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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/27565/2024

ACPR/707/2025 du 03.09.2025 sur ONMMP/2708/2025 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;ADMINISTRATION DES PREUVES;FAUX DANS LES CERTIFICATS;CONJOINT
Normes : CPP.6.al1; CPP.310.al1.leta; CP.251

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/27565/2024 ACPR/707/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 3 septembre 2025

 

Entre

A______, représentée par Me B______, avocat,

recourante,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière partielle rendue le 10 juin 2025 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 23 juin 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 10 juin précédent, notifiée le 12 suivant, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur les faits de sa plainte du 28 novembre 2024 contre C______ susceptibles d'être constitutifs de faux dans les titres (ch. 1 du dispositif), dit que la procédure se poursuivait pour le surplus (ch. 2) et laissé les frais à la charge de l'État (ch. 3).

La recourante conclut à l'annulation du ch. 1 du dispositif de cette décision, au renvoi de la procédure au Ministère public pour ouverture d'une instruction contre C______ et à ce que divers actes d'instruction, qu'elle énumère, soient ordonnés. Elle conclut à la condamnation de l'État en tous les frais de la procédure et à lui verser une indemnité équitable de CHF 2'000.-.

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 1'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______, née le ______ 1966, et C______, né le ______ 1969, se sont mariés en 1992 à D______ [ZH]. Ils ont eu deux enfants, désormais majeurs.

Ils se sont séparés en octobre 2020 mais ont partagé le domicile conjugal situé à E______ [GE] jusqu'au 1er août 2022, date à laquelle A______ est allée vivre à F______ (canton de Vaud).

b.a. Par jugement sur mesures protectrices de l'union conjugale du 23 décembre 2022, le Tribunal civil de première instance de Genève (ci-après : TPI) a condamné C______ à verser à son épouse, par mois et d'avance, à titre de contribution à son entretien, la somme de CHF 5'260.-, depuis le 1er août 2022, sous déduction de CHF 250.- déjà versés à ce titre. Il a par ailleurs fait interdiction à C______ de disposer, sans le consentement de son épouse, de plusieurs montres de marque ainsi que des œuvres d'art attribuées à G______.

Par arrêt du 30 mai 2023, la Chambre civile de la Cour de justice a confirmé le jugement précité, à la suite de l'appel formé par C______.

b.b. Selon ordonnance sur mesures provisionnelles du 14 octobre 2024, rendue par le Tribunal d'arrondissement de H______ (Vaud), à la suite de la demande de divorce déposée par A______, la conclusion prise à titre provisionnel par C______ tendant à verser à son épouse une contribution d'entretien mensuelle de CHF 3'000.- par mois et d'avance jusqu'à droit jugé sur le fond a été rejetée.

La Cour d'appel civile du Tribunal canton de Vaud a, par arrêt du 11 avril 2025, rejeté l'appel formé par C______ contre cette ordonnance.

c. A______ a déposé plainte pénale contre C______ le 28 novembre 2024 pour violation d'une obligation d'entretien (art. 217 CP) et faux dans les titres (art. 251 CP).

c.a. Elle lui reprochait de ne pas lui avoir versé la totalité de la contribution d'entretien due pour le mois de novembre 2024. Elle a par la suite déposé des compléments de plainte les 4 décembre 2024, 8 janvier, 13 février, 7 mars, 4 avril, 2 mai et 4 juin 2025 pour ce même motif.

c.b. Par ailleurs, elle était associée gérante, aux côtés de I______, de la société J______ Sàrl – inactive – toutes deux au bénéfice d'une signature collective à deux. Plus de cinq ans plus tôt, C______ lui avait conseillé d'enregistrer sa signature, de même que celle de I______, auprès de l'étude K______, afin de faciliter les actes de gestion de leur société.

Or, le 11 novembre 2019, sans son accord, C______ avait apposé sa signature à elle, enregistrée auprès de cette étude de notaires, respectivement imité sa signature, sur un document lui ayant permis de retirer, sans son consentement, la quasi-totalité de sa prestation de libre-passage, dont le montant était de CHF 199'004.55 le 12 novembre 2019 auprès de la Fondation Institution supplétive LPP et plus que de CHF 13'394.-, le 31 décembre 2020, auprès de la fondation de prévoyance L______ [selon relevé produit du 20 janvier 2021]. Elle avait découvert le 23 mai 2021 "avec stupéfaction" que sa signature figurait sur un document certifié auprès de l'étude de notaires précitée [produisant à cet égard un relevé du 11 novembre 2019 de frais et débours pour une légalisation de signature et une "signature supplémentaire"], démontrant un retrait en espèces [dont le montant n'est pas indiqué sur le document "payment termination benefit" litigieux, lequel comporte comme indication, sous le titre "Bank transfer", les références d'un compte bancaire M______ au nom de C______] - intervenu le 11 novembre 2019. C______ avait agi ainsi dans le but de l'empêcher de bénéficier de la moitié de son deuxième pilier.

À l'appui de ses allégués, A______ a, outre les documents précités, produit un courriel du 31 mai 2021, de l'étude K______, lui confirmant que, conformément à sa demande du 26 mai précédant, son dépôt de signature avait été détruit.

c.c. Enfin, en janvier 2020, son époux lui avait demandé de contracter un prêt hypothécaire d'un montant de CHF 300'000.-, somme qu'elle devait lui prêter. Ce prêt grèverait l'appartement dont elle était propriétaire à E______. Elle lui avait demandé de trouver le taux d'intérêt le plus avantageux pour un tel emprunt. Sans l'en avertir, il avait, le 1er octobre 2020, conclu un contrat de courtage en son nom avec la société N______ AG. Elle n'avait jamais signé un tel contrat et avait découvert ce document "avec stupéfaction" quelques semaines plus tard. Il était "hautement vraisemblable" que l'intéressé eût imité sa signature en vue de la conclusion de ce contrat, avec pour conséquence qu'elle avait contracté une dette de CHF 300'000.- et était encore tenue de s'acquitter des intérêts hypothécaires à hauteur de CHF 2'262.- par an.

d. Entendue par la police le 24 mars 2025 en qualité de personne appelée à donner des renseignements, Me O______, notaire, qui anciennement avait officié en l'étude K______, a déclaré qu'elle se souvenait de la légalisation de la signature de A______, sauf erreur en 2019. Dans le cadre du dépôt de signature, la fiche ad hoc, remplie par la personne et comportant toutes ses données personnelles, était ensuite conservée à l'étude, avec la copie de sa carte d'identité, en vue d'éventuelles légalisations futures. Si la personne devait avoir besoin d'une nouvelle certification de sa signature, il suffisait qu'elle remît le document en cause signé par ses soins, que l'étude comparait avec le formulaire de signature en sa possession. S'il s'agissait de la même signature, le notaire inscrivait un texte attestant qu'il s'agissait bien de la signature de cette personne, signait ce texte et apposait son sceau. En cas de doute, l'étude contactait la personne au moyen des informations en sa possession afin de confirmer qu'elle était bien l'auteure de la signature. Dans le cas de figure d'une signature ayant évolué au fil du temps, la personne devait se présenter pour compléter un nouveau formulaire et mettre à jour sa signature.

Sur présentation de la facture du 11 novembre 2019 au nom de son ancienne étude, Me O______ a expliqué que la seconde signature qui avait alors été légalisée devait être celle de A______. Elle avait, sur un document du même jour, certifié les signatures de C______ et de A______. Le formulaire de dépôt de signature de celle-ci – que l'étude K______ n'avait pas retrouvé mais dont elle-même avait conservé une copie – datait également du 11 novembre 2019, ce qui laissait supposer que l'intéressée était présente physiquement le jour en question pour le signer devant elle. Elle pouvait attester que A______ avait signé devant elle le formulaire de dépôt de signature mais pas que le formulaire de retrait – litigieux – l'avait été en sa présence. En règle générale, lorsqu'un client venait déposer sa signature, c'était qu'il avait également des documents à faire certifier, le tout étant signé en sa présence. Si elle avait eu le moindre doute sur la signature de A______, elle n'aurait pas signé la légalisation.

e. Entendu devant la police le 31 mars 2025 en qualité de prévenu, C______ s'est exprimé sur l'infraction de violation d'une obligation d'entretien.

En lien avec son deuxième pilier auprès de la Fondation supplétive LPP, il a expliqué que son épouse "savait pertinemment" où "ils avaient envoyé ces avoirs", sauf erreur CHF 199'000.-, à savoir sur son compte M______ (à lui). Il n'avait pas été question d'un retrait en espèces, comme l'intéressée l'affirmait de manière calomnieuse. Celle-ci avait signé le document autorisant le transfert de ces fonds dans leur appartement à E______, comme y mentionné. Il avait indiqué la date [de la signature] pour lui-même et pour son épouse. Il était allé – seul – faire authentifier leurs deux signatures originales par Me O______, à une date dont il ne se souvenait pas. Son épouse avait fait appel aux services de cette notaire à plusieurs reprises. Il contestait avoir faussement apposé la signature de son épouse sur le formulaire de transfert en cause.

Quant aux reproches liés à la conclusion du contrat de courtage avec N______ AG le 1er octobre 2020, C______ a expliqué que le contrat qui lui était soumis autorisait uniquement la divulgation des informations nécessaires à l'obtention d'un crédit hypothécaire. Son épouse avait ensuite accepté l'offre de [la banque] P______, démarchée par N______ AG, relative au prêt hypothécaire. C'était elle qui avait perçu ce montant qu'elle lui avait prêté pour couvrir les dépenses de la maison et de la famille, leur niveau de vie durant les "belles années" ayant été très élevé.

C. Dans la décision querellée, le Ministère public a considéré que la prévention pénale de faux dans les titres était insuffisante pour ouvrir une instruction et qu'aucun acte d'enquête ne paraissait à même de modifier ce constat. En particulier, une expertise graphologique portant sur la signature apposée sur les actes litigieux ne serait pas de nature à modifier cette conclusion, étant précisé qu'elle présupposait l'existence de documents originaux (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_634/2014 du 31 août 2015, consid. 6.1.2), lesquels faisaient défaut en l'espèce, et la plaignante n'alléguant pas qu'elle serait en mesure de les produire.

A______ affirmait ne pas avoir signé le formulaire de retrait des avoirs professionnels de son époux le 11 novembre 2019 et que C______ aurait établi ce document – sur lequel il aurait imité sa signature ou utilisé sa signature légalisée auprès du notaire – pour pourvoir retirer une partie de ses avoirs de prévoyance professionnelle sans son accord. Les éléments au dossier n'étaient toutefois pas suffisants pour douter de l'authenticité de ce document. En effet, C______ avait contesté fermement les faits. En outre, la signature apposée sur le document en question avait été légalisée par Me O______, laquelle avait confirmé lors de son audition par la police que A______ était présente lors de la légalisation de sa signature le 11 novembre 2019 et qu'elle n'aurait pas légalisé le document en cas de doute sur la signature de la plaignante. Sur cette seule base, on ne saurait soupçonner C______ d'avoir imité ou utilisé la copie légalisée de la signature de son épouse pour pouvoir retirer une partie de ses avoirs de prévoyance professionnelle sans son accord.

Les mêmes considérations s'appliquaient concernant la prétendue fausse signature du contrat de courtage, faits contestés par le prévenu.

D. a. À l'appui de son recours, A______ expose que les propos tenus par son époux devant la police étaient mensongers. Il était particulièrement choquant de constater que le Ministère public avait refusé d'approfondir la procédure, alors même que la situation demeurait extrêmement opaque. Son droit d'être entendu avait été violé puisqu'elle n'avait pas été auditionnée. Le Ministère public avait violé la maxime d'instruction (art. 6 CPP) dès lors qu'il était de son devoir d'instruire les faits et de se procurer la version originale des documents originaux en possession desquels elle n'avait jamais été. Elle était tombée par hasard sur l'ordre de transfert détenu par son époux et avait uniquement pu le photographier. Le Ministère public aurait de plus dû interroger son époux à tout le moins sur les raisons qui l'avaient poussé à retirer une grande partie de ses avoirs de prévoyance professionnelle, retrait qui était intervenu quelques mois avant leur séparation. Contrairement à ce qu'avait retenu cette autorité, un faisceau d'indices indiquait qu'il existait un doute sur l'authenticité du document litigieux. En effet, la facture du notaire du 11 novembre 2019 était au nom de son seul époux. La notaire en question était une stagiaire à l'époque des faits et son époux aurait pu profiter de son inexpérience pour légaliser une deuxième signature à son insu. Cette notaire n'avait pu se souvenir si elle-même avait signé devant elle la demande de retrait des avoirs de deuxième pilier de son époux. Le lieu et la date de la signature avaient visiblement été apposés en amont du rendez-vous et par la même personne. De plus, son époux connaissait personnellement Me Q______ qui officiait dans l'étude de notaires en question.

