Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/261/2025 du 15.04.2025 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/4022/2024 ATAS/261/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 15 avril 2025 Chambre 10 |
En la cause
A______
| recourante |
contre
OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI
| intimé |
A. a. A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1971, diplômée de l’École supérieure d’Art Visuel (HEAD), au bénéfice de plusieurs certificats (WebDesigner, WebDeveloper, InDesign) et attestations, dont la dernière obtenue en sensibilisation à la gestion de projets culturels en 2017, a travaillé à 50% dès le 1er janvier 2023 en qualité de chargée de communication culturelle pour l’association B______.org. Elle a été licenciée pour le
31 janvier 2024.
b. L’assurée s’est inscrite auprès de l’Office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) le 22 janvier 2024, indiquant chercher une activité à 50%. Un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur dès le 1er février 2024.
c. Selon le contrat d’objectifs de recherches d’emploi du 15 février 2024, les activités recherchées comprenaient celles de designer en communication visuelle, de chargée de communication, d’artiste plasticienne et d’assistante de plasticien.
d. L’assurée a été engagée en qualité de collaboratrice communication par une association pour une durée déterminée du 1er au 30 juin 2024.
e. Par courriel du 22 août 2024, l’assurée a demandé à son conseiller en personnel s’il était envisageable qu’elle suive le cours « Recherche de fonds » qui aurait lieu à Bussigny le 6 novembre 2024. Elle avait en outre remarqué une formation de deux jours sur l’intelligence artificielle qui pourrait l’aider dans ses recherches d’emploi.
f. Le lendemain, son conseiller l’a priée de compléter et signer le formulaire de demande de cours pour les deux formations sollicitées.
g. Le 6 septembre 2024, l’assurée a transmis à son conseiller le formulaire et la facture du cours « Recherche de fonds » auquel elle était dorénavant inscrite. Elle participerait en outre à une séance d’information le 9 septembre 2024 portant sur une formation de trois jours dispensée par la Fondation pour la formation des adultes (ci-après : IFAGE) sur la recherche de fonds, qui pourrait s’avérer utile, et dont le prix s’élevait à CHF 1'400.-. Elle s’était inscrite au cours sur l’intelligence artificielle via un formulaire.
Elle a joint à son courrier :
- le formulaire « Demande d’assentiment à la fréquentation d’un cours » concernant la journée organisée à Bussigny par Artos, association professionnelle, intitulée « Recherche de fonds », ainsi que la facture y relative d’un montant de CHF 250.-, le programme et son billet de train ;
- le formulaire « Demande d’assentiment à la fréquentation d’un cours » concernant la formation dispensée par l’IFAGE du 18 octobre au
22 novembre 2024 pour un coût total de CHF 1'400.-, avec la description de la formation.
B. a. Le 2 octobre 2024, l’OCE a rendu deux décisions, par lesquelles il a refusé la prise en charge, d’une part, du cours auprès d’Artos intitulé « FC Recherches de fonds » et, d’autre part, de celui auprès de l’IFAGE intitulé « Professionnaliser votre recherche de fonds ». Il a considéré que la difficulté de placement de l’assurée n'était pas établie et que les formations demandées ne permettaient pas, au regard des compétences requises sur le marché du travail et de l'évaluation des qualifications de l’intéressée, de conclure qu’elles contribueraient de manière significative à une amélioration de son employabilité. L’assurée avait en outre spécifié dans sa demande qu'aucun emploi ne lui avait été garanti suite auxdites formations.
