Skip to main content

Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

1 resultats
A/1034/2024

DCSO/465/2024 du 03.10.2024 ( PLAINT ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1034/2024-CS DCSO/465/24

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 3 OCTOBRE 2024

 

Plainte 17 LP (A/1034/2024-CS) formée en date du 25 mars 2024 par MASSE EN FAILLITE DE A______ EN LIQUIDATION, représenté par Me Adrian VESER, avocat.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par pli recommandé du greffier du ______ à :

- MASSE EN FAILLITE DE A______ EN LIQUIDATION

c/o Me VESER Adrian

Kellerhals Carrard

Place Saint-François 1

1002 Lausanne.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Feu B______, décédée en 2016, a entretenu une relation bancaire avec A______, établissement bancaire détenu par sa famille.

b. Les 21 et 22 juillet ______ [année], A______ accepté la reprise de sa clientèle privée par une autre entité et décidé sa dissolution, suivie de sa liquidation ordinaire.

c. Au mois d'août ______, la FINMA a ouvert une procédure d'enforcement à l'encontre de A______, suivie d'un retrait de l'autorisation d'exercer une activité bancaire le 17 septembre ______, ainsi que du prononcé de sa faillite le ______ septembre ______.

d. Entre janvier ______ et le prononcé de la faillite de A______, B______ a procédé à diverses opérations de transferts de son compte et de ses avoirs auprès de cet établissement.

e. Le 31 janvier 2018, les membres de l'hoirie de feu B______ (ci-après l'hoirie de B______ ou les hoirs B______) ont ouvert une action en revendication contre la MASSE EN FAILLITE DE A______ (ci-après la MASSE), auprès de la Chambre patrimoniale cantonale du canton de Vaud.

La MASSE y a opposé l'exception révocatoire.

Par jugement du 27 janvier 2021, la Chambre patrimoniale a admis l'exception révocatoire pour un montant supérieur à l'action en revendication de l'hoirie de B______.

Ce jugement a été confirmé par arrêt du 17 novembre de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois et arrêt du Tribunal fédéral du 1er juin 2022.

Tout au long de cette procédure, les hoirs B______ ont été assistés par les avocats C______ et D______.

B. a. La MASSE a requis et obtenu du Tribunal de première instance, le 6 février 2023, le séquestre de "tous actifs, avoirs et biens, créances et dépôts, notamment espèces, valeurs, créances (fiduciaires et/ou non fiduciaires), intérêts, papiers-valeurs, titres, comptes courants (notamment compte n° 1______, IBAN 2______,) créances résultant de financement pour l'achat et la vente de matières premières, d'instruments financiers destinés à couvrir les fluctuations du marché des matières premières, connaissements, métaux précieux et autres objets de valeur, dépôts ou coffre-fort, propriété des débiteurs E______ et consorts, tous héritiers légaux de feue B______, auprès de [la banque] F______".

Elle invoquait à l'appui du séquestre une créance de 907'740 fr. 43 plus intérêts à 5 % dès le 15 septembre 2016 "découlant du prétentions révocatoires, reconnue à titre préjudiciel par le jugement du 27 janvier 2021 de la Chambre patrimoniale cantonale du canton de Vaud".

b. L'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) a exécuté le jour même le séquestre sous n° 3______, tout en mentionnant dans le procès-verbal de séquestre comme débiteur "Hoirie de feu B______" et comme représentant de l'hoirie "G______, rue 4______ no. ______, [code postal] H______, Porutgal".

c. La MASSE a validé le séquestre par le dépôt, le 17 février 2023, d'une réquisition de poursuite unique visant "tous les héritiers légaux de feu B______", mentionnés sur une page annexe avec leur nom et leur adresse connue au Portugal.

Dans la rubrique "Observations" de la réquisition de poursuite, la créancière a indiqué : "Procès-verbal de séquestre 3______ (…) établi le 9 février 2023", sans autre précision.

La poursuite a été enregistrée sous n° 5______.

d. L'Office a tenté de procéder à la notification du procès-verbal de séquestre et du commandement de payer le 4 avril 2023 par voie d'entraide à G______, "représentant l'hoirie de feu Mme B______", à l'adresse susvisée.

