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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/586/2024

ACJC/133/2025 du 30.01.2025 sur JTBL/1029/2024 ( SBL ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 20.03.2025, rendu le 31.03.2025, IRRECEVABLE, 4A_142/2025
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/586/2024 ACJC/133/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU MERCREDI 29 JANVIER 2025

 

Entre

A______ SA, sise c/o Monsieur B______, ______ (VD), appelante et recourante contre un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 21 octobre 2024,

et

SI C______ SA, sise ______ [GE], intimée, représentée par Me Jean-François MARTI, avocat, quai Gustave-Ador 26, case postale 6253, 1211 Genève 6.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/1029/2024 du 21 octobre 2024, le Tribunal des baux et loyers a condamné A______ SA à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens ainsi que de tout tiers les locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée et au sous-sol de l'immeuble sis rue 1______ nos. ______ à Genève (ch. 1 du dispositif), autorisé SI C______ SA à requérir l'évacuation par la force publique de A______ SA dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), condamné A______ SA à verser à SI C______ SA la somme de 60'473 fr. 55, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er mars 2024 (ch. 3), autorisé la libération de la garantie de loyer constituée le 17 novembre 2006 auprès de [la banque] D______ sous certificat de dépôt n° 2______ par A______ SA, d'un montant de 13'173 fr., en faveur de SI C______ SA, le montant ainsi libéré venant en déduction de la somme due figurant sous chiffre 3 précité (ch. 4), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 6).

B. a. Par acte expédié le 29 octobre 2024 à la Cour de justice, A______ SA a formé recours contre ce jugement. Elle a conclu à ce que la régie E______ lui restitue les clés des locaux et établisse un décompte de "marchandises sorties", lui remette diverses quittances et factures et à ce que la régie précitée, un huissier et elle-même procèdent à un inventaire. Elle a conclu également à ce que SI C______ SA lui rembourse la somme de 150'000 fr. ainsi que les marchandises dont la date avait expiré et qui ont été évacuées, d'un montant de 3'052 fr.

b. Dans sa réponse du 8 novembre 2024, SI C______ SA a conclu, à la forme, à l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement, au fond, au déboutement de A______ SA de toutes ses conclusions et à la confirmation du jugement entrepris.

c. En l'absence de réplique, les parties ont été avisées le 6 décembre 2024 par la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Par contrat du 17 juin 2004, SI C______ SA a remis à bail à F______ SA les locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée et au sous-sol de l'immeuble sis rue 1______ nos. ______ à Genève.

Par avenant du 16 août 2006, F______ SA a cédé à A______ SA son bail avec effet au 1er septembre 2006. L'avenant prévoyait que les clauses et conditions du bail cédé demeuraient inchangées.

A______ SA a fourni une caution de 13'173 fr., selon certificat n° 2______, auprès de [la banque] D______ en faveur de la bailleresse.

Le montant du loyer et des charges a été fixé en dernier lieu à 5'129 fr. par mois.

b. En 2022, A______ SA a régulièrement accumulé du retard dans le paiement de ses loyers, si bien que la bailleresse lui a signifié que le loyer serait exigible par trimestre d'avance à compter du 1er juillet 2022.

c. Lors des deux premiers trimestres de l'année 2023, la locataire a eu du retard dans le paiement de son loyer.

d. Par avis comminatoire du 16 octobre 2023, la bailleresse a mis en demeure la locataire de lui régler dans les 30 jours le montant de 15'426 fr. à titre d'arriéré de loyer et de charges pour la période d'octobre 2023 et l'a informée de son intention, à défaut du paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO.

La locataire ne s'est pas acquittée du montant réclamé dans le délai comminatoire imparti.

e. La bailleresse a, par avis officiel du 28 novembre 2023, résilié le bail pour le 31 décembre 2023, conformément à l'article 257d CO.

