Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites
DCSO/489/2024 du 17.10.2024 ( PLAINT ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE A/3600/2023-CS DCSO/489/24 DECISION DE LA COUR DE JUSTICE Chambre de surveillance DU JEUDI 17 OCTOBRE 2024 |
Plainte 17 LP (A/3600/2023-CS) formée en date du 2 novembre 2023 par A______, représenté par Me Mitra SOHRABI, avocate.
* * * * *
Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :
- A______
c/o Me SOHRABI Mitra
Keppeler Avocats
Rue Ferdinand-Hodler 15
Case postale 6090
1211 Genève 6.
- B______
c/o Me ADJADJ Malek
AAA Avocats SA
Rue du Rhône 118
1204 Genève.
- Office cantonal des poursuites.
A. a. B______ fait l'objet d'une poursuite n° 1______ engagée par A______ pour un montant de 884'087 fr., intérêts en sus.
b. Cette dernière a requis la continuation de la poursuite le 20 mars 2023.
c. Le 29 mars 2023, l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a adressé à B______ un avis de saisie le convoquant à se présenter le 24 avril 2023 en vue d'être interrogé sur sa situation patrimoniale.
d. B______ ne s'étant pas présenté à cette convocation, l'Office a adressé des avis de saisie aux principaux établissements bancaires de la place en date du 1er juin 2023.
Les avoirs de B______ auprès de [la banque] C______ ont été bloqués, soit 2'260 fr. 08, 950.01 EUR, et un coffre-fort.
e. Le 19 juillet 2023, B______ a été entendu par l'Office pour établir sa situation personnelle et financière.
B______ a déclaré exercer comme conseiller financier indépendant et réaliser à ce titre un revenu net de l'ordre de 3'000 fr. par mois. Il vivait chez sa mère, qui l'aidait financièrement. Ses frais médicaux étaient de 50 fr. par mois. Son compte auprès de la [banque] D______, IBAN 2______ avait été clôturé en 2021. Il disposait de parts dans une société de droit singapourien qui n'avaient aucune valeur. Le contenu du coffre bloqué auprès de C______ appartenait à un tiers, E______. Il disposait d'un garde-meubles à F______ [VD] contenant divers meubles. L'appartement dont il était propriétaire dans le canton de Berne avait été saisi et vendu. Il était propriétaire d'un appartement en France.
f. Sur la base de ces éléments, l'Office a tenu compte d'un revenu de 3'000 fr. nets par mois, de charges mensuelles en 1'250 fr., correspondant au montant de base de 1'200 fr. et des frais médicaux de 50 fr., et retenu une quotité saisissable de 1'750 fr.
g. L'Office a, ce même 19 juillet 2023, adressé à C______ une demande de versement des fonds saisis, l'invitant à lui verser la somme de 1'960 fr., correspondant aux actifs saisis, de 3'210 fr., sous déduction du minimum vital de 1'250 fr., moyennant quoi la saisie était levée.
Cet avis n'a pas été communiqué à A______.
h. Par avis concernant la saisie de gains d'indépendant du 22 août 2023, série n° 3______, l'Office a procédé à la saisie sur les gains de B______, l'invitant à retenir 1'750 fr. par mois dès le mois d'août 2023 sur ses revenus et à les verser sur le compte bancaire de l'Office.
Cette décision a été envoyée par courriel à A______ le 23 octobre 2023.
i. L'Office a procédé à divers actes auprès de l'administration fiscale, d'établissements bancaires et des offices des poursuites d'autres cantons pour appréhender tout bien ou revenu de B______.
Selon bordereau d'impôt cantonal et communal 2021, le fisc genevois a procédé à une taxation d'office de B______, retenant un revenu imposable de 80'000 fr.
Selon les procès-verbaux de saisie sur délégation, les biens entreposés dans le garde-meubles de F______ sont sans valeur de réalisation, et la part de copropriété de l'immeuble à G______ [BE] est saisie.
