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27/10/25 Echo des tribunaux Quand une clause contractuelle ambiguë doit être interprétée en défaveur de son auteur

Un arrêt du Tribunal fédéral a tranché un différend opposant une société locataire de locaux commerciaux à son bailleur, à propos de la portée d’une clause de résiliation insérée dans un contrat de bail.

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Un contrat prévoit en son article 3 que le bail est conclu pour cinq ans, du 1er décembre 2017 au 30 novembre 2022. Le locataire peut toutefois le résilier le 1er décembre 2018, à condition de respecter un préavis de six mois. À la fin de la période initiale, le bail se renouvelle automatiquement d’année en année, sauf si l’une des parties le résilie au moins six mois avant l’échéance du bail.

Estimant que cette clause lui permettait de mettre fin au contrat en tout temps après une année, la société locataire a résilié pour le 31 juillet 2020. La bailleresse, pour sa part, considérait que la résiliation n’était possible qu’une seule fois, au terme de la première année, soit pour le 30 novembre 2018. Elle a donc réclamé les loyers jusqu’à l’échéance contractuelle du 30 novembre 2022.

Le Tribunal des baux a donné raison à la locataire: la résiliation était valable et le bail avait pris fin le 31 juillet 2020. Mais la Cour d’appel civile vaudoise a réformé ce jugement, estimant que la clause ne permettait qu’une seule résiliation anticipée après la première année.

Saisi du recours, le Tribunal fédéral a passé en revue les règles d’interprétation des contrats déduites de l’article 18 CO: le juge doit d’abord rechercher la réelle et commune intention des parties, sur la base d’indices, tels que leurs déclarations de volonté, le contexte général, leur comportement ultérieur… Cette interprétation dite subjective relève du fait. Si la volonté réelle des parties ne peut pas être établie ou si les volontés intimes divergent, le juge doit interpréter les déclarations et comportements des parties selon le principe de la confiance, en recherchant comme une déclaration ou une attitude pouvait de bonne foi être comprise en fonction de l’ensemble des circonstances.  Le sens d’un texte, apparemment clair, n’est pas forcément déterminant, de sorte que l’interprétation purement littérale est prohibée. La détermination de la volonté objective des parties, selon le principe de la confiance, est une question de droit. Lorsque l'interprétation ainsi dégagée laisse subsister un doute sur leur sens, les clauses contractuelles doivent être interprétées en défaveur de leur auteur, conformément à la règle dite des clauses ambiguës.

Le Tribunal fédéral a finalement jugé que la clause litigieuse était ambiguë et pouvait raisonnablement être comprise dans les deux sens. Conformément à la règle in dubio contra stipulatorem – selon laquelle une clause obscure s’interprète contre celui qui l’a rédigée –, il a retenu l’interprétation favorable à la locataire: celle-ci pouvait résilier après une année en tout temps, moyennant un préavis de six mois.

Le bail ayant ainsi pris fin le 31 juillet 2020, la demande de la bailleresse en paiement des loyers postérieurs a été rejetée.

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