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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3454/2023

JTAPI/664/2024 du 28.06.2024 ( OCPM ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3454/2023

JTAPI/664/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 28 juin 2024

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Raffaella MASSARA, avocate, avec élection de domicile

 

contre

 

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 1982, est ressortissante de Côte d’Ivoire.

2.             Le 26 octobre 2020, elle a déposé une demande d’asile auprès du secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM), qui l’a attribuée au canton de Glaris, où elle réside.

3.             Par décision du 31 août 2021, confirmée par le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) le 23 décembre 2021, le SEM a rejeté cette demande. Le 30 mars 2022, l’intéressée a déposé une demande de révision de cette décision auprès du TAF, qui n’a pas encore été tranchée à ce jour.

4.             Le 22 septembre 2022, Mme A______ a sollicité auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une autorisation de séjour de courte durée fondée sur l’art. 14 al. 1 let. b de la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains du 15 mai 2005 (ci-après : CTEH - RS 0.311.543) pour lui permettre de participer à une procédure pénale instruite par le Ministère public de Genève, pour traite d’êtres humains.

5.             La procédure pénale, ouverte en février 2022 et reprise en mai 2022 par le Ministère public genevois, a fait l’objet d’une décision de non-entrée en matière du 13 janvier 2023, entrée en force et exécutoire.

6.             Le 8 mars 2023, l’OCPM a informé Mme A______ de son intention de refuser d’entrer en matière sur sa demande du 22 septembre 2022 puisqu’elle ne pouvait plus se prévaloir du droit conféré par l’art. 14 al. 1 let. b CTEH dans la mesure où la procédure pénale était définitivement close. Il lui a imparti un délai de trente jours pour faire valoir ses observations écrites.

7.             Mme A______ s’est déterminée le 9 juin 2023, après avoir obtenu plusieurs prolongations du délai initialement imparti. Elle n’a pas persisté dans sa demande d’autorisation de séjour de courte durée, mais a requis qu’une autorisation de séjour fondée sur l’art. 14 al. 1 let. a CTEH lui soit octroyée, subsidiairement qu’une admission provisoire lui soit accordée.

8.             Par décision du 22 septembre 2023 déclarée exécutoire nonobstant recours, l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur la demande d’autorisation de séjour de Mme A______ fondée sur l’art. 14 al. 1 let. a CTEH et l’a invitée à déposer sa requête auprès des autorités du canton de Glaris, où elle résidait. Il a ajouté que la procédure pénale étant définitivement close, elle ne pouvait se prévaloir du droit conféré par l’art. 14 let. b CTEH pour obtenir à Genève, une autorisation de séjour de courte durée.

9.             Par acte du 23 octobre 2023, sous la plume de son conseil, Mme A______ a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal). Elle a conclu à son annulation et à ce que l’OCPM entre en matière sur sa demande d’octroi « d’une autorisation d’ouverture » ou du moins qu’il la transmette aux autorités compétentes afin qu’elles la traitent conformément au droit. Elle a requis, préalablement, l’octroi de l’effet suspensif au recours et, dans le cadre de mesures provisionnelles, à suspendre l’exécution de son renvoi jusqu’à décision définitive dans le présent recours.

Elle avait perdu ses parents ainsi que ses frères et sœurs pendant la guerre civile en Côte d’Ivoire. Elle avait vécu chez sa tante de 2004 à 2010, mais y avait été harcelée sexuellement à plusieurs reprises par le mari de sa tante et avait été mise à la porte après s’être confiée à sa tante. Pour subvenir à ses besoins, elle s’était vue contrainte de se prostituer et était tombée dans les griffes de trafiquants d’êtres humains qui l’avaient envoyée en Europe où elle avait été contrainte de se prostituer pendant environ six ans dans différentes villes. En octobre 2020, à Genève, elle avait réussi à s’échapper. Avec l’aide de l’association B______, elle avait déposé une plainte pénale pour traite d’êtres humains et avait été auditionnée le 7 janvier 2021 par la police de Glaris. L’autorité d’instruction pénale de Glaris avait transmis la procédure à Genève, où elle avait été exploitée.