A la demande de la créancière poursuivante, des demandes complémentaires ont été effectuées auprès divers autres établissements bancaires, qui n'ont pas porté.
Les relevés bancaires ne faisaient ressortir aucun versement sous forme de salaire provenant de H______ SA. L'Office n'avait obtenu aucune comptabilité ni preuve des revenus perçus par le poursuivi.
B______ a expliqué ne pas être lié par un contrat de travail avec H______ SA, mais par un mandat de consultant indépendant, qui lui permettait de percevoir des commissions de manière irrégulière. Il disposait d'un bureau dans les locaux de la société. Il craignait de perdre cette activité si la saisie était opérée en mains de la société.
La mère de B______ a attesté par écrit qu'elle aidait son fils qu'elle accueillait chez elle. E______ a attesté par écrit que les bijoux déposés en coffre lui appartenaient. L'inventaire du coffre effectué le 28 novembre 2023 fait état de pièces d'argenterie pour un montant de 330 fr.
B. a. Par acte expédié à la Chambre de surveillance le 2 novembre 2023, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre l'avis de saisie de gains d'indépendant du 22 août 2023, concluant à ce que la Chambre de céans annule cette mesure et enjoigne à l'Office d'investiguer davantage la situation de revenu du débiteur, de procéder à un nouveau calcul du revenu saisissable de B______ dès le mois d'août 2023, de rendre sur cette base une nouvelle décision de saisie de revenu de ce dernier en informant son employeur H______ SA et tout autre débiteur d'un revenu qu'ils ne pourraient plus s'acquitter valablement qu'en mains de l'Office.
Elle fait grief à l'Office de n'avoir pas avisé l'employeur du poursuivi, H______ SA, dont B______ percevait régulièrement des revenus, de cette saisie de revenu. Il convenait d'y procéder pour rendre la mesure plus effective et permettre de l'étendre à d'autres montants qui pourraient être perçus de cette société. Elle se plaint en outre d'une violation de son droit d'être entendue, dès lors qu'elle n'avait pas reçu les documents en lien avec les revenus de B______. Enfin, elle estime que les faits avaient été établis de manière incorrecte, car les revenus saisissables du débiteur n'avaient pas été suffisamment investigués et étaient vraisemblablement supérieurs à ce qui avait été retenu.
Cette procédure a été enregistrée sous le numéro de cause A/3600/2023.
b. Le même jour, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre la décision de l'Office de restituer la somme de 1'250 fr. à B______, qui ne lui avait pas été communiquée et dont elle ignorait la date à laquelle elle avait été prononcée. Elle a conclu à l'annulation de cette décision et à la restitution de ce montant par le débiteur à l'Office, voire à l'imputation de ce montant sur la quotité mensuelle saisissable de son revenu.
Elle indique n'avoir pas pu consulter cette décision, mais en avoir appris l'existence oralement, ce qui constituait une violation de son droit d'être entendue. En outre, elle reprend des griefs similaires à ceux développés en lien avec sa plainte parallèle relatée ci-dessus.
Cette procédure a été enrôlée sous le numéro de cause A/3603/2023.
c. Par ordonnance du 8 novembre 2023, la Chambre de céans a ordonné la jonction de ces deux causes A/3600/2023 et A/3603/2023 sous le numéro de cause A/3600/2023.
Elle a rejeté les mesures provisionnelles sollicitées par A______ dans le cadre de sa plainte, tendant à ce que H______ SA soit avisée de ce qu'elle ne pourrait plus s'acquitter de la quotité saisissable des gains de B______ qu'en mains de l'Office.
d. B______ a conclu à l'irrecevabilité des deux plaintes formées par A______, subsidiairement à leur rejet. Il soutient que les plaintes seraient tardives puisque A______ aurait dû consulter le dossier de l'Office et ainsi pu prendre connaissance des mesures contestées plus tôt. Les conclusions formulées étaient par ailleurs imprécises. Il souscrivait, pour le surplus, aux mesures de l'Office.
e. Dans son rapport du 8 décembre 2023, l'Office s'en est rapporté à justice.
