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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4137/2023

ATAS/259/2024 du 22.04.2024 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4137/2023 ATAS/259/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 avril 2024

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

représenté par Me Philippe CURRAT, avocat

 

recourant

contre

 

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’intéressé ou le recourant), né
le ______ 1964, originaire du Maroc, est arrivé en Suisse le 8 juillet 1994.
Il ressort des informations du registre de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) qu’à la suite de son mariage, le 8 juillet 1994, avec une ressortissante suisse, l’intéressé a bénéficié d’une autorisation de séjour au titre du regroupement familial, qui n’a jamais été renouvelée à son échéance, le 7 juillet 1998. À partir du 1er janvier 1998, l’intéressé a vécu séparé de son épouse mais a maintenu sa résidence dans le canton Genève, y compris après son divorce (en avril 1999) et un nouveau mariage, également dissous par jugement, ayant duré de septembre 2007 à novembre 2011.

b. Condamné le 13 septembre 2000 par la Cour d’assises à une peine de réclusion assortie d’une expulsion du territoire suisse, l’intéressé a bénéficié, le 7 février 2003, d’une suspension de l’exécution de sa peine au profit d’un traitement en milieu hospitalier.

c. Par décision du 3 octobre 2006, la Commission de libération conditionnelle a ordonné la libération conditionnelle de l’intéressé, la continuation de sa prise en charge thérapeutique au Maroc ainsi que l’exécution immédiate de la mesure d’expulsion du territoire suisse.

d. Par arrêt du 9 janvier 2007, le Tribunal administratif a annulé cette décision
en tant qu’elle ordonnait l’exécution immédiate de l’expulsion de l’intéressé du territoire suisse.

e. De 2007 à 2015, l’intéressé a travaillé en qualité de monteur-électricien.

f. Par décision du 18 janvier 2019, l’office de l’assurance-invalidité a octroyé à l’intéressé une rente entière d’invalidité avec effet au 1er décembre 2015.

g. En date du 5 juillet 2019, l’intéressé a transmis une demande de prestations complémentaires (ci-après : PC) au Service des prestations complémentaires
(ci-après : le SPC ou l’intimé), indiquant que son arrivée en Suisse remontait
au 8 juillet 1994. Son permis de séjour, de type B, était « en cours de renouvellement ».

B. a. Par décision du 12 juillet 2019, le SPC a refusé d’entrer en matière sur la demande, motif pris qu’il n’était pas titulaire d’une autorisation de séjour dans le canton de Genève.

b. Le 24 août 2023, l’intéressé a déposé une nouvelle demande de PC auprès du SPC. Il y a joint notamment :

-          un « avis de prochaine clôture de l’instruction », du 12 avril 2023, par lequel le Ministère public (ci-après : MP) l’informait de son intention de rendre une ordonnance de classement partiel concernant les infractions consistant dans le séjour (du 4 novembre 2015 au 2 mai 2016) et l’exercice d’une activité lucrative (du 4 novembre 2015 au 31 décembre 2015) sur le territoire suisse sans être au bénéfice des autorisations nécessaires. Pour le surplus, le MP entendait rendre une ordonnance pénale pour la période de séjour illégal non atteinte de prescription ;

-          une copie de son certificat d’assurance 2023 pour l’assurance obligatoire de soins selon la loi sur l’assurance-maladie ;

-          des factures d’acomptes de cotisations personnelles AVS de l’Office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS) pour l’année 2023 ;

-          une copie du contrat de bail de son appartement.

c. Par décision du 20 septembre 2023, le SPC a rejeté cette nouvelle demande en indiquant que le droit aux PC dépendait d’un domicile civil et d’une résidence habituelle en Suisse.

d. Le 29 septembre 2023, l’intéressé a formé opposition à cette décision et invité le SPC à reconsidérer sa position, compte tenu des nombreux éléments qui attestaient de son domicile en Suisse.