Les actes ont été retournés à l'Office par les autorités judiciaires portugaises le 30 mai 2023, non notifiés, le destinataire n'étant plus domicilié à l'adresse indiquée depuis longtemps et son nouveau domicile étant inconnu.

e. L'Office a invité le 8 juin 2023 la MASSE à lui fournir une nouvelle adresse de notification. Si cela devait se révéler impossible, la MASSE devait fournir la preuve de ses vaines recherches afin d'autoriser la notification des actes de poursuites par voie édictale.

f. La MASSE a informé l'Office le 8 juin 2023 qu'elle effectuait des recherches d'adresse.

g. En l'absence de nouvelles de la MASSE, l'Office lui a fixé, le 25 septembre 2023, un délai de dix jours pour fournir l'adresse requise ou les preuves de recherches infructueuses.

h. La MASSE a répondu le 5 octobre 2023 à l'Office que ses démarches étaient restées infructueuses, notamment en raison du régime de protection des données en droit portugais, et invité l'Office à procéder par voie édictale.

i. L'Office, considérant que la MASSE n'avait pas effectué les recherches que l'on pouvait raisonnablement attendre d'elle, l'a invitée à les entreprendre.

j. La MASSE a fourni à l'Office le 5 janvier 2024 la réponse de son avocat au Portugal qui avait trouvé quelques coordonnées pour certains des héritiers, mais confirmait pour le surplus que la réglementation en vigueur au Portugal empêchait la communication d'informations telles que l'adresse de personnes et qu'il n'existait pas de registre public contenant ces informations. Les entreprises de télécommunications n'avaient pas le droit de transmettre de telles données. L'avocat portugais de la MASSE suggérait qu'une cour de justice suisse ou un consulat portugais en Suisse fasse une demande auprès des autorités fiscales portugaises pour obtenir les adresses fiscales des débiteurs, dans la mesure où il s'agissait certainement de résidents fiscaux au Portugal. La MASSE a par conséquent invité l'Office à interpeller l'ambassade du Portugal en Suisse pour lui fournir les adresses des débiteurs par le biais des autorités fiscales portugaises.

k. L'Office a soutenu, dans un courrier à la MASSE du 6 février 2024, qu'il appartenait au créancier poursuivant de rechercher et fournir l'adresse du débiteur. Il a recommandé à la MASSE de mandater une agence de renseignements.

l. Cette dernière a répété, dans un courrier du 28 février 2024 à l'Office, avoir entrepris tout ce qui était en son pouvoir pour trouver les adresses des débiteurs et se heurter au droit portugais de protection des données. Elle invitait par conséquent l'Office à notifier les actes de poursuite par voie édictale et se portait garante des frais de publication.

m. L'Office a imparti à la MASSE, par courrier recommandé du 11 mars 2024, reçu le 13 mars 2024, un délai de 20 jours pour produire les adresses requises ou la preuve de recherches réelles et infructueuses. A défaut, le séquestre serait levé.

C. a. Par acte expédié le 25 mars 2024 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites, la MASSE a formé une plainte contre ce courrier et conclu à ce qu'il soit ordonné à l'Office des poursuites de notifier le commandement de payer et du procès-verbal de séquestre par voie édictale.

Elle soutenait en substance qu'elle avait tenté tout ce qu'elle pouvait, sans succès, pour trouver une adresse permettant la notification des actes de poursuite, alors que l'Office, qui avait la même obligation de tout entreprendre à cette fin, n'avait pas collaboré et avait reporté sur la seule créancière le fardeau de trouver une telle adresse. Cette attitude de l'Office était constitutive d'un déni de justice.

b. La MASSE ayant requis l'effet suspensif à la plainte, celui-ci a été octroyé par décision du 3 avril 2024, en ce sens que l'Office n'était pas autorisé à lever le séquestre pour les motifs indiqués dans son courrier du 11 mars 2024 avant droit jugé sur la plainte.

