision sur réclamation du 24 février 2022, le SBPE a confirmé sa décision d'octroyer une première bourse d'études de CHF 20'000.- pour l'année académique 2021/2022 et de refuser de reconnaître la reconversion professionnelle de Mme A______ au sens de l'art. 11 al. 1 let. e de la loi sur les bourses et prêts d'études du 17 décembre 2009 (LBPE - C 1 20).

La reconversion professionnelle devait être en lien avec les évolutions structurelles du marché de l'emploi ou la conjoncture économique, ou rendue nécessaire pour raisons de santé. Aucun élément donné dans son courriel du 17 août 2021 ne pouvait motiver une telle reconversion professionnelle. Son parcours professionnel et ses qualifications académiques étaient jugées suffisantes pour trouver un emploi dans son domaine d'activité. Il lui avait ainsi été suggéré de demander un chèque annuel de formation pour améliorer sa maîtrise du français et de l'anglais, qui étaient des obstacles dans ses recherches d'emploi.

De plus, en date du 7 juin 2017, une décision négative lui avait été adressée par l'office régional de placement (ci-après : ORP) en réponse à une demande de sa part de formation complémentaire, ceci au motif que sa formation et son expérience professionnelle devaient lui permettre de s'insérer professionnellement.

7) Par acte du 23 mars 2022, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, sans prendre de conclusions formelles.

Elle avait communiqué à la direction du SBPE les raisons de sa reconversion professionnelle. Après le passage du secteur de la construction à la numérisation avec la méthode « Building Information Modelling » (ci-après : BIM), elle s'était retrouvée pendant plusieurs années à résoudre le problème de l'acquisition de compétences techniques pour réintégrer le marché du travail. Le codage était devenu une compétence aussi évidente que la lecture et l'écriture. C'était « le mirage d'un avenir meilleur et plus que la dernière mode en matière d'éducation : la terre promise pour éviter les sables mouvants du chômage dans lesquels [elle était] coincée que pour dynamiser [sa] carrière professionnelle ».

Pour le surplus, elle reprenait chronologiquement toutes les étapes de la procédure. Le 25 juin 2021, elle avait reçu un appel téléphonique du directeur du SBPE, confirmé dans un courriel, qui lui avait indiqué que son projet de reconversion pourrait lui donner droit à une bourse d'études allant jusqu'à CHF 40'000.-, et être dans l'attente de sa demande de bourse.

8) Le 5 mai 2022, le SBPE a conclu au rejet du recours.

Le 18 août 2021, la demande de Mme A______ avait été soumise au groupe d'experts en matière de reconversion, à la lumière d'une directive interne, qu’il joignait. Le groupe avait conclu que la reconversion de Mme A______ ne se justifiait pas car elle était déjà au bénéfice d'un bagage académique et d'une expérience suffisants pour trouver un emploi dans un secteur qui n'était pas connu pour être en difficulté. Le SBPE avait suivi ce préavis négatif.

Mme A______ visait un BU en économie. Elle avait indiqué que c'était dans le but spécifique d'acquérir des compétences pour la gestion de projets « SMART Cities » en appliquant la technique de la Blockchain. Or, en entamant des études à 55 ans, Mme A______ obtiendrait son BU à 58 ans. La gestion de projets « SMART Cities » offrait peu d'occasions d'emploi et le profil recherché dans ce domaine correspondait à celui d'ingénieur, si bien que le BU en économie n'allait pas lui permettre de concrétiser son projet. Elle allait de plus se heurter à une concurrence mieux formée et plus jeune.

Quant au choix de la formation en Suisse italienne, aucun des arguments mis en avant ne pouvait être retenu. Des formations similaires étaient en effet disponibles à Genève. Il était probable qu'elle avait opté pour B______ en raison de sa parfaite maîtrise de l'italien, contrairement au français, ce qui était certainement la principale raison qui compliquait ses recherches d'emploi en Suisse romande.

