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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/4425/2016

DCSO/378/2017 du 03.08.2017 ( PLAINT ) , SANS OBJET

Normes : LP.243; LP.256; LP.256
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4425/2016-CS DCSO/378/17

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 3 AOÛT 2017

 

Plainte 17 LP (A/4425/2016-CS) formée en date du 28 décembre 2016 par A______.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 3 août 2017
à :

- A______

- Faillite de B______ SA, en liquidation
c/o Office des faillites
Faillite n°1______.

 

 


EN FAIT

A.           a. La société B______ SA, ayant son siège à Genève, avait pour but l'édition de revues et périodiques et toutes activités dans le domaine de la publicité.

Son administrateur était C______.

b. Concrètement, B______ SA "détenait" divers titres de presse, soit notamment "D______", "E______", "F______", "G______" et "H______", et en assurait l'édition. I______ SA, autre société dont C______ était administrateur, assumait les fonctions de régie publicitaire pour ces publications alors qu'une troisième société administrée par C______, J______ SA, avait un rôle de coordination et de direction au sein du groupe.

c. Par jugement du 14 juillet 2015, le Tribunal de première instance a accordé à B______ SA, I______ SA et J______ SA, qui avaient déposé leur bilan le 22 juin 2015, un sursis concordataire provisoire courant jusqu'au 13 novembre 2015. Un sursis concordataire définitif a suivi, octroyé par jugement du 23 novembre 2015 puis prolongé au 13 novembre 2016 par jugement du 29 juin 2016.

d. Dans un rapport daté du 14 avril 2016, K______, administrateur de la fiduciaire L______ SA et disposant d'une certaine expérience dans le domaine de la presse, a procédé à la demande du commissaire au sursis à une évaluation de la valeur monétaire des titres de presse "détenus" par B______ SA, se fondant pour ce faire sur les pièces comptables remises par C______, sur la valeur de marché du titre et sur sa valeur intangible.

Aux termes de ce rapport, la valeur du titre "D______", référence au sein de l'univers professionnel M______ mais méritant d'être "nettement mieux travaillé", s'élevait à 60% de son chiffre d'affaires annuel net, soit 65'000 fr.

e. Par lettre adressée le 13 octobre 2016 au Tribunal de première instance, le commissaire au sursis a invité ce dernier à révoquer le sursis concordataire et à prononcer la faillite des trois sociétés en bénéficiant.

A l'appui de son analyse selon laquelle l'évolution de la situation financière, économique et juridique de ces trois sociétés rendait illusoire toute perspective d'homologation d'un concordat, le commissaire a relevé, notamment, l'attitude intransigeante des créanciers privilégiés et les difficulté rencontrées pour céder les titres de presse détenus, "certains intéressés [s'étant] désistés, voire attend[ant] la faillite et la casse des prix".

f. Toujours dans le courant du mois d'octobre 2016, un entretien relatif à une vente d'urgence du titre "D______" a eu lieu entre l'Office des faillites (ci-après : l'Office), le commissaire au sursis et C______.

g. Par jugement du 11 novembre 2016, le Tribunal de première instance a révoqué le sursis concordataire accordé à B______ SA, I______ SA et J______ SA et prononcé la faillite de ces trois sociétés.

Ce jugement a été communiqué le 6 décembre 2016 à l'Office.

h. Immédiatement entendu par l'Office en sa qualité d'administrateur des sociétés faillies, C______ a indiqué disposer d'acquéreurs intéressés à acheter le titre "D______", dépendant de la faillite de B______ SA, pour un montant de 50'000 fr. Cette offre était toutefois soumise à la condition que la vente intervienne suffisamment tôt pour qu'un numéro du magazine puisse être édité à temps pour le salon N______, fin janvier 2017.

Tenant cette offre pour avantageuse compte tenu de l'évaluation de la valeur du titre faite dans le cadre du sursis concordataire (let. d ci-dessus) et des constatations du commissaire au sursis sur la difficulté à le céder (let. e ci-dessus), l'Office a décidé de l'accepter et donc de procéder à la vente d'urgence (art. 243
al. 2 LP) de cet actif, constitué selon la compréhension de l'Office par le droit exclusif d'éditer un magazine intitulé "D______" et les archives du magazine, toujours déposées dans les locaux qu'elle occupait.