b. En date du 13 octobre 2024, l’assurée a formé opposition à l’encontre de ces décisions. Elle a relevé que les cours sollicités constituaient une opportunité essentielle pour améliorer ses compétences dans son domaine d'activité, qu'il était indéniable que le marché du travail était plus difficile à 53 ans, raison pour laquelle elle avait cherché des formations adaptées aux exigences du secteur culturel et aux compétences régulièrement demandées dans les offres d'emploi. Retrouver un emploi était plus compliqué en raison de son âge et les opportunités d'emploi se raréfiaient, en particulier dans le secteur de la culture. La capacité à lever des fonds était une compétence centrale et cruciale dans le domaine culturel, car presque toutes les structures pour lesquelles elle avait travaillé étaient des associations dont les projets étaient possibles grâce aux financements publics et privés, de sorte que l'apprentissage de cette compétence aurait un impact positif sur sa compétitivité. La formation auprès de l'association Artos était financée par ses soins, ce qui représentait 14% de son revenu, de sorte qu’elle était dans l'incapacité de payer celle auprès l’IFAGE. Elle a sollicité que les décisions soient reconsidérées, car il ne lui restait plus que quelques mois de chômage et ce refus compromettait également un projet qu’elle devrait débuter au printemps 2025 et qui nécessiterait une levée de fonds avant la fin de l'année 2024. Son implication dans ce projet et la possibilité d'un futur emploi salarié dépendaient directement de l'obtention de financements.
c. Par décision sur opposition du 4 novembre 2024, l’OCE a confirmé sa décision du 2 octobre 2024 concernant le cours intitulé « FC Recherches de fonds ». Les arguments avancés par l’assurée ne pouvaient pas être retenus pour justifier la prise en charge financière de cette formation. En effet, une difficulté de placement n'était pas démontrée, puisque l'intéressée effectuait, depuis qu'elle émargeait auprès de l'assurance-chômage, des gains intermédiaires en qualité d'artiste et de collaboratrice en communication. Si la formation requise pouvait certes constituer un atout dans la recherche d'un emploi, il n’était pas démontré qu’elle améliorerait de manière notable et substantielle son aptitude au placement et lui permettrait de quitter rapidement le chômage. L’assurée n’avait pas démontré que le suivi de cette formation lui garantirait un emploi ou serait une condition nécessaire à la prise d'un emploi salarié.
d. Par décision sur opposition du 6 novembre 2024, l’OCE a également confirmé sa décision du 2 octobre 2024 concernant le cours intitulé « Professionnaliser votre recherche de fonds », reprenant la même motivation que celle exposée dans la décision du 4 novembre 2024.
C. a. Par actes du 3 décembre 2024, l’assurée a interjeté recours contre ces deux décisions sur opposition par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, qui les a enregistrés sous les numéros de cause A/4022/2024 et A/4023/2024. Malgré ses ressources limitées, elle avait investi dans le cours proposé par Artos pour un montant de CHF 250.-, en sus des frais de déplacement, et avait constaté que des collègues ayant un parcours similaire au sien avaient bénéficié d'une prise en charge financière de cette formation par l’intimé. Cette disparité de traitement était injustifiée et contraire au principe d'égalité de traitement. Elle n’avait pas les moyens de financer la formation complémentaire de trois jours dispensée par l’IFAGE, laquelle était plus approfondie et donc mieux adaptée à ses besoins professionnels. Le secteur culturel reposait largement sur des projets indépendants qui nécessitaient des compétences spécifiques en recherche de financements. Ces compétences étaient donc cruciales pour son insertion sur le marché du travail culturel, où les postes rémunérés dépendaient souvent de la réussite de ces démarches. Elle ne postulait actuellement à aucune offre d'emploi culturelle dans laquelle il était stipulé qu'il fallait savoir effectuer des recherches de fonds, car elle n’était pour l'instant qu'autodidacte dans ce domaine. Cette lacune la freinait dans son accès à des opportunités professionnelles correspondant à ses qualifications artistiques. Elle recherchait des financements pour un projet photographique 2025 et pour l’édition d'un livre en 2025, et ses compétences limitées entraînaient des lacunes dans ses plans de financement. Elle avait obtenu une bourse de recherche pour le second projet cité, ce qui témoignait de la reconnaissance de son engagement dans le secteur culturel. Cependant, cette bourse ne couvrait que la première étape du projet et elle devrait, à l'automne 2025, chercher des fonds supplémentaires pour mener à terme ce projet, rémunérer son travail et garantir sa réussite et sa diffusion. De même, le projet photographique en cours était directement impacté par son manque de compétences en recherches de fonds. Les formations demandées étaient donc essentielles pour assurer la pérennité de ses activités et maintenir son insertion professionnelle dans le secteur culturel. Elle a souligné « l'absurdité de cette situation » qui mobilisait inutilement les ressources de l’intimé. Accorder la prise en charge des cours de recherches de fonds à une actrice culturelle de 53 ans, dont toute la carrière était dédiée à ce domaine, aurait été une décision simple et efficace, qui aurait permis à l’intimé d'économiser des ressources administratives et de remplir sa mission de soutien à l'insertion professionnelle de manière plus pragmatique.
