Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/927/2024 du 26.11.2024 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/1577/2024 ATAS/927/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 26 novembre 2024 Chambre 10 |
En la cause
A______, représenté par le Service de protection de l’adulte
| recourant |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______ 1964, de nationalité espagnole, divorcé et père de deux enfants majeurs, a travaillé en dernier lieu comme gérant technique immobilier avant d’être licencié au 19 février 2021. Il est au bénéfice d’une aide financière accordée par l’Hospice général depuis le 1er avril 2021 et d’une mesure de curatelle de représentation et de gestion ordonnée par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après : TPAE) le 23 octobre 2023.
b. Par décision du 17 mai 2016, l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI) a rejeté la demande de prestation de l’assuré du
5 août 2015 en raison d’atteintes à l’épaule gauche suite à un accident.
c. En date du 22 janvier 2021, l’assuré a déposé une nouvelle demande auprès de l’OAI, faisant état d’une hernie discale, de la pose de stents coronariens, d’atteintes aux tendons et de deux embolies pulmonaires.
d. Dans un avis du 4 août 2021, la docteure B______, médecin auprès du service médical régional (ci-après : SMR) de l’OAI, a résumé les rapports reçus dans le cadre de l’instruction du dossier. Elle a retenu que les troubles statiques et dégénératifs aux niveaux cervical et lombaire devaient faire respecter une épargne stricte du rachis et éviter tout travail physique et les sollicitations répétées du tronc. L’activité habituelle n’était plus exigible depuis le mois de juin 2018, mais l’intéressé avait retrouvé une capacité de travail de 50% dès le 29 avril 2021 dans une activité adaptée légère, sédentaire, permettant l’alternance régulière des positions. Cette capacité était susceptible de s’améliorer avec le traitement manuel. Aux plans cardiologique, pneumologique et orthopédique, aucune incapacité de travail durable n’était retenue.
e. L’OAI a mis en œuvre des mesures de réadaptation professionnelle, sous la forme d’un stage d’orientation chez Intégration pour tous (ci-après : IPT), du
30 septembre au 31 décembre 2021. Cette mesure a été interrompue en raison des difficultés importantes rencontrées par le prestataire et l’assuré, dont l’état psychologique était considéré comme très fragile et préoccupant.
f. Le 12 novembre 2021, la Dre B______ a préconisé la mise en œuvre d’une expertise comportant des volets neurologique, rhumatologique et psychiatrique, afin de se déterminer sur la situation globale de l’assuré.
g. Mandatée par l’OAI, la C______ (ci-après : C______) a procédé à une expertise pluridisciplinaire, confiée à la docteure D______, spécialiste FMH en médecine interne générale et en rhumatologie, au docteur E______, spécialiste en rhumatologie, à la docteure F______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, et au docteur G______, spécialiste FMH en neurologie.
Dans leur rapport du 12 avril 2022, les experts ont diagnostiqué, au plan internistique, une hypercholestérolémie traitée, une maladie coronarienne bitronculaire diagnostiquée à la coronarographie d'avril 2020 avec la mise en place de deux stents, un status après deux embolies pulmonaires post opératoires de 2020 ; au niveau rhumatologique, un status après une réparation chirurgicale de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche en 2015, un status après deux interventions chirurgicales pour une hernie discale L4-L5 gauche responsable d’un syndrome lombo-radiculaire L4-L5 gauche partiellement déficitaire et un status après une fracture des côtes d’évolution favorable en 2020 ; sur le plan neurologique, un syndrome radiculaire L4 plus discrètement L5 gauche algique, irritatif et déficitaire avec des signes de dénervation abondants, dans le contexte de deux interventions neurochirurgicales, soit une cure de hernie discale et microdiscectomie L4-L5 gauche en février 2020 et une intervention de TLIF (pour Transforaminal lumbar interbody fusion) L4-L5 gauche pour récidive le
4 mars 2022 ; au niveau psychiatrique, l’experte n’a retenu aucun diagnostic.
