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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/14920/2024

ACJC/861/2025 du 18.06.2025 sur JTPH/51/2025 ( OS ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14920/2024 ACJC/861/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MERCREDI 18 JUIN 2025

 

Entre

A______ & CIE SA, sise ______ [GE], recourante contre un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 19 février 2025 (JTPH/51/2025), représentée par Me Naomi RUPF, avocate, Callan Law Sàrl, rue Marignac 9, 1206 Genève,

et

COMMISSION PROFESSIONNELLE PARITAIRE B______, sise ______ (VD), intimée.


EN FAIT

A. Par jugement JTPH/51/2025 du 19 février 2025, reçu par les parties le 20 février 2025, le Tribunal des prud'hommes a déclaré valable la décision rendue le 21 novembre 2022 par la COMMISSION PROFESSIONNELLE PARITAIRE B______ (ci-après la Commission paritaire) à l’encontre de A______ & CIE SA (ch. 2 du dispositif), condamné cette dernière à verser à la Commission paritaire 9'500 fr. avec intérêts à 5% dès le 10 février 2023 (ch. 3), prononcé la mainlevée définitive de l’opposition formée par A______ & CIE SA au commandement de payer poursuite n° 1______ (ch. 4), dit qu'il n'était pas perçu de frais, ni alloué de dépens (ch. 5) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 6).

B. a. Le 21 mars 2025, A______ & CIE SA a formé recours contre ce jugement, concluant principalement à ce que la Cour de justice l'annule, déclare irrecevable la demande déposée par sa partie adverse, subsidiairement, déboute celle-ci de toutes ses conclusions et annule le commandement de payer poursuite n° 1______.

b. La Commission paritaire a conclu à la confirmation du jugement querellé.

c. Les parties ont été informées le 29 avril 2025 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. A______ & CIE SA a comme but social tous travaux liés à la construction, notamment la plâtrerie et les réfections de façades. Son siège est à C______ (GE) depuis le mois d’août 2020 et était précédemment à D______ (VD).

b.a Les 2 et 13 février ainsi que 30 août 2018, le Contrôle des chantiers de la construction dans le canton de Vaud (ci-après Contrôle des chantiers) a effectué des contrôles sur des chantiers sis respectivement à E______, à F______ et à G______, sur lesquels œuvraient plusieurs employés de A______ & CIE SA à des travaux relevant de la branche de la plâtrerie-peinture.

Les 13 février, 7 mars et 28 septembre 2018, l’organisme de contrôle a établi trois rapports.

b.b Le 4 décembre 2018, la Commission paritaire a indiqué à A______ & CIE SA que, compte tenu des activités exercées lors des contrôles, elle était soumise à la Convention collective de travail du second œuvre romand (ci-après CCT-SOR). Elle l’a ainsi informée de l’ouverture d’un contrôle pour la période du 1er janvier 2016 au 30 novembre 2018 et lui a imparti un délai pour fournir divers documents, notamment les feuilles d'heures de tous ses employés.

b.c A______ & CIE SA a transmis à celle-ci divers documents en avril et juillet 2019.

Elle n'a pas transmis de feuilles d'heures, se limitant à indiquer ce qui suit à ce sujet : "il est fait référence à la durée de travail selon CCT, les plages horaires sont respectées en fonction de la saison conformément aux dispositions conventionnelles".

c.a Le 10 juillet 2019, le Contrôle des chantiers a effectué un nouveau contrôle sur un chantier de A______ & CIE SA à H______ [VD]et a établi un rapport.

c.b Par courrier du 28 août 2019, la Commission paritaire a informé A______ & CIE SA de la jonction de ce rapport à la procédure pendante, de l’extension de la période du contrôle au 31 décembre 2018 ainsi que du 1er mars au 31 juillet 2019 et lui a imparti un délai pour fournir divers documents.

c.c Le 14 octobre 2019, A______ & CIE SA a adressé des documents à la Commission paritaire.

d. Le 23 novembre 2020, la Commission paritaire a adressé un rapport de contrôle à A______ & CIE SA, par lequel elle constatait des irrégularités et lui demandait des rattrapages et des mises en conformité, avec un délai au 31 décembre 2020 pour s’exécuter.

Le délai a été prolongé au 3 mars 2021.

e. Par courrier du 19 août 2021, Commission paritaire a indiqué à A______ & CIE SA que des documents remis spontanément par son employée I______ avaient été versés au dossier et qu’elle pouvait venir les consulter.

f. Le 19 août 2022, la Commission paritaire a adressé un nouveau rapport de contrôle à A______ & CIE SA, par lequel elle indiquait que, au vu de l’écoulement du temps, le contrôle était réduit à la période du 1er mars au 31 juillet 2019. Le contrôle portait sur un échantillonnage de six travailleurs (T1 à T6, T6 étant I______) sur les dix annoncés par la société comme actifs durant la période initiale. Le rapport faisait état de plusieurs irrégularités et de préjudices financiers subis par les travailleurs. La Commission paritaire a demandé à A______ & CIE SA de se mettre en conformité avec les dispositions conventionnelles, de le démontrer par la production de différents documents et d’effectuer les rattrapages de salaire demandés. Elle a imparti à A______ & CIE SA un délai au 30 septembre 2022 pour ce faire.

g. Sans nouvelles de A______ & CIE SA, la Commission paritaire lui a adressé un rappel le 14 octobre 2022 avec un ultime délai au 31 octobre 2022.

h. Par courrier du 28 octobre 2022, A______ & CIE SA a indiqué qu’elle était désormais membre du Groupement M______ d’entreprises du bâtiment et génie-civil (ci-après le M______). Pour toutes les assurances, y compris la LPP, elle était assurée auprès dudit groupement, lequel veillait au respect des dispositions des CCT en vigueur. Pour deux travailleurs contrôlés (T1 et T5), elle a indiqué, s’agissant du salaire minimum : « ce dossier sera réglé sans autres suites ». S’agissant de I______, elle a demandé la suspension de la procédure au motif que celle-ci avait saisi les autorités judiciaires vaudoises. Elle a conclu au classement du dossier. Pour les autres renseignements, A______ & CIE SA demandait à la Commission paritaire de voir directement avec le M______.

i. Par décision du 21 novembre 2022, la Commission paritaire a prononcé une amende de 9'000 fr. à l’encontre de A______ & CIE SA et a mis à sa charge les frais de contrôle de 500 fr.

