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Décisions | Chambre de surveillance

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C/23015/2020

DAS/75/2021 du 24.03.2021 sur DJP/543/2020 ( AJP ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/23015/2020 DAS/75/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MERCREDI 24 MARS 2021

 

Appel (C/23015/2020) formé le 4 janvier 2021 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), comparant par Me Guillaume FAUCONNET, avocat, en l'Etude duquel elle élit domicile.

* * * * *

Arrêt communiqué par plis recommandés du greffier
du 25 mars 2021 à :

 

- Madame A______
c/o Me Guillaume FAUCONNET, avocat
Quai Gustave-Ador 38, 1207 Genève.

- Madame B______
c/o Me Lisa LOCCA, avocate
Promenade du Pin 1, case postale, 1211 Genève 3.

- Madame C______
c/o Me Nathalie HUBERT DIETRICH, avocate
Rue François-Bellot 12, case postale 3397, 1211 Genève 3.

- Maître D______
Place ______, ______ [GE].

- JUSTICE DE PAIX.


EN FAIT

A.           Par décision DJP/543/2020 du 18 décembre 2020, communiquée aux parties le 21 décembre 2020 pour notification, le juge de paix a restreint les pouvoirs d'exécutrice testamentaire de A______ dans la succession de E______, son époux, limitant ses pouvoirs aux actes de gestion conservatoire nécessaires dans ce cadre, devant s'abstenir de tout acte de liquidation qui pourrait porter préjudice aux droits des opposants jusqu'à accord entre les parties, droit jugé dans une éventuelle action en nullité ou en réduction ou, si aucune action n'est introduite, jusqu'à péremption desdites actions (ch. 1 du dispositif), un émolument de 250 fr. étant fixé (ch. 2).

En substance, le juge de paix a retenu qu'au vu de l'opposition de l'un des enfants du couple à la délivrance d'un certificat d'héritier, la dévolution de la succession était incertaine, de sorte que les pouvoirs de l'exécuteur testamentaire devaient être restreints.

B. a) Par acte d'appel déposé le 4 janvier 2021 au greffe de la Cour, A______ a conclu à l'annulation de la décision entreprise, ses pouvoirs ne devant pas être restreints, sous suite de frais et dépens. Elle considère que les vocations successorales sont clairement établies, de sorte qu'il n'y avait pas motif à restriction de ses pouvoirs.

b) Le notaire dépositaire des dernières volontés du défunt s'en est rapporté à justice le 26 janvier 2021, alors que par réponse du 1er février 2021, B______ a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation de la décision entreprise, sous suite de frais et dépens. Elle soutient en substance que l'appelante fait valoir des motifs de fond non pertinents dans la procédure par-devant le juge de paix et l'autorité de surveillance, la mesure conservatoire prise par la justice de paix étant justifiée et ne tranchant pas le droit matériel.

C______ n'a pas pris position.

C. Ressortent pour le surplus de la procédure les faits pertinents suivants:

a) E______, né le ______ 1928 à F______ (Bulgarie), originaire de Genève et domicilié de son vivant à G______, est décédé le ______ 2020 à G______.

b) Par dispositions testamentaires du 11 février 2015 faisant suite à un contrat de mariage antérieur conclu par devant notaire stipulant que la totalité du bénéfice des acquêts était attribuée au conjoint survivant en plein propriété, il a notamment désigné A______, son épouse, aux fonctions d'exécutrice testamentaire. Celle-ci a accepté cette fonction. La succession comporte des biens immobiliers.

c) Le couple avait deux enfants, C______, née le ______ 1959 et B______, née le ______ 1966.

d) En date des 28 novembre et 1er décembre 2020, C______ a requis de la Justice de paix le bénéfice d'inventaire de la succession.

e) B______ a fait de même le 7 décembre 2020, exposant contester les dispositions testamentaires laissées par le défunt, considérant que sa réserve pouvait avoir été violée, ce qu'elle a répété par le biais d'un conseil le 15 décembre 2020, s'opposant par ailleurs à la désignation d'un exécuteur testamentaire.

Suite à quoi la Justice de paix a prononcé la décision querellée.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions du juge de paix, qui relèvent de la juridiction gracieuse et sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. e CPC), sont susceptibles d'un appel dans le délai de dix jours (art. 314 al. 1 CPC) auprès de la Chambre civile de la Cour de justice (art. 112 al. 2 LOJ), si la valeur litigieuse est égale ou supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

1.2 Interjeté dans le délai utile de dix jours auprès de l'autorité compétente, l'appel qui concerne une cause pécuniaire d'une valeur supérieure à 10'000 fr. dans la mesure où la succession comporte des biens immobiliers, est recevable.

1.3 La Cour revoit la cause avec plein pouvoir d'examen, tant en fait qu'en droit (art. 310 CPC).

2. L'appelante reproche au juge de paix d'avoir restreint ses pouvoirs d'exécutrice testamentaire, alors qu'un testament la désigne comme telle et lui attribue valablement tous les droits dans la succession, celui-ci faisant suite à un contrat de mariage passé entre l'appelante et son défunt époux antérieurement.

2.1 Selon l'art. 3 al. 1 let. f LaCC, le juge de paix est compétent pour prendre les mesures pour assurer la dévolution de l'hérédité et en particulier les mesures prévues aux art. 551 à 559 CC.

