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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/23852/2022

ACPR/921/2023 du 27.11.2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : RETARD INJUSTIFIÉ;PRINCIPE DE LA CÉLÉRITÉ
Normes : CPP.5

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/23852/2022 ACPR/921/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 27 novembre 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, représentée par Me Caroline FERRERO MENUT, avocate, Étude Canonica & Associés, rue François-Bellot 2, 1206 Genève,

recourante,

 

pour déni de justice et violation du principe de la célérité,

 

et


LE MINISTÈRE PUBLIC
de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 3 octobre 2023, A______ recourt pour déni de justice et violation du principe de la célérité de la part du Ministère public dans la présente procédure.

Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à la constatation d'un déni de justice et de la violation du principe de célérité; et à ce qu'il soit ordonné au Ministère public d'instruire, d'organiser une confrontation ainsi que de mettre en lieu sûr les biens lui appartenant se trouvant au domicile de B______, sis chemin 1______ 29 à C______ [GE].

b. Elle a versé les sûretés en CHF 1'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ a déposé plainte pénale le 9 novembre 2022 contre son frère, B______, pour vol. Par pacte successoral, ils avaient été désignés héritiers de leur mère adoptive, décédée le ______ 2022. L'exécuteur testamentaire avait établi un inventaire des biens se trouvant dans l'appartement de la défunte, sis chemin 1______ 9. Il avait été convenu entre son frère et l'exécuteur testamentaire qu'elle pourrait disposer d'un certain nombre de biens situés dans cet appartement, auxquels s'ajoutaient deux chandeliers et quelques autres objets sans valeur, ainsi que reprendre l'argenterie lui appartenant. Elle avait entreposé ces biens dans un garage au chemin 1______ 29 à C______. Courant de l'été 2022, l'exécuteur testamentaire lui avait demandé de débarrasser ledit garage, B______ ayant pris l'initiative de changer la serrure du garage. Après avoir fait ouvrir le garage par un serrurier, elle avait constaté qu'une statue de hibou de D______ estimée entre CHF 7'000.- et CHF 8'000.-, son argenterie et les deux chandeliers, qu'elle aurait entreposés, ne s'y trouvaient plus. Selon l'exécuteur testamentaire, B______ aurait conservé le hibou chez lui pour le protéger d'un vol. B______ n'avait jamais répondu à ses demandes de restitution. L'agent de police E______, du poste [du quartier] de F______, pouvait renseigner sur la situation actuelle de B______, qu'elle jugeait inquiétante.

b. Par plis des 13 et 27 janvier 2023 adressés au Ministère public, A______ s'est enquis de l'avancement de la procédure et a, dans le second, sollicité de pouvoir consulter le dossier.

c. Par courrier du 30 janvier 2023, le Ministère public l'a informée que le dossier n'était pas consultable, les preuves principales n'ayant pas été administrées.

d. Le 7 février 2023, A______ a relancé le Ministère public sur l'avancement de la procédure. Elle craignait une détérioration des objets de valeur lui appartenant et qui étaient certainement entreposés dans l'appartement de son frère, lequel était dans un état de dégradation avancé selon ses informations.

e. Le 1er mars 2023, le Ministère public a transmis la plainte à la police pour complément d'enquête.

f. La recourante a réitéré sa demande par pli du 23 juin 2023.

g. Par courrier du 26 juin 2023, le Ministère public lui a indiqué que le dossier était actuellement en cours d'instruction à la police.

h. A______ a une nouvelle fois relancé le Ministère public le 6 juillet 2023.

C. a. À l'appui de son recours, A______ excipe une violation de l'art. 5 CPP. Le Ministère public ne répondant pas à ses courriers, elle ignorait si le moindre acte d'instruction avait été entrepris. Son frère avait eu tout le temps d'abîmer, déplacer ou revendre les biens qui lui appartenaient et qui se trouvaient en sa possession.

b. Dans ses observations du 6 novembre 2023, le Ministère public conclut au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. Il indique que le dossier a été transmis le 1er mars 2023 à la police pour complément d'enquête. Renseignements pris le même jour, cette dernière l'a informé être sur le point d'établir son rapport, étant précisé que B______ – qui voyageait très souvent à l'étranger et était difficilement joignable – avait été auditionné, tout comme l'exécuteur testamentaire, la semaine précédente. À réception dudit rapport, il se déterminerait sur l'ouverture d'une instruction et, le cas échéant, fixerait une audience de confrontation.