Selon les termes de l’art. 36 al. 2 de l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), l’autorité de migration du canton dans lequel l’infraction avait été commise était compétente pour l’octroi de l’autorisation de séjour de courte durée selon l’art. 14 al. 1 let. b CTEH. Dans ce sens, il semblait logique que la réglementation de la poursuite du séjour selon l’art. 36 al. 6 OASA soit tranchée par la même autorité. Dans des constellations telles que la présente et même si une attribution cantonale avait été effectuée en parallèle par le SEM, il n’apparaissait pas exclu d’emblée que le canton de Genève soit compétent pour examiner sa demande. Les directives et commentaires du SEM (domaine des étrangers, état au 1er juin 2024 ; ci-après : directives LEI), en particulier le chiffre 5.7.2.4, ne fournissaient pas de réponse définitive à la question de la compétence dans le cas présent. En ce sens, il convenait d’ordonner à l’OCPM d’examiner sa demande sur le fond.

Vu le manque de clarté de la réglementation en matière de compétence, il aurait au moins été nécessaire de procéder à un échange de vues avec l’autorité prétendument compétente (en l’occurrence l’office glaronnais des migrations) et, le cas échéant, de lui transmettre la demande.

10.         Dans ses observations du 1er novembre 2023, l’OCPM s’est opposé à la demande de restitution de l’effet suspensif. Sur le fond, il a fait valoir que dans la mesure où la procédure pénale pour traite d’êtres humains avait été classée, le ch. 5.7.2.4 des directives LEI n’était plus applicable et que le canton compétent pour statuer sur la demande d’autorisation de séjour était, partant, celui de résidence de la recourante.

11.         Dans le délai imparti et prolongé à sa demande, la recourante a finalement renoncé à prendre position le 13 novembre 2023.

12.         Par décision du 14 novembre 2023, le tribunal a rejette la demande d’effet suspensif et de mesures provisionnelles au recours formée par Mme A______ Le recours interjeté à l’encontre de cette décision a été déclaré irrecevable en date du 15 décembre 2023 par la chambre administrative de la Cour de justice, l’avance de frais n’ayant pas été versée.

13.         Par réplique du 8 décembre 2023, la recourante a indiqué que la question de la compétence n’était pas explicitement réglée, ni par la loi, ni par l’ordonnance dans un cas comme le sien. La conférence des directeurs et directrices cantonaux des affaires sociales avait émis une recommandation pour ce genre de situation, en ce qui concernait les prestations d’aide aux victimes, qui plaiderait a priori pour que le canton de Glaris soit compétent pour l’octroi du permis de séjour. Il ne s’agissait cependant que d’une recommandation ne liant pas les autorités glaronnaises. Elle ne pouvait pas abandonner la procédure à Genève tant qu’elle n’avait pas la certitude que le canton de Glaris était effectivement compétent. Il était insatisfaisant que la clarification de la compétence lui soit imposée alors qu’en vertu de législation, il revenait aux autorités de clarifier la compétence entre elles.

14.         Par duplique du 5 février 2024, l’OCPM a indiqué ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d’étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/1331/2023 du 12 décembre 2022 consid. 3).

5.             La recourante requiert d’être mise au bénéfice d’un permis de séjour en vertu de l’art. 14 CTEH. L’OCPM répond ne pas être compétent pour traiter de ce point.

6.             Selon l’art. 14 al. 1 CTEH, chaque partie délivre un permis de séjour renouvelable aux victimes, soit dans l’une des deux hypothèses suivantes, soit dans les deux :

a) l’autorité compétente estime que leur séjour s’avère nécessaire en raison de leur situation personnelle ;

b) l’autorité compétente estime que leur séjour s’avère nécessaire en raison de leur coopération avec les autorités compétentes aux fins d’une enquête ou d’une procédure pénale.