Le bail de la locataire a également été résilié de manière ordinaire par courrier du 27 octobre 2023 pour son échéance, soit le 31 juillet 2024.

f. Par requête déposée le 12 janvier 2024, la bailleresse a déposé une action en évacuation devant le Tribunal des baux et loyers et a en outre sollicité l'exécution directe de ladite évacuation, le paiement de la somme de 29'699 fr. 95, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er janvier 2024 et la libération de la garantie bancaire.

g. Par écriture déposée le 13 septembre 2024, la bailleresse a fait valoir des allégués complémentaires, à savoir que la locataire avait, dès janvier 2024, sous loué une partie des locaux, sans autorisation, et malgré la résiliation de bail, pour un pas de porte de 250'000 fr. à G______ et H______.

Après avoir été informés de l'absence de consentement de la bailleresse à la sous-location et de la résiliation du bail, G______ et H______ ont restitué les clés de l'arcade à la régie le 31 mai 2024.

h. Au vu de la remise des clés de l'arcade, la bailleresse a, par courrier du 17 juin 2024, convoqué la locataire à un état des lieux de sortie pour le 28 juin 2024.

La locataire ne s'est pas présentée à l'état des lieux et a refusé de restituer les locaux.

i. Lors de l'audience du 16 septembre 2024, la bailleresse a précisé que l'arriéré s'élevait à 60'473 fr. 55, le décompte ayant été produit.

La locataire a allégué avoir sous-loué les locaux et avoir été empêchée d'exercer son activité commerciale et donc de payer les loyers car la régie lui avait pris la clé des locaux. De plus, elle avait déposé une demande en indemnité d'au moins 35'000 fr. contre la régie. Elle a encore allégué avoir été privée d'électricité pendant trois semaines sans en avoir été informée par la régie, si bien que les produits contenus dans le congélateur s'étaient avariés; la régie avait refusé de rembourser les dégâts occasionnés. Enfin, elle a allégué avoir fait des travaux à l'intérieur des locaux.

Au terme de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

j. Dans son jugement du 21 octobre 2024, le Tribunal a considéré que les conditions d'une résiliation du bail selon l'art. 257d al. 1 CO étaient manifestement réunies en l'espèce de sorte que la bailleresse était fondée à donner congé, ce qu'elle avait fait en respectant les conditions de l'art. 257d al. 2 CO. Depuis l'expiration du terme fixé, la locataire ne disposait plus d'aucun titre juridique l'autorisant à rester dans les locaux loués et en continuant à les occuper, elle violait l'art. 267 al. 1 CO. Dès lors, le Tribunal a prononcé l'évacuation requise. Les arguments développés par la locataire lors de l'audience du 16 septembre 2024 ne constituaient pas des objections. Même si elle n'avait plus disposé des clés d'une partie des locaux (soit ceux occupés par les sous-locataires) dès mai 2024, date de leur remise à la régie, le bail avait déjà été résilié depuis plusieurs mois pour défaut de paiement et les arriérés étaient déjà importants. De plus, elle n'apportait pas le début d'une preuve qu'elle aurait été privée d'électricité pendant trois semaines sans en avoir été informée par la régie. Enfin, elle ne produisait pas l'éventuelle demande en indemnisation qu'elle aurait déposée à cet effet contre la régie.

En outre, la bailleresse avait sollicité l'exécution de l'évacuation, ce à quoi le Tribunal, siégeant dans la composition prévue à l'art. 30 LaCC, a fait droit.

Enfin, au vu des pièces produites, la locataire restait devoir un montant de 60'473 fr. 55, à titre d'arriérés de loyers et d'indemnités pour occupation illicite, montant qu'elle a été condamnée à verser à la bailleresse avec intérêts à 5% l'an dès le 1er mars 2024 (date moyenne).

EN DROIT

1. 1.1. La voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), alors que la voie du recours est ouverte contre les décisions du Tribunal de l'exécution (art. 309 let. a CPC; art. 319 let. a CPC).

1.2 Pour calculer la valeur litigieuse dans les actions en expulsion initiées selon la procédure de l'art. 257 CPC, il faut distinguer les cas où seule est litigieuse l'expulsion en tant que telle, de ceux où la résiliation l'est également à titre de question préjudicielle. S'il ne s'agit que de la question de l'expulsion, l'intérêt économique des parties réside dans la valeur que représente l'usage des locaux pendant la période de prolongation résultant de la procédure sommaire elle-même, laquelle est estimée à six mois (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1 et 1.2.2.3, JdT 2019 II 235 pp. 236 et 239; arrêt du Tribunal fédéral 4A_376/2021 du 7 janvier 2022 consid.1; Lachat, Procédure civile en matière de baux et loyers, Lausanne 2019, pp. 69-70).