c. La recourante réplique. Elle s'étonne que le Ministère public ait attendu 4 mois avant de transmettre sa plainte à la police, malgré ses relances de janvier et février 2023, et ne se soit pas enquis de l'avancement de l'enquête depuis lors, malgré ses deux autres relances de juin et juillet 2023. Des objets de valeurs étaient en possession du mis en cause qui, marginalisé et ne travaillant pas – ce dont elle avait avisé le Ministère public –, avait donc eu à sa disposition quasiment une année pour les vendre ou s'en débarrasser.

d. Par pli du 20 novembre 2023, le Ministère public indique avoir reçu, le 17 novembre 2023, le rapport de renseignements et convoqué une audience de confrontation ainsi que d'audition de l'exécuteur testamentaire le 26 janvier prochain.


 

EN DROIT :

1.             Le recours pour déni de justice ou retard injustifié n'est soumis à aucun délai (art. 396 al. 2 CPP). Par ailleurs, le présent recours a été déposé selon la forme prescrite (art. 393 et 396 al. 1 CPP) et émane de la partie plaignante, qui a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à ce qu'il soit statué sur sa plainte (art. 104 al.1 let. b et 382 CPP). Partant, il est recevable.

2.             2.1. Les art. 29 al. 1 Cst féd. et 5 CPP garantissent à toute personne le droit à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable; ils consacrent le principe de célérité et prohibent le retard injustifié à statuer. L'autorité viole cette garantie lorsqu'elle ne rend pas une décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou celui que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnable. Le caractère approprié de ce délai s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard notamment à la complexité de l'affaire, à l'enjeu du litige pour l'intéressé, à son comportement ainsi qu'à celui des autorités compétentes. Des périodes d'activité intense peuvent compenser le fait que le dossier a été laissé momentanément de côté en raison d'autres affaires. L'on ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure; lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut. Selon la jurisprudence, apparaît comme une carence choquante une inactivité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction (arrêt du Tribunal fédéral 6B_172/2020 du 28 avril 2020 consid. 5.1 et les références citées).

2.2. In casu, s'il est établi que le Ministère public n'a transmis la plainte de la recourante à la police pour complément d'enquête que le 1er mars 2023 soit presque 4 mois après son dépôt, cette durée n'apparaît pas encore choquante au vu de la jurisprudence. Il aurait cependant été judicieux que le Ministère public, qui avait été relancé par la plaignante sur l'avancement du dossier le 7 février 2023 l'en informe, ce qui aurait éventuellement permis d'éviter une nouvelle relance en juin 2023, à laquelle il a répondu. Le Ministère public ne prétend pas s'être enquis auprès de la police de l'avancement de l'enquête, alors que la plaignante l'avait encore une fois relancé à ce propos. Il n'a contacté la police à cette fin qu'à réception du recours, ce qui peut sembler peu rigoureux.

Ce nonobstant, on ne saurait lui reprocher d'être resté totalement inactif depuis le dépôt de la plainte en novembre 2022.

L'apparente lenteur dans la reddition du rapport de renseignements – sans lequel l'enquête ne pouvait progresser – n'est pas le fait du magistrat, la police, contactée par ce dernier, ayant indiqué que le mis en cause aurait été difficilement joignable.

Ledit rapport ayant désormais été reçu par le Ministère public, celui-ci a immédiatement convoqué une audience de confrontation des parties et d'audition de l'exécuteur testamentaire pour le 26 janvier prochain.

Les autres actes d'instruction sollicités peuvent ainsi apparaître prématurés à ce stade.

Compte tenu de ce qui précède, on ne saurait ainsi retenir, eu égard à la jurisprudence susmentionnée, un retard injustifié du Ministère public à statuer ni une violation du principe de la célérité.

3. Le recours, infondé, est rejeté.

4. La recourante, qui succombe, supportera les frais de la procédure envers l'État, fixés en totalité à CHF 1'000.-, (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui seront arrêtés à CHF 1'000.-

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante, soit pour elle son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/23852/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

Total

CHF

1'000.00