La Commission paritaire a retenu les violations suivantes : 1) contrat de travail non-conforme pour une travailleuse, 2) défaut de décompte d’heures mensuel pour tous les travailleurs contrôlés, 3) absence de rémunération du travail excédentaire au détriment d’une travailleuse, 3) non-respect du salaire minimal pour trois travailleurs, 4) fiches de salaire partiellement conformes, 5) prévoyance professionnelle non-conforme pour l’ensemble des travailleurs contrôlés.

j. Aucun recours n’ayant été interjeté contre cette décision, la Commission paritaire a, par courrier du 26 janvier 2023, imparti à A______ & CIE SA un délai au 10 février 2023 pour s’acquitter de la somme de 9'500 fr.

k. Le 30 novembre 2023, elle a fait notifier à celle-ci un commandement de payer le montant de 9'500 fr. avec intérêts à 5% dès le 10 février 2023 au titre de peine conventionnelle selon décision du 21 novembre 2022. Il a été fait opposition à ce commandement de payer qui porte le No 1______.

l.a Par requête du 29 avril 2024, introduite en temps utile après l'échec de la tentative de conciliation, la Commission paritaire a conclu à ce que le Tribunal des prud'hommes condamne A______ & CIE SA à lui verser 9'500 fr., avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 10 février 2023 et prononce la mainlevée définitive de l’opposition formée au commandement de payer précité.

A l’appui de sa demande, elle a indiqué avoir retenu les violations suivantes de la CCT-SOR par A______ & CIE SA :

1) Le contrat de travail de l'employée I______ mentionnait un temps d'essai de trois au lieu d'un mois, en violation de la CCT-SOR. A______ & CIE SA avait produit, pour cette employée, un contrat de travail non signé, qui prévoyait notamment un temps d’essai d’un mois. Or, dans les documents transmis directement par l’intéressée, figurait un contrat de travail signé qui prévoyait un temps d’essai de trois mois.

2) Bien que requise de le faire, A______ & CIE SA n’avait produit aucun décompte d’heures de ses employés dans le cadre du contrôle, de sorte qu'il était établi qu'elle ne tenait pas de tels décomptes, en violation de la CCT-SOR.

3) Il ressortait des décomptes d'heures transmis par I______ qu’il était arrivé à cette dernière de travailler plus de cinquante heures par semaine, soit au-delà du maximum prévu par la loi. Or, aucun supplément de salaire ne lui avait été payé alors qu’elle aurait eu droit à 3'162 fr. 70 pour les heures excédentaires qu’elle avait effectuées, à savoir entre 14 et 22,4 heures par mois.

4) A______ & CIE SA n’avait pas respecté le salaire minimum pour trois employés. J______, engagé en classe de salaire C, aurait dû bénéficier du salaire de la classe B à compter du 1er janvier 2019, ce qui n’avait pas été le cas; son préjudice s’élevait à 237 fr. 25. K______, engagé en classe de salaire A, n’avait pas perçu le salaire afférent à cette classe; son préjudice s’élevait à 1'684 fr. 50. I______ n’avait pas perçu le salaire minimum de la classe de salaire C et son préjudice s’élevait à 341 fr. 80.

5) Les décomptes de salaire produits par A______ & CIE SA ne contenaient pas la totalité des éléments prévus par l’article 31 CCT-SOR, en particulier la profession, la classe de salaire et les absences pour maladie, accident, vacances ou justifiés.

6) Si A______ & CIE SA avait produit un contrat d’assurance prévoyance professionnelle conclu avec la FONDATION COLLECTIVE L______ le 13 février 2013, elle n’avait jamais remis de plan de prévoyance, ce qui ne lui permettait en conséquence pas de vérifier si les prestations d’assurance minimales étaient respectées. En outre, il ressortait des documents transmis par I______ que ce contrat avait été résilié par l’assurance à compter du 30 septembre 2017 de sorte que A______ & CIE SA était affiliée à la Fondation institution supplétive LPP. Or, il était notoire que les prestations de celle-ci ne respectaient pas les prestations minimales exigées par l’article 38 CCT-SOR.

l.b La Commission paritaire a notamment produit à l'appui de sa requête l'exemplaire du contrat de travail de l'employée I______ qui lui avait été remis par A______ & CIE SA et l'exemplaire remis par l'employée. Ces deux documents, datés du même jour, présentent des différences significatives. L'exemplaire remis par A______ & CIE SA n'est pas signé par l'employée et mentionne un temps d'essai d'un mois ainsi qu'un temps de travail de 41 heures par semaine. L'exemplaire remis par I______ est signé par celle-ci et mentionne un temps d'essai de trois mois et un temps de travail de 45 heures par semaine, étant précisé que "la tranche horaire ordinaire de situe entre 6h00 et 22h00".

m.a A______ & CIE SA a conclu, principalement, à ce que le Tribunal déclare la demande irrecevable. Subsidiairement, elle a conclu à ce qu'il déboute sa partie adverse de ses conclusions, constate la nullité de la décision du 21 novembre 2022 et annule le commandement de payer.

Elle a notamment fait valoir que la décision du 21 novembre 2022 était nulle car la Commission paritaire n’était pas compétente pour rendre une telle décision dès lors que son siège se situait à Genève depuis 2020.

Elle a formulé les allégations suivantes :

1) Le temps d'essai de trois mois au lieu d'un mentionné sur le contrat de I______ était une erreur de plume.