L’intéressé a également produit :

-          la première page d’un courrier du 12 avril 2022 de l’OCPM, adressé à son mandataire (Caritas Genève), rappelant que par décision du 7 juin 2007, l’OCPM avait renoncé à prononcer l’expulsion administrative de l’intéressé, tout en refusant de lui délivrer une autorisation de séjour. Aussi s’était-il vu impartir un délai au 17 août 2017 pour quitter la Suisse. Cette décision avait été confirmée sur recours, d’abord par la Commission cantonale de recours, puis par le Tribunal fédéral, le 20 octobre 2008 (arrêt du Tribunal fédéral 2C_397/2008 du 20 octobre 2008). La décision du 7 juin 2007 était par conséquent définitive et exécutoire. Depuis l’entrée en force de la décision du 7 juin 2007, quatre demandes de reconsidération avaient donné lieu à autant de décisions de non-entrée en matière les 13 août 2013, 4 mars 2016, 18 octobre 2018 et 30 juin 2020, toutes entrées en force. Des demandes d’attestation en vue de mariage avaient par ailleurs été refusées par décision des 13 août 2013 et 4 mars 2016, également entrées en force. L’OCPM considérait « par conséquent la nouvelle requête déposée comme une cinquième demande de reconsidération [deuxième page manquante] » ;

-          divers documents attestant d’un suivi médical en 2023;

-          une attestation de subside d’assurance-maladie 2023 ;

-          des factures de télécommunications et des Services industriels de Genève.

e. Par décision du 9 novembre 2023, le SPC a rejeté l’opposition.

Les documents produits attestaient d’un domicile et d’une résidence à Genève. Cependant, l’intéressé n’avait pas résidé de manière ininterrompue en Suisse en étant au bénéfice d’un permis de séjour valable pendant les dix années précédant immédiatement le dépôt de sa demande de PC.

C. a. Le 11 décembre 2023, l’intéressé, représenté par un avocat, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) d’un recours contre cette décision, concluant, principalement, à son annulation, à l’octroi de PC et, subsidiairement, au renvoi de la cause au SPC pour qu’il rende une décision au sens des considérants, le tout sous suite de frais et dépens.

À l’appui de sa position, il a fait valoir que l’intimé ne contestait pas qu’il remplissait les conditions du domicile et de la résidence habituelle en Suisse.
Il a également souligné que l’obtention d’une autorisation de séjour n’était pas un critère décisif pour déterminer s’il s’était valablement constitué un domicile. Même si l’OCPM persistait à ne pas lui délivrer une autorisation de séjour, il n’en demeurait pas moins qu’il était dans l’impossibilité de quitter la Suisse. En effet, l’exécution de son expulsion était bloquée car il n’était toujours pas reconnu par les autorités marocaines. En outre, il restait soumis à une mesure ambulatoire justifiant, par là même, sa présence sur le territoire suisse. Sachant qu’il était au bénéfice d’une rente d’invalidité complète (avec effet au 1er décembre 2015) qui ne lui permettait pas d’assumer ses charges courantes en Suisse, il se justifiait que des PC lui soient octroyées.

Afin de corroborer ses allégations concernant l’impossibilité de quitter la Suisse et le maintien de la mesure ambulatoire, le recourant a produit :

-          un jugement n° PM/1294/2021, rendu le 3 février 2022 par le Tribunal d’application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM), ordonnant « la prolongation du traitement ambulatoire pour une durée de trois ans, soit jusqu’au 5 février 2025, sans préjudice des contrôles annuels », motivé ainsi : même si le MP et le Service d’application des peines et mesures (ci-après : SAPEM) sollicitaient la levée du traitement ambulatoire – consistant en un suivi psychiatrique et un traitement médicamenteux prodigués par le docteur B______, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie – en raison de son succès, et bien que l’intéressé n’ait plus commis d’infraction depuis 2003, il n’en demeurait pas moins que la mesure restait nécessaire afin de prévenir une éventuelle récidive et qu’un suivi volontaire en cas de levée de la mesure ne serait pour l’instant par garanti ;

-          un jugement n° PM 17/2023 du 30 janvier 2023 du TAPEM, ordonnant la poursuite du traitement ambulatoire prononcé à l’encontre de [l’intéressé] jusqu’au prochain contrôle annuel et rappelant qu’en l’état, la mesure était valable jusqu’au 5 février 2025. À l’appui de la poursuite de la mesure, le TAPEM a estimé que celle-ci apparaissait encore utile pour prévenir une éventuelle récidive.

