Décisions | Chambre des prud'hommes
ACJC/1188/2025 du 01.09.2025 sur JTPH/259/2024 ( OS ) , CONFIRME
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/10469/2023 ACJC/1188/2025 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre des prud'hommes DU LUNDI 1ER SEPTEMBRE 2025 |
Entre
Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 2 octobre 2024 (JTPH/259/2024), représenté par Me Reza VAFADAR, avocat, VZ Lawyers, rue Charles-Bonnet 2, 1206 Genève,
et
Monsieur B______, domicilié c/o Mme C______, ______, intimé, et
Monsieur D______, domicilié ______, intimé.
A. Par jugement JTPH/259/2024 du 2 octobre 2024, reçu le lendemain par le recourant, le Tribunal des prud'hommes (ci-après : le Tribunal) a déclaré recevable la demande formée le 3 août 2023 par B______ contre D______ (ch. 1 du dispositif), a déclaré recevable la demande formée le 1er septembre 2023 par B______ contre A______ (ch. 2), a condamné A______ à verser à B______ les sommes brutes de 2'625 fr. 90 (ch. 3) et de 6'010 fr. 30 (ch. 4), a condamné A______ à remettre à B______ un certificat de salaire 2023 (ch. 5), a invité la partie qui en a la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 6), a débouté B______ de sa demande formée à l’encontre de D______ (ch. 7), a dit qu'il n'était pas perçu de frais judiciaires, ni alloué de dépens (ch. 8), puis a débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 9).
B. a. Par acte déposé le 4 novembre 2024 au greffe de la Cour de justice, A______ a formé recours contre ce jugement. Il a conclu principalement à son annulation et, cela fait, à ce que la demande de B______ à son encontre soit rejetée et à ce qu’il soit pris acte de l’acquiescement de D______ aux conclusions de la demande de B______. Subsidiairement, A______ a conclu à l’annulation du jugement et au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.
b. B______ et D______ ont conclu au rejet du recours.
c. Dans leurs réplique, duplique et déterminations, le recourant et D______ ont persisté dans leurs conclusions.
d. Par avis du 11 avril 2025, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :
a. A______ (ci-après également : le « recourant ») est titulaire de la raison individuelle « E______/A______ » dont le but est notamment l’exploitation de l’établissement « F______ » sis rue 1______ no. ______, [code postal] G______ [GE].
b. Le 17 octobre 2022, A______ et D______ ont conclu un contrat de gérance libre, aux termes duquel le recourant autorisait D______ à gérer l’établissement « F______ » pour une durée de cinq ans à compter du 1er novembre 2022. Selon l’article 5 de ce contrat, D______ devait avoir la responsabilité de la gestion du café-restaurant et assumer l’intégralité des charges y relatives à compter du 1er novembre 2022, à l’exception du loyer dû pour les murs. L’article 7a précisait que, pendant la période de démarrage, jusqu’au 30 juin 2023, A______ resterait directeur-exploitant, endossant ainsi les responsabilités du fonctionnement.
c. A une date indéterminée, A______ a signé un contrat de travail de durée indéterminée avec B______, aux termes duquel A______ engageait B______ à temps plein en qualité de Pizzaiolo-cuisinier de l’établissement « F______ » à partir du 1er mars 2023 pour un salaire mensuel net de 4'300 fr. Le contrat de deux pages correspondait à un modèle de contrat de travail de Gastrosuisse tenant compte des exigences de la Convention collective nationale de travail pour l’hôtellerie-restauration (ci-après : « CCNT »). Ce contrat ne précisait pas les montants du salaire brut et des déductions sociales, mais comprenait une clause listant les retenues mensuelles sur le salaire brut.
d. Un second contrat de travail, daté du 1er mars 2023, a été signé entre D______ et B______, aux termes duquel D______ engageait B______ à partir du 1er mars 2023 en qualité de Pizzaiolo-cuisinier de l’établissement « F______ ». Le salaire mensuel brut convenu dans ce contrat était de 4'952 fr. plus 449 fr. 90 de part du treizième salaire. Le contrat de trois pages correspondait à un modèle de contrat de travail de l’Office de contrôle de la CCNT et tenait compte des exigences de la CCNT. Ce contrat précisait les coordonnées de B______, des données personnelles le concernant (date de naissance, état civil, etc.), les montants du salaire mensuel brut, des déductions sociales, ainsi que du salaire mensuel net (4'300 fr.).