Elle a produit un résumé projet « Huis clos » avec budget et décision octroi bourse recherche et un projet « Veyrier entre passé et présent » avec budget et plan de financement.
b. Dans ses réponses du 2 janvier 2025, l’intimé a conclu au rejet des recours, en l’absence de tout nouvel élément lui permettant de revoir les décisions litigieuses.
Il a notamment communiqué les procès-verbaux des entretiens de conseil, lesquels font état de gains intermédiaires pour le C______ et pour l’Association D______ en 2024.
c. La recourante ne s’est pas manifestée dans le délai imparti pour faire valoir d’éventuelles observations sur les écritures de l’intimé ou consulter les dossiers au greffe.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du
6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur
l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du
25 juin 1982 (LACI - RS 837.0).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LACI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-chômage obligatoire et à l'indemnité en cas d'insolvabilité, à moins que la loi n'y déroge expressément.
1.3 Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable
(art. 56ss LPGA ; art. 62ss de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
2. Le litige porte sur le bien-fondé du refus de l'intimé de prendre en charge le cours auprès d’Artos intitulé « FC Recherches de fonds » et celui auprès de l’IFAGE intitulé « Professionnaliser votre recherche de fonds ».
3. Selon l'art. 59 LACI, l’assurance alloue des prestations financières au titre des mesures relatives au marché du travail en faveur des assurés et des personnes menacées de chômage (al. 1). Ces mesures comprennent des mesures de formation (section 2), des mesures d’emploi (section 3) et des mesures spécifiques (section 4) (al. 1bis). Les mesures relatives au marché du travail visent à favoriser l’intégration professionnelle des assurés dont le placement est difficile pour des raisons inhérentes au marché de l’emploi. Ces mesures ont notamment pour but : a. d’améliorer l’aptitude au placement des assurés de manière à permettre leur réinsertion rapide et durable ; b. de promouvoir les qualifications professionnelles des assurés en fonction des besoins du marché du travail ; c. de diminuer le risque de chômage de longue durée ; d. de permettre aux assurés d’acquérir une expérience professionnelle (al. 2).
Conformément à l'art. 60 LACI, sont notamment réputés mesures de formation les cours individuels ou collectifs de reconversion, de formation continue ou d’intégration, la participation à des entreprises d’entraînement et les stages de formation (al. 1). Peuvent demander des prestations de l’assurance-chômage pour la participation à des cours : a. s’agissant des prestations visées à l’art. 59b al. 1, les assurés ; b. s’agissant des prestations visées à l’art. 59cbis al. 3, les personnes menacées de chômage imminent (al. 2). La personne qui décide de son propre chef de suivre un cours doit présenter à l’autorité compétente, assez tôt avant le début du cours, une demande dûment motivée à laquelle elle joindra les documents nécessaires (al. 3). Si la participation à un cours l’exige, la personne concernée n’est pas tenue d’être apte au placement pendant la durée dudit cours (al. 4). Les mesures de formation au sens de la présente loi sont choisies et mises en place autant que possible selon les principes de la loi sur la formation professionnelle du 13 décembre 2002 (LFPr – RS 412.10). Les mesures relatives au marché du travail et les mesures prévues par la LFPr sont coordonnées en vue de promouvoir un marché du travail homogène et transparent (al. 5).
3.1 Selon la jurisprudence, le droit à ces prestations d'assurance est lié à la situation du marché du travail : des mesures relatives au marché du travail ne sauraient être mises en œuvre que si elles sont directement commandées par l'état de ce marché. En effet, la formation de base et la promotion générale du perfectionnement ne relèvent pas de l'assurance-chômage (ATF 111 V 274
consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_478/2013 du 11 avril 2014 consid. 4 et 8C_48/2008 du 16 mai 2008 consid. 3.2).