Le grief de violation du droit d'être entendu soulevé par la plaignante était devenu sans objet, dès lors que toutes les pièces pertinentes avaient été produites à l'appui dudit rapport.
L'Office a produit sa demande de versement de fonds adressé le 19 juillet 2023 à C______, l'invitant à lui verser un montant de 1'960 fr., correspondant aux actifs saisis, de 3'210 fr. sous déduction d'un montant de 1'250 fr., moyennant quoi la saisie était levée. La somme de 1'250 fr. avait été laissée à la disposition du débiteur sur son compte bancaire pour préserver son minimum vital, retenu à raison du montant de base de 1'200 fr. par mois et de 50 fr. de frais médicaux, pour un mois.
L'Office avait enfin modifié son appréciation du gain du débiteur : l'examen des pièces, soit des relevés bancaires couvrant la période de décembre 2022 à juin 2023 révélait un revenu moyen de 4'158 fr. par mois au lieu de 3'000 fr., de sorte que la quotité saisissable était de 2'900 fr. Il avait en conséquence adressé un avis de modification de saisie en ce sens en date du 8 décembre 2023.
Il résulte des documents bancaires que B______ a perçu, pour la période allant de décembre 2022 à mai 2023, 54'913 fr. et 36'600 euros de H______ SA (dont deux versements importants de 54'000 fr. et de 36'600 euros portant la mention "Notre achat du 18/04/2023"), ainsi que 16'000 euros de I______ LLP, et effectué des versements en liquide de plusieurs dizaines de milliers de francs et d'euros sur son propre compte durant la même période.
f. Les parties ont répliqué, respectivement dupliqué, et persisté dans leurs conclusions.
B______ affirme notamment que les versements de H______ SA étaient des remboursements de frais (comme l'indiquent les motifs de paiement, soit "RBT frais" sur les plus petits montants).
g. La cause a été gardée à juger après réception des dernières écritures des parties.
1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'office qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP). La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP) par une partie lésée dans ses intérêts
(ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_933/2023 du 20 mars 2024 consid. 4.2.2.3), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).
1.2 En l'espèce, les plaintes ont été déposées par la créancière poursuivante contre des mesures de l'Office auprès de la Chambre de céans. Contrairement à ce que soutient l'intimé, elles ont été formées en respectant les exigences de motivation et dans le délai de dix jours prescrit par la loi, dans la mesure où la plaignante a eu connaissance de l'avis de saisie de gains d'indépendant adressé à l'intimé le 22 août 2023 en date du 23 octobre 2023, et de la demande de versement de fonds adressé à C______ le 19 juillet 2023, impliquant la restitution de 1'250 fr. au poursuivi, postérieurement au dépôt de sa plainte.
Les plaintes sont en conséquence recevables.
2. 2.1 En cas de plainte, l'office peut procéder à un nouvel examen de la décision attaquée et la modifier jusqu’à l’envoi à l'autorité de surveillance de sa réponse à la plainte; si l'office prend une nouvelle mesure, il la notifie sans délai aux parties et en donne connaissance à l’autorité de surveillance (art. 17 al. 4 LP).
Si l'office a reconsidéré sa décision alors qu'une plainte était pendante, l'autorité de surveillance déclarera la plainte sans objet si le plaignant a obtenu le plein des conclusions formulées dans la plainte par la nouvelle décision de l'office. Si tel n'est pas le cas, l'autorité de surveillance reste saisie dans la mesure où le plaignant n'a pas obtenu satisfaction par la nouvelle décision de l'office
(ATF 126 III 85 = SJ 2000 I 449; Erard, Commentaire Romand - LP, 2005, n. 60, 61, 64 à 66 ad art. 17 LP).