9) Le 17 mai 2022, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 17 juin 2022, par la suite reporté au 2 septembre 2022, pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

10) Par courrier du 17 juin 2022, Mme A______ a, en même temps que le report du délai précité, demandé l'apport du procès-verbal de la réunion du groupe d'experts ayant préavisé négativement sa demande.

11) Le 23 juin 2022, le SBPE a indiqué qu'il ne s'agissait pas d'une commission officielle, de telle sorte qu'il n'existait pas de procès-verbal. La décision était portée par le SBPE.

12) Le 2 septembre 2022, Mme A______ a persisté dans ses conclusions. Elle n'avait jamais reçu de décision négative pour sa demande de reconversion professionnelle du 13 août 2021, ni le procès-verbal du groupe d'experts mentionné dans la réponse du SBPE.

Elle joignait trois courriels lui ayant été adressés, l'un du 7 juin 2017 de l'office cantonal de l'emploi rejetant sa demande pour une simple remise à niveau sur un logiciel de conception et d'ingénierie 3D, le deuxième du 1er septembre 2022 d'un expert en construction et génie civil de la Fondation pour la formation des adultes à Genève (ci-après : Ifage) lui confirmant qu'il n'y avait pas d'école accréditée dans le canton de Genève pour délivrer des qualifications académiques sur la méthode BIM, et le troisième du 23 novembre 2021 du médiateur administratif genevois lui confirmant que son dossier déposé auprès du SBPE était complet.

13) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La recourante se plaint dans un premier temps de ne pas avoir reçu de décision négative pour sa demande de reconversion professionnelle du 13 août 2021, ni le procès-verbal du groupe d'experts mentionné dans la réponse du SBPE.

a. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références citées).

b. Le droit de consulter le dossier est un aspect du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 132 II 485 consid. 3.2). Selon la jurisprudence, le justiciable ne peut pas exiger la consultation de documents internes à l'administration, à moins que la loi ne le prévoie expressément (ATF 125 II 473 consid. 4a ; 122 I 153 consid. 6a). Il s'agit des notes dans lesquelles l'administration consigne ses réflexions sur l'affaire en cause, en général afin de préparer des interventions et décisions nécessaires. Il peut également s'agir de communications entre les fonctionnaires traitant le dossier. Cette restriction du droit de consulter le dossier doit de manière normale empêcher que la formation interne de l'opinion de l'administration sur les pièces déterminantes et sur les décisions à rendre soit finalement ouverte au public. Il n'est en effet pas nécessaire à la défense des droits des administrés que ceux-ci aient accès à toutes les étapes de la réflexion interne de l'administration avant que celle-ci ait pris une décision ou manifesté à l'extérieur le résultat de cette réflexion (ATF 115 V 297 consid. 2g ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_685/2018 du 22 novembre 2019 consid. 4.4.2).

Le principe de l'accès au dossier figure à l'art. 44 LPA, alors que les restrictions sont traitées à l'art. 45 LPA. Ces dispositions n'offrent pas de garantie plus étendue que l'art. 29 Cst. (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 145 n. 553 et l'arrêt cité).

c. L'art. 15 al. 1 de la loi sur les commissions officielles du 18 septembre 2009 (LCOf - A 2 20) prévoit que toutes les séances de commission et de sous-commissions font l'objet de procès-verbaux, qui ne sont pas publics. Ces derniers constituent des projets de décisions et se rapportent uniquement à la formation de l'opinion des membres de l'autorité. Ils ne peuvent dès lors pas être transmis aux parties (ATA/940/2021 du 14 septembre 2021 consid. 5). Le règlement sur les commissions officielles du 10 mars 2010 (RCOf - A 2 20.01) recense exhaustivement lesdites commissions pour le canton de Genève.

d. En l'espèce, si la décision d'octroi de bourse à hauteur de CHF 20'000.- rejetait seulement de manière implicite la demande de reconversion professionnelle, ce refus a été formalisé dans la décision sur réclamation objet du présent recours, si bien que la recourante ne saurait être suivie lorsqu'elle dit ne jamais avoir reçu de décision sur ce point, dès lors que c'est précisément cet aspect de la décision attaquée qu'elle a contesté.