Les deux lettres de l’art. 14 al. 1 CTEH sont d’application directe (arrêt du Tribunal fédéral 2C_483/2021 du 14 décembre 2021 consid. 4.3).

7.             La LEI ne contient pas de disposition spécifique pour concrétiser l’art. 14 al. 1 let. a CTEH (arrêt du Tribunal fédéral 2C_334/2022 du 24 novembre 2022 consid. 6.2). L’art. 30 al. 1 let. e LEI stipule en effet uniquement qu’il est possible de déroger aux conditions d’admission (art. 18 à 29) dans le but de régler le séjour des victimes ou des témoins de la traite d’êtres humains et des personnes qui coopèrent avec les autorités de poursuite pénale dans le cadre d’un programme de protection des témoins mis en place en Suisse, dans un État étranger ou par une cour pénale internationale.

8.             La LEI ne contient pas non plus de disposition spécifique pour concrétiser l’art. 14 al. 1 let. b CTEH. À cet égard, il sied de relever qu’une telle disposition n’est pas nécessaire dans la mesure où les autorités migratoires ne peuvent pas, dans ce cadre spécifique, s’écarter de l’appréciation des autorités pénales qui seules ont le pouvoir d’estimer de manière fiable la nécessité de la présence de la victime pour la suite de la procédure (ATF 145 I 308 consid. 4.2 in fine ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_334/2022 du 24 novembre 2022 consid. 7.1).

9.             Les art. 35 et 36 OASA précisent le champ d’application de l’art. 30 al. 1 let. e LEI (ATF 145 I 308 consid. 3.3.2) et concrétisent l’art. 14 CTEH en droit suisse (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4436/2019 du 1er février 2021 consid. 5.4.1).

Ainsi, selon l’art. 35 al. 1 OASA, l’autorité migratoire cantonale accorde à un étranger, dont le séjour en Suisse n’est pas régulier, un délai de rétablissement et de réflexion de trente jours au moins - période durant laquelle aucune mesure d’exécution, notamment de renvoi, n’est appliquée - s’il y a lieu de croire qu’il est une victime ou un témoin de la traite d’êtres humains.

L’art. 36 OASA précise, pour sa part, que lorsque la présence de la victime ou du témoin est encore requise, les autorités compétentes pour les recherches policières ou pour la procédure judiciaire en informent l’autorité migratoire cantonale, en précisant la durée, avant le terme du délai de réflexion (al. 1) ; que l’autorité compétente en matière d’étrangers du canton dans lequel l’infraction a été commise délivre une autorisation de séjour de courte durée pour la durée probable de l’enquête policière ou de la procédure judiciaire. Si des enquêtes policières sont menées dans plusieurs cantons, c’est le dernier canton dans lequel la personne a séjourné qui délivre l’autorisation de séjour de courte durée (al. 2) ; que la personne concernée doit quitter la Suisse lorsque le délai de réflexion accordé a expiré ou lorsque son séjour n’est plus requis pour les besoins de l’enquête et de la procédure judiciaire (al. 5) ; qu’une prolongation du séjour peut être autorisée en présence d’un cas individuel d’une extrême gravité. Il y a lieu de tenir compte de la situation particulière des victimes ou des témoins de la traite d’êtres humains. L’octroi d’une admission provisoire est réservé (al. 2).

Selon la jurisprudence, l’on ne se trouve dans le champ d’application matériel de l’art. 30 al. 1 let. e LEI que dans le cas où les autorités de police ou de justice compétentes interviennent auprès de l’autorité migratoire - conformément à l’art. 36 al. 1 OASA - en l’informant que la présence de la personne étrangère en Suisse est requise pendant une période déterminée pour les besoins d’une enquête policière ou d’une procédure judiciaire dans laquelle celle-ci apparaît comme victime ou témoin de la traite d’êtres humains. Si ces conditions ne sont pas réalisées, le cas doit être traité à l’aune de l’art. 30 al. 1 let. b LEI (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4436/2019 du 1er février 2021 consid. 5.4; ATA/471/2021 du 4 mai 2021).