c. Dans ses observations du 22 avril 2024, l'Office a conclu au rejet de la plainte en tant qu'elle portait contre son refus de procéder à la notification des actes de poursuite par voie édictale au motif qu'il ne lui appartenait pas de procéder aux recherches nécessaires à déterminer le domicile du représentant de l'hoirie débitrice ou d'établir avoir entrepris toutes les démarches que l'on pouvait attendre de lui pour le découvrir.

d. Dans une réplique spontanée du 2 mai 2024, la MASSE a contesté poursuivre la succession non-partagée de B______, mais chacun des héritiers en tant que codébiteur solidaire, au sens de l'art. 70 al. 2 CO. La plainte ne concernait ainsi que le refus de l'Office de procéder à la notification, par voie édictale, des actes de poursuite destinés à G______, soit l'un des membres de l'hoirie. S'agissant des autres membres de l'hoirie, aucune tentative de notification n'avait encore été effectuée à sa connaissance.

Elle produisait en annexe un courrier adressé le 28 mars 2024 à l'Office à la teneur suivante : "… Nous observons […] que le séquestre cité sous rubrique, ainsi que la poursuite le validant, également citée sous rubrique, ne concernent pas une succession non partagée, au sens des art. 59 al. 2 et 65 al. 3 LP. Il nous apparaît ainsi qu'un exemplaire du procès-verbal de séquestre ainsi que du commandement de payer le validant devrait être notifié à chaque débiteur désigné dans notre réquisition de poursuite du 17 février 2023. …".

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi
(art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie potentiellement lésée dans ses intérêts (ATF
138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

Le courrier du 11 mars 2024 de l'Office doit être assimilé à une mesure au sens de l'art. 17 LP et non pas à un simple avis de fixation d'un nouveau délai à la plaignante pour déposer une adresse valable afin d'atteindre G______ ou fournir la preuve qu'elle avait entrepris sans succès toutes les démarches exigibles pour l'obtenir. L'Office se réservait en effet, en l'absence de réponse à l'issue du délai, de lever immédiatement et sans autre forme de procès, avis ou décision, le séquestre n° 3______.

2. Le grief initial soulevé par la plainte porte sur la réalisation des conditions auxquelles une notification édictale d'actes de poursuite est autorisée au sens de l'art. 66 LP et sur qui repose le fardeau d'entreprendre toutes les démarches possibles pour découvrir le domicile du débiteur poursuivi afin de parvenir à la conclusion qu'il n'a pas de domicile connu au sens de l'art. 66 al. 4 ch. 1 LP.

Dans sa réplique du 2 mai 2024, la plaignante soulève pour la première fois un argument dont la portée pourrait conduire à constater, en amont, la nullité, au sens de l'art. 22 al. 1 LP, de sa réquisition de poursuite, voire du séquestre. Il convient par conséquent d'examiner en priorité cette question.

3. 3.1 En application de l'art. 22 al. 1 LP, sont nulles les mesures contraires à des dispositions édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure; les autorités de surveillance constatent la nullité en tout temps et indépendamment de toute plainte (ATF 136 III 572 consid. 4).

3.2 A teneur de l'art. 70 al. 2 LP, lorsque des codébiteurs sont poursuivis simultanément, un commandement de payer est notifié à chacun d'eux.

Lorsque des codébiteurs sont poursuivis simultanément, une procédure unique se révélerait en effet fréquemment impraticable. Ce serait le cas, par exemple, s'ils ne sont pas tous sujets à la poursuite par voie de saisie, s'ils ne relèvent pas du même for, s'ils sont soumis à des délais différents ou encore si des créanciers personnels à l'un d'eux veulent participer à la saisie. Aussi chacun des codébiteurs doit-il être, dès le début, le sujet d'une poursuite indépendante, ce que prévoit la circulaire n° 15 de la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral, du 16 février 1906. Par ailleurs, les biens d'un codébiteur ne doivent servir qu'à payer ses propres dettes. Il est donc nécessaire qu'on sache pour quel montant il est poursuivi personnellement. Sinon il est impossible de procéder régulièrement à la saisie, à la réalisation et à la distribution des deniers (cf. art. 97 al. 2, 119 al. 2, 144 ss LP). Une procédure qui viole ces principes ne saurait être menée à chef et est radicalement nulle (ATF 81 III 92).