Les conditions de vente n'ont fait l'objet d'aucun document écrit, l'Office ignorant du reste l'identité des acquéreurs. Il était toutefois convenu que l'exécution de la cession était subordonnée à l'absence de plainte contre la décision de vente d'urgence.

i. La décision de l'Office de procéder à la vente d'urgence du titre de presse "D______" a été publiée dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC) du mardi 13 décembre 2016, avec la remarque suivante :

"Dans la mesure où l'urgence reposait sur la possibilité d'éditer le titre pour le Salon N______ qui se tiendra dès le 16 janvier 2017, faute de quoi l'actif considéré perdrait toute valeur marchande, il n'est pas fait application de l'art. 256 al. 3 LP".

j. Dans les jours ayant suivi la publication, O______ a pris contact avec l'Office. Se présentant comme l'un des deux acquéreurs du titre "D______", il s'est fait remettre un bulletin de versement pour s'acquitter de sa part du prix, soit 25'000 fr., tout en indiquant à l'Office que le second acquéreur, dont l'identité n'est pas connue, avait finalement renoncé à cette acquisition.

O______ s'est par la suite acquitté en mains de l'Office d'un montant de 25'000 fr.

k. Au cours de la même période, l'Office a par ailleurs reçu de la société P______ SA une offre de reprise globale pour un montant de 10'000 fr. de divers titres de presse "détenus" par B______ SA.

B: a. Par acte daté du 27 décembre 2016, déposé le 28 décembre 2016 au greffe de la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de
l'art. 17 LP contre la vente d'urgence du titre "D______". Indiquant disposer d'une créance à l'encontre de la faillie, le plaignant invoquait à l'appui de sa plainte être titulaire, au travers de l'association O______ dont il était fondateur et qu'il dirigeait, de la marque "Q______" (pour "D______"), enregistrée le 23 décembre 2015.

Dans un complément de plainte daté du 30 décembre 2016, A______ a en outre contesté que la vente ait revêtu un quelconque caractère d'urgence dans la mesure où, en principe, le magazine "D______" était édité deux fois par an, en mars/avril et en septembre, qu'aucune démarche en vue de l'édition d'un numéro en janvier 2017 n'avait été entreprise et qu'une telle édition était partant techniquement impossible.

Par courrier daté du 30 décembre 2016 également, A______ a dénoncé divers faits révélateurs à son avis de détournements d'actifs de la faillie. Selon lui, C______ organisait en effet, au travers de sociétés tierces, la reprise de plusieurs titres de presse auparavant édités par B______ SA.

b. Dans ses observations datées du 10 janvier 2017, l'Office a conclu à l'irrecevabilité de la plainte pour tardiveté. A titre subsidiaire, il a conclu au rejet de la plainte au motif que l'urgence de la vente résidait non pas tant dans le souhait des acquéreurs d'éditer un magazine en janvier 2017 encore que dans le caractère avantageux de l'offre au regard de l'évaluation faite dans le cadre de la procédure de sursis et des difficultés de réalisation mentionnées par le commissaire au sursis. Le fait que le plaignant n'ait pas été consulté au préalable s'expliquait par le fait que, faute pour lui de s'être manifesté auprès du commissaire au sursis, ses prétentions n'étaient pas connues jusqu'au dépôt de la plainte. La possibilité de demander la distraction d'une partie du produit de la réalisation lui restait par ailleurs ouverte.

c. A______ a persisté dans ses conclusions par réplique du 16 janvier 2017. Outre divers développements en relation avec d'autres titres de presse "détenus" par B______, il y réitère que l'édition d'un magazine "D______" pour le salon N______ n'était, au moment de la décision de l'Office, ni possible techniquement ni sérieusement envisagée. Il y relève par ailleurs que l'acquéreur s'étant annoncé auprès de l'Office, soit O______, était un proche de C______.

Quant au respect du délai de plainte, A______ a soutenu avoir agi dans les dix jours ouvrables à compter de la publication de la décision de l'Office dans la FOSC, étant précisé que le greffe de la Chambre de surveillance était fermé le 26 décembre 2016.

d. L'Office a persisté dans ses conclusions par duplique du 6 février 2017.

e. Par ordonnance du 2 mai 2017, la Chambre de surveillance a invité l'Office à produire les pièces en sa possession relatives à la négociation de la vente d'urgence du titre de presse "D______".

Par lettre datée du 9 mai 2017, l'Office a indiqué qu'aucun document écrit n'existait, les négociations ayant été conduites oralement avec C______, administrateur de la faillie.

f. A l'occasion d'une audience tenue le 6 juin 2017, A______ a indiqué qu'à son sens le prix convenu entre l'Office et les acquéreurs du titre "D______", soit 50'000 fr., excédait la valeur de ce dernier. Il a en revanche estimé à environ 25'000 fr. les archives de la société, lesquelles comprenaient une collection de tous les numéros du magazine pour les années 1876 à 2002.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

g. Par ordonnance du 20 juillet 2017, la Chambre de surveillance a rejeté une requête de mesures provisionnelles formée le 18 juillet 2017 par A______.

EN DROIT

1. 1.1 En cas de liquidation ordinaire, la réalisation intervient après le dépôt de l’état de collocation et la deuxième assemblée des créanciers, par les soins de l’administration (art. 256 LP) ; en procédure sommaire, l’Office y procède à l’expiration du délai de production, au mieux des intérêts des créanciers et en observant les art. 256 al. 2 à 4 LP (art. 231 al. 3 LP). D’après l’art. 243 al. 2 LP, l’administration de la faillite réalise cependant sans retard les biens sujets à dépréciation rapide, dispendieux à conserver ou dont le dépôt occasionne des frais disproportionnés ; elle peut en outre ordonner la réalisation immédiate des valeurs et objets cotés en bourse ou sur le marché (243 al. 2 LP; Gilliéron, Commentaire, N 42 ad art. 221 LP, N 6 et 9 ss. ad art. 223 LP et N 21 ss.
ad art. 243 LP).

La réalisation d'urgence peut intervenir par le biais d'une vente aux enchères ou celui d'une vente de gré à gré (Jeandin/Fischer, in CR LP, 2005, N 9 ad art. 243 LP). Dans la seconde hypothèse, l'Office doit, dans la mesure du possible, respecter les dispositions de l’art. 256 LP, s’agissant en particulier de recueillir l’assentiment des créanciers gagistes pour des biens constitués en gage (art. 256 al. 2 LP) et d’offrir aux créanciers l’occasion de formuler des offres supérieures (art. 256 al. 3 LP) (DCSO/647/2006 du 9 novembre 2006, consid. 2b). L'Office ne peut donc décider de procéder à la réalisation d'urgence d'un actif par le biais d'une vente de gré à gré qu'en présence d'une offre concrète et précise, s'agissant aussi bien des actifs cédés que des contre-prestations promises.

1.2 Dans le cas d'espèce, il y a lieu de constater en premier lieu que les conditions de la vente litigieuse sont, sous réserve du prix, difficiles à cerner de manière précise. Selon les explications de l'Office, ces conditions ont été négociées avec l'administrateur de la faillie, lequel représentait (sans qu'aucune procuration écrite ne figure au dossier) deux acquéreurs potentiels dont l'identité était inconnue. L'objet de la vente, soit le contenu exact des droits patrimoniaux cédés aux acquéreurs conjoints, défini dans la publication du 13 décembre 2016 comme le titre de presse "D______", est extrêmement vague : on ignore en particulier si, dans la compréhension initiale de l'Office, les archives étaient cédées ou encore si le droit exclusif d'éditer le magazine était protégé par des droits immatériels. Ni les discussions ni l'accord qui en est issu n'ont été protocolés, de telle sorte que leur teneur est sujette à contestation.

1.3 Il ressort en revanche clairement des explications de l'Office que la vente ne pourrait être exécutée, si une plainte était déposée contre la décision de réalisation d'urgence, aussi longtemps que cette plainte n'aurait pas été tranchée. La vente était par ailleurs soumise à la condition qu'un numéro du magazine "D______" puisse être édité pour le salon N______ se déroulant pendant la seconde moitié du mois de janvier 2017. Dans la mesure où il est constant que cette condition ne s'est pas réalisée, l'accord de vente est aujourd'hui caduc, avec pour conséquence que la décision de l'Office publiée le 13 décembre 2016 n'a plus d'objet.

1.4 La même conclusion résulte du fait que, avant même le dépôt de la plainte faisant l'objet de la présente procédure, l'un des deux acquéreurs s'est désisté. Dans la mesure où rien ne permet d'admettre que le second acquéreur, qui s'est fait connaître de l'Office, serait disposé à verser le solde du prix, il en résulte que l'Office n'est pas en possession d'une offre d'achat concrète. De ce point de vue également, la décision publiée le 13 décembre 2016 a donc perdu son objet.

1.5 La Chambre de surveillance constatera ainsi la caducité de la décision de vente d'urgence publiée le 13 décembre 2016, ce qui rend sans objet la présente procédure de plainte sans qu'il y ait lieu d'examiner si celle-ci était ou non recevable, respectivement bien fondée.

2. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Constate la caducité de la décision de vente d'urgence rendue le 13 décembre 2016 par l'Office des faillites dans la faillite de B______ SA.

Constate en conséquence que la procédure de plainte n'a plus d'objet.

Raye la cause du rôle.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Messieurs Georges ZUFFEREY et Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Véronique PISCETTA, greffière.

 

Le président :

Patrick CHENAUX

 

La greffière :

Véronique PISCETTA

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.