La tâche de l'assurance-chômage consiste uniquement à combattre, dans des cas particuliers, le chômage effectif ou imminent, par des mesures concrètes d'intégration qui s'inscrivent dans les buts définis à l'art. 59 al. 2 let. a à d LACI. Il doit s'agir de mesures permettant à l'assuré de s'adapter au progrès industriel et technique, ou de mettre à profit sur le marché du travail, en dehors de son activité lucrative spécifique antérieure, ses aptitudes professionnelles existantes
(ATF 111 V 274 consid. 2b ; ATAS/886/2022 du 6 octobre 2022 consid. 4 et les références).
La limite entre la formation de base ainsi que le perfectionnement professionnel en général, d'une part, le reclassement et le perfectionnement professionnel au sens de l'assurance-chômage, d'autre part, n'est souvent pas nette
(ATF 108 V 166). Étant donné qu'une seule et même mesure peut présenter des traits caractéristiques de ces deux domaines, et que la formation professionnelle favorise d'habitude également l'aptitude au placement de l'assuré sur le marché du travail, sont décisifs les aspects qui prédominent au regard de toutes les circonstances concrètes du cas particulier (ATF 111 V 274 consid. 2c et
111 V 400 consid. 2b ; 108 V 165 consid. 2c et les références ; DTA 1990 n. 9
p. 56 consid. 1). Par ailleurs, un cours n'est pris en charge par
l'assurance-chômage que si la formation envisagée est indispensable à l'assuré pour remédier à son chômage. Les tâches visant à encourager le perfectionnement professionnel en général et l'acquisition d'une formation de base ou d'une seconde voie de formation incombent à d'autres institutions que l'assurance-chômage, par exemple à celles qui octroient des bourses d'études ou de formation
(ATF 111 V 398 consid. 2c).
3.2 Par mesures concrètes de reclassement et de perfectionnement, on entend des mesures permettant à l'assuré de remettre à jour ses connaissances professionnelles et de s'adapter au progrès industriel et technique, ou de mettre à profit sur le marché du travail, en dehors de son activité lucrative spécifique antérieure ses aptitudes professionnelles existantes. La mesure entreprise doit notamment être spécifiquement destinée à améliorer l'aptitude au placement. Elle peut par exemple consister en un complément nécessaire à la prise d'un emploi précis par un assuré déjà formé dans le domaine. La mesure sollicitée doit être en outre nécessaire et adéquate. Elle ne saurait avoir pour objectif principal d'améliorer le niveau de formation de l'assuré ou sa situation économique et sociale. Son rôle n'est pas non plus de satisfaire une convenance personnelle ou un désir d'épanouissement professionnel (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, n. 12 ad art. 60 LACI).
Le droit à une mesure de marché du travail est réservé aux assurés dont le placement est difficile pour des raisons inhérentes au marché de l'emploi (art. 59 al. 2 LACI). Cela signifie, premièrement, qu'en présence de possibilité de placement, une mesure ne se justifie pas. Lorsque la formation et l'expérience professionnelles suffisent à permettre à un assuré de retrouver un emploi dans son domaine, il n'existe pas de droit à participer à une mesure de perfectionnement ou à changer de cap professionnellement. Dans ce cas, il n'y a pas d'indication du marché du travail justifiant un perfectionnement ou une nouvelle formation. Deuxièmement, les difficultés de placement doivent être dues au marché du travail et non à d'autres facteurs comme des problèmes de santé, de reconnaissance de diplôme, de diplômes non suffisamment orientés vers la pratique professionnelle ou encore de disponibilité restreinte due à un choix de l'assuré (comme la volonté de l'assuré de ne travailler qu'à un taux très partiel ou de changer d'activité) (Boris RUBIN, op. cit., 2014, n. 13 -15 ad art. 60 LACI).
3.3 En tant qu'autorité de surveillance, le Secrétariat d’État à l’économie
(ci-après : SECO) a adopté des directives à l'intention des organes chargés de l'application de l'assurance-chômage afin d'assurer une pratique uniforme en ce domaine. Dans ce but, elles indiquent l'interprétation généralement donnée à certaines dispositions légales. Elles n'ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux (ATF 133 II 305 consid. 8.1 et les références).