2) Elle établissait des décomptes d'heure pour ses employés, mais la remise de ces décomptes n'était pas justifiée puisqu'elle avait imposé des horaires fixes et versait des salaires fixes.

3) Les décomptes d’heures remis par I______ étaient contestés, avaient été établis a posteriori et n’étaient pas crédibles. La question de la rémunération d’éventuelles heures supplémentaires de cette employée avait fait l’objet d’une procédure prud’homale, au terme de laquelle elle avait conclu un accord avec celle-ci, lui versant 15'000 fr. net, montant suffisant pour réparer une éventuelle violation des droits de l'employée.

4) J______ aurait effectivement dû bénéficier du salaire de la classe B à compter du 1er janvier 2019. Il s’agissait toutefois d’une simple erreur administrative. En outre, son préjudice s’élevait à 219 fr. et non à 237 fr. 25. Cette erreur avait été compensée puisqu’il avait perçu dès 2021 un salaire mensuel s’élevant à 111 fr. de plus que le salaire minimum prévu pour sa fonction. Le préjudice subi par K______ s’élevait à 1'555 fr. et non à 1'684 fr. 50. En outre, cette erreur avait été corrigée puisqu’il avait perçu en 2021 et en 2022 un salaire mensuel s’élevant à 60 fr. de plus que le salaire minimum prévu pour sa fonction. I______ effectuait moins de quarante-cinq heures de travail hebdomadaire, de sorte que son salaire respectait le minimum prévu par la CCT. En tout état, elle lui avait versé 15'000 fr. de sorte que toute éventuelle violation, qui était contestée, devait être considérée comme réparée et compensée.

5) Les décomptes de salaire ne contenaient effectivement pas l’indication de la classe de salaire. Il s’agissait toutefois d’une erreur d’ordre purement administratif.

6) Elle avait adhéré au M______ et à sa caisse de prévoyance le 1er octobre 2021, de sorte que, au moment où la décision de la Commission paritaire avait été rendue, elle était en règle au regard de la CCT-SOR et des exigences relatives à la prévoyance professionnelle.

m.b A______ & CIE SA a produit un procès-verbal, daté du 17 avril 2024, d'une audience tenue par le Tribunal d'arrondissement de Lausanne dans la cause l'opposant à I______. Il en ressort que son administrateur a indiqué devant le Tribunal vaudois que "si après trois mois" il n'était pas satisfait, "les personnes ont le droit de partir". Il contestait les heures supplémentaires alléguées par son ex-employée relevant ce qui suit : "je laisse les feuilles d'heures pour ceux qui veulent les remplir (…) De toute façon on est contrôlé précisément par la CCT de manière stricte. (…) Les employés peuvent remplir les feuilles, les donner au bureau (…) mais normalement le responsable du chantier doit signer et prouver ce que vous avez fait comme travail."

Lors de cette même audience, le témoin N______ a déclaré que les employés devaient remplir tous les jours des feuilles d'heures et les remettre au bureau.

A l'issue de l'audience, les parties ont conclu une transaction par laquelle A______ & CIE SA s'engageait verser 15'000 fr. nets à I______, laquelle acceptait, en contre-partie, de retirer la poursuite portant sur 90'000 fr. qu'elle avait engagée contre la précitée. A______ & CIE SA s'obligeait pour sa part à retirer la poursuite en 26'000 fr. introduite à l'égard de son ex-employée.

n. Par ordonnance du 18 novembre 2024, le Tribunal des prud'hommes a imparti à A______ & CIE SA un délai pour produire tout document (notamment règlement et plan de prévoyance LPP) attestant des conditions d’assurance en matière de prévoyance professionnelle de ses employés durant la période du 1er mars au 31 juillet 2019, indiquant à tout le moins le taux de prime à charge des travailleurs, la cotisation perçue et le détail des prestations.

A______ & CIE SA n’a pas déféré à cette injonction.

o. La Commission paritaire a indiqué lors de son audition par le Tribunal que les sanctions étaient fondées sur les dispositions du règlement édicté par les parties à la CCT-SOR et sur ses recommandations internes, documents figurant à la procédure. L'amende devait avoir un caractère dissuasif et les amendes se cumulaient. In casu, elle avait tenu compte du fait que "le total des infractions pécuniaires calculé" était de 5'400 fr. et que A______ & CIE SA n'avait pas collaboré. Pour la LPP non conforme, la peine conventionnelle retenue se chiffrait à 1'000 fr. (art. 4 ch. 2 let. f du règlement). Celle retenue pour le refus de fournir le décompte d’heures, était de 1'000 fr. (art. 4 ch. 2 let. c.), pour le non-respect du salaire minimum, de 500 fr. par travailleur (art. 2 let. b de la recommandation). Elle n’avait jamais reçu la preuve des réajustements prétendument effectués pour les deux travailleurs en 2019.

A______ & CIE SA a pour sa part déclaré qu'elle s'estimait victime d'un acharnement de la part de la Commission paritaire, raison pour laquelle elle avait déplacé son siège à Genève.

p. Lors de l'audience du Tribunal du 10 décembre 2024, les parties ont persisté dans leurs conclusions et le Tribunal a gardé la cause à juger.

EN DROIT

1.             Formé en temps utile et selon les formes légales contre une décision rendue dans un litige portant sur une valeur litigieuse inférieure à 10'000 fr., le recours est recevable (art. 319 let. a et 308 al. 2 CPC).

Peuvent être invoqués les griefs de violation du droit ou de constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

2.             Le Tribunal a retenu qu'il était compétent pour connaître du litige en raison du siège genevois de la recourante. L'intimée était compétente pour rendre la décision litigieuse aux termes de la CCT-SOR, puisque la recourante avait son siège dans le canton de Vaud pendant la période de contrôle et que les employés y exerçaient leur activité.

La recourante fait valoir que l'intimée n'est pas signataire de la CCT précitée, de sorte qu'elle ne peut pas se prévaloir des dispositions de celle-ci. Les conditions posées par l'art. 1 al. 1 let. e LTPH n'étant pas réalisées, le Tribunal était incompétent pour connaître du litige. De plus l'intimée n'était pas compétente pour rendre la décision litigieuse car la compétence territoriale était définie "au siège de la société à la date de la décision", de sorte que sa décision du 21 novembre 2022 était nulle. Reconnaître le contraire revenait à créer une incertitude juridique et des risques de décisions contradictoires. L'intimée aurait pu transmettre le dossier à la Commission genevoise.

2.1 Dans la branche économique du second-œuvre, en Suisse romande, les rapports de travail sont régis par la CCT-SOR du 16 janvier 2007, entrée en vigueur le 1er janvier 2007. Une nouvelle CCT-SOR est entrée en vigueur le 1er janvier 2011, puis une nouvelle le 1er janvier 2019.

Par arrêté du Conseil fédéral du 1er février 2011, le champ d'application de la CCT-SOR a été étendu à plusieurs reprises, pour la dernière fois, sa version de 2019 a été étendue par arrêté du 11 février 2020 et prorogée le 7 mars 2023, avec effet du 1er avril 2022 au 31 décembre 2024.

Selon l'art. 46 ch. 1 let. b CCT-SOR, dans le but de veiller à l'application de la CCT, il est institué des Commissions professionnelles paritaires cantonales.

L’article 47 CCT-SOR traite de l’exécution commune de la convention. Selon le ch. 2 de cette disposition, les commissions précitées sont chargées d’effectuer des contrôles dans les entreprises et de veiller à l’application de la convention. Au besoin, elles sont autorisées à exercer leurs compétences par la voie juridique.

Par ailleurs, l'article 1 al. 1 let. e de la Loi sur le Tribunal des prud'hommes (LTPH) prévoit que sont jugés par ledit Tribunal les litiges entre les parties à une convention collective de travail et un employeur ou un travailleur, au sens de l'article 357b CO (exécution commune).

Le CPC est applicable devant le Tribunal des prud'hommes. Selon l'art. 34 al. 1 CPC, les litiges doivent être portés, à choix, au for du siège du défendeur, ou du lieu où le travailleur exerce habituellement son activité professionnelle.

2.2 En l'espèce, il n'est pas contesté que la recourante est soumise à la CCT-SOR.

L'intimée est bien une commission paritaire cantonale, chargée, par les parties signataires de cette CCT de veiller au respect de ses dispositions et autorisée à exercer ses compétences par voie juridique (art. 46 al. let. b et 47 al. 2 CCT-SOR).

Le fait que cette CCT n'ait pas été signé par l'intimée n'a dès lors aucune conséquence sur le présent litige, contrairement à ce que soutient la recourante.

Par ailleurs, le Tribunal a retenu à bon droit que, pendant la période de contrôle faisant l'objet du présent litige, soit du 1er mars au 31 juillet 2019, tant le siège de la recourante que les chantiers contrôlés, se trouvaient dans le canton de Vaud, de sorte que l'intimée était compétente à raison du lieu pour sanctionner des infractions à la CCT-SOR (art. 1 CCT-SOR).

La recourante n'avance aucun argument pertinent permettant de retenir que la Commission paritaire genevoise était compétente pour ce faire. Elle ne fournit en particulier aucun élément concret à l'appui de sa thèse selon laquelle "la compétence territoriale" serait "définie au siège de la société à la date de la décision". Elle n'établit pas non plus en quoi la solution retenue par le Tribunal conduirait à une incertitude juridique ou à des risques de décisions contradictoires.

Cette solution est au contraire conforme à la lettre et à l'esprit des dispositions applicables, de sorte qu'elle doit être confirmée.

Le Tribunal était donc bien compétent pour connaître de la demande déposée par l'intimée (art. 1 al. 1 let e LTPH et 34 al. 1 CPC).

La décision rendue par celle-ci le 21 novembre 2022 n'est par ailleurs pas entachée d'un motif de nullité.

3. Le Tribunal a retenu que les infractions retenues par l'intimée étaient établies. La recourante ne contestait pas que le contrat de travail de I______ prévoyait un temps d'essai de trois mois au lieu du mois prévu par la CCT-SOR, ce qui justifiait une peine conventionnelle de 250 fr. Elle ne contestait pas non plus ne pas avoir établi de décomptes d'heures, contrairement à ce que prévoit ladite CCT; le fait que les horaires des employés étaient fixes n'était pas un motif justificatif et une peine de 1'000 fr. était due. La recourante n'avait pas payé à I______ de supplément de salaire pour ses heures excédentaires, ce qui fondait une peine de 5'000 fr. Le non-respect du salaire minimum était admis par l'intimée pour deux employés; le versement ultérieur d'un salaire supérieur au salaire minimum, lequel n'était au demeurant pas prouvé, ne changeait rien au fait que l'infraction était consommée; la peine pour cette infraction était de 500 fr. par employé. Les fiches de salaire de ceux-ci n'indiquaient pas la classe de salaire, contrairement aux exigences de la CCT, ce qui justifiait une peine de 500 fr. Les employés étaient affiliés à l'Institution supplétive LPP lors de la période contrôlée et il était "notoire" que les prestations de cette institution étaient inférieures à celles prévues par la CCT-SOR. A cela s'ajoutait que la recourante n'avait pas collaboré à la procédure, refusant de produire les pièces permettant d'établir la couverture LPP de ses employés au moment du contrôle. Une peine de 1'000 fr. était fondée pour ces faits. Au vu des peines prévues par les textes applicables, du préjudice subi par les travailleurs concernés et de l'absence de collaboration de la recourante, la peine conventionnelle de 9'000 fr. plus 500 fr. de frais prononcée par l'intimée était adéquate et devait être confirmée.