e. Par courrier recommandé du 3 mai 2023 adressé à A______, D______ a résilié avec effet immédiat le contrat de gérance libre du 17 octobre 2022, aux motifs notamment que A______ avait décidé, sans son accord préalable, de l’engagement et de la rémunération de deux employés (dont B______) et que les accès aux comptes et à la caisse ne lui avaient pas été attribués, de sorte qu’il était incapable de gérer le restaurant convenablement.
Par courrier recommandé du 5 mai 2023 adressé à D______, A______, sous la plume de son conseil, a résilié avec effet immédiat le contrat de gérance libre du 17 octobre 2022 aux motifs que D______ ne lui avait pas versé l’intégralité de la somme prévue ni les sûretés prévues, qu’il n’avait pas tenu une comptabilité en ordre et qu’il n’avait pas rémunéré la serveuse pour son activité du mois d’avril 2023.
f. Par message WhatsApp du 3 mai 2023, B______ a demandé à A______ que celui-ci fasse des courses pour le restaurant « F______ », relevant que D______ ne lui répondait plus et qu’il n’avait plus rien en stock.
Le 4 mai 2023, B______ a écrit un message WhatsApp à D______ pour l’interpeler sur les courses à faire pour le restaurant et le paiement de son salaire, précisant avoir eu un échange téléphonique à ce sujet au préalable avec A______. D’après le message de B______, A______ lui avait indiqué par téléphone de voir avec D______ pour les courses et son salaire, car le restaurant était en gérance. B______ indiquait notamment dans son message qu’il admirait D______ comme « patron ».
D______ a répondu à B______, par message WhatsApp du jour même, que « légalement le restaurant n’est plus en gérance depuis hier […] tu peux te retourner contre moi sans soucis je comprendrai, c’est la meilleure chose à faire pour te protéger. Si tu veux dès lundi je peux t’aider à écrire une lettre que tu m’enverra[sic] pour me mettre en demeure. Ensuite si ton salaire n’est toujours pas payé, grâce à cette lettre tu seras en mesure d’engager des poursuites contre moi […]. Fais attention à ce que dit A______ [prénom] car d’après ce que j’ai lus[sic] si tu ne viens pas travailler avant d’avoir envoyer[sic] cette lettre ça pourrait te poser des problèmes… ».
g. Par courrier du 4 mai 2023 adressé à « F______ », B______, sous la plume de son conseil, a relevé avoir reçu l’ordre de fermer le restaurant le jour même. Il a réclamé le paiement de son salaire du mois d’avril 2023, puis sollicité des renseignements sur l’exploitation et l’avenir de l’établissement.
h. Le 7 mai 2023, A______ a versé à B______ un montant net de 2'200 fr. à titre d’acompte pour le salaire du mois d’avril 2023. La quittance signée par B______ précisait que A______ avançait ce montant « dans le cadre de l’interruption sans préavis de la gestion du restaurant « F______ » par D______ » pour lui « permettre de faire face à ses obligations immédiates ».
i. Par courrier du 8 mai 2023 adressé à A______, B______, sous la plume de son conseil, a rappelé à ce dernier ses obligations d’employeur et l’a mis en demeure de lui verser le solde de son salaire du mois d’avril 2023.
Par courrier du même jour adressé au conseil de B______, A______ a expliqué que D______ était l’employeur de B______ avec qui il avait signé un contrat de travail.
j. Par courrier des 9 et 11 mai 2023, B______ a écrit, sous la plume de son conseil, à D______ pour lui réclamer le paiement de ses salaires d’avril et mai 2023.
k. Par deux courriers séparés du 29 mai 2023 adressés respectivement à D______ et à A______, B______ a démissionné avec effet immédiat en raison du non-paiement de ses salaires.