Selon le Bulletin LACI MMT (mesures du marché du travail) du SECO (dans sa version du 1er août 2024), l'autorité compétente (en règle générale le service LMMT – logistique des mesures du marché du travail –) met en place les mesures du marché du travail prévues par les dispositions légales en tenant compte de l’indication du marché du travail et des besoins des assurés (A3).
Les formations, formations continues et reconversions de demandeurs d’emploi de l’assurance-chômage doivent toujours être opportunes pour le marché du travail (cf. ATF 111 V 276 ; 128 V 198). En outre, il convient de tenir compte du principe de proportionnalité (cf. ATF 119 V 254). Dans la mesure où elles sont opportunes pour le marché du travail et respectent le principe de proportionnalité, les formations continues, reconversions et formation de demandeurs d’emploi de l’assurance-chômage sont activement encouragées (A4a).
Les prestations de l'AC visant à encourager la reconversion, le perfectionnement et l'insertion professionnelle ne peuvent être allouées que si la situation du marché du travail exige de telles mesures. Les critères de délimitation à considérer en l'occurrence sont nombreux (la liste n'étant pas exhaustive) :
- motivation de l'assuré : la mesure demandée par l'assuré doit représenter une mesure adéquate pour sortir du chômage et non répondre à un dessein professionnel indépendant du chômage ;
- âge de l'assuré : dans le cas de jeunes chômeurs, il convient d'éviter qu'ils demandent des prestations de l'assurance-chômage pour leur formation de base ;
- sont également exclues, selon la jurisprudence de l'ancien Tribunal fédéral des assurances, les mesures de formation faisant usuellement partie d'une formation de base ou destinées à la compléter, comme les stages obligatoires dans le cadre des études de médecine ou le stage d'avocat au terme des études de droit ;
- adéquation de la mesure : le temps et les moyens financiers engagés doivent être en rapport adéquat avec les objectifs visés par la mesure. En général, une mesure de formation ou d'emploi ne devrait pas dépasser une durée de douze mois. La demande de MMT est dès lors à rejeter si la mesure est « surdimensionnée », c'est-à-dire si le but recherché – l'amélioration de l'aptitude au placement – peut également être atteinte par une mesure moins chère et/ou plus courte (A16 - A20).
Les MMT visent l'amélioration de l'aptitude au placement des assurés sur le marché du travail. Cela implique, d'une part, que les mesures soient adaptées à la situation et au développement du marché du travail et, d'autre part, qu'elles prennent en compte la situation personnelle, les aptitudes et les inclinations des assurés (A23).
La participation à une MMT doit améliorer notablement l’aptitude au placement de l’assuré. Un simple avantage théorique du point de vue de l’aptitude au placement, mais peu vraisemblable dans le cas concret, ne saurait suffire à satisfaire aux exigences posées par l’art. 59 LACI (DTA 1985, N° 23). La participation à une mesure ne peut dès lors être approuvée s’il existe des doutes sérieux quant à son effet bénéfique sur l’aptitude au placement de l’assuré et sur son employabilité sur le marché du travail (A24).
3.4 Pour l'établissement des faits pertinents, il y a lieu d'appliquer les principes ordinaires régissant la procédure en matière d'assurances sociales, à savoir, en particulier, la maxime inquisitoire, ainsi que les règles sur l'appréciation des preuves et le degré de la preuve.
La maxime inquisitoire signifie que l'assureur social et, en cas de litige, le juge, établissent d'office les faits déterminants, avec la collaboration des parties, sans être liés par les faits allégués et les preuves offertes par les parties, en s'attachant à le faire de manière correcte, complète et objective afin de découvrir la réalité matérielle (art. 43 LPGA ; art. 19ss, 22ss, 76 et 89A LPA ; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, Droit suisse de la sécurité sociale, vol. II, 2015, p. 499 s.). Les parties ont l'obligation d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués ; à défaut, elles s'exposent à devoir supporter les conséquences de l'absence de preuve
(art. 28 LPGA ; ATF 125 V 193 consid. 2 ; 122 V 157 consid. 1a ; 117 V 261 consid. 3b et les références).
Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités revêtent une importance significative ou entrent raisonnablement en considération (ATF 144 V 427
consid. 3.2 et la référence ; 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).
4. En l'espèce, l’intimé a rejeté les demandes litigieuses visant à la prise en charge des cours « FC Recherches de fonds » et « Professionnaliser votre recherche de fonds », aux motifs que la difficulté de placement n'était pas établie et que la formation requise n'augmenterait pas de manière significative l'aptitude au placement de la recourante.
Cette dernière estime, au contraire, que les formations demandées répondent à un besoin concret et crucial sur le marché du travail, et lui permettraient d'améliorer significativement son aptitude au placement. Elles étaient essentielles pour assurer la pérennité de ses activités et maintenir son insertion professionnelle dans le secteur culturel.
4.1 La chambre de céans rappelle que la recourante est au bénéfice d'un diplôme décerné par la HEAD en 1998, qu’elle a obtenu plusieurs certificats et attestations, notamment dans le développement et la conception des applications du web et la gestion de projets culturels, et qu’elle peut se prévaloir d’une expérience professionnelle solide et variée, acquise au cours des 30 dernières années, selon son curriculum vitae détaillé. Elle a ainsi été active dans le commissariat d’expositions et l’assistanat d’artistes visuels jusqu’en 2015, a œuvré à la création de cinq sites internet, a participé à de nombreux projets de photographie et de communication visuelle dès 2005. Elle a également travaillé dans l’enseignement, en effectuant des remplacements en arts visuels à l’école primaire entre 2018 et 2019 et en collaborant à un projet audiovisuel entre 2020 et 2022, puis dans la gestion de projets et la coordination, depuis 2021. Elle a en outre participé à de nombreuses expositions durant sa carrière. Dans le cadre de son dernier emploi, elle a eu pour mission de réaliser la stratégie de communication culturelle, de gérer les relations avec les partenaires, soit les programmeurs, artistes, photographes ou traducteurs, d’assister la direction lors d’événements artistiques publics. Elle possède manifestement d’excellentes compétences et connaissances dans son domaine d’activité, comme attesté par le certificat de travail du
1er février 2024 de son dernier employeur.
Cela étant, on ne saurait considérer qu’il existe un grand nombre d’offres d’emploi stable et durable dans le domaine artistique et culturel sur le marché du travail. D’ailleurs, le contrat d’objectifs du 15 février 2024 limite le nombre minimum de recherches mensuelles à six candidatures. On relèvera en outre que la recourante a été licenciée suite à la suppression de son poste et qu’elle recherchait activement un travail depuis plus de dix mois lorsqu’elle a sollicité la prise en charge des cours litigieux. Elle a postulé pour des fonctions très diverses, comme celles d’agente de numérisation d’archives, de plasticienne, d’assistante d’artiste, de gardienne d’exposition, de personnel de salle, de chargée de communication, d’assistante vidéo, photographe, culturelle ou encore de cours de gravure. C’est dire qu’elle a tenté de mettre à profit sa large expérience professionnelle. Elle n’a toutefois été engagée que pour deux missions temporaires qui lui ont permis de réaliser des gains intermédiaires.
Compte tenu de ces éléments, la chambre de céans considère que la condition relative à la difficulté de placement pour des raisons inhérentes au marché de l’emploi est réalisée.
Reste à examiner si les cours sollicités constituent une mesure nécessaire à la réinsertion sur le marché du travail.
4.2 Le cours « Recherches de fonds » est organisé par Artos, soit une association professionnelle active dans le secteur culturel. Il vise à acquérir une méthodologie et une vision stratégique pour pouvoir réaliser des demandes adéquates et adaptées auprès des diverses instances de soutien public, parapublic ou privé, et les fidéliser, en tenant également compte des réalités locales, régionales, cantonales et fédérales.