La recourante fait valoir que c'est en raison d'une erreur de plume que le contrat de I______ prévoyait un temps d'essai de trois mois et que le contrat n'a pas été résilié pendant le temps d'essai de sorte qu'elle n'a pas enfreint la CCT. De plus, la peine conventionnelle de 250 fr. n'était pas prévue par le règlement. Elle avait imposé des horaires et salaires fixes de sorte qu'elle n'avait pas à remettre à ses employés de décomptes d'heures. Les heures excédentaires retenues pour I______ n'étaient pas prouvées, les décomptes produits par celle-ci n'étant pas crédibles. Le fait qu'elle ait versé 15'000 fr. au titre de transaction à l'intéressée pour éviter un procès ne voulait pas dire qu'elle reconnaissait avoir commis une infraction. Il aurait en tout état de cause dû être tenu compte du versement de ce montant dans la fixation de la peine conventionnelle, laquelle ne pouvait excéder le montant de 500 fr. compte tenu du règlement, étant précisé que les recommandations de l'intimée divergeaient de celui-ci. La différence de salaire versée en défaveur des employés J______ et K______ en 2019 était minime et avait été compensée par le fait que les intéressés avaient reçu un salaire supérieur au minimum légal en 2021 et 2022. Il n'était pas prouvé que I______ avait effectué 45 heures de travail par semaine, de sorte que son salaire était conforme à la CCT. La peine de 500 fr. concernant l'absence d'indication de la classe de salaire des employés était excessive pour une erreur minime ne portant pas à conséquence. Elle était en règle avec la LPP dès le 1er octobre 2021, de sorte qu'aucune peine conventionnelle n'était due à ce titre. D'une manière générale, la gravité des violations reprochées était relative et elle s'était mise en règle avant la notification de la décision de l'intimée. Le but de l'amende, soit d'empêcher des violations futures de contrat, était atteint avant le prononcé de celle-ci. La peine maximum qui pouvait être prononcée était de 4'250 fr., laquelle devait être réduite au vu des circonstances. Les frais en 500 fr. n'étaient pas dus.

3.1.1 Selon l’article 6 ch. 2 CCT-SOR, le contrat de travail doit être établi avant la prise d’emploi. Les trente premiers jours sont considérés comme temps d’essai (art. 7 ch. 1 CCT-SOR).

Chaque travailleur reçoit un décompte mensuel mentionnant les heures travaillées, ainsi que les heures supplémentaires et les heures de travail excédentaire (art. 12 ch. 1 let. d CCT-SOR).

Le travail excédentaire est défini comme étant les heures effectuées au-delà de 45 heures par semaine (art. 12 ch. 1 let. c CCT-SOR). Ces heures donnent droit à des suppléments de salaire prévus par l'art. 13 ch. 3 CCT-SOR).

L’article 18 CCT-SOR prévoit des salaires minimums, fixés en fonction de la formation du travailleur et de sa position dans l’entreprise.

Selon l’article 31 CCT-SOR, un décompte mensuel de salaire est remis au travailleur et contient en particulier la profession, la classe de salaire, les heures ou jours d’absence pour maladie, accident, vacances ou justifiés.

L’article 38 ch. 7 CCT-SOR prévoit les conditions minimales de l’assurance LPP dans le canton de Vaud, dans lequel les travailleurs sont en principe assurés auprès de la Caisse de retraite professionnelle de l'industrie vaudoise de la construction. Les employeurs ont l'obligation de s'affilier à cette caisse, sauf s'ils sont au bénéfice d'une décision d'exemption, laquelle est octroyée si l'employeur a démontré avoir pris des mesures de prévoyance équivalente.

3.1.2 Selon l’article 47 ch. 3 CCT-SOR l'employeur est tenu de se présenter devant les Commissions paritaires cantonales chargée du contrôle du respect de la CCT et de leur présenter tous documents et informations utiles. Sans préjudice de l’éventuelle peine conventionnelle, des frais de contrôle sont perçus de la part des entreprises qui ont violé les dispositions conventionnelles, qui ne donnent pas suite aux demandes de renseignements ou fournissent des données incomplètes ou sciemment erronées (art. 47 ch. 4 CCT-SOR).

A teneur de l'art. 52 ch. 2 CCT-SOR, toute infraction aux dispositions de la CCT peut être sanctionnée par une amende de 30'000 fr. au plus par cas d’infraction, sans préjudice de la réparation des dommages éventuels.

3.1.3 Les peines conventionnelles sur l’ensemble du territoire romand sont fixées sur la base d’un règlement établi par la commission professionnelle paritaire du second-œuvre romand (art. 52 ch. 1 CCT-SOR).

Selon l'art. 1 ch. 1 de ce règlement, toute infraction aux dispositions de la CCT peut être sanctionnée par une peine conventionnelle, sans préjudice de la réparation des dommages éventuels. Le montant de la peine conventionnelle est fixé de manière proportionnée. L'amende a pour but d'inciter les entreprises à respecter la CCT et doit avoir un caractère dissuasif (ch. 2). Des frais administratifs sont perçus de la part des entreprises qui ont enfreint la CCT, qui refusent de renseigner l'organe de contrôle, qui le font de manière incomplète ou qui fournissent sciemment des informations erronées (ch. 5). Les frais administratifs de contrôle concernent notamment la vérification des pièces transmises, les frais de préparation, notamment de réquisition des documents et de suivi du dossier (ch. 6).

Selon l'art. 4 ch. 1 du règlement, en cas d'infraction pécuniaire, l'amende est fixée en tenant compte de l'ampleur des montants non versés aux travailleurs par rapport à la masse salariale contrôlée et des antécédents de l'entreprises. Si, suite au contrôle, l'entreprise s'est acquittée totalement ou en partie des arriérés dus au travailleurs, il en est tenu compte dans la fixation de l'amende. Dans tous les cas, la peine doit se monter à au moins 110% des arriérés non acquittés.