l. Par deux demandes simplifiées séparées, déposées le 3 août 2023 et le 1er septembre 2023, après l’échec des tentatives de conciliation, B______ a saisi le Tribunal des prud’hommes, avec des conclusions tendant à la condamnation de la société « E______/A______ » et de D______ en paiement de la somme totale brute de 8'636 fr. 20, avec suite d’intérêts, à titre de solde de salaire pour le mois d’avril 2023 (2'213 fr. 90), de treizième salaire relatif au mois d’avril 2023 (412 fr.), de salaire pour la période du 1er au 26 mai 2023 (4'306 fr.), de treizième salaire pour la période du 1er mai au 26 mai 2023 (358 fr. 70) et de vacances au pro rata pour la période du 1er mars au 26 avril 2023 (1'345 fr. 60).
m. A l’appui de ses deux demandes, B______ a en substance allégué avoir été engagé par A______ dès le 1er mars 2023 en qualité de pizzaïolo. Il avait signé un second contrat de travail à durée indéterminée avec D______, le gérant du restaurant, en qualité de pizzaïolo et de cuisinier. Le 3 mai 2023, A______ avait refusé de lui remettre de l’argent pour acheter des aliments alors qu’il l’avait fait auparavant. Le lendemain, il l’avait informé du fait qu’il n’était pas son employeur et qu’il devait s’adresser à D______. Ce jour-là, il lui avait aussi demandé de fermer le restaurant. Il s’était également adressé à D______ et lui avait réclamé son salaire mais ce dernier lui avait dit que le contrat de gérance dont il bénéficiait avait pris fin le 3 mai 2023 et qu’il pouvait l’aider pour obtenir des prestations de l’assurance chômage. Après avoir insisté auprès de A______ pour le paiement de son salaire, ce dernier lui avait payé une partie du salaire du mois d’avril, soit un montant net de 2'200 fr. Le restaurant avait rouvert le 9 mai 2023 avec du nouveau personnel. Le 1er juin 2023, il avait commencé à travailler pour un nouvel employeur.
n. Dans son mémoire de réponse du 6 octobre 2023, D______, non représenté par un avocat, a indiqué qu’il ne « s’oppose pas aux conclusions » de B______, mais qu’il entendait « dénoncer M. A______ » pour les raisons exposées dans son écriture. D______ expliquait que c’était A______ qui était l’employeur de B______. En substance, il a allégué que B______ avait été engagé par A______. S’agissant du paiement du salaire, malgré l’existence du contrat de gérance libre entré en vigueur le 1er novembre 2022, il n’avait jamais eu accès aux comptes bancaires de l’établissement, ni à la caisse qui étaient demeurés en mains de A______. Lui-même était ainsi gérant uniquement sur le papier, A______ détenant de fait tous les pouvoirs. C’était pour cette raison que les salaires n’avaient pas pu être versés aux employés de l’établissement.
o. Dans son mémoire de réponse du 20 novembre 2023, A______ a notamment allégué exploiter sous la raison individuelle « E______/A______ » le restaurant à l’enseigne « F______ » à G______. La demande étant dirigée contre [la raison individuelle] « E______/A______ », et non contre A______ en personne, celle-ci devait être déclarée irrecevable. Il a également précisé qu’en tout état de cause, il n’était pas l’employeur du B______, notamment en raison du fait que D______ avait repris la gestion de l’établissement dès le 1er novembre 2022 et que B______ avait signé un deuxième contrat de travail avec lui. S’il avait accepté de verser le montant net de 2'200 fr. à B______, c’était pour le dépanner, ce qu’il avait pris le soin de relever sur la quittance qu’il avait fait signer à ce dernier.
p. Par ordonnance du 22 janvier 2024, le Tribunal a joint les causes C/10469/2023-2 et C/11468/2023-2 sous le numéro C/10469/2023-2.
q. A l’audience de débats du 9 avril 2024, B______ a expliqué avoir été engagé par A______ dès le 1er mars 2023 et avoir travaillé durant une dizaine ou une quinzaine de jours avec lui. Il était pizzaïolo, cuisinier et plongeur car il n’y avait pas d’autres employés. Ensuite, A______ lui avait présenté D______ et lui avait dit que c’était le nouveau gérant. Aux alentours du 15 ou du 20 mars 2023, ce dernier lui avait fait signer un deuxième contrat de travail, daté du 1er mars 2023, en raison du fait qu’il reprenait la gestion de l’établissement. En réalité, ce deuxième contrat de travail avait été signé bien après le 1er mars 2023. A______ était resté dans le restaurant même après l’arrivée de D______. Il avait un bureau dans l’établissement. C’était A______ qui avait fixé son cahier des charges au sein de l’établissement, ainsi que son horaire de travail. Après l’arrivée de D______, il avait conservé les mêmes horaires. Au début de son activité, c’était A______ qui faisait les courses en fonction d’une liste qu'il lui remettait. Ensuite, D______ avait pris le relais.