La capacité de travail était définitivement nulle dans l’activité habituelle depuis le mois de février 2020, date de la première intervention de hernie discale. Dans une activité adaptée, ladite capacité était en l’état nulle en raison du syndrome radiculaire gauche persistant, mais la situation n’était pas stabilisée. Une nouvelle évaluation pourrait être proposée à un an post-opératoire, soit en mars 2023.
h. À réception de ce rapport, la Dre B______ a proposé, en date du
4 mai 2022, de demander des informations complémentaires à la neurochirurgienne de l’intéressé au courant du mois de septembre 2022.
i. Par rapport du 10 octobre 2022, la docteure H______, spécialiste FMH en neurochirurgie, a indiqué à l’OAI que son patient disposait d’une capacité de travail de 50 à 60% dans une activité adaptée, du point de vue de sa spécialité. Elle a en outre relevé que, vu la persistance des difficultés à trouver des mots, une imagerie par résonnance magnétique (ci-après : IRM) cérébrale avait été effectuée avec dépistage d’un problème neurologique, pour lequel il était actuellement suivi.
j. Par rapport du 24 novembre 2022, la docteure s, médecin au SMR, a conclu que la capacité de travail de l’assuré était de 0% dès le mois de juin 2018 dans son activité habituelle de gérant immobilier. Dans un travail adapté, ladite capacité était de 0% dès le mois de juin 2018, de 50% dès le mois d’avril 2021, de 0% dès le mois de mars 2022 et de 50% dès le mois d’octobre 2022. Les limitations fonctionnelles concernaient le travail de nuit et en hauteur, ainsi que la nécessité d’épargner le rachis dans sa totalité. L’intéressé devait éviter le port de charges de plus de 5kg de façon répétée, les mouvements en porte-à-faux du dos, les positions statiques prolongées de plus d’une heure et les déplacements prolongés et sur terrain irrégulier.
B. a. Dans un projet de décision du 19 décembre 2022, l’OAI a informé l’assuré qu’il envisageait de lui accorder une demi rente basée sur un degré d’invalidité de 55% du 1er juillet 2021 au 28 février 2022, une rente entière du 1er mars au
31 décembre 2022, et une rente de 55% dès le 1er janvier 2023. L’activité habituelle n’était plus exigible depuis le 1er juin 2018. Dans un métier adapté, il retenait une capacité de travail de 0% du 1er juin 2018 au 31 mars 2021, de 50% du 1er avril 2021 au 28 février 2022, de 0% du 1er mars au 30 septembre 2022 et de 50% dès le 1er octobre 2022. La comparaison des revenus avec et sans invalidité révélait une perte économique de 55%.
b. Le 13 février 2023, l’OAI a envoyé à la caisse de compensation de la SSE la motivation du projet d’acceptation de rente et lui a demandé de préparer le calcul de la prestation et de notifier la décision.
c. En date du 8 mai 2023, l’OAI a envoyé à ladite caisse le prononcé modifié, avec la mention « annule et remplace » le prononcé du 19 décembre 2022. Il a retenu que l’intéressé présentait un degré d’invalidité de 100% dès le
1er juin 2019, de 55% dès le 1er juillet 2021, de 100% dès le 1er mars 2022 et de 55% dès le 1er janvier 2023.
d. Par courrier du 5 octobre 2023, le TPAE a informé à l’OAI que l’assuré avait fait l’objet d’un signalement et qu’il instruisait l’opportunité d’instaurer une mesure de protection à son égard.
e. Le 13 novembre 2023, l’OAI a transmis à la Caisse suisse de compensation copie de l’ordonnance du TPAE du 23 octobre 2023.
f. Par courrier adressé à la Caisse suisse de compensation le 30 novembre 2023, l’OAI a annulé et remplacé son prononcé du 8 mai 2023 a conclu à un degré d’invalidité de 100% dès le 1er juin 2019, de 55% dès le 1er juillet 2021, de 100% dès le 1er juin 2022 et de 55% dès le 1er janvier 2023.
g. Par courriel du 19 mars 2024, la Caisse de compensation des arts et métiers suisses a relevé à l’attention de l’OAI des incohérences entre les dates mentionnées dans le prononcé de la décision, qui mentionnait le droit à une rente de 100% dès le 1er juin 2022, et dans sa motivation, qui retenait le droit à une rente de 100% dès le 1er mars 2022.
h. Par décision du 9 avril 2024, l’OAI a accordé à l’assuré une demi-rente basée sur un degré d’invalidité de 55% du 1er juillet 2021 au 28 février 2022, une rente entière du 1er mars au 31 décembre 2022, et une rente s’élevant à 55% d’une rente entière dès le 1er janvier 2023. Il retenait en effet une capacité de travail de 0% dès le 1er juin 2018, de 50% dès le 1er avril 2021, de 0% dès le 1er mars 2022 et de 50% dès le 1er octobre 2022. La comparaison des revenus avec et sans invalidité révélait un degré d’invalidité de 55%.