Quant au « procès-verbal du groupe d'experts », force est de constater que ce dernier n'est pas une commission officielle et n'a pas d'obligation de tenir un procès-verbal. Même s'il en était une, suivant la jurisprudence précitée, ses procès-verbaux ne pourraient pas être transmis aux parties dès lors qu'il s'agit de préavis. Enfin, le contenu de la réunion a été résumé par l'intimé dans sa réponse, du moins en ce qui concerne la teneur matérielle des opinions émises.

Il n'y a donc pas eu de violation du droit d'être entendu de la recourante.

3) La recourante se plaint ensuite, toujours en substance, d'une violation du principe de la bonne foi.

a. Le principe de la bonne foi entre administration et administré exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst. exige que l’une et l’autre se comportent réciproquement de manière loyale (arrêts du Tribunal fédéral 6B_266/2020 du 27 mai 2020 ; 1C_173/2017 du 31 mars 2017 consid. 2.3). En particulier, l’administration doit s’abstenir de toute attitude propre à tromper l’administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_227/2015 du 31 mai 2016 consid. 7).

b. Valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2). Selon la jurisprudence, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (1) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, (2) qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (3) que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore (4) qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et (5) que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_617/2019 du 27 mai 2020 consid. 4.1).

c. En l'espèce, la recourante ne fournit aucun élément probant permettant de retenir qu'une assurance lui a été donnée de voir son projet de reconversion professionnelle admis et une bourse de CHF 40'000.- octroyée. Même la teneur du courriel telle qu'elle le présente dans son recours (« Je vous confirme que votre projet de reconversion pourrait vous donner droit à une bourse d'études jusqu'à CHF 40'000.-. En espérant recevoir prochainement votre demande [ ] ») ne peut être interprétée ainsi. Enfin, la confirmation qu’elle avait fourni un dossier complet au SBPE ne voulait nullement dire que sa demande allait être acceptée, mais uniquement que toutes les pièces nécessaires à la prise de décision de l'intimé avaient été déposées.

Le grief sera dès lors écarté.

4) La recourante invoque matériellement une violation de l'art. 11 LBPE.

a. Les bourses d'études sont des prestations uniques ou périodiques non remboursables, qui permettent aux bénéficiaires d'entreprendre, de poursuivre ou de terminer une formation (art. 4 al. 1 LBPE).

Les prêts sont des prestations uniques ou périodiques, qui doivent être remboursées à la fin de la formation ou en cas d'interruption ou d'échec de la formation (art. 4 al. 2 LBPE).

b. Aux termes de l’art. 5 LBPE, les aides financières sont accordées sous forme de bourses, de prêts ou de remboursement de taxes (al. 1). Demeurent réservés les cas qui, au sens de l'art. 26 LBPE, peuvent donner lieu à une conversion des prêts en bourses d'études (al. 2).

c. L’art. 11 LBPE liste les formations pouvant donner lieu à une bourse (al. 1) ou à un prêt (al. 2).

Les travaux préparatoires relatifs au projet de loi 10’524 ayant conduit à l’adoption de la LBPE (exposé des motifs - MGC 2008-2009 XI/2, p. 14'907 ss, en particulier p. 14'933-14'934) précisent à propos de l'art. 11 al. 1 LBPE que sont financées par des bourses les formations sanctionnées par les examens professionnels et professionnels supérieurs fédéraux, les écoles supérieures, les hautes écoles spécialisées (ci-après : HES) et les universités jusqu'à l'obtention du baccalauréat universitaire, ainsi que les formations du secteur secondaire II qui permettent d'obtenir un diplôme de fin d'études gymnasiales ou un diplôme de fin d'études des écoles de culture générale. Sont également financés par une bourse la formation professionnelle initiale, le certificat fédéral de capacité (ci-après : CFC) et la maturité professionnelle.