Elle contestait formellement avoir signé un contrat de courtage ou une quelconque autorisation de divulgation d'informations avec N______ AG, dont elle n'avait jamais détenu un orignal. On pouvait s'interroger sur le nombre de documents sur lesquels son époux aurait pu apposer sa signature à elle, étant précisé qu'il disposait sur son ordinateur de sa signature électronique, dont il semblait pouvoir faire usage à sa guise à son insu. C______ avait négocié avec cette société quelques semaines après leur séparation. Il n'avait donné aucune explication quant au prêt de CHF 300'000.- qu'elle lui avait octroyé en plusieurs tranches. Au vu du comportement de l'intéressé tout au long des procédures de mesures de protection de l'union conjugale et de divorce, s'inscrivant dans un schéma visant très vraisemblablement à l'épuiser tant moralement que financièrement, le dessein de vouloir la spolier ne paraissait pas si fantaisiste, "bien au contraire".

La procédure devait donc être renvoyée au Ministère public qui devait procéder à son audition, à une audience de confrontation avec son époux et ordonner la production par ce dernier des originaux de la demande de retrait des avoirs de prévoyance professionnelle ainsi que du contrat de courtage avec N______ AG.

b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant a priori un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             La recourante se plaint d'une violation de son droit d'être entendue, dans la mesure où elle n'a pas été auditionnée dans le cadre de la procédure.

3.1. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment pour le justiciable le droit de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'obtenir l'administration des preuves pertinentes et valablement offertes, de participer à l'administration des preuves essentielles et de se déterminer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 II 218 consid. 2.3).

Diverses mesures d'investigation peuvent être mises en œuvre avant l'ouverture d'une instruction, telle que l'audition du suspect par la police sur délégation du ministère public (arrêt du Tribunal fédéral 6B_875/2018 du 15 novembre 2018 consid. 2.2.1). Durant cette phase préalable, le droit de participer à l'administration des preuves ne s'applique en principe pas. Avant de rendre une ordonnance de non-entrée en matière, le ministère public n'a pas à en informer les parties et il n'a pas à leur donner la possibilité d'exercer leur droit d'être entendu, lequel sera assuré, le cas échéant, dans le cadre de la procédure de recours, ou elles pourront faire valoir, auprès d'une autorité qui dispose d'un plein pouvoir d'examen (art. 391 al. 1 et 393 al. 2 CPP), tous leurs griefs, de nature formel et matériel (arrêt du Tribunal fédéral 6B_854/2018 du 23 octobre 2018 consid. 3.1).

3.2. En l'espèce, la procédure n'a pas dépassé la phase de l'examen de la plainte et de l'audition par la police d'une notaire, en qualité de personne appelée à donner des renseignements, et du mis en cause. Aucune instruction n'a été ouverte, de sorte que le Ministère public était dispensé d'inviter la plaignante à se déterminer oralement ou par écrit avant de prononcer l'ordonnance querellée. La motivation de cette dernière, claire et suffisante, permettait en outre à la plaignante de contester la décision dans le cadre d'un recours en toute connaissance de cause, ce qu'elle a, au demeurant, fait.

Par conséquent, ce grief sera rejeté.

4.                  La recourante reproche au Ministère public de ne pas être entré en matière sur sa plainte du chef de faux dans les titres et d'avoir "refusé d'approfondir la procédure".

4.1.       À teneur de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ne sont manifestement pas réunis.

4.2.       Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1).

4.3.       Selon l'art. 6 al. 1 CPP, les autorités pénales recherchent d’office tous les faits pertinents pour la qualification de l’acte et le jugement du prévenu. Elles mettent en œuvre tous les moyens de preuves licites qui, selon l’état des connaissances scientifiques et l’expérience, sont propres à établir la vérité (art. 139 al. 1 CPP). Il n’y a pas lieu d’administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l’autorité pénale ou déjà suffisamment prouvés (al. 2).

4.4.       D'après l'art. 251 ch. 1 CP, se rend coupable de faux dans les titres quiconque, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, crée un titre faux, falsifie un titre, abuse de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constate ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre.

Sont des titres tous les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique et tous les signes destinés à prouver un tel fait (art. 110 al. 4 1ère phrase CP).

Le titre doit, de par sa nature ou par l'usage qui en est fait, être objectivement apte à prouver le fait qu'il exprime et ce fait doit avoir une portée juridique, c'est-à-dire avoir une incidence dans le domaine juridique (arrêt du Tribunal fédéral 6B_279/2021 du 20 octobre 2021 consid. 2.1).