C. a. Par acte du 6 mai 2024, l’assuré, soit pour lui le Service de protection de l’adulte (ci-après : SPAd), a interjeté recours contre la décision du 9 avril 2024. Il a conclu aux auditions de son épouse et de sa curatrice, à l’annulation de la décision attaquée et à ce qu’il soit dit qu’il avait droit à une rente entière. Subsidiairement, il a requis le renvoi du dossier à l’intimé pour complément d’instruction et nouvelle décision. En substance, le recourant a soutenu qu’il était invalide à 100% depuis le mois de mars 2022 en raison de la maladie d’Alzheimer, comme attesté par son médecin traitant. Les prémices de cette atteinte avaient d’ailleurs été relevées dans le rapport de la C______, qui relatait des difficultés d’attention, de concentration et de mémoire, avec notamment la perte de mots et des oublis fréquents. Ce point aurait dû être approfondi par les experts, car il coïncidait avec le début de la maladie. L’expertise psychiatrique, qui ne retenait aucun diagnostic, était donc erronée. De surcroît, plusieurs rapports faisaient état d’une capacité de travail nulle, notamment le rapport du
17 novembre 2021 de son précédent médecin traitant, le docteur K______, spécialiste FMH en médecine interne générale, le rapport du 12 avril 2022 de la C______, étant encore rappelé que l’expert rhumatologique ne s’était pas prononcé sur un métier adapté, car l’état de santé n’était pas stabilisé. Son épouse, qui ne vivait plus avec lui, avait expliqué au SPAd qu’il ne pouvait plus répondre au téléphone, s’habiller seul ou faire ses courses. L’IMAD passait tous les jours chez lui pour lui apporter des repas et une infirmière pour lui prodiguer les soins quotidiens.
Le recourant a notamment produit une attestation du 1er mai 2024 du
docteur K______, spécialiste FMH en médecine interne générale, aux termes de laquelle son patient n’était pas apte à travailler, quelle que soit l’activité, en raison de troubles cognitifs liés à une pathologie neurodégénérative à début précoce de type maladie d’Alzheimer, et ce depuis le début du mois de mars 2022, étant rappelé en outre les lombosciatalgies ayant des répercussions sur sa capacité de travail et ayant mené à deux interventions neurochirurgicales en 2020 et 2022.
b. Dans sa réponse du 2 juillet 2024, l’intimé a réservé sa réponse jusqu’à production des éléments complémentaires d’ordre médical. Il a relevé que la brève attestation du Dr K______ était postérieure à la décision litigieuse et qu’il convenait de déterminer la survenance de la nouvelle atteinte, qui n’avait pas été portée à sa connaissance, par des éléments objectivables. Une incapacité de travail rétroactive ne pouvait être retenue sans éléments complémentaires, étant rappelé que l’intéressé avait été reçu en entretien par un expert psychiatre en 2022. Cet expert avait constaté que l’intéressé cherchait parfois ses mots et prenait du temps avant d’évoquer des faits anciens, qu’il rapportait se perdre parfois dans des endroits inconnus, mais il avait considéré que son comportement était tout à fait correct et adéquat, et que sa mémoire récente était bonne. L’humeur était stable et aucun trouble de l’attention, de l’orientation ou de la concentration n’avait été relevé. En l’état du dossier, il n’apparaissait pas que la maladie d’Alzheimer ait déjà atteint un caractère incapacitant manifeste en mars 2022.
c. Le 20 juillet 2024, le SPAd a relevé que son protégé s’était longtemps montré anosognosique vis-à-vis de sa maladie, ce qui était fréquent chez les personnes souffrant d’Alzheimer ou de ce type de démence. C’était la raison pour laquelle il n’avait pas indiqué à l’expert que son médecin traitant avait posé ce diagnostic. Il a sollicité l’audition des Drs K______ et J______ en vue de déterminer si une expertise complémentaire se justifiait.
d. Copie de cette écriture a été adressée à l’intimé le 2 août 2024.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA).
2.
2.1 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.
2.2 Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du
19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du
3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961
(RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706).
Conformément aux dispositions transitoires de la modification du 19 juin 2020
let. c, l'ancien droit s'applique toutefois aux bénéficiaires de rente dont le droit à la rente a pris naissance avant l'entrée en vigueur de la modification et qui ont 55 ans révolus au moment de l'entrée en vigueur de la modification.