b. Par réponse du 5 janvier 2024, l’intimé a conclu au rejet du recours en faisant valoir que l’absence de permis de séjour faisait obstacle à l’octroi de PC et qu’en tout état de cause, il ressortait du courrier du 12 avril 2022 de l’OCPM (produit par l’intéressé à l’appui de son opposition à la décision 20 septembre 2023) que la décision de refus d’octroi d’une autorisation de séjour du 7 juin 2007 de l’OCPM avait été confirmée, sur recours, à la fois par la Commission cantonale de recours et le Tribunal fédéral et qu’elle était ainsi définitive et exécutoire.

c. Le 8 janvier 2024, la chambre de céans a imparti un délai au recourant pour faire parvenir sa réplique.

d. Le recourant ne s’étant plus manifesté à ce jour, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC – RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l’art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l’art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC – J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

1.3 La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA –
E 5 10).

1.4 Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC – J 4 20] ; art. 43 LPCC).

2.             Le litige porte sur le droit du recourant à des PC fédérales (ci-après : PCF) et cantonales (ci-après : PCC), plus particulièrement sur le point de savoir si celui-ci a résidé légalement et de manière ininterrompue en Suisse au cours des dix ans précédant immédiatement le dépôt de sa demande de PC.

Il sied de préciser à titre liminaire, qu’au vu du dépôt de la demande le 24 août 2023, la question litigieuse doit être tranchée au regard des dispositions en vigueur à cette époque et jusqu’à la décision sur opposition du 9 novembre 2023 (ATF 130 V 445 consid. 1.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_38/2020 du 20 octobre 2020 consid. 5). Il s’agit plus précisément des règles du droit interne exposées ci-après, vu la nationalité marocaine du recourant. L’Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres d’autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP –
RS 0.142.112.681) n’est pas applicable, ni d’ailleurs une autre convention internationale, la Suisse n’en ayant pas conclu avec le Maroc dans le domaine de la sécurité sociale.

3.              

3.1 Selon l’art. 4 al. 1 let. c LPC, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse ont droit à des prestations complémentaires dès lors qu’elles ont droit à une rente ou à une allocation pour impotent de l’assurance-invalidité ou perçoivent des indemnités journalières de l’assurance-invalidité sans interruption pendant six mois au moins.

Aux termes de l’art. 5 LPC, dans sa teneur en vigueur au 1er janvier 2023 (ici déterminante ; cf. ci-dessus : consid. 2), les étrangers n’ont droit à des prestations complémentaires que s’ils séjournent de manière légale en Suisse. Ils doivent y avoir résidé de manière ininterrompue pendant les dix années précédant immédiatement la date à laquelle ils demandent la prestation complémentaire (délai de carence) (al. 1). Pour les réfugiés et les apatrides, le délai de carence est de cinq ans (al. 2). Pour les étrangers qui auraient droit à une rente extraordinaire de l’AVS ou de l’AI en vertu d’une convention de sécurité sociale, le délai de carence est de cinq ans s’ils ont droit à une rente de l’AI ou qu’ils y auraient droit s’ils justifiaient de la durée de cotisation minimale requise à l’art. 36 al. 1 de la loi sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI – RS 831.20) (al. 3 let. a). Les étrangers qui ne sont ni des réfugiés ni des apatrides et qui ne sont pas visés à
l’al. 3 ont droit aux prestations complémentaires s’ils satisfont au délai de carence visé à l’al. 1 et remplissent une des conditions fixées à l’art. 4 al. 1 let. a, abis, ater, b ch. 2 et c, ou les conditions prévues à l’art. 4 al. 2 (al. 4).

