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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/15823/2023

ACPR/344/2024 du 08.05.2024 sur ONMMP/1264/2024 ( MP ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : DÉCISION D'IRRECEVABILITÉ;QUALITÉ POUR AGIR ET RECOURIR;ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE
Normes : CPP.382.al1

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/15823/2023 ACPR/344/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 8 mai 2024

 

Entre

A______, domiciliée ______ [GE], agissant en personne,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière partielle rendue le 18 mars 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 28 mars 2024, A______, prévenue, recourt contre l'ordonnance du 18 mars 2024, notifiée le lendemain, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur les faits pouvant être qualifiés d'injure, les autres faits retenus contre elle faisant l'objet d'une ordonnance pénale séparée du même jour.

La recourante conclut à l'annulation de ladite ordonnance, à ce qu'il soit ordonné au Ministère public de procéder à divers actes d'instruction, qu'elle énumère, et au classement "dans sa totalité [de] la procédure à [s]on encontre", ou "à tout le moins rendre une ordonnance de non-entrée en matière totale".

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 18 février 2023 peu après minuit, des policiers patrouillant en voiture sont intervenus pour un conflit sur la voie publique à la rue 1______, [code postal] Genève.

b. Entendue par la police le 20 février 2023, A______ a déclaré que, alors qu'elle se trouvait dans la nuit du 17 au 18 février 2023 avec ses amis, B______ et C______, à attendre le bus, un individu, D______, était sorti d'un immeuble avec son chien et leur avait crié dessus en raison du bruit qu'ils faisaient, en diffusant notamment de la musique. Il était parti, puis revenu, et l'avait traitée notamment de "pute" et dit qu'il allait lui "casser la gueule". Une altercation physique s'était ensuivie. Il lui avait asséné un coup à la tête qui l'avait "sonnée". En état de choc, elle avait fait usage de son spray au poivre au niveau du visage de son agresseur.

Depuis ces événements, elle se sentait mal et était choquée. Elle déposait plainte en raison de ces faits.

c. Le 28 février 2023, D______ a également déposé plainte en lien avec cette altercation. Il a expliqué qu'il avait été réveillé par du bruit provenant d'un groupe de personnes en bas de son immeuble, à l'arrêt de bus. Après avoir supporté les nuisances pendant environ 30 minutes, il était descendu pour aller au tabac et avait demandé en passant au groupe, composé d'un homme et de deux femmes, de faire moins de bruit. Le ton était monté des deux côtés et des injures avaient été échangées. En revenant du tabac, il avait demandé à l'homme s'il pouvait lui parler. L'une des filles, soit A______, s'était alors interposée et lui avait dit "tu ne lui parles pas enculé". Il l'avait repoussée avec une main, sans agressivité et elle avait sorti son spray au poivre dont elle l'avait aspergé. Une altercation physique s'était ensuivie, durant laquelle il avait notamment été mis au sol par l'homme et visé une nouvelle fois par un jet de spray.

d. Entendue une nouvelle fois par la police le 4 avril 2023 en qualité de prévenue, A______ a indiqué qu'elle n'avait fait usage de son spray qu'une seule fois juste après que D______ l'avait frappée à la tempe. Elle ne se souvenait pas qu'elle en aurait fait usage une nouvelle fois alors que celui-là s'était retrouvé au sol et s'agrippait à elle. Elle ne se souvenait pas l'avoir frappé et ne l'avait pas injurié. Elle n'employait pas le terme "d'enculé".

e. Auditionnés par la police, C______ et B______ ont confirmé que D______ avait traité A______ de "pute".

f. Par ordonnance pénale du 18 mars 2024, le Procureur a rejeté les réquisitions de preuves de A______ du 23 novembre 2023 et l'a déclarée coupable de voies de fait pour avoir, lors de cette altercation, giclé D______ deux fois au visage avec son spray au poivre et lui avoir asséné deux coups de poing.

g. A______ y a fait opposition.

h. Parallèlement, le même jour, le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur la plainte formée par A______ contre D______ pour injure, voies de fait, voire lésions corporelles simples.

C. Dans la décision querellée, le Ministère public a retenu que des injures avaient été échangées entre A______ et D______, ce qui était confirmé par les déclarations figurant à la procédure. Les conditions de l’art. 177 al. 3 CP étant réalisées, il convenait de renoncer à entrer en matière "également" sur les faits pouvant être qualifiés d'injure au sens de l'art. 177 CP.