En l'occurrence, la résiliation du bail n'est pas contestée. Il ressort par ailleurs des explications de la locataire, qui indique former recours contre les ch. 1 et 2 du dispositif du jugement attaqué, qu'elle conteste tant l'évacuation que les mesures d'exécution. Au vue du montant du loyer de 5'129 fr. par mois, la voie de l'appel est ouverte contre l'évacuation. La voie du recours est par ailleurs ouverte contre les mesures d'exécution. La locataire sera désignée ci-après comme l'appelante.

1.3
1.3.1
En vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe à l'appelant de motiver son appel. Selon la jurisprudence, il doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique. Même si l'instance d'appel applique le droit d'office (art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue. L'appelant doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. A défaut, son appel est irrecevable (arrêts du Tribunal fédéral 4A_621/2021 précité consid. 3.1; 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 3.1; 4A_651/2012 du 7 février 2013 consid. 4.2; 5A_635/2015 du 21 juin 2016 consid. 5.2).

La motivation d'un recours doit, à tout le moins, satisfaire aux exigences qui sont posées pour un acte d'appel (arrêts du Tribunal fédéral 4A_462/2022 du 6 mars 2023, consid. 5.1.1; 5A_206/2016 du 1er juin 2016, consid. 4.2.1).

1.3.2 En l'espèce, l'appelante allègue sous l'indication "recours contre les mesures d'exécution" que la régie E______ a "usurpé" des stocks de marchandises, de sorte qu'elle refusait d'évacuer les locaux tant qu'un inventaire n'avait pas été effectué. Elle ne pouvait par ailleurs pas être évacuée puisqu'elle n'avait pas les clés des locaux. Elle faisait dès lors recours contre les ch. 1 et 2 du dispositif du jugement attaqué. Elle soutient par ailleurs, sous l'indication "recours pour le surplus", que l'intimée lui devrait 150'000 fr. à titre de "marchandises qui se trouvaient dans le dépôt et qu'ils ont enlevés", raison pour laquelle elle faisait recours contre le ch. 4 du dispositif du jugement attaqué.

Par son argumentation, l'appelante ne conteste pas de manière motivée que les conditions de la résiliation du bail étaient remplies et que, ne disposant pas de titre pour occuper les locaux, le Tribunal pouvait prononcer son évacuation ainsi que des mesures d'exécution de son évacuation. Enfin, elle ne remet pas en cause le ch. 3 du dispositif du jugement attaqué selon lequel elle a été condamnée à verser à l'intimée la somme de 60'473 fr. 55, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er mars 2024.

L'appelante prend diverses conclusions à l'encontre de la régie E______, laquelle n'est cependant pas partie à la procédure. Lesdites conclusions sont donc irrecevables. Le fait que ladite régie aurait "usurpé illicitement des stocks", comme l'appelante l'allègue, ne serait quoi qu'il en soit, pas un motif pour renoncer à l'évacuation ou aux mesures d'exécution ordonnées.

Dans son recours "pour le surplus", l'appelante réclame à l'intimée le paiement de sommes qui lui seraient dues à titre de remboursement de stocks de marchandises. Cette question sort toutefois du cadre de la procédure. Les conclusions tendant au paiement des sommes de 150'000 fr. et 3'052 fr. sont en outre nouvelles, et irrecevables, et l'appelante ne prouve en tout état de cause aucunement le dommage qu'elle prétend avoir subi.

Dès lors, au vu de ce qui précède, l'appel et le recours sont irrecevables, faute de motivation conforme aux exigences en la matière, même interprétées de manière large à l'égard d'un plaideur en personne.

2. À teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

 

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


Déclare irrecevables l'appel et le recours interjetés le 29 octobre 2024 par A______ SA contre le jugement JTBL/1029/2024 rendu le 21 octobre 2024 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/586/2024.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Damien TOURNAIRE, Madame
Sibel UZUN, juges assesseurs; Madame Victoria PALAZZETTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.