2.2 En l'espèce, l'Office a, simultanément au dépôt de son rapport sur la plainte, revu sa mesure en adressant au débiteur poursuivi un avis de modification de saisie de gain en date du 8 décembre 2023. Dans la mesure où il n'a pas donné intégralement suite aux conclusions de la plaignante, la plainte conserve son objet.
3. La plaignante invoque une violation de son droit d'être entendue.
3.1 Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend, notamment, le droit pour l'intéressé de prendre connaissance du dossier, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat (ATF 143 III 65 consid. 3.2 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 137 IV 33 consid. 9.2).
3.2 La plaignante fonde son grief de violation de son droit d'être entendue sur l'absence de communication de certaines pièces. Dès lors que l'Office a communiqué diverses pièces à l'appui de ses déterminations sur la plainte, que la plaignante a eu l'occasion d'en prendre connaissance et de répliquer et qu'elle n'a, en particulier, plus fait état de l'absence de transmission de pièces par l'Office, son grief y relatif n'a plus d'objet.
4. La plaignante reproche à l'Office d'avoir insuffisamment investigué la situation financière du débiteur, de n'avoir pas tenu compte de renseignements disponibles concernant celle-ci et d'avoir omis de notifier la saisie de revenu à H______ SA, soit la société avec laquelle travaillerait le débiteur. Parallèlement, elle fait grief à l'Office d'avoir renoncé à saisir 1'250 fr. qui se trouvaient sur le compte du débiteur poursuivi.
4.1.1 Selon l'art. 93 al. 1 LP, les revenus relativement saisissables tels que les revenus du travail ne peuvent être saisis que déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital).
Cette disposition vise toutes les formes de rétribution d'un travail personnel, régulier ou occasionnel, périodique ou permanent, principal ou accessoire, dans le cadre d'une activité d'employé ou d'indépendant (ATF 93 III 33 consid. 1;
86 III 15). Il n'est pas nécessaire que le revenu du débiteur provienne d'un emploi, ni même qu'il lui soit juridiquement dû (ATF 91 IV 69; 85 III 38 consid. 1). Pour qualifier de revenu la prestation acquise, il faut se placer du point de vue économique. La nature juridique, la qualification utilisée par les personnes impliquées ou les modalités d'exécution selon le droit civil ne sont dès lors pas pertinentes. Du point de vue de la nature juridique de l'objet saisi, il n'y a pas de distinction à faire entre les activités dépendantes ou indépendantes (arrêt du Tribunal fédéral 5A_982/2023 du 13 février 2024 consid. 3.1).
Pour fixer le montant saisissable, si le débiteur développe une activité indépendante, l'office l'interroge sur le genre d'activité qu'il exerce, ainsi que sur la nature et le volume de ses affaires; il estime le montant du revenu en ordonnant d'office les enquêtes nécessaires et en prenant tous les renseignements jugés utiles; il peut en outre se faire remettre la comptabilité et tous les documents concernant l'exploitation du débiteur, qui est tenu de fournir les renseignements exigés. Lorsque l'instruction menée par l'office n'a révélé aucun élément certain, il faut tenir compte des indices à disposition. Si le débiteur ne tient pas de comptabilité régulière, le produit de son activité indépendante doit être déterminé par comparaison avec d'autres activités semblables, au besoin par appréciation (ATF 126 III 89 consid. 3a). Il en va de même du poursuivi dont le statut de salarié lui confère une position assimilable au statut d'indépendant, par exemple lorsqu'il est salarié d'une société dont il est l'actionnaire unique ou dans laquelle il occupe une position dominante. Au demeurant, si le débiteur donne des indications inexactes sur son genre d'activité, la mise sous main de justice frappe le revenu de l'activité qu'il exerce réellement, indépendamment de sa qualification (arrêt du Tribunal fédéral 5A_982/2023 du 13 février 2024 consid. 3.1).
Les faits déterminants sur le revenu saisissable doivent être établis d'office, compte tenu des circonstances existant au moment de l'exécution de la saisie. Le poursuivi est tenu envers l'office de collaborer (ATF 119 III 70 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_982/2023 du 13 février 2024 consid. 3.1).