D’après le Message du Conseil fédéral du 4 mars 2016 relatif à la modification
de l’art. 5 al. 1 LPC, en vigueur depuis le 1er juillet 2018, le rajout de la condition « s’ils séjournent de manière légale en Suisse » ne constitue qu’une reprise de la jurisprudence fédérale déjà ancienne (cf. arrêt du Tribunal fédéral des assurances
P 42/90 du 8 janvier 1992 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_423/2013 du 26 août 2014 consid. 4.2 et 4.3), selon laquelle les périodes au cours desquelles une personne a séjourné illégalement en Suisse ne sont pas prises en compte dans la détermination de la durée du séjour (FF 2016, p. 2891). Par ailleurs, cette modification vise à ce qu’il ne soit plus possible de percevoir des prestations complémentaires une fois qu’une autorisation de séjour ou de courte durée aura été révoquée (FF 2016, p. 2866), ce qui suppose qu’une telle autorisation avait été préalablement accordée (cfATAS/748/2017 du 31 août 2017 consid. 6e).

3.2 S’agissant des prestations complémentaires cantonales, l’art. 2 al. 1 LPCC dispose qu’ont droit aux prestations les personnes qui sont, notamment, au bénéfice d’une rente de l’AVS ou de l’AI, voire d’une allocation pour impotent (let. b) ou qui ont droit à des prestations complémentaires fédérales sans être au bénéfice d’une rente de l’assurance-vieillesse et survivants ou de l’assurance-invalidité (let. c). Ils doivent en plus répondre aux autres conditions de la loi
(let. d).

Quant aux requérants étrangers qui ne sont pas ressortissants d’un pays membre de l’Union européenne ou de l’Association européenne de libre-échange, il est nécessaire qu’ils aient été domiciliés dans le canton de Genève et y aient résidé effectivement, sans interruption, durant les dix années précédant la demande
(art. 2 al. 3 LPCC).

La chambre de céans a déjà eu l’occasion de préciser dans un arrêt de principe qu’à l’instar de ce que prévoit la jurisprudence fédérale pour les prestations complémentaires fédérales, seuls les séjours légaux doivent être pris en compte pour calculer le délai de carence cantonal (ATAS/748/2017 précité consid. 7a).

Dans un arrêt du 8 octobre 2018, la chambre de céans a également jugé que le dépôt d’une demande d’autorisation de séjour ne pouvait pas constituer le point
de départ du délai de carence (ATAS/891/2018 consid. 8d).

4.             En l’espèce, le recourant a rendu vraisemblable qu’il résidait en Suisse depuis plus de dix ans au moment du dépôt de sa demande de PC, le 24 août 2023. En revanche, il est établi qu’il n’était à aucun moment au bénéfice d’un titre de séjour pendant le délai de carence des art. 5 al. 1 LPC et 2 al. 3 LPCC et que cette situation était toujours d’actualité au moment de la décision litigieuse, dont la date fixe le pouvoir d’examen des autorités judiciaires (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_38/2020 du 20 octobre 2020 consid. 5). Aussi la décision litigieuse ne prête-t-elle pas le flanc à la critique en tant qu’elle retient que le recourant ne peut prétendre ni à des PCF ni à des PCC faute d’avoir résidé de manière autorisée en Suisse pendant les dix ans précédant immédiatement la date du dépôt de sa demande de PC.

4.1 Dans un premier moyen, le recourant fait valoir qu’une autorisation de séjour ou d’établissement de la part de la police des étrangers ne serait pas un critère décisif pour déterminer si une personne s’est valablement constitué un domicile au sens du droit civil.