D. a. À l'appui de son recours, A______ développe les raisons pour lesquelles il était évident que les éléments constitutifs de lésions corporelles simples, commises sur sa personne par D______, seraient réalisés. Le refus du Ministère public d'instruire violait son droit d'être entendue.

"En définitive, aucune infraction ne p[ouvait] être retenue à [s]on encontre".

b. À réception, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures.

EN DROIT :

1.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

2.             Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane de la prévenue, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP).

3.             La question de la qualité pour agir de la recourante se pose toutefois sous l'angle de l'intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

3.1. Les mémoires de recours doivent être motivés (cf. art. 385 et 396 CPP). Dans le cadre de cette obligation, il appartient en particulier au recourant d'établir sa qualité pour recourir – dont son intérêt juridique au sens de l'art. 382 CPP –, notamment lorsque celle-ci n'est pas d'emblée évidente (arrêt du Tribunal fédéral 1B_304/2020 du 3 décembre 2020 consid. 2.1 et la référence citée).

3.2. À teneur de l'art. 382 al. 1 CPP, toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci.

3.3. Il est un principe général de procédure que la qualité pour interjeter un recours n'est reconnue que si le recourant est lésé personnellement par le dispositif de la décision, un recours contre les motifs de celle-ci étant irrecevable (ATF 96 IV 64 : JT 1970 IV 131). D'une manière générale, les personnes poursuivies ne peuvent recourir contre une décision rendue en leur faveur ; tel est ainsi le cas lors d'un acquittement pur et simple sans frais, alors même qu'elles s'estimeraient lésées par les considérants de ces décisions (ATF 101 IV 327 ; ATF 103 II 155 consid. 3 : JT 278 I 518 ; DCPR/125/2011 du 31 mai 2011). Un simple intérêt de fait ne suffit pas à conférer la qualité pour recourir. Le recourant doit établir que la décision attaquée viole une règle de droit qui a pour but de protéger ses intérêts et qu'il peut par conséquent en déduire un droit subjectif (ATF 133 IV 121 consid. 1.2. p. 124 ; ACPR/248/2012 du 18 juin 2012).

3.4. Le recours d'une partie qui n'est pas concrètement lésée par la décision est en principe irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 1B_669/2012 du 12 mars 2013 consid. c. 2.3.1).

3.5. Selon l'art. 310 al. 1 let. c CPP, le Ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière lorsqu'il peut être renoncé à toute poursuite ou à toute sanction en vertu de dispositions légales (art. 310 al. 1 let. c cum art. 8 al. 1 CPP), notamment si la culpabilité de l'auteur et les conséquences de son acte sont peu importantes (art. 52 CP) ou s'il a été directement atteint par les conséquences de son acte au point qu'une peine serait inappropriée (art. 54 CP).

3.6. En l'espèce, dans son acte, la recourante vise clairement l'ordonnance de non-entrée en matière prononcée en sa faveur, dont elle retranscrit le dispositif (c.f. p. 2 let. A du recours). Or, on discerne mal quel intérêt elle tirerait à contester une décision qui lui donne raison et un tel intérêt ne ressort pas de la motivation de son recours. L'ordonnance de non-entrée en matière est en effet un acte par lequel le Ministère public a décidé de ne pas la poursuivre pour l'infraction d'injure.

Par ailleurs, la recourante ne saurait, par le biais de son recours, obtenir un "classement total" des faits retenus à son encontre en lien avec l'altercation dans la nuit du 17 au 18 février 2023, puisque cette problématique fait l'objet de l'ordonnance pénale du 18 mars 2024 contre laquelle elle a formé opposition.

Tout autre est encore la question des infractions dont la recourante estime avoir été victime et qui font l'objet de sa plainte du 20 février 2023. Cette problématique n'est toutefois pas l'objet de la décision de non-entrée en matière querellée, et le recours n'est clairement pas dirigé contre cette autre décision.

4.             Le recours doit donc être déclaré irrecevable, faute d'intérêt juridique dont peut se prévaloir la recourante à l'annulation de l'ordonnance de non-entrée en matière.

5.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Déclare le recours irrecevable.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et
Madame Valérie LAUBER, juges; Monsieur Selim AMMANN, greffier.

 

Le greffier :

Selim AMMANN

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/15823/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

900.00

Total

CHF

985.00