Les revenus pris en considération sont les revenus réels du débiteur. L'Office ne peut en effet fixer le montant saisissable en se fondant sur un revenu hypothétique (ATF 145 III 255 consid. 5.5.2 ; 115 III 103 consid. 1.c publié aux
JdT 1991 II 108; arrêt du Tribunal fédéral 5A_490/2012 du 23 novembre 2012 consid. 3; Kren Kostkiewicz, Kurzkommentar SchKG, 2ème éd. 2014, n. 17 ad art. 93 LP).
4.1.2 Lorsque la saisie porte sur une créance ou autre droit non constaté par un titre au porteur ou transmissible par endossement, le préposé prévient le tiers débiteur que désormais il ne pourra plus s’acquitter qu’en mains de l’office
(art. 99 LP).
La pratique envisage la possibilité d'une saisie de revenu tacite, qui consiste en une saisie de revenu qui n'est pas portée à la connaissance de l'employeur, ce pour protéger la relation de travail de l'employé (Bachmann, Fachhandbuch Arbeitsrecht, 2018, n. 12.148). Il n'existe aucun droit à l'exécution tacite d'une saisie de salaire, puisque cette pratique est en soi contraire à l'art. 99 LP (arrêt du Tribunal fédéral 5A_408/2011 du 2 septembre 2011 consid. 2.3). Les trois conditions cumulatives usuellement posées dans la pratique sont : la vraisemblance de la mise en danger de l'emploi du débiteur par l'avis de saisie à l'employeur, l'accord de tous les créanciers et la promesse crédible du débiteur de verser lui-même le montant mensuel saisi (arrêt du Tribunal fédéral 5A_544/2012 du 24 juillet 2012 sans numérotation de considérant et qui se réfère à la pratique cantonale bernoise; Mani, Inkassohilfe und Bevorschussung von Unterhaltsbeiträgen, 2016, n. 388 ; BSK SchKG I – Sievi, n. 6 ad art. 99 LP).
La saisie de revenus résultant d'une activité indépendante ne peut en revanche être opérée qu'en mains du débiteur, puisque les tiers débiteurs ne sont pas connus à l'avance (BSK SchKG I – Sievi, n. 6 ad art. 99 LP).
4.2 En l'espèce, contrairement à ce que soutient la plaignante, l'on ne saurait retenir que le poursuivi réalise un revenu de 80'000 fr. sur la base de son bordereau d'impôt pour l'année 2021, dans la mesure où ce revenu résulte d'une taxation d'office, qui n'établit pas les revenus effectivement réalisés.
S'agissant des biens immobiliers du débiteur, rien ne permet de retenir qu'il en obtiendrait un revenu, ce que la plaignante n'allègue d'ailleurs pas, se contentant de soutenir qu'il serait en mesure de le faire. Un revenu hypothétique n'étant pas à être pris en compte lors de la saisie, cette éventualité de percevoir des loyers est sans pertinence.
La plaignante allègue que le débiteur emploierait une personne à son service. Il ne ressort pas de l'exposé de la plaignante sur quels faits elle appuie son allégué. La lecture des observations du débiteur permet de comprendre que la plaignante se réfère vraisemblablement à la personne qui était présente au moment d'une saisie par délégation effectuée à F______ par l'office des poursuites vaudois compétent. Le débiteur conteste dans sa réponse qu'il s'agisse de son employé, arguant qu'il était au service de sa mère. La plaignante ne revenant pas sur ce point dans sa réplique, elle semble avoir renoncé à s'en prévaloir, étant en tout état relevé que les éléments au dossier ne permettent pas de considérer que l'existence d'un employé au service du débiteur est rendue vraisemblable.
