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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/25515/2023

ACPR/11/2024 du 11.01.2024 sur OTMC/3769/2023 ( TMC ) , REJETE

Recours TF déposé le 20.02.2024, rendu le 09.04.2024, ADMIS/PARTIEL, 7B_198/2024
Descripteurs : SOUPÇON;PREUVE ILLICITE;NOUVEAU MOYEN DE FAIT
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/25515/2023 ACPR/11/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 11 janvier 2024

Entre

A______, détenu à la prison de B______, représenté par Me C______, avocat,

recourant

contre l'ordonnance de refus de mise en liberté rendue le 15 décembre 2023 par le Tribunal des mesures de contrainte

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés

 


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 2 janvier 2024, A______ forme un recours contre l'ordonnance du 15 décembre 2023, notifiée le 20 suivant, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après, TMC) a refusé de le mettre en liberté.

L’acte ne comporte pas de conclusions.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.             Le 20 novembre 2023, vers 15h.15, A______, ressortissant guinéen sans titre de séjour, a été interpellé par un policier pendant qu’il se déplaçait en tram. À un arrêt, hors du véhicule, des vérifications « simples » ont été immédiatement entreprises sur le téléphone mobile dont il était porteur. Selon le policier, deux conversations par la messagerie WHATSAPP laissaient apparaître des « rencontres douteuses » possiblement en lien avec un trafic de cocaïne.

b.             A______ a été conduit au poste. Aucun stupéfiant n’a été découvert sur lui. Il a affirmé être venu d’Espagne, dormir dans la rue et se nourrir, notamment, de ce que lui procurait l’une des deux personnes dont les coordonnées étaient révélées par les conversations susmentionnées ; il n’était venu à Genève que le temps de récupérer des effets personnels dans un foyer.

c.              L’appareil téléphonique a été saisi et inventorié. Le recours formé contre cette décision a été rejeté le 20 décembre 2023 (ACPR/988/2023).

d.             Les deux interlocutrices sur WhatsApp ont été identifiées et entendues, par la police, puis, contradictoirement, par le Ministère public. Elles ont affirmé que A______ leur avait livré, ou devait le faire, de la cocaïne pour leur consommation personnelle, comme il l’avait fait à plusieurs reprises déjà par le passé. A______ l’a contesté, même s’il a admis avoir reçu de l’une d’elles de l’argent « à crédit » pour lui fournir de la cocaïne, « marchandise » qu’il n’avait pas sur lui, et avoir été contacté par l’autre pour lui en procurer. Par son avocat, il a contesté que les auditions des prénommées eussent été régulières, que ce soit à raison du statut qui leur a été conféré ou de la mise au courant de leurs droits procéduraux.

e.              À la police, A______, après avoir signé sur conseil de son avocat l’autorisation de fouiller le téléphone portable (et fait modifier de « 1600 » à « 2030 » l’heure à laquelle il l’a paraphée), a prétendu qu’il ne se souvenait pas du code de déverrouillage. Par la suite, il déclarera révoquer l’autorisation susmentionnée, puis demandera la mise sous scellés de l’appareil ; démarche que le TMC déclarera irrecevable, pour cause de tardiveté, le 26 décembre 2023.

f.              Le 22 novembre 2023, A______ a été placé en détention provisoire pour une durée de trois mois par le TMC (il a attaqué cette décision, sur laquelle il a été statué séparément, cf. ACPR/10/2024 du 11 janvier 2024).

g.             Le lendemain, 23 novembre 2023, il a vainement demandé sa libération immédiate au Ministère public, reprenant les faits, moyens et arguments qu’il avait fait valoir par-devant le TMC. Son recours formé contre la décision de cette autorité le maintenant en détention provisoire a été rejeté le 22 décembre 2023 (ACPR/998/2023).

h.             Dans l’intervalle, le 7 décembre 2023, A______ a fait porter une lettre – intitulée « DEMANDE DE MISE EN LIBERTÉ IMMÉDIATE (CPP 228 I) – VICES DE PROCÉDURE – DEMANDE D’INSTRUCTION COMPLÉMENTAIRE – CP 261bis et saisine IGS – DEMANDE DE MISE EN SÉCURITÉ IMAGES VIDÉOSURVEILLANCE TPG (Rappel et extension urgente) – DEMANDE DE MISE EN SÉCURITÉ CONVERSATIONS DE POLICE AVEC CENTRALE – PLAINTE PÉNALE contre activités de la Police »au Ministère public, censée selon lui compléter sa requête du 23 novembre 2023 et demandant derechef sa libération. L’accès de la police à ses conversations Whatsapp était une mesure de contrainte, non une vérification d’usage. Il n’y avait même pas lieu de le confronter aux deux toxicomanes, puisque leurs noms étaient apparus sur des moyens de preuve inexploitables. Faute de charges, il devait être libéré, et la procédure classée. Par ailleurs, l’Inspection générale des services de police devait s’intéresser aux circonstances de son interpellation, car il avait, en réalité, été victime d’un contrôle « au faciès ».

Dans ses déterminations du 14 décembre 2023, il soulignera (p. 4) que, puisqu’il n’avait pas transmis de code d’accès, il était « matériellement impossible » que la police pût lire les données contenues dans son téléphone à l’heure à laquelle il avait signé l’autorisation de fouille.