Pour les infractions autres que pécuniaires, l'amende est en principe fixée sur la base de montants figurant à l'art. 4 ch. 2 du règlement, étant précisé que cette liste n'est pas exhaustive. Il peut être tenu compte de la bonne collaboration ou de l'absence de volonté de coopérer de l'entreprise en réduisant ou augmentant les montants d'amende prévus par le règlement de 20% (art. 4 ch. 2). Le refus de fournir les décomptes d'heures ou les contrats d'assurance est sanctionné par une amende de 1'000 fr. (art. 4 ch. 2 let. C). La violation de l'obligation minimale d'assurance est sanctionnée par une amende de 1'000 fr. (art. 4 ch. 2 let. F).

Selon l’article 5 du règlement, les frais mis à charge de l’entreprise concernée sont fixés forfaitairement, selon le nombre de séances nécessaires au traitement du dossier, de l’ouverture de contrôle au prononcé de la décision. Pour la première séance, soit il n’y a pas de frais, soit ils sont fixés à hauteur de 100 fr. par heure nécessaire au traitement du cas. Dès la deuxième séance, les frais sont de 600 fr. par séance.

3.1.4 Outre le règlement précité, les peines conventionnelles en lien avec la CCT-SOR sont régies par un texte intitulé "Recommandations des peines conventionnelles" édicté par l'intimée et fondé notamment sur l'art. 52 de la CCT.

Selon l'art. 1 de ces recommandations, des frais de contrôle sont perçus (ch. 2). Le montant de la peine conventionnelle et des frais de contrôle est laissé à la libre appréciation de la Commission paritaire, dans les limites fixées par la CCT (ch. 3). Les infractions prévues par les recommandations ne sont pas exhaustives et les montants fixés pour chaque infraction sont cumulables (ch. 4). La non-collaboration à la procédure de contrôle est constitutive d'une violation grave des dispositions conventionnelles au sens de l'art. 52 ch. 2 CCT (ch. 7).

Les peines conventionnelles prévues par l'art. 2 ch. I des recommandations sont les suivantes : 500 fr. par travailleur pour le non-respect des salaires minimums ou des majorations pour heures supplémentaires, 5'000 fr. pour le non-respect de la durée de travail, 1'000 fr. pour le non-respect de la prévoyance professionnelle et 250 fr. pour l'absence d'un contrat de travail conforme.


3.1.5
Les sanctions infligées par une commission paritaire chargée de l’application d’une convention collective de travail sont des clauses pénales au sens de l’art. 160 CO. Le juge doit réduire les peines qu’il estime excessives (art. 163 al. 3 CO). Pour déterminer l’éventuel caractère excessif d’une peine, il faut tenir compte de la gravité de la violation contractuelle et de la faute, ainsi que du but tendant à empêcher, par une peine efficace, de futures violations du contrat (Dunand, L’exécution des peines conventionnelles notifiées par les commissions paritaires, Arbeit und Arbeitsrecht, 2017, p. 63 ; ATF
116 II 302 consid. 3 et 4).

Dans l’application de l’art. 163 al. 3 CO et donc dans l’usage de son pouvoir d’appréciation (art. 4 CC), le juge doit observer une certaine réserve. Une intervention du juge dans le contrat ne se justifie que si le montant de la peine fixée est si élevé qu’il dépasse toute mesure raisonnable, au point de ne plus être compatible avec le droit et l’équité. Pour juger du caractère excessif de la peine conventionnelle, il ne faut pas raisonner abstraitement, mais, au contraire, prendre en considération toutes les circonstances concrètes de l’espèce (arrêts du Tribunal fédéral 4A 468/2016 du 6 février 2017 consid. 6.1).

3.1.6 Dans le cadre d'une procédure judiciaire régie par le CPC, à l'instar de la présente procédure, les parties sont tenues de collaborer à l'administration des preuves, en particulier de produire les titres requis (art. 160 al. 1 let. b CPC).

Si une partie refuse de collaborer sans motif valable, le tribunal en tient compte lors de l'appréciation des preuves (art. 164 CPC).

3.1.7 A teneur de l'art. 321 al. 1 CPC, le recours doit être motivé. Cette motivation doit indiquer en quoi la décision de première instance est tenue pour erronée. La partie recourante ne peut pas simplement renvoyer à ses moyens de défense soumis aux juges du premier degré, ni limiter son exposé à des critiques globales et superficielles de la décision attaquée. Elle doit plutôt développer une argumentation suffisamment explicite et intelligible, en désignant précisément les passages qu'elle attaque dans la décision dont est appel, et les moyens de preuve auxquels elle se réfère (arrêt du Tribunal fédéral 4A_274/2020 du 1er septembre 2020 consid. 4).

3.2.1 En l'espèce, le Tribunal a retenu à juste titre que la recourante avait enfreint l'article 7 al. 1 CCT-SOR en concluant avec I______ un contrat de travail avec un temps d'essai de 3 mois au lieu de 1 mois.

Contrairement à ce que soutient la recourante, le fait qu'il s'agisse "d'une erreur de plume" est dénué de pertinence. Il ressort en tout état de cause du dossier que cette manière de faire était volontaire, puisque l'administrateur de la recourante a déclaré devant le Tribunal vaudois que les employés avaient "le droit de partir" après trois mois – et non 1 mois – s'il n'était pas satisfait de leurs prestations.

La peine conventionnelle pour une telle infraction est bien de 250 fr. selon l'art. 2 ch. I let. f des recommandations de l'intimée, comme l'a retenu le Tribunal.

3.2.2 Contrairement à ce que fait valoir la recourante, elle n'est pas dispensée d'établir des décomptes d'heures pour ses employés au motif que les horaires en vigueur au sein de l'entreprise seraient fixes.

Ses affirmations sur ce dernier point sont de plus contredites par les déclarations de son administrateur qui a déclaré, lors de l'audience tenue en avril 2024 devant le Tribunal vaudois, que les employés remplissaient des décomptes d'heures. Le témoin N______, entendu dans la procédure précitée, a confirmé que des décomptes d'heures étaient établis par les employés de la recourante, ce qui résulte également des pièces produites par I______.

