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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/14581/2022

ACPR/52/2023 du 20.01.2023 sur ONMMP/2407/2022 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;VIOLATION DE DOMICILE;VOL(DROIT PÉNAL);SOUPÇON
Normes : CPP.310; CP.186; CP.139

 

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/14581/2022 ACPR/52/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 20 janvier 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, comparant en personne,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 8 juillet 2022 par le Ministère public,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 14 juillet 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 8 juillet 2022, notifiée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte du 5 précédent contre inconnu.

Sans prendre de conclusions formelles, la recourante déclare recourir contre cette décision.

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 800.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ a déposé plaintes en 1994, 2001 ainsi que les 30 juillet 2018 (P/2______/2018), 15 mars (P/3______/2022) et 27 juin 2022 (P/4______/2022) des chefs, notamment, de violation de domicile (art. 186 CP), dommages à la propriété (art. 144 CP) et vol (art. 139 CP), exposant, en substance, avoir subi, dès 1973, des cambriolages sans effraction, au cours desquels des déprédations et vols auraient été commis dans son logement. Plusieurs indices laissaient penser que ses voisins et un commerçant de E______ [GE] étaient à l’origine de ces méfaits.

Ces plaintes ont fait l'objet d'ordonnances de non-entrée en matière, dont celles des 30 juillet 2018 et 15 mars 2022, qui ont été confirmées par la Chambre de céans (ACPR/713/2019 du 17 septembre 2019 ; ACPR/509/2022 du 29 juillet 2022).

Les recours interjetés par A______ au Tribunal fédéral contre ces deux arrêts ont été déclarés irrecevables (arrêts 6B_1174/2019 du 23 octobre 2019 et 6B_982/2022 du 27 octobre 2022).

b. Par courrier du 5 juillet 2022, A______ a déposé une nouvelle plainte contre inconnu pour le vol de sa carte B______ [carte de débit] et d'un ticket de caisse.

En substance, elle y exposait avoir effectué ce jour-là des courses auprès du magasin C______ de la rue 1______ à Genève. À la caisse, après avoir réglé ses achats, elle avait rangé sa carte bancaire, enveloppée dans le ticket de caisse, dans son sac à main, puis avait regagné à pied son logement. Arrivée chez elle, vers 11h30, elle avait posé ses deux cabas et son sac à main sur une chaise à l'entrée puis, avant de sécuriser la porte, s'était rendue à la cuisine afin d'y déposer ses achats. Vers midi, lorsqu'elle avait ouvert son sac à main pour ranger sa carte B______ dans une pochette, elle avait eu la mauvaise surprise de constater que sa carte, de même que le ticket de caisse C______, n'y figuraient plus. À 12h29, après avoir contacté la hotline D______ [banque], sa carte bancaire avait été bloquée. La collaboratrice en ligne lui avait, par ailleurs, assuré qu'aucun versement ni prélèvement frauduleux n'avait été effectué à l'aide de celle-ci et qu'une nouvelle carte lui parviendrait dans un délai de deux ou trois jours ouvrables.

Le vol des objets précités avait vraisemblablement été commis lorsqu'elle était dans sa cuisine, mais pas au sein du magasin C______, ni sur le chemin du retour ni dans l'entrée de son immeuble, puisque personne ne s'était trouvé à proximité. Depuis quelques temps, la porte-fenêtre de son salon était à nouveau manipulée par un tiers. Aussi, comme exposé dans ses plaintes précédentes, des individus, qui parvenaient à contourner "toutes les mesures de sécurité", s'introduisaient de jour comme de nuit dans son logement, durant son absence ou sa présence. Elle soupçonnait fortement un commerçant de E______ et ses éventuels complices – parmi lesquels figuraient des employés de la C______ de la rue 1______ – d'être à l’origine de ces méfaits.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public considère que, malgré les éléments détaillés exposés par A______, il n'apparaissait pas possible, sauf à déployer des moyens aléatoires et disproportionnés, d'identifier l'auteur du vol dénoncé. Ne disposant d'aucun élément susceptible d'orienter des soupçons sur un ou des auteurs, il ne pouvait procéder (art. 310 al. 1 let. b CPP).

En tout état, la carte B______ de la plaignante n'avait pas été utilisée par un tiers et avait été remplacée, à la suite d'un rapide blocage. S'agissant du ticket de caisse, le paiement par carte permettait à l'intéressée de prouver l'existence des achats effectués auprès du magasin C______, le 5 juillet 2022, et, peut-être, de solliciter une copie du ticket, si cela lui paraissait nécessaire. Dans ces circonstances, elle n'avait subi aucun dommage ou celui-ci était "très minime".

D. a. Dans son recours, A______ reprend certains faits exposés dans ses plaintes des 30 juillet 2018, 15 et 27 juin 2022, au sujet notamment des cambriolages sans effraction qu'elle aurait subis à son domicile, dès 1973, et au cours desquels des vols et déprédations auraient été commis.

À ses yeux, il y avait suffisamment d'éléments au dossier pour retenir que le vol de sa carte B______ et du ticket de caisse C______ avait été commis dans son logement le 5 juillet 2022. Elle soupçonnait fortement un commerçant de E______, ses complices, ainsi que certains de ses voisins habitant des appartements aux 6ème, 7ème et 8ème étages d'être les auteurs de ces intrusions.

b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures ni débats.


 

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et – les formalités de notification n'ayant pas été respectées (art. 85 al. 2 CPP) – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. La recourante revient sur certains faits exposés dans ses plaintes pénales des 30 juillet 2018, 15 mars et 27 juillet 2022. Dans la mesure où il s'agit de procédures distinctes de celle objet du présent recours, la Chambre de céans ne saurait entrer en matière sur ceux-ci.

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             La recourante reproche au Ministère public de ne pas être entré en matière sur les faits exposés dans sa plainte du 5 juillet 2022.

3.1.  À teneur de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis. Le ministère public doit être certain que les faits ne sont pas punissables (ATF 137 IV 285 consid. 2.3 p. 287 et les références citées). En d'autres termes, il doit être évident que les faits dénoncés ne tombent pas sous le coup de la loi pénale (ATF 137 IV 285 consid. 2.3. p. 287).

Le principe "in dubio pro duriore" découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et 2 al. 2 CPP en relation avec les art. 19 al. 1 et 324 CPP ; ATF 138 IV 86 consid. 4.2 p. 91 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_185/2016 du 30 novembre 2016 consid. 2.1.2 et les références). Il signifie qu'en principe, un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un certain pouvoir d'appréciation. La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'infraction grave (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 p. 243 ; ATF 138 IV 86 consid. 4.1.2 p. 91 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_417/2017 du 10 janvier 2018 consid. 2.1.2; 6B_185/2016 du 30 novembre 2016 consid. 2.1.2 et les références). En cas de doute, il appartient donc au juge matériellement compétent de se prononcer (arrêt du Tribunal fédéral 6B_185/2016 du 20 novembre 2016 consid. 2.1.2 et les références).

Une non-entrée en matière vise aussi des cas où la preuve d'une infraction, soit de la réalisation en fait de ses éléments constitutifs, n'est pas apportée par les pièces dont dispose le ministère public. Il faut que l'insuffisance de charges soit manifeste. De plus, le procureur doit examiner si une enquête, sous une forme ou sous une autre, serait en mesure d'apporter des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée. Ce n'est que si aucun acte d'enquête ne paraît pouvoir amener des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée que le ministère public peut rendre une ordonnance de non-entrée en matière. En cas de doute sur la possibilité d'apporter ultérieurement la preuve des faits en question, la non-entrée en matière est exclue (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 9 ad art. 310; R. PFISTER-LIECHTI (éd.), La procédure pénale fédérale, Fondation pour la formation continue des juges suisses, Berne 2010, p. 62).

3.2.  Aux termes de l'art. 186 CP, se rend coupable de violation de domicile celui qui, notamment, d'une manière illicite et contre la volonté de l'ayant droit, aura pénétré dans une habitation.

3.3.  L'art. 139 CP punit celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l’approprier.

Si l'acte ne visait qu'un élément patrimonial de faible valeur, l'auteur sera, sur plainte, puni d'une amende (art. 172ter CP).

3.4.  En l'espèce, la recourante soutient qu'un tiers aurait pénétré dans son logement en sa présence et y aurait dérobé sa carte bancaire ainsi qu'un ticket de caisse rangés dans son sac à main.

La recourante ne prétend toutefois pas avoir été témoin de cette soustraction ni avoir constaté de signe d'effraction. Elle n'a pas non plus été en mesure d'expliquer la manière dont un tiers aurait pu s'introduire dans son appartement dans le très court laps de temps durant lequel elle était à la cuisine avant de sécuriser la porte, étant relevé qu'elle n'allègue pas avoir été suivie. Ainsi, hormis ses déclarations et convictions, le dossier ne recèle aucun indice concret laissant supposer qu'un tiers aurait pénétré dans son logement contre son gré et son insu et s'y serait approprié ce qu'elle affirme lui avoir été soustrait. Pour le surplus, il ressort du dossier que sa carte bancaire n'a pas été utilisée frauduleusement par un tiers.

S'agissant des auteurs soupçonnés, à savoir un commerçant de E______, ses éventuels complices et des voisins, la recourante n'apporte aucun élément concret laissant penser qu'ils seraient effectivement entrés dans son appartement et lui auraient volé les objets précités.

Il s'ensuit que ni la prévention de violation de domicile (art. 186 CP) ni celle de vol (art. 139 CP) ne sont établies avec une vraisemblance suffisante et aucune mesure d'instruction ne paraît à même de modifier ce constat. La décision du Ministère public ne prête dès lors pas le flanc à la critique.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera ainsi confirmée.

5.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à la recourante et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Mesdames Daniela CHIABUDINI et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/14581/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

715.00

-

CHF

Total

CHF

800.00