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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1984/2023

ATAS/328/2024 du 14.05.2024 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1984/2023 ATAS/328/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 14 mai 2024

Chambre 10

 

En la cause

A______
représentée par Me Marie-Josée COSTA, avocate

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l'assurée), née le ______ 1967, mariée depuis le 11 juin 1993 à Monsieur B______, né le ______ 1961, et mère de deux enfants, nés en 1994 et 2000, est une ressortissante italienne domiciliée à Vernier. Entre 1984 et 1992, elle a exercé l'activité d'assistante en pharmacie, de secrétaire et d'assistante médicale. Suite à son mariage, elle n'a plus travaillé.

b. Le 1er décembre 2021, elle a déposé auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) une demande de moyens auxiliaires de l'assurance-invalidité (ci-après : AI) en raison d'un carcinome de la sphère
oto-rhino-laryngée (ci-après : ORL) découvert le 14 août 2021, tendant à l’octroi d’une perruque et de rubans. À la question de savoir si une demande de prestations AI avait déjà été déposée, elle a répondu par la négative.

c. Le 21 décembre 2021, le service d'oncologie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) a transmis à l'OAI un rapport médical indiquant à titre de diagnostic un cancer ORL depuis août 2021 et à titre de pronostic « probablement amélioration dans les 12 prochains mois ».

d. Le même jour, l'OAI a octroyé à l'assurée le droit à des moyens auxiliaires, en prenant en charge les perruques ou cheveux postiches pour un montant de CHF 62.- (TVA incluse). L'OAI a indiqué à l'assurée que si elle se trouvait en incapacité de travail de longue durée en raison de son atteinte à la santé, elle aurait la possibilité de déposer une demande d'intervention précoce, de réadaptation ou de rente.

e. Le 15 juin 2022, l'OAI a enregistré une demande de prestations dans laquelle l'assurée indiquait être atteinte d'une tumeur de la sphère ORL depuis le 14 août 2021.

f. Le 13 septembre 2022, l'époux de l'assurée a transmis à l'OAI une attestation d'immatriculation de leur fils cadet à la Haute école de gestion de Genève
(ci-après : HEG), ainsi qu'un questionnaire relatif au statut rempli par ses soins dans lequel il a expliqué avoir eu un taux d'activité professionnelle de 100% jusqu'au 31 janvier 2023 puis avoir bénéficié du chômage à partir de cette date. Il avait précisé qu'étant lui-même malade, sa situation financière avait changé.

g. Par rapport médical sous forme de réponses à un questionnaire du 21 septembre 2022, le docteur C______, spécialiste FMH en médecine interne générale, a indiqué que l'assurée avait souffert d'un carcinome épidermoïde de l'oropharynx (amygdale gauche, base de la langue gauche) diagnostiqué le 15 août 2021. Elle avait été hospitalisée en urgence en août 2021, pour un choc hémorragique sur saignement sur faux anévrysme de l'artère linguale, nécessitant une embolisation avec une mise en évidence d'une masse néoplastique et d'une embolie pulmonaire bilatérale. Elle avait bénéficié d'une radio-chimiothérapie à visée curative du 20 septembre au 29 octobre 2021 et présenté des troubles de la déglutition, une hypoesthésie localisée du membre inférieur droit et une malnutrition protéino-énergétique grave. Le 15 juin 2022, elle avait subi une pharyngectomie partielle par voie transmandibulaire, un évidement ganglionnaire, ainsi qu'une reconstruction par lambeaux libres antéro-latéral de la cuisse droite. L'évolution était grevée d'une inappétence, de douleurs cervicales, bucco-laryngée, d'une dyspnée récidivante avec dysphonie et un encombrement bronchique. Une nutrition par sonde naso-gastrique avait été débutée. Il était constaté un épuisement physique et un retentissement psychologique important, avec dysthymie et parfois de l'anxiété. Les contrôles post chirurgie avaient montré l'existence de collections et fistules au niveau du plancher buccal et de la loge ptérygoïdienne gauches. Une reprise chirurgicale avait eu lieu ainsi qu'une antibiothérapie à large spectre, qui avait été maintenue jusqu'en août 2022. Suite à l'arrêt des traitements, l'assurée avait développé des douleurs et un érythème cervical gauche, avec un état fébrile depuis septembre 2022, nécessitant une hospitalisation aux HUG avec une reprise d'une antibiothérapie. Les examens radiologiques avaient montré un retard de consolidation d'ostéotomie mandibulaire sur infection chronique. Depuis le mois d'août 2022, dans un contexte de faiblesse généralisée, l'assurée avait présenté des malaises avec perte de connaissance et parfois des convulsions des quatre membres et un orthostatisme. L’incapacité de travail était totale et son pronostic réservé au vu de la situation oncologique, des complications infectieuses, de l’état de dénutrition et du retentissement thymique négatif.

Le Dr C______ a notamment transmis à l'OAI :

-          un avis de sortie des soins aigus du 18 juillet 2022 du service d'ORL et de chirurgie cervico-faciale des HUG retenant à titre de diagnostic principal un ulcère trophique de la paroi pharyngée latérale gauche post radique et indiquant que l'assurée avait séjourné au sein de leur service du 14 juin au 18 juillet 2022 pour la pharyngectomie partielle, l'évidement ganglionnaire et la reconstruction par lambeaux de la cuisse droite ;

-          un avis de sortie des soins aigus du 18 septembre 2022 du service d'ORL et de chirurgie cervico-faciale des HUG retenant une dermohypodermite latérocervicale gauche, un retard de consolidation d'ostéotomie symphysaire de la mandibule sur infection chronique, ainsi qu'une syncope possiblement convulsivante, et mentionnant un séjour au sein de leur service du 1er au 19 septembre 2022 au cours duquel il avait été procédé aux extractions des dents 31 et 41 et une révision osseuse mandibulaire en regard, ainsi qu'une révision et fermeture de fistule oro-cutanée.

h. Le 18 novembre 2022, le docteur D______, chef de clinique du service d'ORL et de chirurgie cervico-faciale des HUG, a établi un rapport médical dans lequel il a indiqué en substance que la situation oncologique de l'assurée était contrôlée, mais qu'elle présentait une ostéomyélite chronique de la mandibule avec de multiples épisodes de surinfection et un impact conséquent sur sa qualité de vie. Le Dr D______ a retenu un trouble de la déglutition, une malnutrition, et un impact sur la voix et l'articulation, et de la fatigue. Ces atteintes avaient des répercussions sur tous les domaines courants de la vie de l'assurée.