Il est néanmoins admis que le créancier de débiteurs solidaires d'une même dette dépose une unique réquisition de poursuite, pour autant que celle-ci mentionne chacun des débiteurs solidaires avec les coordonnées permettant de leur notifier à chacun un commandement de payer, comportant le même numéro de poursuite. Un unique commandement de payer ne peut être notifié dans ce cas que si les débiteurs ont un représentant légal commun (ATF 81 III 92; Ruedin, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 2 ad art. 70 LP; Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n° 22 ad art. 70 LP).

Ces principes valent également pour la requête en séquestre (ATF 145 III 221 consid. 5.3; 115 III 134, JdT 1992 II 30).

3.1.2 Aux termes de l'art. 49 LP, aussi longtemps que le partage n'a pas eu lieu, qu'une indivision contractuelle n'a pas été constituée ou qu'une liquidation officielle n'a pas été ordonnée, la succession est poursuivie au lieu où le défunt pouvait être lui-même poursuivi à l'époque de son décès et selon le mode qui lui était applicable.

L'art. 49 LP ne se limite pas à créer un for de poursuite. Il autorise exceptionnellement la poursuite d'une entité dénuée de personnalité juridique, la succession, selon des modalités précisées aux art. 65 al. 3 et 67 al. 1 ch. 2 LP. Ce régime exceptionnel, s'impose non seulement aux actes de poursuite et aux actes d'exécution de l'office, mais également aux incidents et phases judiciaires, notamment aux tâches d'exécution confiées au juge, ainsi que les contestations devant le juge de droit des poursuites avec effets de droit matériel
(ATF 113 III 79, JdT 1990 II 8, SJ 1988 111; 116 III 4, JdT 1992 II 86,
SJ 1990 633 consid. 2a; Schüpbach, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 2 et 9 ad art. 49 LP).

En cas de poursuite contre une succession, le poursuivant doit énoncer le nom de la succession et le nom du représentant désigné ou, à défaut d'un représentant connu du poursuivant, le nom d'un des héritiers auquel la notification du commandement de payer doit être faite. L'art. 65 al. 3 autorise la notification à l'un des héritiers choisi indifféremment; c'est le créancier qui opère ce choix au début de la poursuite, lors de la rédaction de la réquisition de poursuite, étant précisé que l'héritier ainsi désigné doit être considéré comme le représentant de la succession pendant toute la durée de la procédure; cette liberté de choix connaît sa limite dans l'abus de droit que commet, par exemple, le créancier qui, conscient du conflit existant entre les héritiers, choisit délibérément de faire notifier un commandement à un héritier dont il présume qu'il ne fera pas opposition. La succession peut être poursuivie sur cette base aussi longtemps que le partage n'a pas eu lieu, qu'une indivision contractuelle n'a pas été constituée ou que la liquidation officielle n'a pas été ordonnée (art. 49, 67 al. 1 ch. 2, 65 al. 3 LP; Circulaire n° 16 du Tribunal fédéral du 3 avril 1925, concernant les communautés héréditaires et les indivisions, Formule n° 1, Explications pt 2; ATF 116 III 4, 7, JdT 1992 II 86; 113 III 79, JdT 1990 II 8; 107 III 7, JdT 1983 II 35 consid. 1; 91 III 13, JdT 1965 II 40; Ruedin, op. cit., n° 21 ad art. 67 LP; Jeanneret, Lembo, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005,n° 20 ad art. 65 LP).