Les rentes en cours des personnes assurées ayant atteint l’âge de 55 ans au
1er janvier 2022 (naissance entre 1957 et 1966 pour les hommes, et entre 1958 et 1966 pour les femmes) restent dans l’ancien système, y compris si elles sont révisées. Les dispositions légales de la LAI dans sa version en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021 restent donc applicables (OFAS, CIRAI, ch. 9104).
En l’occurrence, le recourant était âgé de 57 ans au 1er janvier 2022 et son droit à la rente est né avant cette date, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.
3.
3.1 L’objet du litige dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui, dans le cadre de l’objet de la contestation déterminé par la décision, constitue, d’après les conclusions du recours, l’objet de la décision effectivement attaqué. D’après cette définition, l’objet de la contestation et l’objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés sont certes compris dans l’objet de la contestation, mais non pas dans l’objet du litige
(ATF 125 V 413 consid. 1b et 2 et les références).
Les questions qui, bien qu'elles soient visées par la décision administrative et fassent ainsi partie de l’objet de la contestation, ne sont plus litigieuses, d'après les conclusions du recours, et qui ne sont donc pas comprises dans l’objet du litige, ne sont examinées par le juge que s'il existe un rapport de connexité étroit entre les points non contestés et l’objet du litige (ATF 125 V 413 consid. 1b et les références).
3.2 En l’espèce, la décision litigieuse reconnaît le droit du recourant à une
demi-rente du 1er juillet 2021 au 28 février 2022, à une rente entière du 1er mars au 31 décembre 2022, et à une rente de 55% dès le 1er janvier 2023. L’intimé a notamment retenu que l’incapacité de travail dans une activité adaptée avait été de 100% à partir du 1er mars 2022, puis de 50% à compter du 1er octobre 2022, de sorte que la rente entière octroyée dès le 1er mars 2022 était diminuée à une rente de 55% après trois mois d’amélioration théorique de la capacité de gain, soit dès le 1er février 2023.
Le recourant conclut à l’octroi d’une rente entière, sans autre précision. Il ressort toutefois clairement de ses écritures qu’il conteste toute amélioration de sa capacité de travail à partir du 1er octobre 2022, puisqu’il fait valoir l’existence de troubles cognitifs depuis le mois de mars 2022.
Le litige porte donc sur le bien-fondé de la décision du 9 avril 2024 en tant qu’elle diminue la rente entière accordée au recourant depuis le mois de mars 2022, au motif que l’intéressé aurait retrouvé une capacité de travail de 50% dès le
1er octobre 2022.
4. Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA, applicable par analogie
(ATF 148 V 321 consid. 7.3.1 ; 145 V 209 consid. 5.3 et les références ;
130 V 343 consid. 3.5.2 ; 125 V 413 consid. 2d et les références).
4.1 En vertu de l’art. 17 al. 1 LPGA (dans sa teneur en vigueur jusqu’au
31 décembre 2021), si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée.
Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon
l’art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 144 I 103 consid. 2.1 ; 134 V 131 consid. 3 ; 130 V 343
consid. 3.5). Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à une accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_622/2015 consid. 4.1). Il n'y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; 112 V 371 consid. 2b ; 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier. La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral I 111/07 du 17 décembre 2007 consid. 3 et les références).
Le point de savoir si un changement notable des circonstances s’est produit doit être tranché en comparant les faits tels qu’ils se présentaient au moment de la dernière révision de la rente entrée en force et les circonstances qui régnaient à l’époque de la décision litigieuse. En effet, la base de comparaison déterminante dans le temps pour l'examen d'une modification du degré d'invalidité lors d'une révision de la rente est constituée par la dernière décision entrée en force qui repose sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et une comparaison des revenus conformes au droit (ATF 147 V 167 consid. 4.1 et la référence).
Lorsque les faits déterminants pour le droit à la rente se sont modifiés au point de faire apparaître un changement important de l'état de santé motivant une révision, le degré d'invalidité doit être fixé à nouveau sur la base d'un état de fait établi de manière correcte et complète, sans référence à des évaluations antérieures de l'invalidité (ATF 141 V 9).
Lorsque la comparaison des états de fait déterminants dans le temps met en évidence une modification des circonstances pertinentes, le droit à la rente doit être examiné à nouveau sous tous ses aspects factuels et juridiques (« allseitige Prüfung »), sans que les évaluations antérieures ne revêtent un caractère obligatoire. Il n'est pas nécessaire que ce soit l'élément de fait qui s'est modifié qui conduise à fixer différemment le droit à la rente. Selon la jurisprudence, il suffit qu'à la suite de la modification d'une circonstance, un autre élément déterminant résultant de l'examen complet du droit à la prestation entraîne une augmentation, une diminution ou une suppression de la rente. Ainsi, le Tribunal fédéral a retenu que, dans le cadre de la nouvelle évaluation de l'état de santé et de la capacité de travail, un trouble de santé s'ajoutant au tableau clinique existant ne fait pas obstacle à une suppression de la rente. Sont susceptibles de faire l'objet d'une nouvelle évaluation, éventuellement divergente, les aspects qui font l'objet d'une hypothèse, par exemple les revenus sans et avec invalidité et les hypothèses qui les sous-tendent, l'état de santé ou la capacité de travail (arrêt du Tribunal fédéral 8C_240/2023 du 14 mars 2024 consid. 7.1.2 et les références).
4.2 Conformément aux art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI, est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident.
Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).
En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.
Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et 28a al. 1 LAI).
Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001
consid. 1).
4.3 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193
consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).
Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450
consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).
Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.
Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références ;
125 V 351 consid. 3b/bb).
Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR
(ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).
En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du
4 mai 2012 consid. 3.2.1).
On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références).
4.4 De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du
25 juillet 2018 consid. 4.2).
4.5 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références ; 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).
Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante
(ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151 consid. 3.5; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).
5. En l’espèce, dans sa décision du 9 avril 2024, l’intimé a notamment retenu, conformément aux avis du SMR, que la capacité de travail du recourant, nulle à partir du mois de mars 2022, s’élevait à 50% dès le mois d’octobre 2022, ce qui justifiait de diminuer la rente entière après trois mois d’amélioration théorique, soit dès le 1er janvier 2023.
Le recourant conteste cette diminution et fait valoir que sa capacité de travail est demeurée nulle depuis le mois de mars 2022. Il se réfère au rapport du
1er mai 2024 du Dr K______, lequel a attesté que son patient, qu’il suivait depuis le début de l’année 2024, était dans l’incapacité totale d’exercer une activité professionnelle, quelle qu’elle soit, en raison de troubles cognitifs liés à une pathologie neurodégénérative à début précoce de type maladie d’Alzheimer, et ce depuis le début du mois de mars 2022.
L’intimé indique « réserver sa réponse jusqu’à production des éléments complémentaires d’ordre médical ». Il considère que la survenance de cette nouvelle atteinte doit être déterminée par des éléments objectivables et qu’une incapacité de travail rétroactive ne peut pas être retenue sans éléments complémentaires. Il rappelle notamment que l’expert psychiatre, qui a examiné l’intéressé en 2022, n’a retenu aucun diagnostic et a conclu à une entière capacité de travail. L’intimé précise ne pas avoir eu connaissance de la pathologie neurodégénérative dont souffre le recourant et sollicite que la chambre de céans procède à l’instruction du dossier.
5.1 La chambre de céans constate tout d’abord que la décision litigieuse ne tient pas compte de l’évolution de l’état de santé du recourant jusqu’à son prononcé.
Il ressort en effet du recours du 6 mai 2024 du SPAd que l’intéressé est atteint d’une maladie de type Alzheimer et qu’il n’est plus en mesure de faire ses courses, de s’habiller seul ou encore de cuisiner. Des repas lui sont ainsi apportés tous les jours par l’IMAD et une infirmière lui prodigue des soins quotidiens à domicile.
Il ne disposait donc manifestement pas d’une capacité de travail de 50% en
avril 2024, ce que l’intimé ne conteste au demeurant pas.
Pour ce motif déjà, la décision attaquée ne peut qu’être annulée.
5.2 En ce qui concerne la diminution de la rente entière à partir du
1er janvier 2023, la chambre de céans considère que le rapport du Dr K______ ne suffit effectivement pas pour établir, au degré de la vraisemblance prépondérante requis, que le recourant était déjà en incapacité totale de travail en raison de ses troubles cognitifs au moment déterminant, soit à partir du
1er octobre 2022, compte tenu du rapport du 10 octobre 2022 de la
Dre H______ qui avait conclu, après examen du recourant, à une capacité de travail partielle.