Quant au second alinéa de ce même article, il y est expliqué que le projet de loi permet d'octroyer une bourse à un apprenti qui souhaite obtenir un CFC de cuisinier car il s'agit d'une formation initiale de niveau secondaire II. Si cette personne désire ensuite faire un CFC de boulanger, elle ne pourra pas bénéficier d'une bourse, mais d'un prêt car il s'agit d'une deuxième formation initiale de niveau secondaire II. Il en va de même pour une personne qui entreprendrait une formation d'infirmière (formation initiale HES) et qui souhaiterait ensuite entamer une formation de sage-femme (deuxième formation HES). Les deuxièmes formations de base sont financées par des prêts remboursables. En effet, l'obligation subsidiaire de l'État de financer la formation ne peut aller au-delà du financement d'une première formation qui permet d'intégrer le monde du travail (MGC 2008-2009 XI/2, p. 14'933-14'934 ; ATA/364/2019 du 2 avril 2019 consid. 4b).

d. Selon l'art. 11 al. 1 let. e LBPE, la reconversion rendue nécessaire par la conjoncture économique ou pour des raisons de santé, pour autant qu'elle ne soit pas financée par une assurance sociale, peut donner droit à une bourse (art. 11 al. 1 let. e LBPE). Le montant maximum annuel des bourses ou prêts d’études s’élève à CHF 40'000.- en cas de reconversion professionnelle définie à l’art. 11 LBPE (art. 22 al. 1 let. b LBPE).

e. En matière administrative, les faits doivent en principe être établis d'office et, dans la mesure où l'on peut raisonnablement exiger de l'autorité qu'elle procède à cette recherche, les règles sur la répartition du fardeau de la preuve ne s'appliquent pas. Il n'en demeure pas moins que, lorsque les preuves font défaut, ou si l'on ne peut raisonnablement exiger de l'autorité qu'elle les recueille, la règle de l'art. 8 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) est applicable par analogie. Pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (ATF 112 Ib 65 consid. 3 ; ATA/278/2021 du 2 mars 2021 consid. 6 ; ATA/1240/2018 du 20 novembre 2018 consid. 6).

5) En l'espèce, la recourante ne fait valoir aucune raison de santé motivant sa reconversion, si bien que seule la condition selon laquelle cette dernière doit être rendue nécessaire par la conjoncture économique entre en ligne de compte. S'agissant de la revendication du droit à une bourse, il incombait à la recourante de prouver que sa reconversion était rendue nécessaire par la conjoncture. Or non seulement elle n'a nullement étayé ses recherches d'emploi (ATA/610/2020 du 23 juin 2020 consid. 6b), ni le manque de places de travail dans le secteur économique dans lequel elle dispose d'une formation et d'une expérience professionnelle, mais elle s'est contentée d'assertions très générales sur la nécessité de passer au numérique.

Les arguments présentés par l'intimé apparaissent par ailleurs pertinents. La recourante aurait 58 ans lors de l'obtention de son BU. Celui qu'elle brigue est en économie, et l'on ne voit pas comment un tel diplôme, non complété par une maîtrise universitaire, lui permettrait de mieux s'insérer dans le marché du travail, et dans quel secteur précis, ni même comment elle pourrait dans ce cadre acquérir les compétences spécifiques au type de gestion de projets qu'elle a elle-même défini comme son objectif.

Dans ces conditions, le refus d'admettre la demande de bourse déposée par la recourante comme reconversion professionnelle au sens de l'art. 11 al. 1 let. e LBPE est conforme au droit. Le recours, mal fondé, sera ainsi rejeté.

6) Vu la matière concernée, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l'issue du litige, il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 mars 2022 par Madame A______ contre la décision sur réclamation du service des bourses et prêts d'études du 24 février 2022 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ ainsi qu'au service des bourses et prêts d'études.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Rodriguez Ellwanger

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :