Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision
AARP/197/2025 du 27.05.2025 sur JTDP/64/2025 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE P/1953/2024 AARP/197/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale d'appel et de révision Arrêt du 27 mai 2025 |
Entre
A______, sans domicile connu, comparant par Me B______, avocate,
appelant,
contre le jugement JTDP/64/2025 rendu le 15 janvier 2025 par le Tribunal de police,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/64/2025 du 15 janvier 2025, par lequel le Tribunal de police (TP) a classé la procédure à son endroit s'agissant de l'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b de la Loi sur les étrangers et l'intégration (LEI) pour la période du 25 avril au 22 août 2023, l'a reconnu coupable d'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI pour la période du 23 août 2023 au 21 janvier 2024 et l'a condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 40.- l'unité, a renoncé à révoquer les sursis octroyés les 31 octobre 2019 et 1er février 2021 par le TP, l'a condamné aux frais de la procédure, a compensé la créance de l'État portant sur les frais de la procédure avec les valeurs patrimoniales séquestrées et a fixé l'indemnité due à l'avocate nommée d'office.
A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement, à une indemnisation de CHF 200.- par jour de détention injustifiée avec intérêts à 5% l'an dès le 21 janvier 2023, à la restitution des sommes saisies et à ce que les frais soient laissés à charge de l'État, subsidiairement, qu'il soit renoncé à lui infliger une peine au sens de l'art. 52 du Code pénal suisse (CP).
b. Selon l'ordonnance pénale du Ministère public (MP) du 22 janvier 2024, il était reproché à A______ d'avoir à Genève, du 25 avril 2023, lendemain de sa dernière condamnation, au 21 janvier 2024, date de son interpellation, séjourné sur le territoire suisse alors qu'il n'était pas au bénéfice des autorisations nécessaires, qu'il était démuni de papiers d'identité valables indiquant sa nationalité et dépourvu de moyens de subsistance légaux suffisants.
B. Les faits de la cause ne sont pas contestés par l'appelant et correspondent à la description qui en est faite dans l'acte d'accusation. Quelques éléments pertinents pour statuer sur les points encore litigieux sont rappelés ci-dessous, étant pour le surplus renvoyé au jugement de première instance (art. 82 al. 4 du Code de procédure pénale suisse [CPP]).
a. Le 21 janvier 2024, dans le cadre d'une opération C______ visant à déstabiliser le trafic de stupéfiants, l'attention des services de police s'est portée sur un individu noir, ultérieurement identifié comme étant A______, lequel se tenait à la rue de Berne. Lors de son contrôle, il s'est avéré qu'il était démuni de tout document d'identité et n'était pas en mesure de se légitimer.
b. Auditionné le même jour par la police, A______ a refusé de s'exprimer et a fait usage de son droit au silence.
c. Il ne s'est pas présenté à l'audience de première instance en raison de son départ à l'étranger et a été valablement représenté par son conseil.
C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite, avec l'accord des parties, au sens de l'art. 406 al. 2 CPP.
b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions. Il conclut préalablement à ce que toute preuve obtenue lors du contrôle de police du 9 janvier 2025 (recte : 21 janvier 2024) soit écartée conformément à l'art. 141 CPP.
Aux termes de l'art. 215 al. 1 CPP, un contrôle de police devait être fondé, au minimum, sur la présence d'un vague soupçon de la commission d'une infraction. Le profilage racial ou ethnique constituait une forme de discrimination et était contraire à l'art. 8 al. 2 de la Constitution fédérale (Cst) et aux art. 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) ainsi qu'à l'arrêt WA BAILE c. Suisse du 20 février 2024 CEDH. L'arrêt du Tribunal fédéral 7B_102/2024 du 11 mars 2024 apportait également des précisions en matière de "fishing expedition".
c. Le MP a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement attaqué.
d. Le TP n'a pas formé d'observations et s'est intégralement référé à son jugement.
D. a. A______, né le ______ 2001, est ressortissant guinéen et est célibataire. Selon son conseil, il est arrivé en Suisse en tant que mineur non accompagné et est resté sur le territoire suisse, jusqu'à son départ, vraisemblablement pour D______ (Maroc) pour une période allant du 2 au 13 janvier 2024.
b. Il ressort de l'extrait du casier judiciaire de A______, neuf condamnations prononcées entre juillet 2017 et juin 2024 :
- le 5 juillet 2017, par le Tribunal des mineurs du canton du Valais, à une peine privative de liberté de deux jours, pour infraction à l'art. 19 al. 1 de la Loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup) ;
- le 19 septembre 2017, par le Tribunal des mineurs du canton de Genève, à une peine privative de liberté de neuf jours, pour infraction à l'art. 19 al. 1 LStup et opposition aux actes de l'autorité (art. 286 CP) ;
- le 3 janvier 2018, par le Tribunal des mineurs du canton de Genève, à une privative de liberté de treize jours, pour infraction à l'art. 19 al. 1 LStup, à l'art. 115 al. 1 let. b LEI et à l'art. 19a LStup ;
- le 4 mars 2018, par le Tribunal des mineurs du canton de Genève, à une peine privative de liberté de dix jours, pour infraction à l'art. 19 al. 1 LStup ;
- le 18 octobre 2018, par le Tribunal des mineurs du canton de Genève, à une peine privative de liberté de trente-quatre jours, pour infractions au sens de l'art. 115 al. 1 let. b LEI et à l'art. 19 al. 1 LStup ;
- le 31 octobre 2019 par le TP à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 10.- l'unité, assortie du sursis, délai d'épreuve de trois ans, pour séjour illégal (délai d'épreuve prolongé d'une année, par jugement du 24 avril 2023) ;
- le 1er février 2021 par le MP à une peine pécuniaire de 120 jours-amende, à CHF 10.- l'unité, assortie du sursis, délai d'épreuve de trois ans, pour séjour illégal, non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée et délit contre la LStup (délai d'épreuve prolongé d'une année par jugement du 24 avril 2023) ;
- le 24 avril 2023 par le TP à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 10.- l'unité, pour séjour illégal, non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée et délit contre la LStup ;
- le 20 juin 2024 par le TP à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 10.- l'unité, pour séjour illégal (période pénale : 25 avril 2023 au 22 août 2023).
Le premier juge a considéré, au vu du casier judiciaire que, depuis 2018, A______ avait été condamné à six reprises pour séjour illégal ce qui représentait, sous l'angle des peines, un total de 144 unités pénales, ce qui n'a pas été remis en cause par l'appelant.
E. Me B______, défenseure d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, quatre heures d'activité de chef d'étude à CHF 200.- / l'heure.
EN DROIT :
1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).
La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).
2. 2.1. Se rend coupable d'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI, quiconque séjourne illégalement en Suisse.
2.2. Selon l'art. 215 al. 1 CPP, afin d'élucider une infraction, la police peut appréhender une personne et, au besoin, la conduire au poste dans les buts d'établir son identité (let. a), de l'interroger brièvement (let. b), de déterminer si elle a commis une infraction (let. c) ou de déterminer si des recherches doivent être entreprises à son sujet ou au sujet d'objets se trouvant en sa possession (let. d).
2.3. L'appréhension au sens de l'art. 215 CPP ne suppose pas d'emblée, au contraire de l'arrestation provisoire, que la personne concernée soit soupçonnée d'un délit (cf. ATF 139 IV 128 consid. 1.2 et ATF 142 IV 129 consid. 2.2). Lors d'une appréhension, parfois aussi appelée contrôle d'identité, la police restreint passagèrement la liberté de mouvement de personnes dans l'exercice de son droit d'investigation. Cette mesure lui permet d'établir l'identité d'une personne et de déterminer si elle a commis une infraction ou si elle a un lien quelconque avec celle-ci, pour avoir par exemple vu quelque chose ou pour se trouver en possession d'objets recherchés (Message du Conseil fédéral du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de procédure, FF 2006 1057, pp. 1205 et 1206).
2.4. Si la personne appréhendée ne se conforme pas à ses devoirs, découlant de l'art. 215 al. 2 let. b à d CPP, de présenter ses papiers d'identité, les objets qu'elle transporte avec elle, ainsi que d'ouvrir ses bagages ou son véhicule, la police a le droit de perquisitionner les vêtements, les objets qu'elle a sur elle, les bagages et les véhicules sans mandat de perquisition du Ministère public, aux conditions de l'art. 241 al. 3 CPP en relation avec l'art. 250 CPP. Ces perquisitions se limitent à la garantie des buts de l'appréhension au sens de l'art. 215 al. 1 CPP. Dans ce sens également, la police, en application de l'art. 241 al. 4 CPP, a le droit de fouiller la personne appréhendée sur la base de sa compétence propre, pour des raisons de sécurité, dans le but d'éloigner un danger (ATF 139 IV 128 consid. 1.2 et 1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 7B_102/2024 du 11 mars 2024 consid. 2.4.3).