Des mesures d’instruction complémentaires sont donc nécessaires pour clarifier l’évolution de l’état de santé du recourant et déterminer si une capacité de travail de 50% peut être retenue après le 1er octobre 2022, cas échéant durant combien de temps.
À cet égard, force est de constater que la décision litigieuse repose sur une instruction manifestement lacunaire du dossier, qu’il n’appartient pas à la chambre de céans de compléter.
5.2.1 En effet l’intimé n’a plus sollicité de rapport médical depuis la réception de celui du 10 octobre 2022 de la Dre H______, soit pendant près d’un an et demi jusqu’à l’envoi de sa décision du 9 avril 2024.
Pourtant, il était au courant, à tout le moins depuis le 13 novembre 2023, soit bien avant le prononcé de la décision contestée, que le recourant bénéficiait d’une curatelle de représentation et de gestion ordonnée par le TPAE le 23 octobre 2023. Il n’a cependant pas jugé utile de s’informer des raisons ayant conduit à cette mesure.
5.2.2 En outre, les mentions de troubles cognitifs se succèdent dans le rapport de la C______ du 12 avril 2022.
Les experts ont ainsi relevé que la biographie était très difficile à retracer et que l’intéressé se montrait très imprécis (rapport p. 8), qu’il avait déclaré avoir perdu la mémoire depuis la pose de deux stents en avril 2020 (rapport p. 9). Il ne savait pas de quoi était décédé son père, n’avait pas pu dater précisément les décès de ses parents (rapport p. 9) et ne se souvenait pas de la date de son mariage (rapport p. 10). Le recueil biographique était émaillé d’imprécisions et de lacunes quant aux dates de sa biographie et de ses différentes activités professionnelles. L’expertisé paraissait ralenti (rapport p. 11). Un état confusionnel avait été rapporté lors de l’hospitalisation faisant suite à l’intervention lombaire de
mars 2022 (rapport p. 13). Il signalait des difficultés de mémoire, de perte du mot et d’orientation, uniquement en marge de l’entretien ou à la demande, ce qui pouvait faire suspecter une nosognologie partielle de certaines difficultés sur le plan cognitif et neuropsychologique (rapport p. 14). Certains éléments observés durant l’évaluation et partiellement décrits par l’intéressé pouvaient suggérer des séquelles cognitives possiblement en lien avec les embolies pulmonaires. Ainsi, un ralentissement psychomoteur était observable et l’expertisé présentait un manque de mots et rapportait des difficultés à s’orienter (rapport p. 15).
En outre, il ressort du rapport de la psychiatre que l’intéressé se plaignait depuis 2020 de perte de mots et de troubles de la mémoire, mais également de difficultés d’attention, de concentration, d’oublis fréquents et de l’impression d’avoir besoin de plus de temps pour réaliser ses tâches habituelles (rapport p. 5). L’experte a elle-même constaté des difficultés à préciser certaines dates (rapport p. 7), un manque de mots et un ralentissement psychomoteur (rapport p. 9), et relevé que l’intéressé avait renoncé à se rendre à la cafétéria pendant la pause de peur de se perdre (rapport p. 10). Elle a d’ailleurs suggéré la présence de séquelles cognitives (rapport p. 10). Pourtant, elle a conclu, sans procéder à un quelconque test ou bilan complémentaire, qu’il n’y avait pas d’élément « manifeste » orientant vers un trouble de l’attention, de l’orientation ni de la concentration (rapport p. 9), que les capacités de déplacement, de conversation et de contact étaient conservées (rapport p. 10), que la mémoire des faits anciens pouvait être perturbée, mais que la mémoire des faits récents était correcte, car l’intéressé pouvait décrire sa vie quotidienne de façon précise et plausible (rapport p. 9). Compte tenu des constats objectifs de l’experte, de l’évocation de séquelles cognitives et de la suspicion d’une nosognosie partielle, l’experte ne pouvait pas conclure, sans autre examen, à l’absence de tout diagnostic et de toute limitation d’ordre psychique.
Les experts somaticiens ont également fait état de troubles cognitifs, puisque le neurologue a signalé que l’anamnèse avait été laborieuse (rapport p. 2 et 4) et le rhumatologue a noté que le déroulé des faits était « excessivement difficile » à faire préciser (rapport p. 8), que l’intéressé ne se souvenait pas de la date de son licenciement (rapport p. 9) et que le déroulé d’une journée type était difficile à faire préciser (rapport p. 9). Ces dernières indications permettent de douter de l’appréciation de l’experte psychiatre concernant la mémoire à court terme. Enfin, cet expert clairement a évoqué des troubles neuropsychologiques en raison de l’interrogatoire difficile (rapport p. 14).