4.5.       En l'espèce, la recourante et son époux sont séparés depuis le mois d'octobre 2020, mais ont partagé le domicile familial à E______ jusqu'à la fin du mois de juillet 2022. Il ressort du dossier que depuis lors à tout le moins leurs relations sont tendues, notamment sur le plan financier et que les intéressés s'affrontent devant les juridictions civiles. Le 23 décembre 2022 en effet, le TPI a rendu un jugement condamnant le mis en cause à verser à la plaignante une contribution mensuelle de CHF 5'260.- depuis le 1er août 2022, outre lui faisant interdiction de disposer de montres de marque et d'œuvres d'art sans le consentement de la plaignante. Ce dernier a formé appel contre ce jugement qui a été confirmé par la Chambre civile de la Cour de justice le 30 mai 2023. Alors que la recourante avait pris domicile dans le canton de Vaud et déposé une demande de divorce, le mis en cause a conclu à titre provisionnel à une réduction de cette contribution au montant de CHF 3'000.- par mois, ce qui lui a été refusé par ordonnance du 14 octobre 2024, confirmée par arrêt de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois le 11 avril 2025.

C'est dans ce contexte que, le 28 novembre 2024, la recourante a déposé une plainte contre son époux dans la mesure où il ne s'était pas acquitté pour ledit mois de l'intégralité de la contribution due. Dans ce même écrit, elle lui a fait grief d'avoir apposé à son insu sa signature sur deux documents.

4.6.1. La recourante indique avoir eu connaissance le 23 mai 2021 de l'apposition de sa signature par son époux, à son insu, sur une demande de transfert d'avoirs issus de son deuxième pilier. Elle a aussi prétendu que le montant transféré à son époux à la suite de cette demande de transfert, à laquelle elle était tenue de donner son accord, aurait mené l'intéressé à retirer près de CHF 200'000.- en espèces. Or, la photographie du document, daté du 11 novembre 2019, qu'elle a produite à l'appui de sa plainte, mentionne expressément que le transfert, dont le montant n'est pas indiqué, devait intervenir sur un compte auprès de M______ appartenant à son époux. C'est au demeurant ce que ce dernier a aussi indiqué à la police. La recourante ne dit mot à cet égard dans son recours. Il sied de rappeler qu'en novembre 2019, les époux n'étaient pas encore séparés, puisqu'ils ne l'ont été qu'en octobre 2020. Il est dans ces conditions difficile, en particulier s'agissant de la découverte du document litigieux en mai 2021 déjà, de concevoir que la recourante ne se soit souciée des conséquences qu'il aurait eues sur sa propre situation qu'au mois de novembre 2024, compte tenu de la séparation intervenue en octobre 2020, et en particulier de ce qu'il serait advenu des près de CHF 200'000.- ainsi retirés du deuxième pilier de son époux.

S'y ajoute que la notaire qui a eu à légaliser les deux signatures apposées sur ce document a, devant la police, expliqué le processus d'enregistrement d'une signature en l'étude, exigeant la présence de la personne concernée. En l'occurrence, sur présentation par la police de la facture du 11 novembre 2019 au nom de son ancienne étude, cette notaire a expliqué que la seconde signature qui avait alors été légalisée devait être celle de la recourante. Elle avait, sur un document du même jour, certifié les signatures de C______ et de A______. Le formulaire de dépôt de signature de celle-ci – que l'étude K______ n'avait pas retrouvé mais dont elle-même avait conservé une copie qu'elle a présentée à la police – datait également du 11 novembre 2019, ce qui laissait supposer que l'intéressée était présente physiquement le jour en question pour le signer devant elle. Elle pouvait attester que A______ avait signé devant elle le formulaire de dépôt de signature mais pas que le formulaire de retrait – litigieux – l'avait été en sa présence. En règle générale, lorsqu'un client venait déposer sa signature, c'était qu'il avait également des documents à faire certifier, le tout étant signé en sa présence. Enfin, si elle avait eu le moindre doute sur la signature de A______, elle n'aurait pas signé la légalisation. Ainsi, quand bien même le mis en cause a de son côté déclaré à la police que son épouse avait signé ce document à leur ancien domicile conjugal à E______, ceci n'exclut pas pour autant que la notaire ait procédé comme elle a indiqué en avoir le souvenir. Enfin, la plaignante, à l'appui de sa plainte, a produit un courriel du 31 mai 2021, de l'étude K______, lui confirmant que, conformément à sa demande du 26 mai précédant, son dépôt de signature avait été détruit.