Il ressort de ce qui précède que les affirmations de la recourante selon lesquelles elles s'estimait dispensée de l'obligation d'établir des décomptes d'heures sont inexactes. La recourante a au contraire sciemment omis de produire les décomptes d'heures requis par l'intimée, violant ainsi son obligation de collaborer, et a qui plus est formulé des allégations ne correspondant pas à la réalité.

Le Tribunal a ainsi retenu à juste titre que les allégations de l'intimée retenant une infraction à la CCT-SOR en lien avec les décomptes d'heures étaient établies.

La recourante ne critique pas de manière motivée, conformément à la jurisprudence, le montant de la peine conventionnelle de 1'000 fr. retenue par le Tribunal en application de l'art. 4 ch. 2 let. C du règlement.

Son grief sur ce point est dès lors infondé.

3.2.3 La recourante ne saurait être suivie lorsqu'elle fait valoir que les décomptes d'heures produits par l'intimée, concernant I______, ne sont pas crédibles. Lesdits décomptes ont été remis par l'employée concernée à l'intimée dans le cadre du contrôle et sont clairs, précis, et signés par l'intéressée. Contrairement à ce que soutient la recourante, sans démontrer ses allégations, ces décomptes ne contiennent pas d'incohérence en lien avec les temps de trajets.

L'on relèvera sur ce point que ce sont surtout les allégations de la recourante qui ne sont pas crédibles; dans sa réponse à la demande, elle a affirmé établir des décomptes d'heures (ad. 41, p. 4) alors que dans son recours elle déclare qu'elle ne devait pas remettre de tels décomptes en raison des horaires fixes imposés en son sein.

La recourante n'a de plus pas expliqué pour quelles raisons l'exemplaire du contrat de travail de I______ qu'elle avait remis à l'intimée lors du contrôle, différait sur des points importants de celui signé par l'employée (temps d'essai et de travail). Au vu des divers manquements et de l'absence de collaboration de la recourante, l'on retiendra ainsi que ses allégations sur les heures excédentaires de la précitées, lesquelles ne sont confirmées par aucun élément concret du dossier, sont particulièrement peu fiables.

La recourante ne critique pas de manière motivée les constations de l'intimée selon lesquelles, à teneur des relevés produits à la procédure, I______ a travaillé plus de 50 heures par semaine, soit au-delà du maximum prévu par la loi, alors que le contrat prévoyait 45 heures hebdomadaires. Les affirmations de l'intimée selon lesquelles les heures de travail excédentaires se situaient entre 14 et 22,4 heures par mois, sans indemnisation, ne sont pas non plus critiquées de manière étayée et sont confirmées par les pièces produites. Le montant dû à ce titre de 3'162 fr. 70 n'est pas non plus critiqué de manière recevable par la recourante.

Le Tribunal a ainsi retenu sans arbitraire que l'intimée avait enfreint la CCT en ne respectant pas la durée de travail, ce qui justifiait une amende de 5'000 fr. selon l'art. 2 ch. I let. c de ses recommandations. Contrairement à ce que soutient la recourante, le montant de 500 fr. prévu par lesdites recommandations ne vise que le non-respect des majorations pour heures supplémentaires. Or, in casu, la recourante n'a pas simplement omis de majorer le montant versé au titre d'heures supplémentaires, mais ne les pas du tout indemnisées. En outre, le total des heures effectuées par l'employée excédait le maximum de 50 par semaine prévu par la loi.

La recourante fait valoir que, sur ce point, les recommandations divergent du règlement, sans en tirer de conclusion concrète. Cette objection est infondée, dans la mesure où le règlement confère une large marge de manœuvre aux Commissions cantonales sur la question de la fixation de la peine. L'intimée était ainsi en droit, pour fixer la peine, de tenir compte des autres critères mentionnés par le règlement, notamment le dommage subi par l'employé et la collaboration de l'entreprise. La peine fixée et confirmée par le Tribunal pour cette infraction n'est dès lors pas arbitraire.

Le fait que la recourante ait versé 15'000 fr. à titre transactionnel à I______, qui lui réclamait 90'000 fr., n'est pas un élément pertinent permettant de la disculper ou de l'exonérer de l'amende. En effet, l'on ignore à quel titre le montant précité a été versé; il n'est dès lors pas établi qu'il couvre les arriérés d'heures supplémentaires dues à I______, comme le prévoit l'art. 4 ch. 1 du règlement. Cela est d'autant plus vrai que la recourante conteste toujours avoir commis l'infraction qui lui est reprochée.

Les griefs formés par la recourante contre les considérants du Tribunal en lien avec l'indemnisation du travail excédentaire effectué par I______ sont par conséquent infondés.

3.2.4 La recourante ne conteste pas avoir versé aux employés J______ et K______ un montant inférieur au salaire minimum prévu par la CCT-SOR. Il résulte du dossier que, en tenant compte du 13ème salaire, la différence est de 237 fr. 25 sur la période contrôlée de cinq mois pour le premier et de 1'684 fr. 50 pour le second.

La recourante fait valoir que cette différence a été compensées par la suite, car les intéressés ont perçu en 2021 et 2022 un salaire supérieur au salaire minimum prévu par la CCT. Cependant, comme l'a relevé à juste titre le Tribunal, la recourante n'établit pas la réalité de ses allégations sur ce point, lesquelles ont été contestée en temps utile par l'intimée. Elle s'est limitée à fournir à titre de preuve un document établi par ses soins, qui n'a aucune force probante.

Ce grief est dès lors infondé.

Par ailleurs, la recourante ne démontre pas que I______ travaillait moins que 45 heures par semaine comme elle l'affirme. Le contrat de travail, dans la version remise par l'employée et signée par les deux parties prévoit à cet égard que le temps de travail de l'intéressée était de 45 heures par semaine et aucun élément du dossier ne permet de retenir que ce contrat ne correspondait pas à la réalité.

