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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/4656/2023

ACPR/642/2023 du 16.08.2023 sur ONMMP/2176/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : SOUPÇON
Normes : CPP.310

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/4656/2023 ACPR/642/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 16 août 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, représentée par Me Vincent SPIRA, avocat, Spira + Associées, rue De-Candolle 28, 1205 Genève,

recourante

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 2 juin 2023 par le Ministère public

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé

 


EN FAIT :

A.           a. Par acte déposé le 13 juin 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 2 précédent, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte du 27 février 2023 contre B______, son frère.

Le recourante conclut, préalablement, à l’octroi de l’assistance judiciaire gratuite et, principalement, à l'annulation de cette ordonnance et à ce que soit ordonnée l’ouverture d’une instruction contre le prénommé, en particulier pour l’audition de deux témoins.

b. Elle a été dispensée du paiement de sûretés (art. 383 al. 1 CPP).

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.             Le 1er février 2023, A______ aurait été agressée par B______ alors qu’elle cheminait sur le pont C______, à Genève. Elle aurait reçu un coup de poing au nez et un autre au visage. Peu après, elle a été rejointe par une autre amie, dont elle ne connaît que le prénom, qui lui a écrit un message comportant notamment le passage suivant : «  il n’a pas à te toucher gratuitement  ». Un constat médical lui a été délivré à l’occasion d’une consultation, le 8 suivant ; il ne relève pas de tuméfaction ni d’hématome au visage, mais une douleur à la palpation du nez, ainsi que ruminations, stress et cauchemars.

b.             Entendu par la police par suite de la plainte pénale, B______ a contesté toute violence. Le tiers qui l’accompagnait le 1er février 2023, également entendu, n’a gardé le souvenir que d’un conflit verbal, sans coups.

C.           Dans la décision querellée, le Ministère public retient que les déclarations des protagonistes étaient contradictoires, qu’il n’existait pas de témoin neutre des faits et que les photographies produites avec la plainte n’étaient pas datées.

D.           a. À l'appui de son recours, A______ s’étonne que le Ministère public n’ait pas pris en compte sa rencontre survenue avec son amie immédiatement après les faits, les messages échangés à cette occasion, ainsi que le constat médical. Les déclarations du tiers qui accompagnait B______ ne pouvaient être accueillies sans autre comme un élément à décharge ; les deux avaient eu le temps de s’accorder sur une version à fournir. Elle s’était ensuite ouverte des faits non seulement à l’amie précitée, mais à une autre encore, avec qui elle avait rendez-vous peu après. Il eût fallu les entendre, établir la date des photos (en inspectant le téléphone portable qui les avait prises), puis confronter les parties.

b. À réception, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable, pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 396 al. 1, 390 al. 1 et 385 al. 1 CPP), concerner une décision du Ministère public sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 310 al. 2, 322 al. 2 et 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la partie plaignante, qui a un intérêt juridiquement protégé à l’annulation ou à la modification de la décision entreprise (art. 382 al. 1 et 104 al. 1 let. b CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence.

3.             Dans sa plainte, la recourante s’estime victime de lésions corporelles simples de la part de son frère, à raison des coups qu’il lui a donnés. Dans son recours, elle se plaint d’une constatation incomplète des faits à cet égard.

3.1.       Selon l'art. 123 ch. 1 CP, celui qui, intentionnellement, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. Cette disposition concerne les lésions du corps humain ou de la santé qui ne peuvent être qualifiées de graves au sens de l'art. 122 CP. Elle protège l'intégrité corporelle et la santé tant physique que psychique. Sous l'effet d'un choc ou au moyen d'un objet, l'auteur dégrade le corps humain d'autrui, que la lésion soit interne ou externe ; il provoque une fracture, une foulure, une coupure ou toute autre altération constatable du corps humain (ATF 134 IV 189 consid. 1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_187/2015 du 28 avril 2015 consid. 2.1).

3.2.       Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage in dubio pro duriore. Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et 2 al. 2 CPP en relation avec les art. 319 al. 1 et 324 al. 1 CPP ; ATF 138 IV 86 consid. 4.2) et signifie qu'en principe un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies (ATF 146 IV 68 consid. 2.1). La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave. En effet, en cas de doute s'agissant de la situation factuelle ou juridique, ce n'est pas à l'autorité d'instruction ou d'accusation mais au juge matériellement compétent qu'il appartient de se prononcer (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1).

Une non-entrée en matière vise aussi des cas où la preuve d'une infraction, soit de la réalisation en fait de ses éléments constitutifs, n'est pas apportée par les pièces dont dispose le ministère public. Il faut que l'insuffisance de charges soit manifeste. De plus, le procureur doit examiner si une enquête, sous une forme ou sous une autre, serait en mesure d'apporter des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée. Ce n'est que si aucun acte d'enquête ne paraît pouvoir amener des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée que le ministère public peut rendre une ordonnance de non-entrée en matière. En cas de doute sur la possibilité d'apporter ultérieurement la preuve des faits en question, la non-entrée en matière est exclue (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 9 ad art. 310).

3.3.       En l’espèce, l’auteur visé dans la plainte pénale conteste les faits. Le témoin qui l’accompagnait n’a pas vu les coups de poing qu’aurait reçus la recourante. Certes, celle-ci produit des photos, non datées, ainsi que la capture d’écran d’un message, elle aussi non datée.

On ne peut cependant rien tirer d’aucun de ces éléments. Les photos (regroupées sous pièce n° 3 annexée à la plainte) laissent deviner des rougeurs, mais ne disent rien de la cause ou de l’auteur de celles-ci. Dès lors, on ne voit pas la nécessité de faire inspecter le téléphone portable de la recourante pour les dater (ni ce qui l’a empêchée de s’y livrer elle-même d’emblée ou encore à l’occasion de son recours).

Quant à lui, le constat médical – délivré à l’occasion d'une consultation demandée une semaine après la date des faits – ne décrit aucune lésion. Pour le surplus, il reprend la version des faits de la recourante.

Les personnes auxquelles la recourante affirme s’être confiée peu après la rencontre avec son frère n’ont, par définition, pu que recueillir les explications qu’elle leur a fournies. Qu’il y ait concomitance n’est pas de nature à accréditer les soupçons. L’extrait de message («  il n’a pas à te toucher gratuitement  ») ne nomme pas l’éventuel agresseur ; il n’est pas daté.

On ne voit pas ce qu’une confrontation de la recourante avec son frère ou avec le tiers présent aux côtés de celui-ci amènerait de différent. On peut raisonnablement présumer que chacun camperait sur ses positions.

4.             Dans ces conditions, une poursuite pénale contre le mis en cause se solderait selon toute vraisemblance par un acquittement. Le recours doit par conséquent être rejeté.

5.             Comme il était d’emblée dénué de chances de succès, la recourante ne saurait être exonérée des frais judiciaires (art. 136 al. 2 let. b CPP). En effet, un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'un plaideur raisonnable et de condition aisée renoncerait à engager la procédure en raison des frais qu'il s'exposerait à devoir supporter (ATF 133 III 614 consid. 5).

6.             La recourante assumera, par conséquent, les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03), étant précisé que la décision de refus de l’assistance judiciaire est rendue sans frais (art. 20 RAJ).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Rejette la demande d’assistance judiciaire.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante (soit, pour elle, son conseil) et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente ; Monsieur Christian COQUOZ et
Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges ; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 


P/4656/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10 03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

715.00

Total

CHF

800.00