A______ a expliqué qu’il devait s’occuper du restaurant jusqu’à ce que D______ obtienne la patente. Il avait payé B______ pour son activité en mars 2023 depuis le compte du restaurant.
D______, qui a comparu sans être assisté par un avocat, a déclaré « Je reconnais toutes les conclusions de B______ ». Il a ensuite indiqué qu’il était présent au restaurant dès le mois de mars 2023. Il avait créé un compte bancaire pour le restaurant mais il n’avait pas pu y déposer les recettes de la caisse puisqu’il les remettait chaque soir à A______. Il n’avait pas pu verser le salaire de B______ pour cette raison. Il n’avait pas non plus accès aux fournisseurs. Son activité au sein du restaurant se limitait à aller chercher les marchandises listées par B______ à H______ [distribution en-gros]. Il avançait les fonds pour les courses, puis il se faisait rembourser par A______. A______ décidait des heures d’ouverture et de fermeture du restaurant et il donnait des ordres. C’est lui qui avait décidé d’ouvrir le restaurant tous les jours et non pas que les week-ends comme il l’avait proposé. A______ lui avait dit que B______ avait besoin d’un travail à temps plein et que dans tous les cas, les employés devaient travailler pour gagner leur propre salaire. D______ a ajouté qu’il avait signé le contrat de travail avec B______ car A______ lui avait dit de le faire en sa qualité de gérant. Pendant les cours pour la patente, il avait appris qu’il devait avoir un diplôme et une autorisation d’exploiter pour exploiter le restaurant. Il avait fait une erreur en signant ce contrat de travail.
r. Par courrier du 15 mai 2024, A______ a modifié ses conclusions en ce sens qu’il concluait, principalement, à ce que le Tribunal prenne acte de l’acquiescement de D______ intervenu dans la procédure et à ce que la cause soit rayée du rôle.
s. A l’audience du 22 mai 2024, D______ a déclaré ne pas avoir accepté de payer le salaire de B______ lors de l’audience du 9 avril 2024. Suite à la remarque du Tribunal selon laquelle il avait reconnu les prétentions de B______ lors de l’audience du 9 avril 2024, D______ a clarifié que ce qu’il avait voulu dire à l’audience du 9 avril 2024, c’était que B______ avait travaillé et qu’il devait donc être payé, mais lui-même ne reconnaissait pas lui devoir de montant.
D. Dans le jugement querellé, les premiers juges ont retenu, en substance, que c’était A______, et non l’entreprise individuelle « E______/A______ » qui aurait dû, formellement, être assigné, mais que l’inexactitude de B______ était relative. Elle n’avait pas empêché A______ de se reconnaître et de se défendre, de sorte qu’elle ne portait pas à conséquence. Par conséquent, A______ disposait bien de la légitimation passive. Ainsi, la demande n’était pas nulle et le Tribunal a procédé d’office à la rectification de la qualité d’une des parties, en ce sens que c’est bien « A______ » qui est partie à la présente procédure.
Sur la conclusion de A______ selon laquelle le Tribunal devait constater l’acquiescement de D______, le Tribunal a considéré que le fait que D______ – qui comparaissait seul et qui n’était pas assisté d’un conseil – reconnaisse le bien-fondé des prétentions de B______, tout en contestant en être le débiteur n’était pas suffisant pour retenir un acquiescement au sens de l’article 241 CPC.