Pour les raisons déjà exposées ci-dessus, il n'est pas possible de retenir que le versement par la recourante d'un montant de 15'000 fr. à titre transactionnel dans le cadre du litige devant le Tribunal vaudois suffit à "réparer" et "compenser" cette infraction, comme l'affirme la recourante.

La recourante ne conteste pas de manière motivée le montant de l'amende de 500 fr. par travailleur retenu par le Tribunal à cet égard, lequel est conforme à l'art. 2 ch. I let. b des recommandations de l'intimée.

Le recours est ainsi infondé sur ce point.

3.2.5 La recourante ne conteste pas que les fiches de salaires soumises à l'intimée n'étaient pas conforme à l'art. 31 CCT puisqu'elles ne comportaient pas la profession et la classe de salaire des employés.

Elle fait cependant valoir qu'il s'agit d'un pur détail administratif et qu'une sanction à cet égard constitue "un excès de zèle illégitime".

Elle ne motive cependant pas sa position et n'explique pas en quoi l'intimée aurait failli à sa mission en exigeant le respect des dispositions de la CCT. En particulier, il apparaît que l'indication de la classe de salaire est nécessaire pour que l'employé, voire les autorités judiciaires, puissent s'assurer que le salaire effectivement versé est conforme aux minima prévus.

La recourante ne forme pas non plus de grief motivé à l'encontre du montant de 500 fr. retenu par le Tribunal à titre de peine conventionnelle à ce titre. La Cour rappellera à cet égard que la liste d'infractions mentionnées à l'art. 2 des recommandations de l'intimée n'est pas exhaustive (art. 1 ch. 4). A la lecture de cette liste, le montant de 500 fr. n'est ni critiquable, ni arbitraire.

3.2.6 La recourante fait valoir qu'elle s'est affiliée à la Caisse de la prévoyance de la construction le 1er octobre et était dès lors en règle à la date de la décision rendue par l'intimée, de sorte que qu'elle n'a pas enfreint les règles de la CCT relatives à l'obligation d'assurer des prestations minimales LPP aux employés.

Cet argument n'est pas décisif. Même si la recourante a corrigé la situation postérieurement au contrôle, il n'en demeure pas moins que l'intimée était en droit de la sanctionner pour des infractions commises en 2019.

La recourante était tenue, aux termes de la CCT, de collaborer avec l’intimée et de lui fournir les documents qu'elle demandait. Or, elle a gravement violé cette obligation. Elle a commencé par remettre à l'intimée copie d'un contrat de prévoyance qui avait été résilié plusieurs années auparavant, sans informer l'intimée ce fait. Par la suite, la recourante n'a pas obtempéré aux demandes de l'intimée de lui fournir son plan de prévoyance, afin de lui permettre de vérifier si ses dispositions respectaient les exigences de la CCT.

La recourante n'a pas non plus déféré à l'injonction du Tribunal de fournir ces documents, contrevenant à l'art. 160 CPC.

En application de l'art. 164 CPC, et au vu de tous les éléments figurant au dossier, le Tribunal a retenu sans arbitraire que les allégations de l'intimée selon lesquelles le plan de prévoyance conclu par la recourante pour ses employés ne respectait pas les exigences de la CCT-SOR étaient véridiques.

L'on remarquera en outre que, pour la période du contrôle, la recourante avait l'obligation de s'assurer, selon l'art. 38 ch. 7 CCT-SOR, auprès de la Caisse de l'industrie vaudoise de la construction, sauf dispense expresse. Or elle n'allègue pas avoir obtenu une telle dispense.

La peine conventionnelle de 1'000 fr. retenue par le Tribunal pour cette infraction est conforme aux articles 2 ch. I let. d des recommandations de l'intimée et à l'art. 4 ch. 2 let. F du règlement.

Le grief de la recourante sur la question de la LPP doit dès lors être écarté.

3.2.7 Les montants se cumulant aux termes des textes applicables, les infractions retenues ci-dessus justifieraient le prononcé d'une peine conventionnelle de 9'250 fr. au total comme l'a jugé le Tribunal (250 fr. + 1'000 fr. + 5'000 fr. + 1'500 fr. + 500 fr. + 1'000 fr.), soit un montant supérieur à celle prononcée par l'intimée.

Contrairement à ce que fait valoir la recourante, aucun motif ne justifie une réduction de ce montant. Elle n'a pas collaboré à la procédure, produisant des documents trompeurs (contrat de travail de I______ et contrat de prévoyance résilié) et formulant des affirmations inexactes (absence de feuilles d'heures). Elle est même allée jusqu'à déplacer son siège pour tenter de faire obstacle à la poursuite de la procédure intentée par l'intimée.

Les frais en 500 fr. facturés par l'intimée sont quant à eux conformes aux dispositions applicables (art. 5 du règlement et 2 ch. II des recommandations), étant précisé que l'absence de collaboration de la recourante a probablement compliqué la procédure, obligeant l'intimée a lui adresser de nombreuses correspondances et relances et à examiner des documents peu clairs et contradictoires.

Les intérêts moratoires alloués par le Tribunal et le chiffre 4 du dispositif du jugement querellé ne font quant à eux pas l'objet de griefs de la part de la recourante.

Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le Tribunal a condamné la recourante à verser à l'intimée 9'500 fr., intérêts en sus, et prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer poursuite n° 1______.

La décision querellée doit par conséquent être confirmée.

4. La valeur litigieuse étant inférieure à 50'000 fr., il ne sera pas prélevé de frais judiciaires, ni alloué de dépens (art. 71 RTFMC et 22 al. 2 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ & CIE SA à l'encontre du jugement JTPH/51/2025 rendu le 19 février 2025 dans la cause C/14920/2024.

Au fond :

Le rejette.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires ni alloué de dépens.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, présidente; Madame Nadia FAVRE, Monsieur Valery BRAGAR, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15'000 fr.