La poursuite de l'art. 49 LP ne vise pas les héritiers personnellement puisqu'elle porte sur le seul actif successoral, alors que la poursuite individuelle, au(x) for(s) personnel(s), porte sur le patrimoine de l'héritier, dont sa part à la communauté, à l'exclusion des actifs successoraux dont il n'est pas seul titulaire; la poursuite d'un héritier ne peut tendre qu'à l'exécution de sa part de liquidation. La poursuite de la succession, sur le seul actif successoral, ne peut donc intimer que les héritiers en commun, avec cette particularité, qu'elle est dispensée de les énumérer et qu'en dérogation à la règle qu'il y a autant de poursuites que de poursuivis (art. 70 al. 2 LP) les actes sont signifiés à un seul d'entre eux, comme s'il était seul poursuivi alors que tous le sont mais sur le seul actif successoral. De la réquisition et des actes doit apparaître que la succession et non tout ou partie des hoirs est intimée (Schüpbach, op. cit., n°8 ad art. 49 LP; Gilliéron, op. cit., n° 11, 14 et 17 ss ad art. 49 LP).

L'office doit s'assurer que la succession n'a pas fait l'objet d'une liquidation officielle, mais il n'a pas à vérifier d'office si la succession a été liquidée d'une autre manière, par exemple par un partage; dans ce dernier cas, il ne doit trancher cette question que si le destinataire de l'acte de poursuite prétend que la succession a été partagée (ATF 99 III 51, JdT 1975 II 20; Jeanneret, Lembo, op. cit., n° 19 ad art. 65 LP; Gilliéron, op. cit., n° 68 ad art. 65 LP).

3.2 En l'espèce, la plaignante a requis, dans un premier temps, le séquestre de biens relevant de la succession de feu B______, appartenant en main commune au hoirs de la défunte. Elle n'a pas visé des biens appartenant au patrimoine personnel de chacun des héritiers. La créance à l'origine du séquestre et de la poursuite consiste en des prétentions révocatoires dirigées contre B______ et relevant par conséquent de sa succession et non pas du patrimoine de chacun de ses héritiers. La plaignante n'allègue pas que cette succession aurait fait l'objet d'un partage. Les termes de son projet d'ordonnance de séquestre ainsi que de sa réquisition de poursuite, notamment la désignation du débiteur, permettaient de comprendre qu'elle entendait requérir l'exécution forcée contre la succession. Elle a même vraisemblablement désigné un représentant de l'hoirie en la personne de G______, de sorte que l'Office a mentionné celui-ci comme tel pour la notification du procès-verbal de séquestre et du commandement de payer. L'Office, en se fiant à la teneur des actes de la plaignante et à ses indications, a considéré que le séquestre, puis la poursuite requis par la plaignante visaient la succession de B______ au sens de l'art. 49 LP, ce qui ressort clairement des actes de poursuite et courriers qu'il a émis. La plaignante ne s'est jamais plainte du contenu de ces actes, notamment du procès-verbal de séquestre qui permettait de comprendre sans ambiguïté que l'Office était convaincu d'avoir été saisi d'un séquestre contre une succession.

L'Office était d'autant plus fondé à considérer que la plaignante entendait agir contre la succession de B______ qu'elle n'avait déposé qu'une seule requête de séquestre et une seule réquisition de poursuite contre les hoirs. Si elle avait voulu agir contre chacun d'eux pour une dette solidaire ne relevant pas de la succession, elle aurait dû déposer autant de requêtes de séquestre et de réquisitions de poursuite qu'il y avait d'héritiers, une unique requête, respectivement réquisition, étant nulle dans un tel de cas de figure – il n'est nulle part allégué que l'on se trouverait dans le cas exceptionnel de débiteurs solidaires légalement représentés.

Il découle de ce qui précède que l'Office a correctement donné suite à l'ordonnance de séquestre et à la réquisition de poursuite en considérant qu'elles visaient la succession de B______, représentée par G______ et en tentant de notifier à ce dernier les actes de poursuite. La question de la nullité du séquestre, de la réquisition de poursuite et du commandement de payer ne se pose donc pas dans la mesure où ces actes visent la succession de B______.

En revanche, dans la mesure où la plaignante devait maintenir la position qu'elle a récemment adoptée, à savoir qu'elle aurait en réalité requis le séquestre, puis la poursuite des héritiers de B______, non pas en tant que succession, mais en qualité de débiteurs solidaires pris individuellement, la question de la validité de la réquisition de poursuite et du séquestre devra être examinée par l'Office. L'Office sera par conséquent invité à éclaircir ce point.