Il est vrai que lorsqu’un travailleur étranger tombe malade ou est victime d’un accident en Suisse, le défaut de l’autorisation de travail exigée par le droit public n’exclut pas le droit à des prestations de l’assurance-invalidité fédérale
(cf. ATF 118 V 79). Cependant, la chambre de céans a déjà jugé dans l’arrêt de principe précité (ATAS/748/2017) que la principale justification avancée à l’appui de l’importance moindre accordée aux prescriptions de police des étrangers dans le domaine de l’assurance-invalidité est l’argument tiré d’un lien logique entre l’affiliation obligatoire (et, partant, le devoir de cotiser à l’AVS/AI) et le droit aux prestations. Selon la chambre de céans, c’est ce lien qui a amené le Tribunal fédéral à conclure qu’il n’est « pas contraire à l’ordre public suisse d’allouer des prestations sociales, en particulier de l’AI, à un ressortissant étranger entré illégalement en Suisse et néanmoins obligatoirement assuré en raison de l’exercice d’une activité lucrative ». Or, si l’assujettissement obligatoire à l’AVS et à l’AI est défini de façon très large et s’accompagne d’une couverture d’assurance et d’une obligation de cotiser à la charge des assurés et le cas échéant de leurs employeurs (art. 1a et 3 ss et 12 LAVS ; art. 1b et 2 LAI), les prestations complémentaires ne sont quant à elles pas financées par de telles cotisations d’assurance mais par le budget général de la Confédération et des cantons (art. 13 LPC ; art. 41 LPCC ; ATAS/748/2017 du 31 août 2017 consid. 6c). Par ailleurs, selon le Tribunal fédéral, le fait que l’étranger qui réside illégalement en Suisse ait, le cas échéant, versé des cotisations AVS pendant une période supérieure à celle du délai de carence de l’art. 5 al. 1 LPC ne saurait suppléer à l’exigence de la résidence légale en Suisse (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_423/2013 du 26 août 2014 consid. 4.2 et 4.3, cité in Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, p. 44, n. 2).

4.2 Dans un deuxième moyen, le recourant relève que bien qu’une autorisation de séjour lui soit « en permanence refusée » par l’OCPM, il ne se trouve pas moins dans l’impossibilité de quitter la Suisse et reste soumis à une mesure ambulatoire justifiant, par là même, sa présence sur le territoire suisse. Il précise que cette situation le met dans l’incapacité d’assumer ses charges courantes au moyen de sa seule rente d’invalidité.

Aux termes de l’art. 5 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst – RS 101), les organes de l’État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. Cela implique notamment qu’ils s’abstiennent d’adopter un comportement contradictoire ou abusif
(ATF 136 I 254 consid. 5.3 et les arrêts cités). De ce principe général découle notamment le droit fondamental du particulier à la protection de sa bonne foi
dans ses relations avec l’État, consacré à l’art. 9 in fine Cst. (ATF 138 I 49
consid. 8.3.1 et les arrêts cités). L’administration doit s’abstenir de tout comportement propre à tromper l’administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part. Le citoyen peut ainsi exiger de l’autorité qu’elle se conforme aux promesses ou assurances qu’elle lui a faites et ne trompe pas la confiance qu’il a légitimement placée dans celles-ci. De la même façon, le droit à la protection de la bonne foi peut aussi être invoqué en présence, simplement, d’un comportement de l’administration susceptible d’éveiller chez l’administré une attente ou une espérance légitime (ATF 129 II 381 consid. 7.1 et les références citées). Pour cela, les conditions cumulatives suivantes doivent être réunies : 1. il faut que l’autorité soit intervenue dans une situation concrète à l’égard d’une personne déterminée ; 2. qu’elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de sa compétence ; 3. que l’administré n’ait pas pu se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement obtenu ; 4. qu’il se soit fondé sur celui-ci pour prendre des dispositions qu’il ne saurait modifier sans subir un préjudice ; 5. que la loi n’ait pas changé depuis le moment où le renseignement a été donné (ATF 121 V 66 consid. 2a et les références ; Jacques DUBEY, Droits fondamentaux, 2018, vol. II, n. 3510 ss).

En l’occurrence, ce n’est pas parce que l’OCPM a refusé un permis de séjour au recourant, tout en renonçant à prononcer son expulsion administrative, que cette autorité lui aurait donné, par ce biais, l’assurance que son séjour, toléré de facto en Suisse, serait considéré comme légal dans la perspective d’un droit à des PC. Par ailleurs, l’OCPM n’aurait en tout état pas été compétent ni pu être tenu pour compétent pour donner une telle assurance, cette autorité n’étant pas un organe d’exécution de la législation en matière de PC (cf. ATAS/769/2021 du 21 juillet 2021 consid. 5d ; ATAS/891/2018 du 8 octobre 2018 consid. 8b)

5.             Compte tenu de ce qui précède, le recours est rejeté.

6.             Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

*****

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le