Sur la question de savoir qui était l’employeur de B______, le Tribunal a retenu que même si un second contrat de travail avait été signé avec D______, A______ s’était toujours comporté en employeur vis-à-vis des employés de l’établissement. Ce dernier avait en effet engagé le personnel de l’établissement, à savoir B______ et la serveuse alors que le contrat de gérance libre était entré en vigueur depuis le 1er novembre 2022. Il était également le seul référent des deux employés de l’établissement et avait fixé les horaires de B______, qui étaient restés identiques après l’arrivée de D______. Enfin, c’était bien A______ qui avait payé une partie du salaire du mois d’avril 2023 à B______. D______ a expliqué qu’il n’avait pas eu accès ni à la caisse, ni au compte bancaire sur lequel les recettes avaient été déposées. L’impossibilité d’accéder aux comptes bancaires ainsi qu’à la caisse de l’établissement l’avaient contraint de résilier le contrat de gérance libre le 3 mai 2023. Ainsi, il ne faisait aucun doute pour le Tribunal que le deuxième contrat de travail était fictif et que les parties avaient continué à se comporter comme s’il n’existait pas. Par conséquent, seul A______ devait être considéré comme l’employeur de B______.
En conséquence, le Tribunal a condamné A______ à verser à B______, avec suite d’intérêts, la somme brute de 2'625 fr. 90 à titre de solde du salaire du mois d’avril 2023, la somme brute de 4'664 fr. 70 à titre de salaire pour le mois de mai 2023 et la somme brute de 1'345 fr. 60 à titre d’indemnité pour vacances non prises. Le Tribunal a également condamné A______ a remettre un certificat de salaire 2023 à B______.
1. Le recours, écrit, motivé et formé dans les trente jours par une partie qui y a un intérêt (art. 59 al. 2 let. a CPC), est recevable contre les décisions finales de première instance rendues dans le cadre d'affaires patrimoniales dont la valeur litigieuse est inférieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 a contrario, 319 let. a et 321 al. 1 CPC).
Interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours est recevable.
Il peut être formé pour la violation du droit et la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).
2. Le recourant reproche tout d’abord au Tribunal d'avoir manifestement constaté de manière inexacte certains faits. L'état de fait présenté ci-dessus a donc été rectifié et complété dans la mesure nécessaire, de sorte que ce grief ne sera pas examiné plus avant.
3. Dans un second grief, le recourant reproche au Tribunal d’avoir violé l’art. 241 al. 1 CPC en retenant que D______ n’avait pas acquiescé aux prétentions de B______.
3.1 En matière civile, l'art. 241 al. 1 CPC dispose que toute transaction, tout acquiescement et tout désistement d'action consignés au procès-verbal par le tribunal doivent être signés par les parties. L'acquiescement se définit comme un acte unilatéral par lequel une partie reconnaît le bien-fondé des prétentions adverses et admet ses conclusions (cf. Denis Tappy, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2e éd. 2019, no 19 ad art. 241 CPC; Gschwend/ Steck, in Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 3e éd. 2017, n° 28 ad art. 241 CPC; Naegeli/Richers, in Kurzkommentar ZPO, 2e éd. 2013, n° 21 ad art. 241 CPC). L'acquiescement est définitif et irrévocable (Markus/Kriech, in Schweizerische Zivilprozessordnung [ZPO] Kommentar, 2e éd. 2016, n° 7 ad art. 241 CPC; Laurent Killias, in Berner Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2012, n° 8 ad art. 241 CPC). S'agissant d'un acte unilatéral, seule est requise, au procès-verbal, la signature de la partie qui acquiesce (arrêt du Tribunal fédéral 4D_4/2018 du 19 mars 2018 consid. 2.2).
3.2 En l’espèce, comme l’a relevé le recourant, dans l’écriture de D______ du 6 octobre 2023, ce dernier a indiqué qu’il ne s’opposait pas « aux conclusions du Demandeur ».
D______ a également déclaré lors de l’audience du 9 avril 2024 « Je reconnais toutes les conclusions de B______ ».
Puis, lors de l’audience du 22 mai 2024, le Tribunal a fait remarquer à D______ « qu’à l’audience du 9 avril 2024, [il avait] reconnu les prétentions de B______ ».
Cependant, pour évaluer s’il y a eu réellement – ou non – acquiescement, il convient de remettre ces propos dans leurs contextes et de tenir compte de l’ensemble des déclarations de D______. La Cour ne saurait en effet retenir un acquiescement sur la base de malentendus ou de possibles erreurs dans les termes utilisés.