Le Dr D______ a notamment transmis à l'OAI :

-          une lettre de transfert du 29 mars 2022 du service d'ORL et de chirurgie cervico-faciale des HUG mentionnant que l'assurée avait séjourné du 4 au
5 janvier 2022 au service des urgences, puis du 5 janvier au 3 février 2022 au sein de leur service pour des douleurs post radiques, un saignement de l'ulcère de la région amygdalienne gauche et une malnutrition protéino-énergétique grave ;

-          une lettre de sortie des soins aigus du 2 mai 2022 du service d'ORL et de chirurgie cervico-faciale des HUG indiquant un séjour au sein de leur service du 12 au 19 avril 2022 pour saignement de l'ulcère de la région amygdalienne gauche.

i. Dans un rapport médical du 28 novembre 2022, la docteure E______, spécialiste FMH en radio-oncologie, a décrit une évolution favorable depuis la chirurgie reconstructive oropharyngée de l'assurée. Cette dernière n'avait plus de trachéostomie, mais continuait de bénéficier d'une alimentation par sonde nasogastrique. Elle se trouvait en incapacité totale dans les domaines courants de la vie (ménage, loisirs et activités sociales), ainsi que dans toute activité.

j. Sans soumettre le dossier au service médical régional de l'assurance-invalidité (ci-après : SMR), un mandat d'enquête ménagère a été émis le 29 novembre 2022 par l'OAI qui a retenu le statut de ménagère. Cette enquête économique sur le ménage a été réalisée le 9 février 2023 au domicile de l'assurée. Les empêchements suivants ont été établis :

Domaines particuliers (activités)

Pondération

Empêchements sans aide exigible de la famille

Empêchements après déduction de l'aide exigible des membres de la famille et des personnes vivant en ménage commun

Invalidité

1. Alimentation

39% 

83%

19%

7.3%

2. Entretien du logement

23% 

80%

14%

3.4%

3. Achats et courses diverses, tâches administratives

 10%

73%

0%

0.0%

4. Lessive et entretien des vêtements

 18%

74%

22%

3.9%

5. Soins et assistance aux enfants et aux proches

 0%

0%

0%

0.0%

6. Soin du jardin et de l'extérieur de la maison

10%

75%

75%

7.4%

 

Total invalidité dans l'accomplissement des tâches ménagères pour un 100%

22.0%

Total d'heures nécessaires à la tenue du ménage par semaine

28.18 h

Empêchements avant obligation de réduire le dommage

22.14 h

78.6%

 

Obligation de réduire le dommage exigible des membres de la famille

16.00 h

56.6%

 

Empêchements après obligation de réduire le dommage

06.13 h

22.0%

 

L'enquêtrice avait retenu, à titre de diagnostic, un carcinome épidermoïde de l'oropharynx (amygdale et base de la langue gauches) avec un test HPV 16 positif et une incapacité de travail totale depuis le 14 août 2021. Il était précisé que dans l'hypothèse où il n’y avait pas d'avis du SMR, les limitations fonctionnelles étaient un trouble de la déglutition, une alimentation par sonde gastrique, un trouble de la voix et l'articulation, une xérostomie et une asthénie.

L'enquête précisait que l'assurée habitait avec son époux et leur fils cadet dans une maison, avec sept pièces et deux salles de bains, et le logement était divisé en trois étages, comprenant un sous-sol avec un studio pour le fils et une mezzanine.

Concernant l'aide exigible des proches, l'enquêtrice a précisé que l'époux de l'assurée et leur fils cadet élaboraient les repas, s'occupaient de nettoyer et vider le lave-vaisselle, rangeaient et nettoyaient la cuisine, mettaient les assiettes et les couverts, s'occupaient des travaux légers et lourds d'entretien de la maison, des travaux saisonniers ou périodiques (comme nettoyer les vitres, la cuisine en profondeur). L'époux s'occupait des achats et des démarches administratives, transportait le panier à linge du sous-sol, repassait le linge si nécessaire. De l'aide était également requise pour sortir le linge des machines et le plier. S'agissant des soins du jardin et de l'extérieur de la maison, l'époux effectuait la tonte de la pelouse, la taille des haies et des arbres fruitiers, le nettoyage de la terrasse et de la cour.

Il était précisé que l'époux de l'assurée avait déposé une demande AI en
avril 2021 ayant abouti à une rente entière à 100% à durée limitée du
1er novembre 2021 au 30 avril 2022 suite à un burn-out. Il se trouvait en bonne santé et n'avait plus aucune activité lucrative. Il n'y avait pas de facteurs susceptibles de réduire l'exigibilité. S'agissant de l'aide exigible de son fils cadet, il avait été tenu compte du fait qu'il se trouvait en études.

B. a. Par projet de décision du 14 mars 2023, l'OAI a nié le droit à la rente de l'assurée, considérée comme une personne non active consacrant tout son temps à ses travaux habituels, au motif qu'elle présentait un taux d'invalidité insuffisant pour ouvrir le droit à une rente. Une atteinte à la santé invalidante dès le
14 août 2021 avait été retenue, mais il ressortait des constats effectués à l'occasion de l'enquête ménagère du 9 février 2023 qu'elle présentait un empêchement de 22% dans l'accomplissement de ses travaux habituels en tenant compte de l'exigibilité des membres de sa famille.

b. Par courrier du 18 avril 2023, l'assurée s'est opposée au projet de décision, faisant valoir que l'OAI n'avait pas tenu compte de son important dossier médical et de la complexité de son cas, et que la manière de procéder de l'infirmière lors de l'enquête ménagère lui avait paru superficielle.

Était joint à son opposition un courrier du 13 avril 2023 du Dr C______ par lequel il contestait les conclusions de l'OAI. Il a fait valoir que la situation de l'assurée s'était compliquée d'une dermohypodermite au niveau cervical avec une ostéomyélite mandibulaire nécessitant des traitements antibiotiques lourds et prolongés, et de plusieurs complications respiratoires (embolie pulmonaire, infections répétées). Elle se trouvait au décours d'une nouvelle hospitalisation pour pneumonie d'aspiration, nécessitant des traitements antibiotiques intraveineux. Les conséquences de la maladie oncologique étaient nombreuses, permanentes, invalidantes et sévères avec un déconditionnement physique, des troubles de l'élocution et une dysarthrie, des troubles de la déglutition, une dyspnée, des douleurs de la sphère ORL et une importante fatigabilité. La nutrition se faisait par une gastrostomie endoscopique percutanée et une rééducation pluridisciplinaire était indispensable. La maladie oncologique, ses conséquences, la perte d'autonomie constatée et les complications infectieuses nombreuses avaient un retentissement psychologique important avec des troubles du sommeil, une anxiété, des difficultés à se concentrer et un abaissement thymique.