10.         À teneur du chiffre 5.7.2.4 des directives LEI, lorsque la victime a été exploitée dans plusieurs cantons et que des enquêtes policières y sont menées, c’est le dernier canton dans lequel la personne a séjourné qui délivre l’autorisation de séjour de courte durée, celui-ci étant en principe le canton dans lequel la dernière infraction de traite d’êtres humains a été commise. Toutefois, lorsque l’autorité de poursuite pénale de l’un de ces cantons prend la direction de la procédure pénale, c’est l’autorité migratoire de ce canton qui est compétente pour délivrer l’autorisation de séjour de courte durée. Lorsque la victime n’a pas été exploitée sur le territoire d’un canton, l’autorité migratoire de ce canton n’est pas compétente : le SEM refuse son approbation, car les conditions du droit fédéral ne sont d’emblée pas remplies.

Selon la jurisprudence, les directives LEI n’ont pas force de loi en tant que simples ordonnances administratives, mais les juridictions en tiennent en principe compte lorsqu’elles sont conformes à l’ordre juridique (ATF 146 II 359 consid. 5.3 ; 142 II 182 consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_334/2022 du 24 novembre 2022 consid. 6.3).

11.         L’art. 36 LEI stipule que le titulaire d’une autorisation de courte durée, de séjour ou d’établissement peut choisir librement son lieu de résidence sur le territoire du canton qui a octroyé l’autorisation.

L’autorisation n’est valable que pour le territoire du canton qui l’a délivrée et l’étranger ne peut détenir une autorisation que dans un seul canton (art. 66 OASA).

12.         En vertu de l’art. 37 LEI, si le titulaire d’une autorisation de courte durée ou de séjour veut déplacer son lieu de résidence dans un autre canton, il doit solliciter au préalable une autorisation de ce dernier (al. 1), étant précisé que le titulaire d’une autorisation de séjour a droit au changement de canton s’il n’est pas au chômage et qu’il n’existe aucun motif de révocation (al. 2), que le titulaire d’une autorisation d’établissement a droit au changement de canton s’il n’existe aucun motif de révocation (al. 3) et qu’un séjour temporaire dans un autre canton ne nécessite pas d’autorisation (al. 4).

Un étranger doit par conséquent être au bénéfice d’une autorisation délivrée par l’autorité migratoire du canton dans lequel il est domicilié. A contrario, l’autorité migratoire d’un canton ne peut délivrer d’autorisation que pour les étrangers établis sur le territoire de son canton (JTAPI/132/2019 du 11 février 2019 consid. 25 ; JTAPI/759/2013 du 25 juin 2013 consid. 3).

Si, en raison d’un traitement ou d’un encadrement médical (par ex. établissement hospitalier, sanatorium), un étranger se trouve en dehors du canton qui lui a délivré l’autorisation, ce séjour n’est pas considéré comme un changement de canton même s’il est de longue durée. Il en va de même des étrangers qui, en application de l’art. 36 al. 2 OASA, obtiennent une autorisation de séjour de courte durée pour la durée probable de l’enquête policière ou de la procédure judiciaire et séjournent en dehors du canton qui leur a délivré l’autorisation (directives LEI, ch. 3.1.8.2.1).

13.         Aux termes de l’art. 27 al. 3 de la loi sur l’asile du 26 juin 1998 (LAsi - RS 142.31), le SEM attribue le requérant à un canton (canton d’attribution). Il ne décide de le changer de canton que si les deux cantons concernés y consentent, suite à une revendication du principe de l’unité de la famille ou en cas de menace grave pesant sur l’intéressé ou sur d’autres personnes (art. 22 al. 2 de l’ordonnance 1 sur l’asile relative à la procédure du 11 août 1999 - OA 1 - RS 142.311).