Dans leur « évaluation médico-assurantielle », au point 7 du rapport, les experts ont retenu qu’il serait indiqué de procéder à un examen neuropsychologique à distance de l’hospitalisation de mars 2022 qui avait été marquée par la survenue d’un état confusionnel aigu (rapport p. 15). Ils ont conclu que les ressources dont l’intéressé avait disposé par le passé et ses bonnes facultés intellectuelles paraissaient actuellement ternies par les difficultés démontrées lors de l’expertise, avec un ralentissement psychomoteur et des troubles mnésiques, ce qui pourrait faire évoquer des troubles neuropsychologiques dont il n’était pas conscient et qui justifierait un complément d’examen à distance de l’expertise (rapport p. 16).
Dans la partie « réponses aux questions du mandant », sous chiffre 8 du rapport, les experts ont conclu que la capacité de travail était actuellement nulle en raison du syndrome radiculaire gauche, mais que la situation n’était pas stabilisée et qu’une nouvelle évaluation pourrait être proposée en mars 2023, soit une année après l’intervention. Ils ont donc manifestement oublié de répéter, dans cette partie du rapport, qu’ils suggéraient également un examen neuropsychologique, clairement mentionné au point précédent.
À réception du rapport de la C______, la Dre B______ a consigné, dans son avis du 4 mai 2022, les diagnostics et limitations fonctionnelles retenus par les experts (rapport p. 14), et considéré que l’incapacité de travail totale était toujours justifiée en raison d’une aggravation des lombosciatalgies gauches et du contexte post-opératoire récent. Elle a proposé d’interroger la neurochirurgienne au mois de septembre 2022. Elle n’a cependant pas relevé le complément d’instruction préconisé sur le plan neuropsychologique, ni les nombreuses références aux problèmes cognitifs, ce qui permet de douter qu’elle se soit livrée à une lecture attentive de l’expertise.
5.3 Il sied également de souligner que, dans son rapport du 10 octobre 2022, la Dre H______ a notamment mentionné qu’au vu de la persistance des difficultés à trouver des mots, une IRM cérébrale avait été effectuée avec « dépistage d’un problème neurologique », pour lequel le patient était suivi.
Dans son appréciation du 24 novembre 2022, la Dre B______ n’a à nouveau pas relevé l’existence des troubles cognitifs et l’intimé n’a pas sollicité la moindre information à ce sujet. Il n’a en particulier ni sollicité les résultats de l’IRM cérébrale, ni requis un rapport récent de la part du médecin traitant, ni demandé à l’intéressé des informations quant à son nouveau suivi.
5.4 Compte tenu de l’existence avérée de troubles cognitifs, l’intimé ne pouvait en aucun cas conclure, sans prendre connaissance des derniers examens médicaux et sans procéder aux éventuelles investigations médicales qui s’imposaient encore, que le recourant avait récupéré une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée dès le 1er octobre 2022 au vu de l’amélioration des lombosciatalgies.
Dans ces circonstances, la cause sera renvoyée à l’intimé pour qu'il détermine l’évolution de l’état de santé et la capacité de travail du recourant depuis le mois d’octobre 2022, date à partir de laquelle il a considéré qu’une activité adaptée pouvait être exercée à 50%.
6. Eu égard à tout ce qui précède, le recours sera partiellement admis et la décision du 9 avril 2024 annulée, en tant qu'elle diminue la rente entière d'invalidité du recourant à un 55% de rente dès le 1er janvier 2023.
La cause est renvoyée à l’intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision.
Le recourant, représenté par sa curatrice, collaboratrice d'un service de l'État, ne peut prétendre à l'allocation de dépens devant l'autorité judiciaire cantonale, faute de justification économique (ATF 126 V 11 consid. 2 et 5).
Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L’admet partiellement.
3. Annule la décision du 9 avril 2024 en tant qu'elle diminue le droit du recourant à une rente entière d'invalidité à un 55% de rente dès le 1er janvier 2023.
4. Renvoie la cause à l’intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision.
5. Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.
6. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Melina CHODYNIECKI |
| La présidente
Joanna JODRY |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le