c. Dans une lettre du 20 avril 2023, la Dre E______ a indiqué que, suite à un traitement très lourd à visée curatif par radio-chimiothérapie, l'assurée se trouvait en rémission oncologique, mais qu'elle souffrait de complications de ce traitement. En raison de la persistance de plus de six mois d'un ulcère hémorragique post-radique, elle avait dû se soumettre à une intervention compliquée de reconstruction par pharyngectomie partielle avec greffe de lambeau libre. Elle s'impliquait dans une longue et difficile réadaptation logopédique pour pouvoir recommencer à manger par voie orale et à parler correctement. Après plus d'un an d'alimentation par sonde nasogastrique, en début d'année 2023, elle avait de nouveau été admise au bloc opératoire pour mettre en place une nutrition entérale par gastrostomie. La rééducation s'était compliquée aussi par de multiples épisodes infectieux avec des hospitalisations fréquentes. Elle devait également se soumettre à de nombreux examens radiologiques et visites cliniques, car le risque de rechute tumorale n'était malheureusement pas nul. Elle avait une incapacité totale de travail dans tous les domaines.

d. Dans une note interne du 4 mai 2023, l'OAI a indiqué que l'assurée n'apportait aucun élément susceptible de modifier sa position suite au projet de décision. S'agissant de l'exigibilité de l'époux de l'assurée, il ressortait de la demande de prestations de ce dernier qu’il avait subi un accident en décembre 2022 (chute dans les escaliers). Il avait déposé une nouvelle demande en avril 2023 qui se trouvait en cours d'instruction et l'OAI n'était pas en possession d'éléments médicaux. Dans l'enquête de février 2023, il était mentionné que l'époux se trouvait en bonne santé et qu'il n'y avait pas de facteur susceptible de réduire l'exigibilité.

e. Par décision du 15 mai 2023, l'OAI a confirmé son projet du 14 mars 2023, refusant la rente d'invalidité à l'assurée et précisant qu'aucun élément probant ne permettait de remettre en question les conclusions de l'enquête ménagère.

C. a. Par acte du 14 juin 2023, l'assurée, représentée par une avocate, a interjeté recours contre ladite décision par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans). Elle a conclu à son annulation et au renvoi de la cause à l'intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision, sous suite de frais et dépens. En substance, la recourante a contesté la valeur probante du rapport d'enquête économique sur le ménage et, singulièrement, l'évaluation des empêchements dans la sphère ménagère. L'enquêtrice n'avait pas eu connaissance de ses empêchements et handicaps, n'avait pas pris en compte toutes ses atteintes et n'avait pas visité son domicile, de sorte qu'elle n'avait pas eu la connaissance de la situation locale et spatiale. L'état de santé de son époux et les horaires de son fils cadet n'avaient pas été discutés avec l'enquêtrice, alors que son époux était gravement atteint dans sa santé depuis décembre 2022 et présentait des troubles psychiques. Elle estimait que durant son hospitalisation, un empêchement de 100% aurait dû être retenu et pour les périodes hors hospitalisation, l'empêchement aurait dû être supérieur à celui retenu par l'enquêtrice. Quant au taux de 60% retenu à titre d'exigibilité des proches, celui-ci n'était raisonnablement pas exigible. Elle a également fait valoir que sa situation s'était dégradée avec l'apparition de métastases aux poumons.

À l'appui de son écriture, la recourante a produit un bordereau de pièces comprenant notamment les documents suivants :

-          des certificats médicaux du Dr C______ retenant un arrêt de travail complet entre le 8 décembre 2022 et le 30 juin 2023 pour son époux ;

-          un rapport médical du service de radiologie de l'Hôpital de la Tour du
8 décembre 2022, faisant suite à un scanner du rachis cervical du
8 décembre 2022 de son mari, qui avait conclu à une uncocervicodiscarthrose pluri-étagée prédominant en C5-C6 et C6-C7 avec arthrose inter-apophysaire postérieure responsable d'un rétrécissement des foramens intervertébraux et C5-C6 et C6-C7 à gauche ;

-          un rapport médical du 22 février 2023 du service de radiologie de l'Hôpital de la Tour suite à une imagerie par résonnance magnétique (IRM) du rachis cervical du 21 février 2023 de son époux, qui avait conclu à une déchirure partielle des ligaments inter-épineux étendue de C3 à C6, une discopathie dégénérative chronique C5-C6 associée à une spondylose postérieure sans canal cervical étroit et une sténose foraminale ostéophytaire serrée du foramen de conjugaison C6-C7 gauche ;

-          un rapport médical du 13 mars 2023 du docteur F______, spécialiste FMH en neurologie, qui avait notamment retenu que, suite à l'accident du
8 décembre 2022 lors duquel son mari avait chuté et glissé dans un escalier, se heurtant la région cervicale et l'épaule gauche, celui-ci présentait des douleurs cervicales et de l'épaule gauche avec un handicap fonctionnel en particulier pour l'habillage ;

-          un rapport médical du 12 juin 2023 de la docteure G______, psychiatre et pédopsychiatre, indiquant qu’elle présentait un état anxieux et dépressif moyen à sévère (code F 32.1 CIM-10) ; elle ne pouvait toujours pas s'alimenter par la bouche, sa vie sociale était très induite après la découverte de son cancer ; à la suite de sa trachéotomie, elle avait eu une baisse de morale avec un trouble du sommeil moyennement présent ; elle présentait des difficultés de mémoire et, particulièrement, de concentration ; son appétit avait été perturbé suite à une alimentation avec une sonde ; elle avait subi une perte de poids de 17kg en une année ; après la greffe, elle avait commencé à avoir des idées suicidaires passives (et non actives) qui étaient présentes à cause des restrictions dans sa vie sociale.

b. Dans sa réponse du 11 juillet 2023, l'intimé a conclu au rejet du recours. En substance, il a retenu une incapacité de travail totale dans toute activité et un statut de ménagère à 100%. L'enquête avait été effectuée par une personne spécialisée dans ce genre d'examen et remplissait toutes les exigences jurisprudentielles, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de s'en écarter. Concernant l'exigibilité de l'époux et du fils cadet de la recourante, l'enquêtrice s'était entretenue avec ces derniers et avait pris en compte les éléments pertinents. Il en ressortait qu'ils fournissaient une aide non négligeable à l'accomplissement des tâches ménagères que la recourante ne pouvait plus accomplir : les repas, le nettoyage de la cuisine, l'entretien du logement, les travaux lourds, les achats et les courses, la lessive et l'entretien des vêtements, ainsi que le jardin et l'extérieur de la maison. Aucun élément au dossier ne permettait de conclure que les efforts déployés dans ce cadre allaient au-dessus de leur force et capacité.

L'intimé a joint à sa réponse l'avis médical du SMR du 7 juillet 2023, concluant que la recourante présentait un cancer ORL avancé dont les traitements avaient entraîné de nombreuses opérations, hospitalisations et séquelles encore présentes, motivant une interruption de travail totale dans toute activité professionnelle depuis le mois d'août 2021. La recourante avait été hospitalisée tous les un à trois mois pour des durées d'une semaine à plus d'un mois, ce qui avait entraîné durant ces périodes une incapacité totale d'effectuer toutes tâches ménagères, ainsi que dans les périodes de convalescence post-hospitalisations. La recourante présentait un trouble dépressif depuis le début de son atteinte à la santé, qui entraînait des troubles cognitifs et une fatigabilité. Sur le plan somatique, elle présentait une atteinte sévère de l'état général, avec une dénutrition importante, une fatigabilité, des douleurs, des troubles de la déglutition et de l'élocution. Des soins infirmiers étaient nécessaires plusieurs fois par semaine pour les soins de sa sonde. Le pronostic oncologique était très réservé. Le SMR estimait que l'enquêtrice avait pris en compte les atteintes à la santé de la recourante dans l'évaluation de ses empêchements ménagers.

c. Par courrier du 18 juillet 2023, l'intimé a transmis à la chambre de céans un rapport médical de la Dre E______ du 14 juillet 2023 qui indiquait que la recourante avait été diagnostiquée d'une progression métastatique de son cancer ORL, notamment sous forme de quatre métastases pulmonaires. Ces lésions avaient été traitées par radiothérapie stéréotaxique courant mois de juillet 2023. Dans ce contexte, son suivi oncologique était plus rapproché tant sur le plan clinique que radiologique. Une vidéo-fluoroscopie avait mis en évidence des fausses routes au liquide, ainsi qu'une sténose de l'œsophage cervicale qui allait nécessiter une dilatation prochainement. Une alimentation per os ne serait vraisemblablement plus envisageable. La recourante présentait une incapacité totale de travail dans tous les domaines.

d. Le 21 septembre 2023, la recourante a répliqué, réitérant l'absence de valeur probante de l'enquête économique sur le ménage. Elle avait indiqué à l'enquêtrice que son époux et son fils ne pouvaient donner que très ponctuellement un coup de main, ce qui était loin des nombreuses tâches que l'enquêtrice leur avait imputées à tort. Celle-ci ne connaissait pas toutes ses atteintes à la santé et n'avait pas tenu compte de toutes ses limitations fonctionnelles, notamment ses graves troubles psychiques, alors même que le SMR admettait qu'elle présentait un état dépressif entraînant des troubles cognitifs et une fatigabilité depuis le début de son atteinte à la santé. Le SMR retenait aussi une incapacité totale d'effectuer toute tâche ménagère durant les périodes d'hospitalisation et de convalescence
post-hospitalisations, ce qui n'avait pas été pris en compte par l'enquêtrice et l'intimé.

La recourante a précisé qu'elle souffrait d'une progression métastatique de son cancer ORL et qu'elle avait eu un nouveau malaise en juin 2023, suite auquel elle avait fait une expulsion de dent et subi une fracture.

À l'appui de sa réplique, elle a produit différents documents médicaux dont les suivants :

-          un rapport médical du service de médecine de premier recours du
18 juin 2023 des HUG indiquant qu’elle avait eu un malaise et chuté sur le côté gauche, faisant une avulsion dentaire et subi une fracture du métacarpe gauche ;

-          un courriel du 22 juillet 2023 du docteur H______, spécialiste FMH en médecine interne, médecin-conseil de l’employeur de l’époux, qui indiquait que ce dernier présentait plusieurs affections médicales ayant une répercussion sur sa capacité de travail, retenant une incapacité de travail à 100% en cours depuis le 8 décembre 2022 : était joint un courriel du Dr C______ du 20 juillet 2023 indiquant que, sur le plan psychologique, son mari présentait une aggravation des symptômes d'anxiété, avec perturbation du sommeil et, sur le plan somatique, un syndrome d'apnée du sommeil de degré sévère ; il avait subi un traumatisme de l'épaule gauche et du rachis ; les mouvements répétés et le port de charges lourdes ne pouvaient plus être effectués ; il existait des cervicalgies irradiantes parfois vers le membre supérieur gauche et une persistance de douleurs invalidantes, parfois insomniantes ; le bilan radiologique cervical avait montré une déchirure partielle ligamentaire interépineux C3-C6, une discopathie étagée, une sténose foraminale serrée et une arthrose étagée postérieure ; il ressentait des douleurs cervicales et lombaires en permanence, surtout lors de stations assises et debout prolongées ; sa capacité de travail était nulle et une demande de prestations AI avait été déposée.

e. Par déterminations du 9 novembre 2023, l'intimé a proposé de réformer sa décision, en ce sens où la recourante devait se voir octroyer une rente AI au taux de 43% dès le mois de décembre 2022. Il avait retenu un empêchement de 100% dans la sphère ménagère, avant l'exigibilité des membres de la famille qui était maintenue à 56.6%, soit seize heures par semaine, tenant compte tant de la situation personnelle et familiale que des déclarations de la recourante. S'agissant de l'époux de l’intéressée, il ne ressortait pas des éléments du dossier ni des déclarations faites lors de l'enquête qu'il n'était pas en mesure de participer aux travaux ménagers. S'agissant de leur fils, en tenant compte de l'Enquête suisse sur la population active effectuée périodiquement par l'Office fédéral de la statistique, un adolescent en formation de son âge consacrait en moyenne 12.4 heures par semaine au travail domestique et familiale. L'exigibilité de seize heures par semaine entre le fils et l'époux de la recourante ne semblait pas excessif.

Était joint à ces déterminations un nouvel avis médical du SMR du
9 novembre 2023, lequel a, après avoir pris en compte les nouvelles pièces médicales du dossier, maintenu ses conclusions du 7 juillet 2023. Il a rajouté qu'au vu de la progression du cancer, avec l'apparition de métastases pulmonaires nécessitant un traitement de radiothérapie, et des complications présentes sur les voies aérodigestives nécessitant à nouveau des interventions et des hospitalisations, l'état général de la recourante était très précaire et les tâches ménagères possibles très réduites.

f. Par observations du 11 décembre 2023, la recourante a conclu que le droit à une rente devait être ouvert à compter du 1er août 2022, dans la mesure où elle avait déposé une demande de perruque le 1er décembre 2021 en invoquant un carcinome présent depuis le 14 août 2021 et que l'intimé aurait dû étendre son instruction au droit à la rente, un cancer justifiant une incapacité totale de travail. S'agissant de l'aide familiale, si par impossible une exigibilité des proches devait être retenue, celle-ci devrait être limitée à celle de son fils et être réduite de moitié, ce qui correspondait à une aide hebdomadaire de huit heures, ce qui donnait par conséquent un taux d'invalidité de 71.7%. Ainsi, le droit à la rente devait être couvert à compter du 1er août 2022 et son taux d'invalidité devait être fixé à tout le moins à 70%, ce qui ouvrait le droit à une rente entière d'invalidité.

La recourante a joint à son écriture un certificat médical du 29 novembre 2023 du Dr C______ attestant d'un arrêt de travail complet pour son époux durant la période du 1er au 31 décembre 2023.

g. Le 22 janvier 2024, l'intimé a persisté dans ses précédentes conclusions. Avant la demande de prestations du 15 juin 2022, il n'existait pas d'éléments suffisants permettant d'admettre qu'une rente d'invalidité devait entrer en considération et induire une instruction d'office sur la question d'une éventuelle rente. Aucun problème relatif aux empêchements de la recourante n'était clairement évoqué par son médecin avant le rapport du 21 septembre 2022. La recourante avait déposé une demande de moyens auxiliaires (perruque, turbans) en date du
1er décembre 2021, mais il ne ressortait pas du rapport des HUG reçu le
13 décembre 2021 qu'elle présentait un empêchement justifiant l'octroi d'une rente, le médecin ayant indiqué le besoin d'une perruque et faisant état d'une
« probablement amélioration dans les 12 prochains mois ».

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du
19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au
1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du
19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du
3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961
(RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706).

4.1 En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

4.2 En l’occurrence, la décision querellée porte sur l’octroi d’une rente dont le droit est né postérieurement au 31 décembre 2021, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.

5.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

6.              

6.1 Dans la procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l’autorité administrative compétente s’est prononcée préalablement d’une manière qui la lie, sous la forme d’une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l’objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n’a été rendue, la contestation n’a pas d’objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 131 V 164 consid. 2.1 ; 125 V 414 consid. 1a ; 119 Ib 36 consid. 1b et les références).

L’objet du litige dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui – dans le cadre de l’objet de la contestation déterminé par la décision – constitue, d’après les conclusions du recours, l’objet de la décision effectivement attaqué. D’après cette définition, l’objet de la contestation et l’objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés sont certes compris dans l’objet de la contestation, mais non pas dans l’objet du litige (ATF 125 V 413 consid. 1b et 2 ; 122 V 242 consid 2a et les références).

Les questions qui – bien qu’elles soient visées par la décision administrative, et fassent ainsi partie de l’objet de la contestation – ne sont plus litigieuses, d’après les conclusions du recours, et qui ne sont donc pas comprises dans l’objet du litige, ne sont examinées par le juge que s’il existe un rapport de connexité étroit entre les points non contestés et l’objet du litige (ATF 122 V 242 consid. 2a et les références). Par ailleurs, l’autorité de recours n’examine les questions formant l’objet du litige, mais qui ne sont pas contestées, que s’il existe des motifs suffisants de le faire au regard des allégations des parties ou d’indices ressortant du dossier (ATF 125 V 413 consid. 2c).

6.2 En l'espèce, il est rappelé que la décision litigieuse du 15 mai 2023 nie le droit à une rente AI de la recourante. L'intimé a retenu une atteinte invalidante dès le
14 août 2021 et, en se référant à l'enquête économique sur le ménage du
9 février 2023, un empêchement de 22% dans l'accomplissement de ses travaux habituels en tenant compte d'une exigibilité de ses proches de 56.6%. Le taux étant inférieur à 40%, il ne donnait pas droit à une rente.

Désormais, l'intimé reconnaît à la recourante un droit à une rente au taux de 43% dès le mois de décembre 2022, valant par conséquent admission partielle du recours et annulation de sa décision du 15 mai 2023.

La recourante requiert l'octroi d'une rente tenant compte d'un taux d'invalidité à tout le moins de 70% dès le 1er août 2022.

Par conséquent, au regard de la décision attaquée et des conclusions des parties, le litige ne porte plus que sur la quotité de la rente d'invalidité et la date du début du droit à la rente.

7.              

7.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI).

Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).

Selon l'art. 7 al. 1 LAI, l'assuré doit entreprendre tout ce qui peut être raisonnablement exigé de lui pour réduire la durée et l'étendue de l'incapacité de travail (art. 6 LPGA) et pour empêcher la survenance d'une invalidité (art. 8 LPGA). L'art. 7 al. 2 première phrase ajoute que l'assuré doit participer activement à la mise en œuvre de toutes les mesures raisonnablement exigibles contribuant au maintien de son emploi actuel, à sa réadaptation à la vie professionnelle ou à l'exercice d'une activité comparable (travaux habituels).

Par travaux habituels visés à l'art. 7 al. 2 LAI, des assurés travaillant dans le ménage, il faut entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l'assistance apportés aux proches (art. 27 al. 1 RAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001
consid. 1).

7.2 En vertu de l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes : sa capacité de gain ou sa capacité d'accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles (let. a) ; il a présenté une incapacité de travail
(art. 6 LPGA) d'au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable (let. b) ; au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (let. c).

Selon l'art. 28a al. 2 LAI, le taux d’invalidité de l’assuré qui n’exerce pas d’activité lucrative, qui accomplit ses travaux habituels et dont on ne peut raisonnablement exiger qu’il entreprenne une activité lucrative est évalué, en dérogation à l’art. 16 LPGA, en fonction de son incapacité à accomplir ses travaux habituels.

Aux termes de l'art. 28b LAI, la quotité de la rente est fixée en pourcentage d'une rente entière (al. 1). Pour un taux d'invalidité compris entre 50 et 69%, la quotité de la rente correspond au taux d'invalidité (al. 2). Pour un taux d'invalidité supérieur ou égal à 70%, l'assuré a droit à une rente entière (al. 3). L'al. 4 dispose les quotités de la rente pour les taux d'invalidité inférieurs à 50%.

L'art. 29 LAI prévoit que le droit à la rente prend naissance au plus tôt à l'échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA, mais pas avant le mois qui suit le 18e anniversaire de l’assuré (al. 1). La rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance (al. 3).

Selon l'art. 69 RAI, l’office AI examine, au besoin en liaison avec la caisse de compensation compétente en vertu de l’art. 44, si l’assuré remplit les conditions de la demande de droit aux prestations de l'assurance (al. 1). Si ces conditions sont remplies, l’office AI réunit les pièces nécessaires, en particulier sur l’état de santé du requérant, son activité, sa capacité de travail et son aptitude à être réadapté, ainsi que sur l’indication de mesures déterminées de réadaptation. Des rapports ou des renseignements, des expertises ou une instruction sur place peuvent être exigés ou effectués ; il peut être fait appel aux spécialistes de l’aide publique ou privée aux invalides (al. 2).

7.3 Chez les assurés travaillant dans le ménage, le degré d'invalidité se détermine, en règle générale, au moyen d'une enquête économique sur place, alors que l'incapacité de travail correspond à la diminution - attestée médicalement - du rendement fonctionnel dans l'accomplissement des travaux habituels (ATF 130 V 97 consid. 3.3).

7.3.1 L'évaluation de l'invalidité des assurés pour la part qu'ils consacrent à leurs travaux habituels nécessite l'établissement d'une liste des activités que la personne assurée exerçait avant la survenance de son invalidité, ou qu'elle exercerait sans elle, qu'il y a lieu de comparer ensuite à l'ensemble des tâches que l'on peut encore raisonnablement exiger d'elle, malgré son invalidité, après d'éventuelles mesures de réadaptation. Pour ce faire, l'administration procède à une enquête sur place et fixe l'ampleur de la limitation dans chaque domaine entrant en considération. En vertu du principe général de l'obligation de diminuer le dommage, l'assuré qui n'accomplit plus que difficilement ou avec un investissement temporel beaucoup plus important certains travaux ménagers en raison de son handicap doit en premier lieu organiser son travail et demander l'aide de ses proches dans une mesure convenable. La jurisprudence pose comme critère que l'aide ne saurait constituer une charge excessive du seul fait qu'elle va au-delà du soutien que l'on peut attendre de manière habituelle sans atteinte à la santé. En ce sens, la reconnaissance d'une atteinte à la santé invalidante n'entre en ligne de compte que dans la mesure où les tâches qui ne peuvent plus être accomplies le sont par des tiers contre rémunération ou par des proches et qu'elles constituent à l'égard de ces derniers un manque à gagner ou une charge disproportionnée (ATF 133 V 504 consid. 4.2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_191/2021 du
25 novembre 2021 consid. 6.2.2 et les références).

Selon la jurisprudence, une enquête ménagère effectuée au domicile de la personne assurée constitue en règle générale une base appropriée et suffisante pour évaluer les empêchements dans l’accomplissement des travaux habituels. En ce qui concerne la valeur probante d’un tel rapport d’enquête, il est essentiel qu’il ait été élaboré par une personne qualifiée qui a connaissance de la situation locale et spatiale, ainsi que des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Il y a par ailleurs lieu de tenir compte des indications de l'assuré et de consigner dans le rapport les éventuelles opinions divergentes des participants. Enfin, le texte du rapport doit apparaître plausible, être motivé et rédigé de manière suffisamment détaillée par rapport aux différentes limitations, de même qu'il doit correspondre aux indications relevées sur place. Si toutes ces conditions sont réunies, le rapport d’enquête a pleine valeur probante. Lorsque le rapport constitue une base fiable de décision dans le sens précité, le juge n’intervient pas dans l’appréciation de l’auteur du rapport sauf lorsqu’il existe des erreurs d’estimation que l’on peut clairement constater ou des indices laissant apparaître une inexactitude dans les résultats de l’enquête (ATF 140 V 543 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_625/2017 du 26 mars 2018 consid. 6.2).

En présence de troubles d’ordre psychique, et en cas de divergences entre les résultats de l’enquête économique sur le ménage et les constatations d’ordre médical relatives à la capacité d’accomplir les travaux habituels, celles-ci ont, en règle générale, plus de poids que l’enquête à domicile. Une telle priorité de principe est justifiée par le fait qu’il est souvent difficile pour la personne chargée de l’enquête à domicile de reconnaître et d’apprécier l’ampleur de l’atteinte psychique et les empêchements qui en résultent (arrêt du Tribunal fédéral 9C_657/2021 du 22 novembre 2022 consid. 5.1 et la référence).

7.3.2 Il existe dans l'assurance-invalidité – ainsi que dans les autres assurances sociales – un principe général selon lequel l'assuré qui demande des prestations doit d'abord entreprendre tout ce que l'on peut raisonnablement attendre de lui pour atténuer les conséquences de son invalidité (ATF 141 V 642 consid. 4.3.2 et les références ; 140 V 267 consid. 5.2.1 et les références). Dans le cas d'une personne rencontrant des difficultés à accomplir ses travaux ménagers à cause de son handicap, le principe évoqué se concrétise notamment par l'obligation d'organiser son travail et de solliciter l'aide des membres de la famille dans une mesure convenable. Un empêchement dû à l'invalidité ne peut être admis chez les personnes qui consacrent leur temps aux activités ménagères que dans la mesure où les tâches qui ne peuvent plus être accomplies sont exécutées par des tiers contre rémunération ou par des proches qui encourent de ce fait une perte de gain démontrée ou subissent une charge excessive. L'aide apportée par les membres de la famille à prendre en considération dans l'évaluation de l'invalidité de l'assuré au foyer va plus loin que celle à laquelle on peut s'attendre sans atteinte à la santé. Il s'agit en particulier de se demander comment se comporterait une famille raisonnable, si aucune prestation d'assurance ne devait être octroyée (ATF 133 V 504 consid. 4.2 et les références). La jurisprudence ne pose pas de grandeur limite au-delà de laquelle l'aide des membres de la famille ne serait plus possible. L'aide exigible de tiers ne doit cependant pas devenir excessive ou disproportionnée (ATF 141 V 642 consid. 4.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_248/2022 du 25 avril 2023 consid. 5.3.1 et les références).

Toutefois, la jurisprudence ne répercute pas sur un membre de la famille l'accomplissement de certaines activités ménagères, avec la conséquence qu'il faudrait se demander pour chaque empêchement si cette personne entre effectivement en ligne de compte pour l'exécuter en remplacement. Au contraire, la possibilité pour la personne assurée d'obtenir concrètement de l'aide de la part d'un tiers n'est pas décisive dans le cadre de l'évaluation de son obligation de réduire le dommage. Ce qui est déterminant, c'est le point de savoir comment se comporterait une cellule familiale raisonnable, soumise à la même réalité sociale, si elle ne pouvait pas s'attendre à recevoir des prestations d'assurance. Dans le cadre de son obligation de réduire le dommage (art. 7 al. 1 LAI), la personne qui requiert des prestations de l'assurance-invalidité doit par conséquent se laisser opposer le fait que des tiers - par exemple son conjoint (art. 159 al. 2 et 3 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 [CC ‑ RS 210]) ou ses enfants (art. 272 CC) - sont censés remplir les devoirs qui leur incombent en vertu du droit de la famille (arrêt du Tribunal fédéral 9C_248/2022 du 25 avril 2023 consid. 5.3.2 et les références).

Le Tribunal fédéral a récemment confirmé qu'il n'y a pas de motif de revenir sur le principe de l'obligation de diminuer le dommage tel que dégagé par la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 9C_248/2022 du 25 avril 2023 consid. 5.3 et les références).

Toutefois, on ne saurait attendre d'un assuré qu'il ait recours à l'aide de ses enfants en les pénalisant dans une mesure déraisonnable dans l'exercice de leur activité professionnelle et dans leur vie privée ou qu'il fasse appel à l'aide de son conjoint lorsque celui-ci souffre de troubles fondant l'octroi d'une rente entière d'invalidité (arrêts du Tribunal fédéral 9C_934/2010 du 7 juillet 2011 consid. 4.3 ;
Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité, 2018, n. 109 - 110 ad art. 28a LAI). En outre, le fait que le conjoint de l'assuré qui tient le ménage soit au chômage ne conduit pas à une extension de l'obligation de réduire le dommage en raison de sa collaboration à la tenue du ménage, car il s'agit d'une considération étrangère à l'invalidité. Autrement, l'assuré qui tient le ménage et dont le conjoint est involontairement au chômage se trouverait défavorisé par rapport à celui dont le conjoint exerce une activité lucrative (Michel VALTERIO, op. cit., n. 109 - 110 ad art. 28a LAI).