En l’occurrence, dans sa réponse du 6 octobre 2023, après avoir indiqué ne pas s’opposer aux conclusions de B______, D______ expliquait que c’était A______ qui était l’employeur.
S’agissant des déclarations effectuées lors de l’audience du 9 avril 2024, D______ a clarifié le 22 mai 2024 que ce qu’il avait voulu dire lors de la première audience, c’était que B______ avait travaillé et qu’il devait donc être payé, mais que lui-même ne reconnaissait pas lui devoir les montants réclamés.
Au vu de l’ensemble des déclarations de D______ et des divergences entre celles-ci, il est manifeste que D______ ne comprenait pas les implications possibles de déclarations telles que « je ne m’oppose pas aux conclusions » ou « je reconnais les conclusions ». Il sied de rappeler à cet égard que D______ comparaissait seul et qu’il n’était pas assisté d’un conseil.
Les termes employés, compte tenu de l’ensemble des déclarations de D______, ne permettent donc pas de conclure que celui-ci s’est véritablement reconnu débiteur des conclusions émises par B______. Au contraire, il ressort de l’ensemble du dossier que D______ a toujours contesté devoir en être tenu responsable.
Dans ce contexte, la Cour ne peut pas considérer qu’il aurait pu y avoir un acquiescement de la part de D______.
C’est donc à bon droit que le Tribunal a retenu que D______ n’avait pas acquiescé aux prétentions de B______.
Le jugement sera par conséquent confirmé sur ce point.
4. L’appelant reproche encore au Tribunal d’avoir violé les art. 319 et 18 CO en retenant que A______ était l’employeur de B______ pendant la période litigieuse.
4.1 Selon l’art. 319 al. 1 CO, les quatre éléments constitutifs d’un contrat de travail sont i) une prestation personnelle du travailleur, ii) la mise à disposition par le travailleur de son temps pour une durée déterminée ou indéterminée, iii) un rapport de subordination et iv) un salaire (Rehbinder, Berner Kommentar p. 46; Aubert, Commentaire romand, n° 1 ad. art. 319 CO). Le rapport de subordination revêt une importance primordiale dans la qualification du contrat de travail. Il suppose que le travailleur est soumis à l’autorité de l’employeur pour l’exécution du contrat, d’un point de vue temporel, spatial et hiérarchique (Aubert, op. cit. N° ad. art. 319 CO). Le droit de l’employeur de donner des directives et des instructions constitue un élément caractéristique du contrat de travail (SJ 1990 p. 145, 149).
4.2 La jurisprudence a déjà eu l’occasion de trancher la question de la légitimation passive du propriétaire d’un fonds de commerce remis en gérance libre pour connaître des réclamations d’un employé du gérant libre. Dans un arrêt de décembre 1999, confirmé par le Tribunal fédéral par décision du 15 novembre 2000 (4C_234.2000), la Cour d’appel des Prud’hommes a considéré que l’engagement d’un employé par un gérant libre en exécution du contrat de gérance libre crée en principe une relation de travail entre le gérant libre et l’employé ainsi engagé, le propriétaire du fonds de commerce étant généralement étranger à toute relation de travail en l’absence notamment d’un rapport de subordination pouvant le lier à l’employé. La Cour cantonale a également considéré que le fait que le propriétaire du fonds de commerce soit en possession de la patente d’exploitation d’un établissement qu’il ne gère pas lui-même, ne lui confère pas automatiquement le statut d’employeur. Ce n’est que dans l’hypothèse où le contrat de gérance libre ne reflèterait pas la réalité des rapports juridiques entre le gérant et le propriétaire du fonds de commerce que la question d’une éventuelle légitimation passive de ce dernier peut être prise en considération (CAPH/9/2008 du 24 janvier 2008, consid. 2).
4.3 Pour apprécier la forme et les clauses d'un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al: 1 CO).
4.4 En l’espèce, début 2023, B______ a signé deux contrats de travail, le premier avec A______ et le second avec D______.
