Skip to main content

Décisions | Sommaires

1 resultats
C/3786/2020

ACJC/1148/2020 du 24.08.2020 sur OTPI/274/2020 ( SP ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 02.10.2020, rendu le 26.10.2020, IRRECEVABLE, 4A_512/2020
Normes : CPC.261; CO.418v; CO.418u
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3786/2020 ACJC/1148/2020

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du LUNDI 24 AOÛT 2020

 

Entre

A______ SARL, sise rue ______, ______ Genève, appelante d'une ordonnance rendue par le Tribunal de première instance le 4 mai 2020, comparant par Me Lauris Loat, avocat, avenue de Rumine 64, case postale 5793, 1002 Lausanne (VD), en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

B______ AG, sise ______, ______ (ZG), intimée, comparant par Me Patricia Spack Isenrich, avocate, avenue Général-Guisan 64, case postale 7399, 1002 Lausanne-Pully (VD), en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTPI/274/2020 du 4 mai 2020, reçue par les parties le 11 mai 2020, le Tribunal de première instance a rejeté la requête de mesures provisionnelles formée le 21 février 2020 par A______ SARL à l'encontre de B______ AG (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 1'500 fr., mis à la charge de A______ SARL et compensés avec l'avance de frais effectuée par celle-ci (ch. 2 à 4), condamné A______ SARL à verser à B______ AG 1'200 fr. à titre de dépens (ch. 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

B. a. Par acte expédié le 14 mai 2020 à la Cour de justice, A______ SARL forme appel contre l'ordonnance précitée, dont elle requiert l'annulation. Elle conclut, avec suite de frais, principalement, à l'admission des conclusions de sa requête du 21 février 2020 et, subsidiairement, au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Elle produit une pièce nouvelle, à savoir une page Internet consultée le 12 mai 2020 intitulée "Conservation, suppression et destruction de données dans Office 365" (pièce 10). Elle forme trois allégués nouveaux fondés sur cette pièce (allégués 22 à 24).

b. Par arrêt du 15 mai 2020, la Cour a rejeté la requête de A______ SARL tendant à la suspension de l'effet exécutoire attaché à l'ordonnance attaquée et dit qu'il serait statué sur les frais dans l'arrêt rendu sur le fond.

c. Dans sa réponse du 15 juin 2020, B______ AG conclut, avec suite de frais, à la confirmation de l'ordonnance attaquée.

d. Dans sa réplique du 29 juin 2020, A______ SARL persiste dans ses conclusions.

Elle produit 10 pièces nouvelles, à savoir des messages électroniques datés de 2017 et 2019 (pièces 14 à 18), deux extraits du Registre de commerce du canton de Zoug concernant l'entreprise individuelle "C______" et la société D______ GMBH (pièce 19 et 21), un extrait du site Internet "E______" consulté le 25 juin 2020 (pièce 20), une "Plaquette de présentation de l'activité de la société D______ Gmbh" non datée (pièce 22) et un "Extrait relatif à la société "F______" basée à G______, en Espagne" consulté en ligne le 25 juin 2020 (pièce 23). Elle forme des allégués nouveaux fondés sur ces pièces (pages 3 à 5 de la réplique). Elle allègue entre autres que "les administrateurs de l'intimée ont également des parts dans d'autres sociétés" (réplique, p. 4). Il résulte des extraits du registre du commerce du canton de Zoug que deux administrateurs de B______ AG sont respectivement titulaire et fondée de pouvoir de l'entreprise "C______" et que deux administratrices de B______ AG sont respectivement associée et fondée de pouvoir de D______ GMBH.

e. Dans sa duplique du 8 juillet 2020, B______ AG persiste dans ses conclusions.

Elle soulève l'irrecevabilité des allégations et pièces nouvelles de A______ SARL, en réponse desquelles elle forme des allégués nouveaux.

f. Les parties ont été informées le 9 juillet 2020 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour, notamment de l'ordonnance attaquée, contre laquelle aucun grief de constatation inexacte des faits n'est soulevé.

a. En mai 2017, A______ SARL, sise à Genève et dont le but est la prestation de services en relation avec le consulting et le marketing, et B______ AG, sise à Zoug et active notamment dans la fabrication et la vente d'appareils ménagers ont conclu un contrat d'agence oral.

A______ SARL s'est engagée à gérer la clientèle existante de B______ AG et à démarcher de nouveaux clients en Suisse romande, moyennant une rémunération basée uniquement sur les ventes réalisées et non pas sur la recherche de prospects.

b. B______ AG a créé l'adresse e-mail H______@______ à l'attention de I______, associée gérante avec signature individuelle de A______ SARL. Elle lui a transmis ladite adresse ainsi qu'un mot de passe pour y accéder en date du 23 mai 2017.

Par e-mail du 26 mai 2017, I______ a notamment indiqué à J______, administratrice de B______ AG, qu'elle avait changé le mot de passe pour accéder à l'adresse e-mail précitée. Elle a demandé à J______ si cela lui posait problème, ajoutant que si l'idée était que toutes les deux utilisent cet e-mail, elle pouvait remettre le mot de passe initialement transmis par B______ AG.

Par e-mail du 31 mai 2017, J______ a notamment répondu à I______ que l'adresse e-mail H______@______ était destinée à être utilisée uniquement par cette dernière. Elle ne voyait aucun inconvénient à la modification du mot de passe. Elle n'avait aucun accès à cet e-mail et n'en avait pas besoin.

c. Par message électronique du 6 novembre 2019, B______ AG a informé A______ SARL de ce qu'elle mettait fin à la collaboration immédiatement ("sofort").

d. Par courriel du 8 novembre 2019, B______ AG a demandé à A______ SARL la liste des adresses e-mails des clients ("Mailadressen"). Le même jour, cette dernière lui a répondu que la liste des clients "actifs" ("the today active customers") se trouvait dans la base de données de B______ AG. Relancée, elle lui a précisé par e-mail du 11 novembre 2019 que la liste d'adresses ("the adresse list") lui appartenait, dans la mesure où elle n'avait jamais été employée par B______ AG.

e. A partir du 8 janvier 2020, A______ SARL n'a plus eu accès à l'adresse e-mail H______@______.

Par courrier recommandé de son conseil du 16 janvier 2020, A______ SARL a notamment demandé à B______ AG de lui redonner accès à l'adresse e-mail précitée aux fins de pouvoir copier, puis supprimer, tous les e-mails s'y trouvant ainsi que les données relatives à ses clients et prospects. Elle a également requis qu'une fois cela fait, l'adresse e-mail H______@______ soit définitivement désactivée.

Dans ce même courrier, A______ SARL a également exposé avoir constitué un large carnet d'adresses de potentiels clients en Suisse ainsi qu'à l'étranger, qui se trouvait sur la boîte e-mail H______@______ et qui demeurait sa propriété. Elle interdisait par ailleurs à B______ AG de copier les e-mails ainsi que le répertoire de clients et prospects. Dans l'hypothèse où B______ AG désirait conserver ledit répertoire, elle devrait lui verser la somme de 270'000 fr.

f. Par e-mail du 17 janvier 2020, J______ a indiqué à I______ que l'adresse e-mail H______@______ avait été désactivée au mois de janvier 2020 et qu'elle avait disposé de suffisamment de temps pour copier puis effacer les données jusqu'au 31 décembre 2019. B______ AG n'avait pas eu accès à l'adresse e-mail précitée ni aux e-mails qu'elle contenait. L'adresse e-mail avait été réactivée et I______ pouvait récupérer les données de A______ SARL puis les effacer. Enfin elle attendait que A______ SARL lui confirme qu'elle pouvait désactiver la boîte e-mail.

Par e-mail du 20 janvier 2020, A______ SARL a indiqué à B______ AG avoir copié toutes les données lui appartenant sur la boîte e-mail H______@______.

g. Le 22 janvier 2020, A______ SARL a fait parvenir à B______ AG un projet de convention à teneur duquel cette dernière devait confirmer avoir supprimé l'adresse e-mail litigieuse et confirmer n'avoir copié aucune des données s'y trouvant, une clause pénale de 270'000 fr. étant prévue.

Par e-mail de son conseil du 7 février 2020, B______ AG a indiqué à A______ SARL qu'elle refusait de signer ladite convention.

h. Par acte du 21 février 2020, A______ SARL a formé devant le Tribunal une requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles à l'encontre de B______ AG.

Sur mesures provisionnelles, elle a conclu, sous suite de frais et dépens, à ce que le Tribunal fasse interdiction à B______ AG d'utiliser toute donnée éventuellement récoltée par le biais de la boîte e-mail H______@______, ordonne à B______ AG de prouver immédiatement qu'elle n'avait copié aucune donnée récoltée par le biais de la boîte e-mail H______@______, de détruire immédiatement toutes les données éventuellement récoltées par le biais de la boîte e-mail H______@______, de prouver immédiatement qu'elle n'avait conservé aucune donnée éventuellement récoltée par le biais de la boîte e-mail H______@______, de prouver immédiatement qu'elle avait définitivement supprimé la boîte e-mail H______@______, le tout sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, et qu'enfin le Tribunal lui octroie un délai de 60 jours pour déposer une demande au fond.

Elle a fait valoir que B______ AG avait résilié le contrat d'agence qui les liait afin de s'occuper seule de la commercialisation de ses produits, que la précitée avait ainsi un intérêt aux données qu'elle-même avait récoltées afin de développer la clientèle en Suisse romande. Il y avait urgence à interdire à B______ AG d'utiliser les données se trouvant sur la boîte e-mail H______@______, dès lors qu'une utilisation sans droit de la liste de prospects par B______ AG causerait une grave atteinte à ses intérêts financiers, ainsi qu'à sa réputation, dans la mesure où les prospects pourraient considérer qu'elle avait divulgué leurs données sans droit à des tiers. Par ailleurs, B______ AG n'avait pas supprimé l'adresse e-mail H______@______, de sorte qu'il fallait l'y contraindre.

i. Par ordonnance du 2 mars 2020, le Tribunal a rejeté la requête sur mesures superprovisionnelles.

j. Dans ses déterminations du 20 avril 2020, B______ AG a conclu au rejet de la requête sous suite de frais et dépens. Elle a exposé n'avoir jamais eu accès à la boîte e-mail H______@______ dès lors que A______ SARL avait changé le mot de passe d'accès au mois de mai 2017 et qu'elle n'avait jamais eu connaissance du nouveau mot de passe. Le 8 janvier 2020, l'adresse e-mail H______@______ avait été effacée puis réactivée le 17 janvier 2020 afin que A______ SARL puisse y accéder. Le 27 janvier 2020, la licence pour l'adresse e-mail H______@______ avait été désactivée. Enfin l'adresse e-mail avait été définitivement effacée le 16 avril 2020.

Elle a produit notamment un message électronique du 16 avril 2020, par lequel un informaticien de K______ GMBH lui confirmait qu'il avait effacé l'adresse e-mail précitée et qu'il n'avait donné accès à cette boîte e-mail ni à J______, ni à quelqu'un d'autre ("dass ich weder Andrea Keller oder sonst jemanden Zugang gegeben habe").

k. Le 23 avril 2020, A______ SARL a répliqué en se déterminant sur les allégués de B______ AG. Elle a notamment soutenu que sa partie adverse ne prouvait ni qu'elle n'avait jamais eu accès à la boîte e-mail en question durant ou après la collaboration, ni qu'elle n'avait aucune copie de la liste des prospects litigieuse. Elle n'a en revanche pas contesté ne pas avoir communiqué à B______ AG le nouveau mot de passe.

l. Lors de l'audience du Tribunal du 27 avril 2020, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

EN DROIT

1. L'appel est recevable contre les décisions de première instance sur mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC). Dans les affaires patrimoniales, il est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

En l'espèce, l'appelante ne dit mot sur la valeur litigieuse. Celle-ci peut toutefois être estimée à un montant supérieur à 10'000 fr., compte tenu des conclusions de la requête. La voie de l'appel est par conséquent ouverte.

Interjeté dans le délai de 10 jours et dans la forme prescrits (art. 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

2. 2.1 La Cour revoit le fond du litige avec un plein pouvoir d'examen
(art. 310 CPC) et applique le droit d'office (art. 57 CPC).

Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, elle le fait cependant uniquement sur les points du jugement que l'appelant estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante - et, partant, recevable -, pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). Hormis les cas de vices manifestes, elle doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).

En l'espèce, seuls les griefs figurant dans l'acte d'appel seront examinés, la réplique n'étant pas destinée à compléter ou améliorer l'appel (cf. ATF 132 I 42 consid. 3.3.4 - JdT 2008 I 110), mais uniquement à présenter un exposé auquel les développements contenus dans la détermination de l'autre partie donnent lieu (cf. ATF 135 I 19 consid. 2.2 - JdT 2009 I 443; arrêts du Tribunal fédéral 4A_487/2014 du 28 octobre 2014 consid. 1.2.4; 4A_66/2014 du 2 juin 2014 consid. 2.2).

2.2 En outre, dans le cadre de mesures provisionnelles, instruites selon la procédure sommaire (art. 248 let. d CPC), la cognition du juge est circonscrite à la vraisemblance des faits allégués ainsi qu'à un examen sommaire du droit (ATF 131 III 473 consid. 2.3; 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5). Les moyens de preuve sont, en principe, limités à ceux qui sont immédiatement disponibles (art. 254 CPC; HOHL, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010, p. 283 n° 1556).

3. Les parties allèguent des faits nouveaux et l'appelante dépose des pièces nouvelles dans le cadre de la procédure d'appel.

3.1
3.1.1
Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

Il faut distinguer les "vrais nova" des "pseudo nova". Les "vrais nova" sont des faits et moyens de preuve qui ne sont survenus qu'après la fin des débats principaux, soit après la clôture des plaidoiries finales (cf. ATF 138 III 788 consid. 4.2; Tappy, , Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 11 ad art. 229 CPC). En appel, ils sont en principe toujours admissibles, pourvu qu'ils soient invoqués sans retard dès leur découverte. Les "pseudo nova" sont des faits et moyens de preuve qui étaient déjà survenus lorsque les débats principaux de première instance ont été clôturés. Leur admissibilité est largement limitée en appel, dès lors qu'ils sont irrecevables lorsqu'en faisant preuve de la diligence requise, ils auraient déjà pu être invoqués dans la procédure de première instance. Il appartient au plaideur d'exposer en détails les motifs pour lesquels il n'a pas pu présenter le "pseudo nova" en première instance déjà (ATF 143 III 42 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_1006/2017 du 5 février 2018 consid. 3.3).

Le CPC part du principe que le procès doit se conduire entièrement devant les juges de première instance. A ce stade, chaque partie doit exposer l'état de fait de manière soigneuse et complète et amener tous les éléments propres à établir les faits jugés importants. La procédure d'appel n'a pas pour but de compléter le procès de première instance en permettant aux parties de réparer leurs propres carences, mais de contrôler et corriger le jugement de première instance à la lumière des griefs formulés à son encontre (ATF 142 III 413 consid. 2.2.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_303/2018 du 17 octobre 2018 consid. 3.2; 4A_334/2012 du 16 octobre 2012 consid. 3.1).

3.1.2 A teneur de l'art. 151 CPC, les faits notoires ou notoirement connus du tribunal et les règles d'expérience généralement reconnues ne doivent pas être prouvés.

Sont notamment assimilés à des faits notoires les indications figurant au Registre du commerce, accessibles par Internet (ATF 138 II 557 consid. 6.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_510/2018 du 7 mai 2019 consid. 5.3; 4A_509/2014 du 4 février 2015 consid. 2.1 in SJ 2015 I 385), ainsi que les extraits de publication de la FOSC (ACJC/1520/2013 du 20 décembre 2013 consid. 1.4; ACJC/894/2007 du 12 juillet 2007 consid. 1.3).

Les faits notoires ne devant être ni allégués ni prouvés, ils sont soustraits à l'interdiction des nova (arrêts du Tribunal fédéral 5A_719/2018 du 12 avril 2019 consid. 3.2.3; 4A_36/2017 du 2 mars 2017 consid. 7).

3.2 En l'espèce, l'appelante n'explique pas pour quelles raisons elle n'a pas produit en première instance ses pièces nouvelles 10, 14 à 18, 20, 22 et 23. Ces pièces sont donc irrecevables, comme les allégués nouveaux formés par l'appelante sur la base de ces pièces. Les extraits du Registre de commerce du canton de Zoug produits par l'appelante sous pièces 19 et 21 sont en revanche recevables. Les indications contenues dans ses extraits sont aussi recevables, mais ne sont pas déterminantes pour la solution du litige en l'absence d'autres explications recevables. Les allégations nouvelles figurant dans la duplique de l'intimée sont irrecevables.

4. L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir violé l'art. 261 al. 1 CPC. Elle fait valoir que l'intimée n'a pas prouvé ne pas avoir eu accès aux données se trouvant sur l'adresse de courriels H______@______. Elle soutient avoir démontré que l'intimée a eu accès à ces données et souhaite s'en servir. A son avis, le fait que l'intimée ait "potentiellement" copié lesdites données et qu'elle les utilise viole l'art. 418v CO, "ce qui constitue une atteinte au sens des dispositions sur le contrat d'agence rendue vraisemblable par l'Appelante au vu des nombreuses incohérences dans le comportement de l'intimée". Il y aurait urgence vu le risque élevé que l'intimée, qui entend développer elle-même la clientèle, à tout le moins en Suisse romande, utilise les données en question, ce qui porterait "atteinte à la réputation et aux intérêts financiers de l'Appelante, qui a gagné la confiance de ses prospects en développant" la liste litigieuse.

4.1

4.1.1 Les mesures provisionnelles sont des décisions à caractère temporaire qui règlent une situation juridique dans l'attente d'une réglementation définitive au travers d'une décision principale ultérieure (ATF 133 III 399 consid. 1.5; arrêt du Tribunal fédéral 4A_288/2012 du 9 octobre 2012 consid. 1.2). Elles ne sont que l'accessoire d'une action au fond, qui réglera définitivement la situation juridique. Si le procès au fond n'est pas encore pendant, elles doivent être validées par l'ouverture d'une action (art. 263 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_229/2014 du 14 mai 2014 consid. 3.1).

Le juge ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (art. 261 al. 1 CPC).

Le requérant doit rendre vraisemblable tant l'existence de sa prétention matérielle de nature civile que sa mise en danger ou atteinte par un préjudice difficilement réparable, ainsi que l'urgence (Huber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2016, n. 23 ad art. 261 CPC)

Le requérant doit rendre vraisemblable que le droit matériel invoqué existe et que le procès a des chances de succès, la mesure provisionnelle ne pouvant être accordée que dans la perspective de l'action au fond qui doit la valider (cf. art. 263 et 268 al. 2 CPC; ATF 131 III 473 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_1016/2015 du 15 septembre 2016 consid. 5.3; BOHNET, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 7 ad art. 261). Il doit en outre rendre vraisemblable une atteinte au droit ou son imminence, sur la base d'éléments objectifs (BOHNET, op. cit., n. 10 ad art. 261 CPC).

Doit également être rendu vraisemblable l'existence d'un préjudice difficilement réparable, qui peut être de nature patrimoniale ou immatérielle (Message relatif au CPC, FF 2006 p. 6961; BOHNET, op. cit., n. 11 ad art. 261 CPC; HUBER, op. cit., n. 20 ad art. 261 CPC). Le requérant doit rendre vraisemblable qu'il s'expose, en raison de la durée nécessaire pour rendre une décision définitive, à un préjudice qui ne pourrait pas être entièrement supprimé même si le jugement à intervenir devait lui donner gain de cause. En d'autres termes, il s'agit d'éviter d'être mis devant un fait accompli dont le jugement ne pourrait pas complètement supprimer les effets. Est difficilement réparable le préjudice qui sera plus tard impossible ou difficile à mesurer ou à compenser entièrement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_611/2011 du 3 janvier 2012 consid. 4.1).

Le risque de préjudice difficilement réparable implique l'urgence (BOHNET, op. cit., n. 12 ad art. 261 CPC). L'urgence est une notion relative qui comporte des degrés et s'apprécie moins selon des critères objectifs qu'au regard des circonstances. Elle est en principe admise lorsque le demandeur pourrait subir un dommage économique ou immatériel s'il devait attendre qu'une décision au fond soit rendue dans une procédure ordinaire (ATF 116 Ia 446 consid. 2 = JdT 1992 I p. 122; BOHNET, op. cit., n. 12 ad art. 261 CPC).

La mesure ordonnée doit respecter le principe de proportionnalité, ce qui signifie qu'elle doit être à la fois apte à atteindre le but visé, nécessaire, en ce sens que toute autre mesure se révèlerait inapte à sauvegarder les intérêts de la partie requérante, et proportionnée, en ce sens qu'il ne doit pas exister d'alternatives moins incisives (HOHL, Procédure civile, tome II, 2ème éd., 2010, p. 323 s.).

La non réalisation des conditions à l'octroi de mesures provisionnelles conduit au rejet de la requête (ACJC/1471/2015 du 4 décembre 2015 consid. 3.1.1; ACJC/250/2015 du 6 mars 2015 consid. 4.1; ACJC/1610/2014 du 19 décembre 2014).

4.1.2 Rendre vraisemblable signifie qu'il n'est pas nécessaire que le juge soit convaincu de l'exactitude de l'allégué présenté, mais qu'il suffit que, sur la base d'éléments objectifs, le fait en cause soit rendu probable, sans qu'il doive pour autant exclure la possibilité que les faits aient aussi pu se dérouler autrement (ATF 130 III 321 consid. 3.3, JdT 2005 I 618, SJ 2005 I 514; ATF 120 II 393 consid. 4c; ATF 104 Ia 408).

La vraisemblance requiert plus que de simples allégués: ceux-ci doivent être étayés par des éléments concrets ou des indices et être accompagnés de pièces (ATF 138 III 636 consid. 4.3.2 et 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_893/2013 du 18 février 2014 consid. 3).

4.1.3.A juste titre, les parties conviennent qu'elles ont été liées par un contrat d'agence. Le Tribunal a exposé les principes pertinents suivants - que l'appelante ne remet pas en discussion - régissant le devoir de restitution des parties à la fin du contrat et les principes régissant le droit de l'agent à une indemnité pour la clientèle.

Aux termes de l'art. 418v CO, chaque partie est tenue de restituer à la fin du contrat d'agence tout ce qui lui a été remis pour la durée du contrat soit par l'autre partie, soit par des tiers pour le compte de cette dernière. Sont réservés les droits de rétention des parties.

Tous les documents internes établis par l'agent lui restent acquis. Il en va ainsi des listes de clients. Ces informations sont de toute manière à disposition du mandant par le biais des contrats qu'il a conclus avec les clients (DREYER, CR CO I, 2ème éd. 2012, n. 3 ad art 418v CO; PÄRLI, BSK OR I, 7ème éd. 2020, n. 2 ad art. 418v CO).

Lorsque l'agent, par son activité, a augmenté sensiblement le nombre des clients du mandant et que ce dernier ou son ayant-cause tire un profit effectif de ses relations d'affaires avec ces clients même après la fin du contrat, l'agent ou ses héritiers ont droit, à moins que ce ne soit inéquitable, à une indemnité convenable, qui ne peut pas leur être supprimée par convention (art. 418u al. 1 CO).

La notion de clientèle doit être comprise dans un sens relativement restreint : si les clients ne sont pas susceptibles de passer des commandes plus ou moins régulièrement, leur ensemble ne peut être qualifié de clientèle (DREYER, op. cit., n. 5 ad art. 418u et les références citées).

4.2 En l'espèce, c'est à juste titre que le Tribunal a considéré que l'appelante n'a rendu vraisemblable ni l'atteinte ou le risque d'atteinte à ses prétentions découlant des dispositions sur le contrat d'agence précitées, ni le risque d'un préjudice difficilement réparable, ni l'urgence.

L'appelante ne fonde sa requête que sur des allégations et des suppositions qui ne sont pas corroborées par les pièces du dossier, étant précisé que, contrairement à ce qu'elle soutient, l'intimée ne supportait pas le fardeau de la preuve et, en particulier, n'était pas tenue d'établir qu'elle n'avait pas eu accès aux données de la boîte e-mail litigieuse ou qu'elle ne détenait pas la liste des prospects de l'appelante. Le fait que l'intimée n'a pas donné suite à la proposition d'arrangement de sa parties adverse ne signifie pas qu'elle a eu accès à ces données et/ou qu'elle a l'intention de les utiliser.

Comme le relève pertinemment le premier juge, le mot de passe d'accès à la boîte mail précitée a été modifié par l'appelante au début de la relation contractuelle, trois jours après la mise à disposition de l'adresse. Aucun élément du dossier ne rend vraisemblable que l'intimée a eu par la suite connaissance du nouveau mot de passe, qui ne lui a pas été communiqué par l'appelante. Celle-ci n'a ainsi pas rendu vraisemblable que l'intimée a eu accès à sa liste de prospects enregistrée dans la boîte e-mail litigieuse (la liste de clients étant connue de l'intimée par le biais des contrats conclus) ni, par conséquent, qu'elle s'apprêtait à en faire usage pour développer sa clientèle. Par ailleurs, il n'est pas contesté que l'appelante a pu récupérer la liste litigieuse, de sorte que l'intimée a rempli son devoir de restitution.

Au vu de ce qui précède, le risque de préjudice difficilement réparable n'est pas non plus rendu vraisemblable. Il en va de même de la condition de l'urgence.

En définitive c'est à bon droit que le Tribunal a rejeté la requête de mesures provisionnelles. L'ordonnance attaquée sera donc confirmée.

5. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'200 fr. (art. 26 et 37 RTFMC), comprenant les frais de la procédure sur effet suspensif, mis à la charge de l'appelante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC) et compensés avec l'avance effectuée, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

L'appelante sera condamnée à verser à l'intimée 800 fr., débours et TVA compris, à titre de dépens d'appel (art. 20, 25 et 26 LaCC; art. 86, 88 et 90 RTFMC).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 14 mai 2020 par A______ SÀRL contre l'ordonnance OTPI/274/2020 rendue le 4 mai 2020 par le Tribunal de première instance dans la cause C/3786/2020-24 SP.

Au fond :

Confirme l'ordonnance attaquée.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'200 fr., les met à la charge de A______ SARL et les compense avec l'avance effectuée, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SARL à verser à B______ AG 800 fr. titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.