8.              

8.1 Selon l'art. 29 al. 1 LPGA, celui qui fait valoir son droit à des prestations doit s'annoncer à l'assureur compétent, dans la forme prescrite pour l'assurance sociale concernée.

L'art. 65 al. 1 RAI indique que celui qui veut exercer son droit aux prestations de l'assurance doit présenter sa demande sur formule officielle.

En principe, les prestations d'assurance sociale sont servies à la demande de l'ayant droit : celui qui ne s'annonce pas à l'assurance n'obtient pas de prestations, même si le droit à celles-ci découle directement de la loi (ATF 101 V 261 consid. 2).

8.2 Selon la jurisprudence, en s'annonçant à l'assurance-invalidité, l'assuré sauvegarde en règle générale tous ses droits à des prestations d'assurance, même s'il n'en précise pas la nature exacte, l'annonce comprenant toutes les prétentions qui, de bonne foi, sont liées à la survenance du risque annoncé. Cette règle ne vaut cependant pas pour les prestations qui n'ont aucun rapport avec les indications fournies par le requérant et à propos desquelles il n'existe au dossier aucun indice permettant de croire qu'elles pourraient entrer en considération. L'obligation de l'administration d'examiner le cas s'étend seulement aux prestations qui, sur le vu des faits et des pièces du dossier, peuvent entrer normalement en ligne de compte. Lorsque par la suite l'assuré fait valoir qu'il a encore droit à une autre prestation, il y a lieu d'examiner l'ensemble des circonstances du cas particulier, au regard du principe de la bonne foi, si l'imprécise annonce antérieure comprend également la prétention que l'assuré fait valoir ultérieurement (ATF 121 V 195 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_165/2013 du 8 juillet 2013 consid. 4.4).

8.3 Dans le cas d'une assurée qui avait demandé des mesures médicales et une rente, le Tribunal fédéral a estimé que l'administration aurait également dû examiner le droit à une allocation d'impotent dans la mesure où il ressortait du rapport d'un médecin que l'assurée avait besoin de l'aide d'autrui pour s'habiller, prendre ses repas et faire sa toilette (RCC 1976 p. 45ss).

Dans un autre arrêt, le Tribunal fédéral a retenu qu'une demande de prestations de l'AI tendant à l'octroi de mesures médicales déposée par un assuré correspondait à une annonce comprenant toutes les prétentions qui, de bonne foi, étaient liées à la survenance du risque annoncé. En effet, les rapports médicaux figurant au dossier indiquaient que l'assuré nécessitait une assistance et une surveillance personnelle découlant de son handicap et entraînant des frais supplémentaires par rapport à une personne non handicapée du même âge. Le Tribunal fédéral a jugé que cet élément représentait un indice qui permettait de croire que la prestation en cause pouvait alors entrer en considération et obligeait l'intimé à instruire d'office la question d'une éventuelle impotence de l'assuré. Toutefois, le Tribunal fédéral a précisé qu'il ne pouvait être reproché à l'administration de ne pas avoir instruit la question du droit à l'allocation pour impotent sur la base d'un rapport médical, qui faisait état de l'existence d'une assistance et d'une surveillance personnelle permanente accrue trois mois après l'apparition de l'atteinte à la santé, celui-ci ne permettant pas encore d'admettre le caractère durable du besoin d'aide d'autrui (arrêt du Tribunal fédéral 9C_92/2008 du 24 novembre 2008 consid. 4.3).

9.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ;
125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

10.          

En l'espèce, il est rappelé que, dans sa décision litigieuse, l'intimé a tout d'abord nié le droit à une rente de la recourante, dans la mesure où l'enquête ménagère avait retenu un empêchement de 78.6% dans la sphère ménagère et une exigibilité des proches de 56.6%, soit un empêchement pondéré à 22% dans l'accomplissement de ses travaux habituels. Puis, dans le cadre de la présente procédure, l'intimé a modifié son appréciation et a reconnu à la recourante le droit à une rente de 43% à compter du 1er décembre 2022, tenant compte d'un empêchement de 100% dans la sphère ménagère et d'une exigibilité des proches de 56.6%.

10.1 Le droit à la rente de la recourante étant admis sur le principe, il convient tout d'abord de fixer la date du début de ce droit.

L'intimé a conclu que son droit s'ouvrait à compter du 1er décembre 2022, la recourante ayant déposé sa demande de prestations AI le 15 juin 2022.

Pour sa part, la recourante estime que dans la mesure où elle a déposé une demande de moyens auxiliaires le 1er décembre 2021 en invoquant un carcinome présent depuis le 14 août 2021, l'intimé aurait dû étendre son instruction au droit à la rente, un cancer justifiant une incapacité totale de travail. Ainsi, il doit être retenu que son droit à la rente s'ouvre à compter du 1er août 2022.

10.1.1 Il convient de déterminer si le dossier constitué antérieurement à la demande de prestations du 15 juin 2022, soit lors de la demande de mesures auxiliaires du 1er décembre 2021, comportait des indications médicales permettant à l'intimé de se rendre compte que la recourante se trouvait en incapacité de travailler ou d'effectuer ses tâches ménagères.

La demande du 1er décembre 2021 se rapporte uniquement à l'octroi d'une perruque et de rubans, et ne comporte pas d'éléments pouvant laisser suggérer que la recourante se trouvait en incapacité de travailler ou d'exercer ses activités ménagères, l’intéressée n'ayant en outre pas indiqué qu'elle présentait une telle limitation. Il en va de même du rapport médical du 21 décembre 2021 qui ne fait état d'aucun empêchement durable de la recourante ou de difficultés à exécuter certaines tâches. L'unique mention d'une atteinte d'un cancer ORL lors du dépôt d'une demande de moyens auxiliaires ne justifie pas que l'intimé instruise d'office la question d'un droit à la rente. En effet, le fait d'être atteinte d'un cancer n’implique pas nécessairement que la personne souffrante se trouve en incapacité de travailler ou d'effectuer ses tâches ménagères. Ainsi, au moment du dépôt de la demande de moyens auxiliaires, l'intimé n'était en possession d'aucun indice permettant de penser que l'octroi d'une rente pourrait entrer en considération. Il n’était pas tenu d’instruire d'office la question d'une éventuelle incapacité de travail.

10.1.2 Partant, la demande de rente ayant été déposée le 15 juin 2022, le droit à la rente a pris naissance le 1er décembre 2022 (art. 29 al. 1 LAI et 28 al. 1 let. b LAI).