Le recourant a souligné que le contrat entre B______ et D______ avait été signé postérieurement à celui conclu avec A______. De plus, ce second contrat était légèrement plus long et détaillé que le premier. Contrairement au contrat signé par B______ et A______, le second contrat conclu avec D______ précisait notamment les coordonnées de B______, des données personnelles, ainsi que les montants du salaire mensuel brut et des déductions sociales.
Comme le relève également le recourant, le contrat de gérance prévoyait que D______ devait avoir la responsabilité de la gestion du café-restaurant et devait assumer l’intégralité des charges y relatives à compter du 1er novembre 2022, à l’exception du loyer dû pour les murs.
La Cour ne saurait toutefois s’arrêter aux clauses des différents contrats pour apprécier les relations entre les parties.
Il convient bien plutôt d’examiner la réalité des rapports juridiques entre les parties et, plus précisément, de déterminer qui exerçait réellement le pouvoir de subordination.
En l’occurrence, il ressort du dossier que A______ s’est toujours comporté en employeur vis-à-vis de B______.
L’affirmation du recourant selon laquelle le deuxième contrat de travail signé avec B______ avait remplacé le premier contrat de travail ne peut pas être suivie. Certes, ce deuxième contrat était légèrement plus long et plus détaillé, mais il ressort du dossier que D______ n’a finalement jamais réellement pu exercer ses fonctions de gérant et que le pouvoir de décision au sein du restaurant et vis-à-vis de son personnel est demeuré entre les mains de A______.
A cet égard, contrairement à ce qu’affirme le recourant dans son écriture, le constat que D______ n’avait jamais exercé ses fonctions de gérant ne se base pas uniquement sur l’art. 7a du contrat de gérance libre, mais se fonde surtout sur le complexe de faits décrit ci-dessous.
A______ a engagé B______, alors même que le contrat de gérance libre était entré en vigueur depuis le 1er novembre 2022.
A______ a également fixé les horaires de B______, qui sont restés identiques après l’arrivée de D______. B______ a par ailleurs expliqué que A______ n’avait jamais quitté le restaurant, même après l’arrivée de D______.
D______ a expliqué qu’il n’avait pas eu accès ni à la caisse, ni au compte bancaire sur lequel les recettes avaient été déposées, de sorte qu’il était dans l’impossibilité de gérer réellement l’établissement.
Le message WhatsApp de B______ du 4 mai 2023 à D______ ne modifie pas cette appréciation. Certes, B______ réclame son salaire à D______ dans ce message, mais il l’a envoyé après avoir eu une discussion avec A______ au cours de laquelle ce dernier lui avait expliqué qu’il n’était pas son employeur et qu’il devait s’adresser à D______. B______ avait donc pu être influencé par les déclarations de A______ avant l’envoi de son message. Le fait que B______ ait fait référence à D______ comme étant son « patron » dans ce message n’est pas non plus significatif, dans la mesure où, dans le langage courant, beaucoup d’employés désignent ainsi leur supérieur hiérarchique, sans pour autant qu’il s’agisse de leur employeur.
C’est donc à juste titre que le Tribunal a retenu que B______ et A______ avaient continué à être liés par un contrat de travail, même après la signature du contrat de travail entre B______ et D______.
C’est également à bon droit que le Tribunal a considéré que seul A______ était l’employeur de B______ en avril et mai 2023.
Par conséquent, le jugement sera confirmé sur ce point également.
5. Au vu de ce qui précède, les griefs du recourant sont infondés. Le recours sera ainsi rejeté et le jugement du Tribunal confirmé, étant précisé que la quotité des montants alloués n'a pas été remise en question.
6. Il n'est pas perçu de frais (art. 114 let. c CPC) ni alloué de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :
A la forme :
Déclare recevable l'appel formé par A______ le 4 novembre 2024 contre le jugement JTPH/259/2024 rendu le 2 octobre 2024 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/10469/2023.
Au fond :
Confirme le jugement entrepris.
Déboute les parties de toute autre conclusion.
Sur les frais :
Rappelle que la procédure est gratuite et qu'il n'est pas alloué de dépens.
Siégeant :
Madame Anne ROUX FOUILLET, présidente; Madame Nadia FAVRE, Monsieur Valery BRAGAR, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.
Indication des voies de recours et valeur litigieuse :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15'000 fr.