Il résulte de ce qui précède une absence de soupçons suffisants fondant une prévention de faux dans les titres à l'encontre de l'époux de la plaignante s'agissant de ce premier document.

Dans ces conditions, pour autant que le destinataire du document litigieux soit encore en possession du document original du 11 novembre 2019, une expertise graphologique n'apparait, par appréciation anticipée des preuves, pas nécessaire, ce que le Ministère public a constaté à juste titre. Il en va de même de l'audition de la plaignante et d'une confrontation avec son époux, dont il ne peut être attendu autre chose que le maintien de leurs positions respectives, dores et déjà connues.

4.6.2. La recourante soutient que son époux aurait, le 1er octobre 2020, apposé sa signature à elle sur un contrat de courtage la liant, sans qu'elle n'en fût avertie, à la société N______ AG, ce qu'elle avait découvert "avec stupéfaction" quelques semaines plus tard. Il résulte de la procédure, et en particulier de ses propres affirmations, qu'en janvier 2020, son époux lui avait demandé de contracter un prêt hypothécaire d'un montant de CHF 300'000.-, somme qu'elle devait lui prêter. Ce prêt grèverait l'appartement dont elle était propriétaire à E______. Elle lui avait demandé de trouver le taux d'intérêt le plus avantageux pour un tel emprunt. Il était "hautement vraisemblable" que l'intéressé eût imité sa signature à cette occasion, avec pour conséquence qu'elle avait contracté une dette de CHF 300'000.- et était encore tenue de s'acquitter des intérêts hypothécaires à hauteur de CHF 2'262.- par an.

Devant la police, le mis en cause a expliqué que le contrat litigieux autorisait uniquement la divulgation des informations nécessaires à l'obtention d'un crédit hypothécaire. Son épouse avait ensuite accepté l'offre de P______, démarchée par N______ AG, relative au prêt hypothécaire. C'était elle qui avait perçu ce montant qu'elle lui avait prêté pour couvrir les dépenses de la maison et de la famille, leur niveau de vie durant les "belles années" ayant été très élevé. Dans son recours, la plaignante ne remet nullement en cause cette explication, concédant au contraire avoir prêté ledit montant à son époux en plusieurs tranches, ce qui met à mal sa version des faits selon laquelle elle aurait en définitive été liée contre sa volonté par un emprunt hypothécaire signé avec P______, et non pas la société N______ AG et qu'elle aurait tout ignoré de la destination des CHF 300'000.-, étant rappelé qu'au début de l'année 2020, le couple n'était pas séparé et ne l'a été que des mois plus tard.

Enfin, pour le reste, ce qui n'est pas de nature à étayer des allégations de la commission de faux dans titres par son époux à son préjudice, la recourante se livre à des conjectures quant au nombre de documents sur lesquels son époux aurait pu apposer sa signature, dans la mesure où il disposerait sur son ordinateur de sa signature électronique et pourrait en faire usage à sa guise à son insu. Comme déjà relevé, la recourante et le mis en cause sont en conflit depuis le mois d'août 2022 sur la contribution d'entretien due à celle-ci à la suite de leur séparation. S'il ne saurait être remis en cause que cela pèse psychologiquement sur la recourante, ses considérations selon lesquelles son époux aurait pour "dessein de vouloir la spolier", ce qui ne "para[îtrai]t pas si fantaisiste, bien au contraire", ne suffisent pas encore à fonder un soupçon de commission d'infraction pénale à son préjudice.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que le Ministère public n'est pas entré en matière sur ce point encore de la plainte et de même considéré que ni une expertise graphologique, ni l'audition de la plaignante, ni une confrontation avec son époux conduiraient à un autre constat.

5.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

6.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 1'000.- pour l'instance de recours (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03), montant qui sera prélevé sur les sûretés.

7.             Corrélativement, aucun dépens ne lui sera alloué (ATF 144 IV 207 consid. 1.8.2).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante, soit pour elle son conseil, et au Ministère public.

Le communique pour information à C______, soit pour lui son conseil.

Siégeant :

Madame Valérie LAUBER, présidente; Madame Françoise SAILLEN AGAD et
Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Monsieur Sandro COLUNI, greffier.

Le greffier :

Sandro COLUNI

 

La présidente :

Valérie LAUBER

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).


 

P/27565/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

Total

CHF

1'000.00