10.2 Il convient ensuite de fixer le degré d'invalidité de la recourante.

10.2.1 Dans la mesure où les parties s'accordent à considérer que le taux d'empêchement de la recourante est de 100% dans la sphère ménagère sans compter l'aide des proches, mais que la recourante conteste l'enquête ménagère du 9 février 2023 sur laquelle l'intimé s'est fondé pour fixer une exigibilité de ses proches à hauteur de 56.6%, il convient tout d'abord d'examiner si le rapport d'enquête ménagère du 9 février 2023 peut se voir reconnaître valeur probante.

L'intimé soutient que tel serait le cas, dans la mesure où l'enquête a été effectuée par une personne spécialisée dans ce genre d'examens, au domicile de la recourante. L'enquêtrice avait développé de manière circonstanciée les différentes rubriques faisant partie de son mandat, tenu compte de l'ensemble des éléments médicaux du dossier et connaissait parfaitement les limitations fonctionnelles découlant des atteintes à la santé de la recourante. L'enquête reposait dans une large mesure sur les comportements, ainsi que les déclarations de la recourante. Celle-ci remplissait donc toutes les exigences auxquelles la jurisprudence soumettait la valeur probante d'un tel document, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de s'en écarter.

Quant à la recourante, elle estime que l'enquête ne saurait se voir attribuer valeur probante, dans la mesure où elle ne reposait pas sur ses déclarations, que l'enquêtrice n'avait pas visité la maison et qu'il n'a pas été tenu compte de toutes ses atteintes et limitations fonctionnelles. En outre, l'enquêtrice n'avait pas pris en considération l'état de santé de son époux et l'emploi du temps de son fils cadet en études à la HEG pour fixer l'exigibilité de ses proches.

La chambre de céans constate que, contrairement à ce que prétend l'intimé, le contenu du rapport d'enquête économique sur le ménage n'apparaît pas plausible et motivé au regard des compléments apportés par la recourante en cours de procédure, ainsi que des avis du SMR produits ultérieurement à l'enquête.

En premier lieu, l'enquêtrice n'a pas tenu compte de toutes les atteintes et limitations de la recourante pourtant documentées par de nombreux documents médicaux. Singulièrement, il ne ressort pas du rapport d'enquête les multiples complications survenues après le traitement de radio-chimiothérapie, ayant nécessité de nombreuses périodes d'hospitalisations et de convalescence pour lesquelles le SMR a retenu une incapacité totale d'effectuer toute tâche ménagère (cf. avis SMR du 7 juillet 2023). L'intimé lui-même s'est écarté du taux d'empêchement de 78.6% établi par l'enquêtrice, retenant plutôt un taux de 100%. On ne saurait donc conclure que l'enquêtrice a pris en considération toutes les atteintes à la santé de la recourante et ses limitations afin d'évaluer ses empêchements ménagers.

En second lieu, s'agissant de l'aide apportée par la famille, l'enquêtrice a indiqué que l'époux de la recourante avait déposé une demande de prestations en
avril 2021 pour un burn-out ayant abouti à une rente entière à 100% du
1er novembre 2021 au 30 avril 2022 et qu'il se trouvait en bonne santé au moment de l'enquête, de sorte qu'il n'existait aucun facteur susceptible de réduire l'exigibilité.

La chambre de céans constate toutefois, au vu des attestations médicales versées au dossier, que l'époux ne se trouvait pas en bonne santé au moment de l'enquête ménagère. En effet, suite à une chute du 8 décembre 2022, il s'était heurté la région cervicale et l'épaule gauche, et avait subi une déchirure partielle de ligaments inter épineux. Depuis cet incident, il présentait des douleurs cervicales et de l'épaule gauche avec un handicap fonctionnel, en particulier pour l'habillage (cf. rapports médicaux des 8 décembre 2022 et 22 février 2023 du service de radiologie de l'Hôpital de la Tour ; rapport médical du 13 mars 2022 du Dr F______). Les mouvements répétés et le port des charges lourdes ne pouvaient plus être effectués (cf. courriel du 20 juillet 2023 du Dr C______). Le médecin-conseil de son employeur a par ailleurs retenu une incapacité de travail de 100% depuis le 8 décembre 2022. Or, l'enquêtrice n'a pas relevé dans son rapport ces limitations qui peuvent potentiellement restreindre la possibilité d'assistance de l’intéressé. Bien que, conformément à la jurisprudence, l'aide apportée par les membres de la famille à prendre en considération dans l'évaluation de l'invalidité de la personne assurée va plus loin que celle à laquelle on peut s'attendre sans atteinte à la santé, il convient de relever que dans le cas de figure où l'époux aidant présente des limitations fonctionnelles et des atteintes invalidantes, il convient d'en tenir compte. Or, force est de constater que les atteintes précitées de l'époux de la recourante n'ont pas été mentionnées par l'enquêtrice, ni prises en considération dans son rapport.

Il sied également de préciser qu'il ne saurait être attendu du fils cadet de la recourante qu'il étende l'assistance pour l'ensemble des tâches ménagères nécessaires. Dans la mesure où la maison est composée de sept pièces et deux salles de bains sur trois étages avec un studio et une mezzanine et qu'il se trouve en études, l'extension de son aide pour couvrir l'ensemble des tâches ménagères serait considérée comme excessive et déraisonnable.

Dès lors que l'enquêtrice n'a pas tenu compte de toutes les atteintes et limitations de la recourante pour l'établissement de son empêchement, ni du fait que son époux présentait des limitations pouvant entraver l'accomplissement de certaines tâches ménagères, l'on ne saurait reconnaître pleine valeur probante à l'enquête effectuée le 9 février 2023.

Partant, au vu des éléments susmentionnés, l'intimé ne pouvait pas se baser sur cette enquête pour retenir une exigibilité des proches de 56.6% et fixer l'invalidité de la recourante à 43%.

10.2.2 Il reste à examiner s'il est possible de quantifier le taux d'exigibilité des proches.

Dans la mesure où l'enquête ménagère n'a pas pris en considération les limitations du mari de la recourante et qu'il n'est pas possible de déterminer sur la seule base des rapports médicaux produits dans la présente procédure si celui-ci peut effectuer certaines tâches ménagères, la chambre de céans n'a d'autres choix que de renvoyer le dossier à l'intimé pour instruire ce point.

10.3 Par conséquent, la chambre de céans n'étant pas en mesure de fixer le degré d'invalidité de la recourante, la cause sera renvoyée à l'intimé pour qu'il éclaircisse ce point, singulièrement le taux d'exigibilité des proches de la recourante, étant rappelé que le taux d’empêchement de la recourante n’est plus litigieux.

11.         Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis, la décision litigieuse annulée et la cause sera renvoyée à l'intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision.

Pour le surplus, la recourante obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 2'000.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens
(art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émolument et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA – E 5 10.03]).

Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision de l'intimé du 15 mai 2023.

4.        Renvoie la cause à l'intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision dans le sens des considérants.

5.        Condamne l'intimé à verser à la recourante une indemnité de CHF 2'000.- à titre de dépens.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Joanna JODRY

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le