L'Office a par ailleurs procédé à de nombreux actes pour éclaircir la situation financière du débiteur. Il n'est donc pas resté inactif, contrairement à ce que lui reproche la plaignante. Il a, dans un premier temps et sur la seule base des déclarations du débiteur, arrêté les revenus de celui-ci à 3'000 fr. par mois, sans qu'il soit clairement déterminé s'il s'agissait d'un salaire ou d'un bénéfice d'indépendant. Dans le cadre de la présente procédure, l'Office a revu à la hausse le montant des revenus du débiteur, en retenant 4'158 fr. par mois à ce titre sur la base des documents bancaires qui figuraient déjà au dossier mais n'avaient pas encore été transmis à la plaignante. Son calcul demeure toutefois peu compréhensible tant au niveau des entrées de paiement admises au titre de revenus que des déductions. Les explications du débiteur ne permettent en particulier pas de comprendre pourquoi les versements de 54'000 fr. et de 36'600 euros, correspondant à environ 7'500 fr. mensualisés sur une année, effectués par H______ SA, qui ne sont pas des remboursements de frais comme il l'admet, ne devraient pas être pris en compte comme des revenus. Le montant mensuel de 4'158 fr. retenu par l'Office comme revenu net du débiteur ne peut, dans ces circonstances pas être identifié de manière suffisante sur la base des pièces produites, des indices laissant à penser que le revenu du débiteur est en réalité supérieur.
En outre, la question de savoir si le débiteur travaille en qualité d'employé ou agit en qualité d'indépendant n'a pas été suffisamment investiguée. Il convient notamment d'approfondir l'examen de versements provenant de sociétés tierces et de compléter l'examen de la situation financière du débiteur en l'enjoignant de produire une documentation plus précise et plus complète permettant de définir ses sources de revenus, plus particulièrement en provenance de H______ SA, voire d'autres sociétés comme I______ LLP dont il a perçu 16'000 euros en quelques mois.
Enfin, s'il s'avère que le débiteur est employé de la société H______ SA, il conviendra d'examiner si les conditions pour une saisie de salaire tacite sont réalisées, à défaut de quoi la saisie de revenus devra, en application de l'art. 99 LP, être opérée en main de cette société.
Il appartiendra en conséquence à l'Office de compléter son instruction et de procéder à un nouvel examen de la situation financière du débiteur et, cas échéant, de prévenir l'employeur du débiteur qu'il devra s'acquitter en mains de l'Office.
4.3 La décision de l'Office de laisser un montant de 1'250 fr. à disposition du débiteur est conforme, dans la mesure où ce montant correspond à l'équivalent du minimum vital pour un mois.
La plaignante ne saurait être suivie lorsqu'elle se prévaut de deux créances hypothécaires dont le débiteur était titulaire et dont le montant correspondant serait bloqué depuis septembre 2021 auprès d'une banque en application de l'art. 9 LP postérieurement à la vente forcée d'un immeuble appartenant au débiteur dans le canton de Berne, puisqu'aucun élément ne permet de retenir que ce montant serait suffisamment liquide pour permettre de couvrir les dépenses courantes du débiteur au moment du prononcé de la mesure.
La plainte sera rejetée sur ce point.
5. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).
La Chambre de surveillance :
A la forme :
Déclare recevables les plaintes formées par A______ le 2 novembre 2023 contre la décision de l'Office cantonal des poursuites de restituer à B______ la somme de 1'250 fr. du 19 juillet 2023 et contre l'avis concernant la saisie de gains d'indépendant du 22 août 2023.
Au fond :
Rejette la plainte dirigée contre la décision de l'Office cantonal des poursuites de restituer à B______ la somme de 1'250 fr. du 19 juillet 2023.
Admet partiellement la plainte dirigée contre l'avis concernant la saisie de gains d'indépendant du 22 août 2023.
Invite l'Office cantonal des poursuites à procéder dans le sens des considérants.
Rejette la plainte pour le surplus.
Siégeant :
Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseurs; Madame Elise CAIRUS, greffière.
La présidente : Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI |
| La greffière : Elise CAIRUS |
Voie de recours :
Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.