C. Dans la décision querellée, le TMC retient que les charges, qui portent sur un trafic de stupéfiants et aussi sur un séjour illégal en Suisse, sont graves et suffisantes ; elles ne reposaient pas sur des preuves manifestement inexploitables ou frappées de nullité, dès lors que l’autorisation de fouiller le téléphone avait été donnée par écrit, le 20 novembre 2023, fût-ce à 20h.30, mais surtout en présence de l’avocat du prévenu. Les risques de fuite, collusion et réitération subsistaient à l’identique de leur examen précédent, sans élément nouveau qui justifierait leur reconsidération. Aucune mesure de substitution n’entrait en considération.

D. a. À l'appui de son recours, A______ répète (cf. ACPR/988/2023) que la fouille de son téléphone portable n’était pas admissible : elle était une mesure de contrainte « anticipée illégale ». Elle seule, avait permis un rattachement aux deux toxicomanes. Il avait signé « à contrecœur » l’autorisation de fouille, à 20h.30 – c’est-à-dire après les auditions des toxicomanes –, et son conseil ne donnerait plus jamais un tel conseil. Or, à 16h., son téléphone n’était « pas encore » verrouillé. Par ailleurs, le policier qui l’avait interpellé avait « maquillé » les heures auxquelles les toxicomanes s’étaient vu notifier leurs droits procéduraux à l’occasion de leurs auditions. Sans ces moyens de preuve, il n’existait pas de charges contre lui.

Le mémoire de recours se termine par un renvoi « aux conclusions exprimées sous chiffre premier de la présente », mais le document est dépourvu d’une telle subdivision, tout comme de conclusions désignées comme telles.

b. À réception, la cause a été gardée à juger.

E. Le 19 décembre 2023, le Ministère public a demandé aux TPG de lui fournir toute image de vidéo-surveillance qui serait disponible sur les circonstances de l’appréhension de A______ dans le tram. Le 2 janvier 2024, il a prié la police d’aller de l’avant, maintenant que les scellés ont été levés.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé dans le délai prescrit (art. 90 al. 2, 91 al. 1, 384 let. b, 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Au vu des développements qui suivent, la cause pouvait être traitée d’emblée sans échange d’écritures ni débats (art. 390 al. 2, 1ère phrase, a contrario CPP). Peu importe, par conséquent, que l’acte de recours, rédigé par un mandataire professionnel, ne comporte aucune conclusion – soit, fût-ce implicitement, ce que le recourant demande à l’autorité de recours (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 8 ad art. 390) –, et qu’il n’exprime notamment pas sa volonté d’obtenir l’annulation de la décision attaquée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1B_255/2012 du 15 mai 2012 consid. 2.1.), mais un abandon pur et simple des poursuites engagées contre lui, quand bien même il ne conteste pas la prévention d’infractions à la LÉI.

3.             Le recourant nie l'existence de toutes charges de trafic de stupéfiants, au motif que celles retenues par le premier juge auraient été recueillies dans des conditions qui les rendraient inexploitables.

3.1.       Comme l’a déjà rappelé la Chambre de céans sur un précédent recours du même prévenu (ACPR/988/2023), le juge de la détention n'a pas à se préoccuper du caractère exploitable d'une telle preuve (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2e éd, Bâle 2019, n. 7 ad art. 221 et les références). La décision d'exclure un moyen de preuve litigieux du dossier est du ressort de la direction de la procédure, respectivement du juge du fond. Il n'appartient, en principe, pas au juge de la détention de se prononcer sur ce point. Celui-ci vérifie l'existence de soupçons suffisants de culpabilité sur la base des résultats provisoires de l'instruction. Il peut ainsi tenir compte de moyens de preuve figurant au dossier, à moins toutefois que ceux-ci n'apparaissent d'emblée inexploitables (arrêt du Tribunal fédéral 1B_648/2022 du 19 janvier 2023 consid. 2.1).

3.2.       Dans l’évolution de la procédure depuis la décision précitée de la Chambre de céans, on ne discerne pas d’élément propre à infirmer cette analyse.

L’autorisation écrite de fouille qu’a signée puis rétractée le recourant n’a donc pas l’importance qu’il lui prête. Du reste, à teneur de dossier, la police n’a pas découvert d’éventuels autres acquéreurs de stupéfiants pendant que, si on comprend bien le recourant, son appareil était ouvert (ou déverrouillé) à disposition des enquêteurs.

En l’état, rien ne rend donc manifestement inexploitables, pour le juge de la détention, les preuves sur lesquelles se sont fondées les autorités précédentes pour placer et maintenir le recourant en détention provisoire.

4.             Dès lors, faute de fait nouveau, y compris sur le risque de fuite, la Chambre de céans peut purement et simplement renvoyer aux considérants de sa décision ACPR/998/2023, précitée, rejetant le recours formé contre la décision de refus de mise en liberté. Il conviendra toutefois qu’une célérité particulière (art. 5 al. 2 CPP) soit apportée à l’exécution des prochains actes d’enquête, dans la mesure où ils pourraient, cas échéant, utilement s’étendre à l’audition du policier à l’origine de l’appréhension, de la conduite et de l’audition du recourant au poste, et ce, indépendamment du traitement de la plainte apparemment déposée contre lui.

5.             Pour les motifs exprimés dans la décision susmentionnée, le recours, dénué de chances de succès, voire frisant la témérité, ne saurait valoir l’assistance judiciaire à son auteur, qui n’y prétend d’ailleurs pas.

6.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). La défense d'office n’empêche, en effet, pas que les frais de l’instance doivent être fixés (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

* * * * *



 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Refuse d’étendre à la présente procédure de recours le mandat d’office de Me C______.

Met à la charge de A______ les frais de l’instance, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit pour lui son défenseur), au Tribunal des mesures de contrainte et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/25515/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

-

CHF

Total

CHF

900.00