Selon l’art. 28 LAsi, le SEM ou les autorités cantonales peuvent assigner un lieu de séjour au requérant (al. 1) et ils peuvent lui assigner un logement, en particulier l’héberger dans un logement collectif. Les cantons en garantissent la sécurité et, pour ce faire, peuvent édicter des dispositions et prendre des mesures (al. 2).

Le canton d’attribution est tenu d’exécuter la décision de renvoi ordonné suite au rejet ou au refus d’entrer en matière sur une demande d’asile (art. 46 al. 1 cum art. 44 al. 1 LAsi). Quiconque a obtenu l’asile en Suisse a droit à une autorisation de séjour dans le canton où il séjourne légalement (art. 60 al. 1 LAsi).

14.         En l’espèce et à la lumière des considérants précités, c’est à juste titre que la recourante a déposé, le 22 septembre 2022, sa demande d’autorisation de séjour de courte durée auprès de l’OCPM dans la mesure où la procédure pénale pour traite d’êtres humains était instruite par le Ministère public genevois. Cette procédure ayant fait l’objet d’une décision de non-entrée en matière en janvier 2023, entrée en force et exécutoire, la recourante ne peut plus se prévaloir de l’art. 14 al. 1 let. b CTEH pour obtenir une autorisation de séjour de courte durée dans le canton de Genève. Cette disposition ne fonde donc plus la compétence de l’OCPM - ni d’ailleurs d’aucune autre autorité migratoire - pour la délivrance d’une autorisation de séjour de courte durée.

S’agissant de la délivrance d’une autorisation de séjour en vertu de l’art. 14 al. 1 let. a CTEH, la recourante doit s’adresser à l’autorité migratoire du canton de Glaris. En effet, la compétence pour se prononcer sur le statut d’un étranger appartient, ainsi qu’il résulte de la systématique du droit des étrangers - la LAsi et la LEI -, au canton dans lequel l’étranger est domicilié respectivement dans lequel il réside. Or, la recourante, qui ne peut pas librement choisir son domicile, réside dans le canton de Glaris, auquel elle a été attribuée par le SEM. Partant, c’est à bon droit que l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur la demande d’octroi d’une autorisation de séjour fondée sur l’art. 14 al. 1 let. a CTEH.

La question de l’admission provisoire relève également de l’autorité migratoire du canton de Glaris (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-4912/2020 du 27 novembre 2020).

15.         La recourante demande enfin que sa demande soit transmise d’office à l’autorité des migrations du canton de Glaris, se prévalant des art. 11 LPA et 8 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021).

16.         L’art. 11 LPA prévoit que l’autorité examine d’office sa compétence (al. 2) et que, si elle décline sa compétence, elle transmette d’office l’affaire à l’autorité compétente et en avise les parties (al. 3).

Selon la doctrine, l’art. 11 LPA, et notamment son al. 3, s’applique aussi autorités et aux juridictions administratives genevoises (Thierry TANQUEREL, op. cit, n. 1481 s. p. 506 ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procé-dure administrative genevoise, Berne 2017, n. 181 p. 51 s.).

17.         L’art. 1 al. 1 PA stipule que la présente loi s’applique à la procédure dans les affaires administratives qui doivent être réglées par les décisions d’autorités administratives fédérales statuant en première instance ou sur recours.

Les règles de la PA ne sont ainsi pas, sauf exception, applicables à des décisions cantonales puisque les autorités cantonales ne sont pas mentionnées à l’art. 1 al. 1 PA (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1471 p. 504 et n. 1475-1476 p. 505).

18.         En l’espèce, l’art. 11 al. 3 LPA ne concerne que des autorités genevoises, de sorte que l’OCPM n’a pas l’obligation de transmettre la demande de la recourante du 8 mars 2023 à l’autorité migratoire glaronnaise. Quant à la PA, elle ne s’applique pas à Genève.

Partant, l’OCPM n’a pas fauté en refusant de transmettre la demande du 8 mars 2023 de la recourante à l’autorité migratoire glaronnaise.

19.         Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

20.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

21.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 23 octobre 2023 par Madame A______ contre la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 22 septembre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière