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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3310/2022

ATAS/138/2024 du 04.03.2024 ( PC ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3310/2022 ATAS/138/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 4 mars 2024

Chambre 6

 

En la cause

A______ représentée par Monsieur J______

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

b. A______ (ci-après : l’intéressée ou la recourante), née le ______ 1953, a requis avec son époux B______ le versement de prestations complémentaires le 29 septembre 2016. Elle est veuve depuis le 4 juillet 2019.

c. Selon décision du 20 janvier 2022, le SPC a recalculé provisoirement le droit aux prestations complémentaires de la bénéficiaire dès le 1er février 2022.

d. Par courrier du même jour, il a requis de la bénéficiaire la production de pièces, selon liste annexée, en vue de la révision périodique de son dossier, en lien avec les comptes bancaires ouverts en Suisse et à l’étranger pour les années 2018 à 2021, les rentes de prévoyance professionnelle en Suisse pour 2020 et 2021, de vieillesse et de veuve au Portugal pour les années 2019 à 2021, la valeur vénale du marché et locative du bien immobilier au Portugal pour les années 2019 à 2021, le loyer et les charges pour les mois de février et mars 2022 ainsi que le nombre de personnes partageant le logement.

e. Après un premier rappel envoyé le 21 février 2022, l’intéressée a, dès le lendemain, fait parvenir au service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) plusieurs des documents requis, notamment ceux en lien avec les comptes et rentes en Suisse, les déclarations fiscales 2018, 2019, 2020 et 2021 et, s’agissant des éléments financiers et immobiliers au Portugal, un extrait du compte
BPI 1______ pour la période du 19 novembre au 18 décembre 2019 et celui relatif à la même période pour 2020, ainsi qu’une déclaration du 22 février 2022 en portugais du « Centro nacional de pensoes » pour l’année 2021, indiquant également la pension mensuelle pour l’année 2022 de rente de retraite et de veuve.

f. Par courrier du 11 mars 2022 au SPC, l’intéressée a précisé qu’elle n’avait pas d’estimation par un architecte du bien immobilier au Portugal parce qu’elle ne souhaitait pas le vendre, puisqu’il avait été acheté par son époux dans le but de le donner à son petit-fils.

g. Le 21 mars 2022 elle a encore adressé au SPC son avis de taxation relatif à l’année 2021.

h. Le 23 mars 2022, le SPC a envoyé un nouveau rappel à l’intéressée, listant d’une part les documents déjà reçus et d’autre part, ceux faisant encore défaut. Un délai au 5 avril 2022 lui était imparti pour produire ces derniers, à défaut de quoi, le droit aux prestations complémentaires serait supprimé.

i. Le 8 avril 2022, le SPC a prolongé au 8 mai 2022 le délai octroyé pour produire les pièces manquantes, soit : un relevé du compte auprès de la banque BPI, mentionnant capital et intérêts aux 31 décembre 2018 et 31 décembre 2021 ; les justificatifs de rente de vieillesse et de veuve de la sécurité sociale étrangère pour 2019 et 2020, ainsi que les décisions précisant la date d’effet du droit à la rente ; une estimation officielle de la valeur du marché pour les années 2019, 2020 et 2021 du bien immobilier au Portugal ; une évaluation officielle de la valeur locative dudit bien pour ces mêmes années ; l’indication du nombre de personnes occupant le logement de l’intéressée.

L’attention de l’intéressée était attirée sur le fait qu’à défaut de production des pièces requises d’ici au 8 mai 2022, les prestations seraient supprimées.

j. Par courrier du 5 mai 2022, l’intéressée a fait parvenir au SPC une liasse de documents en portugais, soit apparemment :

-          un extrait internet du registre foncier du bien immobilier au Portugal du 3 mai 2022 faisant état d’une « valeur actuelle de l’actif » (valor patrimonial actual) de EUR 49'418.98 en 2019 et sur lequel l’intéressée apparaît comme propriétaire par moitié du bien avec C______, son fils ;

-          un courrier de la banque BPI concernant le compte 1______ du 18 janvier 2022 accompagné d’un extrait de compte pour la période du 21 décembre 2021 au 18 janvier 2022,

-          un courrier de la banque BPI concernant le compte 1______ du 17 décembre 2021, accompagné d’un extrait de compte pour la période du 22 novembre au 16 décembre 2021,

-          un courrier de la banque BPI concernant le compte 1______ du 18 décembre 2019, accompagné d’un extrait de compte pour la période du 3 au 18 décembre 2019,

-          deux attestations (« Declaraçao ») du Centro nacional de pensoes relatives aux montants des rentes de veuve et de vieillesse pour 2020 et 2021, le premier cité comportant une rubrique « montants versés avant 2020 ».

k. Par courrier du 16 mai 2022, le SPC a invité l’intéressée à lui faire parvenir, dans un délai au 15 juin 2022 :

-          les justificatifs des rentes de veuve et de vieillesse étrangère, et la décision précisant leur date d’effet,

-          les évaluations de la valeur locative du marché (estimation par un architecte, notaire ou agent immobilier) pour le bien immobilier au Portugal pour les années 2019, 2020 et 2021,

-          copies des relevés mentionnant capital et intérêts aux 31 décembre 2018, 2019, 2020 et 2021 des comptes :

o   2______ (2018 uniquement)

o   3______,

o   4______,

o   5______

-          le nombre de personnes partageant le logement.