4. 4.1.1 Il y a déni de justice au sens de l'art. 17 al. 3 LP lorsque l'Office (ou un autre organe de l'exécution forcée) refuse de procéder à une opération alors qu'il en a été régulièrement requis ou qu'il y est tenu de par la loi. Cette disposition vise ainsi le déni de justice formel – soit la situation dans laquelle aucune mesure n'est prise ou aucune décision rendue alors que cela devrait être le cas – et non le déni de justice matériel – soit la situation dans laquelle une décision est effectivement rendue, mais qu'elle est arbitraire (Erard, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 52 à 54 ad art. 17 LP; Dieth/Wohl, Kurz Kommentar, SchKG, 2ème édition, 2014, n° 32 ad art. 17 LP). Il en découle qu'il ne peut en principe y avoir déni de justice au sens de l'art. 17 al. 3 LP lorsqu'une mesure ou une décision susceptible d'être attaquée dans le délai de dix jours prévu par l'art. 17 al. 2 LP a été prise par l'Office, quand bien même elle serait illégale ou irrégulière (ATF 97 III 28 consid. 3a; Erard, op. cit., n° 53 ad art. 17 LP).

4.1.2 Aux termes de l'art. 66 al. 4 LP, la notification se fait par publication lorsque le débiteur n'a pas de domicile connu (ch. 1), qu'il se soustrait obstinément à la notification (ch. 2) ou que, le débiteur étant domicilié à l'étranger, la notification par l'intermédiaire des autorités de sa résidence ou par la poste selon l'art. 66 al. 3 LP ne peut être obtenue dans un délai raisonnable (ch. 3).

La notification d'un commandement de payer par publication officielle constitue une ultima ratio. Il ne faut pas y recourir avant que toutes les recherches aient été entreprises par le créancier et l'office pour découvrir une éventuelle adresse de notification du débiteur. Le poursuivant doit, par exemple, prouver non seulement que le débiteur a abandonné son précédent domicile, mais encore qu'il n'en a pas fondé un nouveau ou qu'il est actuellement sans domicile connu. De son côté, l'office a l'obligation de vérifier les données du poursuivant concernant le domicile ou une éventuelle adresse de notification du débiteur (ATF 136 III 571 consid. 5; 119 III 60; 112 III 6; arrêts du Tribunal fédéral 5A_41/2019 du 22 janvier 2020 consid. 4.3.1; 7B.164/2002 du 22 octobre 2002 consid. 2.1).

4.1.3 La réquisition de poursuite énonce notamment le nom et le domicile du débiteur (art. 67 al. 1 ch. 2 LP). Le nom doit être énoncé de manière claire et certaine; une mention insuffisante rend nulle la réquisition de poursuite
(ATF 114 III 62 consid. 1a; 98 III 24; 62 III 134). Une désignation défectueuse n'est toutefois considérée comme insuffisante que si elle est de nature à induire en erreur et a induit en erreur; si elle permet de reconnaître la véritable identité du poursuivi, l'acte peut être rectifié et la poursuite continuée. Lorsqu'un défaut affecte la réquisition de poursuite, l'office peut refuser d'y donner suite, en fixant le cas échéant au poursuivant un délai pour remédier au vice. C'est en premier lieu au poursuivant – et non à l'office des poursuites – qu'il incombe de rechercher l'adresse du débiteur, respectivement de vérifier si l'adresse dont il dispose correspond encore à celle du domicile du débiteur; pour sa part, l'office des poursuites saisi doit vérifier les indications relatives au domicile du débiteur fournies par le créancier; si ces indications se révèlent inexactes ou insuffisamment précises, il doit impartir au poursuivant un délai aux fins de rectifier ou compléter les indications viciées, ou de lui demander les renseignements nécessaires. L'Office peut également rechercher lui-même, aux frais du créancier, le véritable domicile du débiteur (ATF 141 III 173 consid. 2.4 et les références citées; 120 III 110 consid. 1a; 112 III 6 consid. 4, JdT 1988 II 99; 109 III 7; Ruedin, op. cit., n° 11, 17, 18, 49 ad art. 67 LP; Gilliéron, op. cit., n° 116 ad art. 67 LP; Malacrida/Roesler, KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, Hunkeler [éd.], n° 5 ad art. 69 LP;).