Il appert donc que le suivi de cette journée devrait permettre à la recourante de valoriser ses aptitudes professionnelles, l’obtention de soutiens financiers étant indispensables à la réalisation de projets artistiques et culturels. On relèvera en outre que ce cours, dispensé sur une journée, n’a évidemment pas pour objectif d'améliorer le niveau de formation de la recourante ou sa situation économique et sociale. Au vu de sa durée et de son coût, soit CHF 250.-, la mesures en cause apparait adéquate et respecte le principe de proportionnalité. Elle prend par ailleurs en compte la situation personnelle, les aptitudes et le parcours de la recourante. On rappellera encore que l’âge de l’intéressée, 53 ans, est un élément de nature à entraver ses recherches d’emploi.
Partant, la chambre de céans considère qu’il est vraisemblable que cette mesure améliore de manière importante l’aptitude au placement de la recourante et qu’elle ne constitue pas un simple avantage théorique, éventuel.
4.3 Il en va de même concernant le cours « Professionnaliser votre recherche de fonds » dispensé par l’IFAGE, lequel a pour objectifs de connaître les fondamentaux d'une stratégie de levée de fonds, de pouvoir évaluer sa propre structure, de se créer un référentiel donateurs, de construire sa stratégie et son plan d'action et de partager des expériences avec des professionnels du domaine et échanger des conseils pour enrichir sa pratique et développer son réseau.
Cette formation, d’une durée de trois jours et qui coûte CHF 1'400.-, répond donc également aux conditions d’octroi examinées ci-dessus, pour les mêmes motifs. Elle apparaît également adaptée à la situation du marché du travail et ne semble pas démesurée.
4.4 Cela étant, ces deux cours ont un contenu partiellement identique.
Selon le programme d’Artos, le cours comprend une partie théorique de 6 heures portant sur l’étude de marché et des plans d’action (« À qui est-ce pertinent de demander un soutien dans quel contexte ? Quels sont les critères et les délais ? Élaborer son planning et effectuer un suivi auprès des instances qui ont octroyé un soutien. Comment entretenir son réseau ? »), le travail de dossier (« Constituer un dossier adapté à chaque demande. Quels sont les documents adéquats à préparer ? Comment établir et développer son budget ? ») et la sensibilisation aux techniques de communication (« Astuces pour optimiser les demandes de fonds »), puis
une heure de pratique avec un entretien autour du projet personnel.
La formation de l’IFAGE comprend deux modules. Le premier a pour but d'aborder le contexte, les acteurs et la communication autour d'une campagne de levée de fonds, avec un examen du panorama des bailleurs de fonds, de la communication et du marketing, et une rencontre avec des professionnels de la levée de fonds. Le second module porte sur le lancement d’une campagne de recherche de fonds et a pour but d'analyser les étapes essentielles d'une telle campagne, incluant notamment la stratégie, le plan d'action, la rédaction de dossier et les outils de recherche de fonds.
La seconde mesure, plus longue et plus approfondie, reprend ainsi les notions de base abordées dans le cours d’Artos.
Par conséquent, il ne se justifie pas de les accorder toutes les deux.
La recourante ayant déjà pris à sa charge le cours d’Artos, il convient de lui reconnaître le droit à la seconde formation, laquelle lui permettra de développer et d’analyser les rudiments acquis et donc, d'améliorer considérablement son aptitude au placement.
4.5 Au vu de ce qui précède et compte tenu de l'ensemble des circonstances, la recourante a droit à la prise en charge par l’intimé de la formation « Professionnaliser votre recherche de fonds » dispensée par l’IFAGE.
5. Partant, le recours contre la décision sur opposition du 4 novembre 2024 est rejeté.
Le recours contre la décision sur opposition du 6 novembre 2024 est admis.
Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare les recours recevables.
Préalablement :
2. Joint les causes A/4022/2024 et A/4023/2024 sous la cause A/4022/2024.
Au fond :
3. Rejette le recours interjeté contre la décision sur opposition du 4 novembre 2024.
4. Admet le recours interjeté contre la décision sur opposition du 6 novembre 2024.
5. Dit que la recourante a droit à la prise en charge par l’intimé de la formation « Professionnaliser votre recherche de fonds » dispensée par l’IFAGE.
6. Dit que la procédure est gratuite.
7. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Melina CHODYNIECKI |
| La présidente
Joanna JODRY |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le