Le juge de paix est en outre l'autorité compétente pour exercer la surveillance des exécuteur testamentaire, administrateur d'office, liquidateur officiel et représentant de la communauté héréditaire (art. 3 al. 2 LaCC).

2.2 Au décès d'une personne, l'autorité compétente est tenue de prendre d'office les mesures nécessaires pour assurer la dévolution de l'hérédité (art. 551 al. 1 CC); elle peut prendre toute mesure nécessaire, notamment celles prévues aux art. 552 à 559 CC. La gestion provisoire de la succession est généralement assurée par les héritiers légaux, mais l'autorité doit ordonner l'administration d'office si les conditions des art. 554 al. 1 ch. 1 à 4 CC sont remplies. Lorsque le défunt désigne un exécuteur testamentaire, celui-ci assume en général la gestion de la succession, mais l'autorité doit ordonner l'administration d'office ou restreindre ses pouvoirs lorsque la gestion provisoire par l'exécuteur testamentaire présente des risques pour la délivrance des biens aux héritiers (arrêts du Tribunal fédéral 5A_841/2013 consid. 5.1, 5P_352/2006 consid. 4; 5A_502/2008 consid. 2).

Selon l'art. 517 al. 1 CC, le testateur peut, par une disposition testamentaire, charger de l'exécution de ses dernières volontés une ou plusieurs personnes capables d'exercer les droits civils.

Si le disposant n'en a pas ordonné autrement, les exécuteurs testamentaires ont les droits et les devoirs de l'administrateur officiel d'une succession. Ils sont chargés de faire respecter la volonté du défunt, notamment de gérer la succession, de payer les dettes, d'acquitter les legs et de procéder au partage conformément aux ordres du disposant ou suivant la loi (art. 518 al. 1 et 2 CC).

Après l'expiration du délai d'un mois qui suit la communication des dispositions testamentaires aux intéressés, les héritiers institués peuvent requérir de l'autorité la délivrance d'un certificat d'héritier (art. 559 al. 1 CC). Les héritiers légaux peuvent également demander la délivrance d'un certificat d'héritier (ATF 73 I 273 consid. 1). Si les héritiers légaux contestent la vocation héréditaire des héritiers institués, le certificat d'héritier n'est pas délivré et l'autorité doit décider de ce qu'il advient de la gestion provisoire, si elle doit être, comme précédemment, laissée aux héritiers légaux, respectivement à l'administration d'office ou s'il y a lieu, en raison de circonstances nouvelles, de la retirer aux héritiers légaux et d'ordonner l'administration d'office (STEINAUER, Le droit des successions, 2006 no 895).

L'opposition permet ainsi aux héritiers qui risquent de subir un dommage si les héritiers institués devaient disposer provisoirement des biens de la succession, alors que leur action successorale devait être admise, d'empêcher la délivrance d'un certificat d'héritier. L'opposition ne déclenche toutefois pas une procédure tendant à déterminer le droit matériel des héritiers dans la succession. Il appartient aux héritiers qui s'estiment lésés d'ouvrir l'action en nullité ou l'action en réduction dans les délais légaux (art. 521 al. 1 et 533 al. 1 CC; ATF 128 III 318 consid. 2.2).

2.3 Dans le cas présent, tout d'abord il faut admettre que le juge de paix pouvait, comme il l'a fait, restreindre les pouvoirs de l'exécuteur testamentaire, plutôt que d'ordonner l'administration d'office de la succession, comme il aurait pu le faire en cas de risque potentiel pour la délivrance des biens.

En outre, c'est à tort que l'appelante conteste la décision du juge de paix de restreindre ses pouvoirs d'exécutrice testamentaire en faisant valoir des motifs de fond. Dans la mesure où, ni le juge de paix, ni la Chambre de céans ne sont les autorités ayant compétence de statuer sur les éléments relevant du fond des actions successorales, les motifs soulevés sont impropres à mettre en échec la décision attaquée, comme le soulève à juste titre l'une des intimées.

Comme l'appelante ne soulève aucun grief en rapport avec les risques, ou leur absence, que les pleins pouvoirs de l'exécutrice testamentaire pouvaient faire courir ou non aux autres héritiers dans le cadre de la succession considérée, point ne serait besoin d'aborder cette question pour rejeter l'appel. Cela étant, il faut admettre dans le cas d'espèce que ce risque potentiel, au vu des relations entre les parties, semble exister, l'exécuteur testamentaire désigné étant héritière légale et instituée, un conflit entre ses propres intérêts et ceux des autres héritières légales réservataires ne pouvant être exclu.

3. Dans la mesure où elle succombe, l'appelante supportera les frais de la procédure ainsi que des dépens en faveur de l'intimée ayant procédé, fixés à hauteur de 500 fr.

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel formé le 4 janvier 2021 par A______ contre la décision DJP/543/2020 rendue le 18 décembre 2020 par la Justice de paix dans la cause C/23015/2020.

Au fond :

Confirme la décision attaquée.

Fixe les frais de la procédure à 500 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont entièrement compensés par l'avance de frais versée par celle-ci, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ au paiement à B______ de dépens à hauteur de 500 fr.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours:

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.