2.5. L'appréhension à des fins d'investigations pénales au sens de l'art. 215 CPP requiert donc un vague soupçon de commission d'infraction et se distingue des contrôles de police préventifs et de sécurité, lesquels trouvent leurs fondements dans les lois cantonales de police (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1297/2017 du 26 juillet 2018 consid. 2.4.1).
2.6. Selon l'art. 45 al. 1 de la loi genevoise sur la police (LPol), celle-ci exerce ses tâches dans le respect des droits fondamentaux et des principes de légalité, de proportionnalité et d'intérêt public.
2.7. L'art. 47 LPol autorise les membres autorisés du personnel de la police d'exiger de toute personne qu'ils interpellent dans l'exercice de leur fonction qu'elle justifie de son identité (al. 1). Si la personne n'est pas en mesure de justifier de son identité et qu'un contrôle supplémentaire se révèle nécessaire, elle peut être conduite dans les locaux de la police pour y être identifiée (al. 2). L'identification doit être menée sans délai ; une fois cette formalité accomplie, la personne quitte immédiatement les locaux de la police (al. 3).
2.8. Dans l'arrêt 7B_102/2024 précité, visant le cas d'un ressortissant guinéen contrôlé, sans motif concret, par la police dans un tram à Genève, le TF a reconnu que la fouille du téléphone portable de l'intéressé dans la foulée s'apparentait à une "fishing expedition". Cette mesure était, en l'espèce, disproportionnée et, dépassant le cadre de l'art. 215 CPP, était soumise à l'exigence d'un mandat, selon l'art. 241 al. 1 CPP. Il n'y avait en particulier aucun indice, au moment de son interpellation, d'un lien du prévenu dans cette affaire avec un trafic de cocaïne contre lequel était dirigée l'opération C______ (cette opération étant, selon les explications fournies par le Tribunal des mesures de contrainte dans la procédure en question, "destinée spécifiquement à déstabiliser les réseaux de trafiquants de cocaïne en procédant à des contrôles en divers lieux du canton, soit une mission clairement d'intérêt, de sécurité et de santé publics", les policiers étant "formés pour identifier divers signes laissant penser qu'une personne pourrait s'adonner au trafic, signes qui peuvent être liés au comportement général d'une personne, à un état de stress et à tout autre élément pertinent relevant des techniques policières (...) " [consid. 2.5.2]). Le TF a également relevé que d'éventuels indices d'infractions à la LEI, lesquels ne ressortaient pas du dossier, ne justifiaient pas encore la perquisition d'un téléphone, cette mesure allant au-delà de ce qui était nécessaire dans le cadre d'une appréhension au sens de l'art. 215 CPP (consid. 2.4.4). Le TF avait cependant conclu qu'il "appartiendrait au juge du fond de procéder à la pesée des intérêts qu'implique l'application de l'art. 141 al. 2 CPP, en prenant en considération, d'une part, l'intérêt public à la poursuite d'infraction graves et, d'autre part l'intérêt privé au respect des droits fondamentaux qui prohibent en particulier le profilage racial et la "fishing expedition" (droit à la liberté personnelle, notamment)"(consid. 2.6.3).
2.9. La CEDH a récemment condamné la Suisse pour profilage racial, en violation des art. 8 et 14 CEDH (arrêt CourEDH Wa Baile c. Suisse du 20 février 2024, réquisitions n° 43868/18 et 25883/21). Le cas concernait un suisse d'origine kenyane contrôlé et fouillé en 2015 par la police en gare de Zurich alors qu'il n'existait aucun soupçon d'infraction. Ayant refusé de présenter ses documents d'identité, lesquels se trouvaient dans son sac, il avait été condamné à une amende pour refus d'obtempérer aux injonctions de la police. Compte tenu des circonstances du contrôle d'identité (les policiers avaient retenu une suspicion d'infraction à la loi fédérale sur les étrangers uniquement sur la base du comportement de l'intéressé qui avait détourné le regard à leur approche) et du lieu où ledit contrôle avait été effectué, le requérant pouvait se prévaloir d'un grief de discrimination fondée sur sa couleur de peau.
2.10. En l'espèce, les griefs de l'appelant concernant le contrôle du 21 janvier 2024 tombent à faux.
L'opération C______ dans le cadre de laquelle le contrôle de l'appelant s'est inscrit à teneur du rapport d'arrestation du 21 janvier 2024 a pour but premier la prévention du trafic de stupéfiants et pouvait justifier un contrôle de police préventif fondé sur l'art. 47 LPol, à distinguer d'une appréhension au sens de l'art. 215 CPP. L'appelant a eu affaire à la police à tout le moins à neuf reprises avant la présente procédure. Le policier ayant procédé à son contrôle pouvait légitimement avoir des soupçons quant à la commission d'une infraction de séjour illégal, alors que l'appelant se trouvait dans les rues de Genève. Cette infraction était par ailleurs en train d'être commise, ce que l'appelant ne conteste par ailleurs pas. Cette situation diffère également largement du cas traité dans l'arrêt CourEDH Wa Baile c. Suisse. L'appelant n'a donc pas fait l'objet d'une discrimination basée sur sa couleur de peau.
Dans ces circonstances, les policiers étaient fondés à procéder à son interpellation et à le conduire au poste en vue de son identification et de sa fouille. L'action de la police n'est pas allée au-delà de ce qui est autorisé par l'art. 215 CPP, contrairement à la perquisition considérée comme disproportionnée par l'arrêt du Tribunal fédéral 7B_102/2024 précité.
Par conséquent, l'appréhension de l'appelant du 21 janvier 2024 ne saurait être considérée comme illicite.
2.11. Les éléments constitutifs de l'infraction de séjour illégal sont par ailleurs remplis.
L'appelant s'est trouvé sur le territoire suisse, plus particulièrement à Genève, entre les 23 août 2023 et 21 janvier 2024, alors qu'il n'était pas au bénéfice d'une autorisation de séjour. L'appelant ne remet pas ces faits en cause, pas plus que l'élément subjectif, dans la mesure où il a été condamné à plusieurs reprises pour la même infraction.
Partant, le verdict de culpabilité de l'appelant du chef de séjour illégal au sens de l'art. 115 al. 1 let. b LEI sera confirmé, pour la période du 23 août 2023 au 21 janvier 2024.
3. 3.1.1. Le séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) est passible d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire.
3.1.2. L'art. 115 al. 1 let. b LEI consacre un délit continu. La condamnation en raison de ce délit opère cependant une césure, de sorte que le fait de perpétuer la situation irrégulière après le jugement constitue un acte indépendant permettant une nouvelle condamnation à raison des faits non couverts par le premier jugement, en conformité avec le principe ne bis in idem (ATF 145 IV 449 consid. 1.1 ; 135 IV 6 consid. 3.2). En vertu du principe de la culpabilité, sur lequel repose le droit pénal, les peines prononcées dans plusieurs procédures pénales en raison de l'effet de césure ne peuvent dépasser la peine maximale prévue par la loi pour l'infraction en question. Pour prononcer une nouvelle condamnation en raison d'un délit continu et pour fixer la peine sans égard à la durée de l'infraction déjà prise en compte dans un jugement antérieur, il faut que l'auteur, après la première condamnation, prenne une nouvelle décision d'agir, indépendante de la première. En l'absence d'une telle décision, et lorsque la situation irrégulière qui doit faire l'objet d'un nouveau jugement procède de la même intention que celle qui a présidé aux faits déjà jugés, la somme des peines prononcées à raison du délit continu doit être adaptée à la culpabilité considérée dans son ensemble et ne pas excéder la peine maximale prévue par la loi (ATF 145 IV 449 consid. 1.1 ; 135 IV 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_95/2023 du 12 juillet 2023 consid. 1.1).
3.2. Le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
3.3. Aux termes de l'art. 46 al. 1 CP, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Si la peine révoquée et la nouvelle peine sont du même genre, il fixe une peine d'ensemble en appliquant par analogie l'art. 49 CP. S'il n'y a pas lieu de prévoir de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation (al. 2).
La révocation du sursis ne se justifie ainsi qu'en cas de pronostic défavorable, à savoir lorsque la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l'épreuve. Par analogie avec l'art. 42 al. 1 et 2 CP, le juge se fonde sur une appréciation globale des circonstances du cas d'espèce pour estimer le risque de récidive. En particulier, il doit prendre en considération l'effet dissuasif que la nouvelle peine peut exercer, si elle est exécutée. Il peut parvenir à la conclusion que l'exécution, le cas échéant, de la nouvelle peine aura un effet dissuasif suffisant, justifiant de renoncer à la révocation du sursis antérieur. L'inverse est également admissible : si le sursis précédent est révoqué, l'exécution de la peine qui en était assortie peut conduire à nier l'existence d'un pronostic défavorable pour la nouvelle peine et, partant, à assortir cette dernière du sursis (ATF 134 IV 140 consid. 4.2 à 4.5).
3.4. Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l’auteur a commise avant d’avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l’auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l’objet d’un seul jugement (art. 49 al. 2 CP).
3.5. Selon l’art. 52 CP, si la culpabilité de l’auteur et les conséquences de son acte – conditions cumulatives – sont peu importantes, l’autorité compétente renonce à lui infliger une peine. Si les conditions indiquées à l'art. 52 CP sont réunies, l’exemption par le juge est de nature impérative. Si elles ne sont réalisées qu'en instance de jugement, un verdict de culpabilité est rendu, mais dépourvu de sanction(ATF 135 IV 130 consid. 5.3.2 p. 135).
L'exemption de peine suppose que l'infraction soit de peu d'importance, tant au regard de la culpabilité de l'auteur que du résultat de l'acte. L'importance de la culpabilité et celle du résultat dans le cas particulier doivent être évaluées par comparaison avec celle de la culpabilité et celle du résultat dans les cas typiques de faits punissables revêtant la même qualification ; il ne s’agit pas d’annuler, par une disposition générale, toutes les peines mineures prévues par la loi (Message concernant la modification du code pénal suisse [dispositions générales, entrée en vigueur et application du code pénal] et du code pénal militaire ainsi qu’une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs du 21 septembre 1998, FF 1999 p. 1871). Pour apprécier la culpabilité, il faut tenir compte de tous les éléments pertinents pour la fixation de la peine, notamment des circonstances personnelles de l'auteur, telles que les antécédents, la situation personnelle ou le comportement de l’auteur après l’infraction (ATF 135 IV 130 consid. 5.4 p. 137).
3.6.1. La faute de l'appelant est de gravité relative. Il est demeuré sur le territoire suisse pendant une période de cinq mois, alors qu'il ne disposait d'aucune autorisation et avait été condamné six fois auparavant pour cette même infraction.
Son mobile est égoïste, l'appelant ne se conformant pas à l'ordre juridique suisse par convenance personnelle.
Sa situation personnelle, peu explicitée au cours de la procédure, semble précaire mais ne justifie pas les faits. Elle peut, en revanche, les expliquer. Il appert qu'il aurait, depuis lors, quitté la Suisse et se plierait désormais aux normes en vigueur.
Sa collaboration a été moyenne à bonne, dans la mesure où il a fait usage de son droit de se taire puis a choisi de quitter le territoire suisse. Sa prise de conscience semble entamée pour ces mêmes raisons.
Son pronostic est défavorable pour les motifs qui suivent.
Au vu de ses six précédentes condamnations pour la même infraction, l'appelant ne saurait être mis, une nouvelle fois, au bénéfice du sursis. Sa culpabilité n'est, au demeurant, pas anodine, au vu de ses multiples récidives, alors qu'il ne pouvait ignorer que son comportement était illicite. Les conditions de l'art. 52 CP ne sont dès lors pas réalisées, de sorte qu'une exemption de peine sur cette base n'entre pas en considération.
3.6.2. La fixation d'une peine pécuniaire se justifie. L'appelant ne remet pas en question, au-delà de l'acquittement plaidé, la quotité de celle-ci, ni l'unité du jour-amende.
La peine pécuniaire, en lien avec l'infraction traitée, doit être complémentaire au jugement du TP du 20 juin 2024. Si le TP avait eu à connaître de l'ensemble de la période pénale retenue il aurait vraisemblablement fixé la peine à 60 jours-amende pour l'entier de la période pénale retenue (25 avril 2023 – 21 janvier 2024). Dans ce cas, la peine complémentaire doit être fixée à 30 jours-amende (60 – 30). Le montant du jour-amende, arrêté à CHF 40.- l'unité en première instance, sera ramené à CHF 10.- l'unité, au vu de la situation économique de l'appelant qui semble précaire, à tout le moins en Suisse.
La peine doit ainsi être fixée à 30 jours-amende, à CHF 10.- l'unité, complémentaire à celle fixée par le TP le 20 juin 2024.
Le maximum légal du genre de peines n'est au surplus pas atteint (art. 34 al. 1 CP).
Les cinq jours de détention subis par l'appelant seront en outre imputés sur cette peine (art. 51 CP), ce qui exclut toute indemnisation (ATF 141 IV 236 consid. 3.3).
3.6.3. La non-révocation des sursis antérieurs est acquise à l'appelant (art. 391 al. 2 CPP).
4. 4.1. L'appelant, qui obtient très partiellement gain de cause sur le montant du jour-amende, par ailleurs non plaidé, supportera les 95% des frais de la procédure envers l'État (art. 428 al. 1 CPP), y compris un émolument d'arrêt de CHF 1'000.- (art. 14 al. 1 let. e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale). Le solde des frais de la procédure sera laissé à la charge de l'État.
4.2. Il n'y a pas lieu de revenir sur la répartition des frais de la procédure de première instance compte tenu de l'issue de l'appel (art. 426 al. 1 CPP).
5. 5.1. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me B______, défenseure d'office de A______ satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale.
La rémunération de Me B______ sera partant arrêtée à CHF 1'037.80 correspondant à quatre heures d'activité de cheffe d'étude au tarif de CHF 200.-/heure plus la majoration forfaitaire de 20% et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1%.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/64/2025 rendu le 15 janvier 2025 par le Tribunal de police dans la procédure P/1953/2024.
L'admet partiellement.
Annule ce jugement.
Et statuant à nouveau:
Classe la procédure s'agissant de l'infraction de séjour illégal pour la période du 25 avril 2023 au 22 août 2023 (art. 329 al. 5 CPP et art. 11 al. 1 CPP).
Déclare A______ coupable de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI ; période pénale du 23 août 2023 au 21 janvier 2024).
Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, sous déduction de 2 jours-amende correspondant à 2 jours de détention avant jugement (art. 34 CP).
Fixe le montant du jour-amende à CHF 10.-.
Dit que cette peine est complémentaire à celle fixée par le Tribunal de police le 20 juin 2024.
Renonce à révoquer les sursis octroyés les 31 octobre 2019 et le 1er février 2021 par le Tribunal de police de Genève (art. 46 al. 2 CP).
Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 666.- y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).
Compense, à due concurrence, la créance de l'État portant sur les frais de la procédure avec les valeurs patrimoniales séquestrées figurant sous chiffre 1 de l'inventaire du 21 janvier 2024 (art. 442 al. 4 CPP).
Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'135.-, y compris un émolument d'arrêt de CHF 1'000.-.
Les met à la charge de A______ à hauteur de 95% et laisse le solde à la charge de l'État.
Prend acte de ce que le TP a arrêté à CHF 1'362.05 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseure d'office de A______, pour la procédure préliminaire et de première instance et arrête à CHF 1'037.80 l'indemnité due pour la procédure d'appel.
Notifie le présent arrêt aux parties.
Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'Etat aux migrations et à l'Office cantonal de la population et des migrations.
La greffière : Linda TAGHARIST |
| La présidente : Rita SETHI-KARAM |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète
(art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.
| ETAT DE FRAIS |
|
| COUR DE JUSTICE |
|
Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).
Total des frais de procédure du Tribunal de police : | CHF | 666.00 |
Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision |
|
|
Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c) | CHF | 00.00 |
Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i) | CHF | 60.00 |
Procès-verbal (let. f) | CHF | 00.00 |
Etat de frais | CHF | 75.00 |
Emolument de décision | CHF | 1'000.00 |
Total des frais de la procédure d'appel : | CHF | 1'135.00 |
Total général (première instance + appel) : | CHF | 1'801.00 |