4.2.1 En l'espèce, le déni de justice dénoncé par la plaignante n'est pas réalisé, l'Office ayant rendu une décision, présentement entreprise.

4.2.2 En réalité, la plaignante reproche à l'Office d'avoir mal appliqué les art. 66 al. 4 ch. 1 et 67 al. 1 ch. 2 LP dans cette décision.

En l'occurrence, l'Office a notifié à la plaignante un avis par lequel elle lui fixait un ultime délai pour fournir soit une adresse de notification du commandement de payer dans la poursuite en validation de séquestre, soit la preuve que toutes les recherches exigibles en ce sens avaient été effectuées, sans succès, précisant qu'en l'absence de réponse, le séquestre serait levé. Il a manifesté par là qu'il considérait que la créancière avait à ce stade échoué dans la fourniture de la preuve qu'elle avait effectué toutes les recherches exigibles.

Après avoir relancé à plusieurs reprises la plaignante, lui signifiant qu'il lui appartenait de lui fournir des coordonnées efficaces pour atteindre G______, l'Office était fondé à prendre une telle décision. Contrairement à ce que soutient la plaignante, il n'appartenait pas à l'Office d'entreprendre lui-même des recherches, conformément aux principes rappelés ci-dessus. L'Office n'avait pas non plus à considérer que la plaignante avait entrepris toutes les recherches que l'on pouvait exiger d'elle : elle ne s'était pas adressée aux avocats suisses des héritiers, ni à la banque auprès de laquelle des avoirs sont séquestrés alors que cette dernière peut être tenue de collaborer à cet égard (ATF 112 III 6 déjà cité); elle ne semble pas avoir mis en œuvre un enquêteur privé comme le lui suggérait l'Office. La plaignante ne décrit pas les recherches concrètes qu'elle aurait effectuées au Portugal, se limitant à invoquer le droit portugais qui interdirait toute communication d'information concernant le domicile d'une personne.

On ne comprend pas pourquoi la plaignante maintient la désignation de G______, dont elle ne connaît pas l'adresse et ne parvient pas à la trouver, pour représenter la succession de B______ dans la poursuite, alors que d'autres héritiers en font partie et pourraient la représenter. Elle admet en effet disposer de l'adresse actuelle de certains héritiers.

En l'état, l'Office est par conséquent fondé à considérer que les recherches de la plaignante sont insuffisantes pour justifier le recours à la notification édictale. La plainte se révèle par conséquent infondée.

Compte tenu de l'effet suspensif octroyé à la plainte, l'Office sera invité à fixer un nouveau délai raisonnable à la plaignante pour produire les informations requises. Il sera par ailleurs rappelé à l'Office que si la recherche du domicile du débiteur incombe en première ligne au créancier poursuivant, il ne saurait refuser d'entreprendre toute action simple requise par la plaignante pour obtenir des informations qui lui seraient indûment refusées par des tiers. Ainsi, une demande de renseignement à la banque auprès de laquelle un séquestre est exécuté, comme cela était le cas dans l'arrêt du Tribunal fédéral 112 III 6 déjà cité, fait partie des démarches exigibles de l'Office. En revanche, mettre en œuvre une sorte d'entraide internationale administrative telle que la suggère la plaignante dans son courrier du 5 janvier 2024 à l'Office constitue un transfert inadmissible sur l'Office du fardeau de la recherche des coordonnées du débiteur.

5. En conclusion, la plainte sera rejetée et l'Office sera invité à agir conformément aux considérants de la présente décision.

6. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 25 mars 2024 par la MASSE EN FAILLITE DE A______ contre le courrier du 11 mars 2024 de l'Office cantonal des poursuites relatif au séquestre n° 3______ et à la poursuite n° 5______.

Au fond :

La rejette.

Invite l'Office cantonal des poursuites à agir dans le sens des considérants de la présente décision.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Messieurs Luca MINOTTI et Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.