Son attention était à nouveau attirée sur le fait que la non remise des justificatifs demandés dans le délai imparti entraînerait la suppression du droit aux prestations.

l. Par décision du 16 mai 2022, le SPC a recalculé provisoirement le droit aux prestations complémentaires de l’intéressée, dans l’attente de la remise des documents complémentaires.

m. Le 25 mai 2022, une amie de l’intéressée, Madame D______, a contacté le SPC pour le compte de celle-ci, indiquant qu’elle avait déjà transmis les pièces bancaires sollicitées.

n. Sur demande écrite de l’intéressée du 6 juin 2022, un rendez-vous a été fixé auprès du SPC en date du 30 juin 2022 pour clarifier la situation.

o. Selon la note de suite du rendez-vous du 30 juin 2022, l’intéressée s’était présentée accompagnée de Madame D______. Elle avait remis au SPC une attestation de la valeur du bien immobilier et de sa valeur locative. Il n’y avait pas eu d’estimation auparavant et elle ne pouvait pas en obtenir d’autres. Elle n’avait pas d’autre compte que celui pour lequel elle avait fourni les relevés (2______), les autres ayant éventuellement appartenu à son mari, décédé en 2019, et été clôturés ensuite. Elle allait s’adresser à la BPI pour obtenir une attestation à leur propos et la ferait suivre. Enfin, elle habitait seule dans son appartement.

p. Le 7 juillet 2022, l’intéressée a envoyé trois attestations de la BPI, datées du 5 juillet 2022, indiquant qu’il n’existait pas de comptes correspondant aux références 3______; 4______ ; 5______.

q. Par décision du 6 septembre 2022, le SPC a décidé de la suppression du droit aux prestations complémentaires de l’intéressée au 30 septembre 2022, vu qu’elle n’avait pas été donné suite à la demande de pièces complémentaires dans le délai imparti.

A. a. L’intéressée a formé opposition à l’encontre de cette décision le 16 septembre 2022. Elle avait toujours répondu aux demandes formulées par le gestionnaire qu’elle n’avait jamais pu rencontrer malgré sa demande de rendez-vous. Elle avait uniquement été reçue à l’accueil au mois de juin 2022, suite à quoi elle avait envoyé les derniers documents, dont elle adressait une nouvelle fois copie en tant que de besoin. Parmi les annexes figurait une évaluation par l’agence immobilière E_____ de la valeur de marché du bien immobilier (EUR 68'000.-) et de la valeur locative (EUR 350.-) du bien sis au Portugal.

b. Selon la note interne au dossier du SPC du 26 septembre 2022, manquaient encore au dossier les décisions de la sécurité sociale portugaise précisant la date d’effet du début des rentes de vieillesse et de veuve pour l’année 2019, ainsi que les relevés des comptes bancaires portugais 2______ (2018 uniquement), 3______, 4______, 5______. Des transferts ayant été faits depuis le compte de l’intéressée « via les trois comptes susmentionnés », le SPC s’interrogeait sur la titularité de ces comptes.

c. Le 27 septembre 2022, le SPC a rejeté l’opposition et confirmé la suppression du droit aux prestations au 30 septembre 2022. En effet, malgré cinq demandes de pièces (20 janvier, 21 février, 23 mars, 8 avril et 16 mai 2022) et un ultime délai au 15 juin 2022, manquaient encore au dossier, au jour de la décision sur opposition, les éléments suivants essentiels à la révision :

-          les décisions de la sécurité sociale portugaise, précisant la date du début du droit à la rente de vieillesse et de veuve ;

-          les justificatifs des montants respectifs de la rente de vieillesse et de veuve pour l’année 2019 ;

-          le relevé du compte 2______ au 31 décembre 2018 ;

-          les relevés des comptes 3______; 4______ ; 5______ pour les années 2019, 2020, 2021 et 2022.

B. a. Le 7 octobre 2022, l’intéressée a recouru contre la décision de suppression des prestations complémentaires, concluant à son annulation et au maintien de son droit.

Le recours était signé par Monsieur J______, qui indiquait s’occuper avec Mme D______ de l’administratif de l’intéressée dans la mesure où l’intéressée ne maîtrisait pas le français et n’avait jamais eu à se charger de l’administratif avant le décès de son mari. Il a produit une procuration justifiant de ses pouvoirs.

À teneur du recours, Monsieur et Madame F______ avaient systématiquement envoyé les documents demandés par le SPC avec l’aide de l’intéressée. Lorsque les documents requis devaient être recherchés au Portugal, ils avaient contacté le fils de la recourante par courriel pour les obtenir et les transmettre. Ils pensaient donc que certains documents avaient potentiellement été égarés ou mal compris par le SPC, raison pour laquelle ils avaient d’ailleurs sollicité en juin 2022 un entretien avec le gestionnaire en charge du dossier. Ils avaient cependant uniquement été reçus par un employé de l’accueil qui n’avait pas été en mesure de les aider. Concernant les comptes bancaires au Portugal, l’intimé ne semblait pas avoir compris qu’ils avaient été fermés, comme indiqué par les attestations de la banque BPI produites en annexe.

b. L’intimé a répondu le 7 novembre 2022, concluant au rejet du recours, les pièces sollicitées dans le cadre de la révision périodique faisant toujours défaut, à l’exception d’un relevé bancaire portugais auprès de la banque BPI, pour la période du 14 décembre 2019 au 14 janvier 2020, indiquant un solde au 2 janvier 2020, pouvant faire office de solde au 31 décembre 2019 du compte 5_____.

c. La recourante a déposé des observations en date du 18 novembre 2022, insistant sur le fait qu’elle n’avait jamais pu rencontrer le gestionnaire et que l’huissier qu’elle avait vu à sa place n’avait pas pu l’aider dans ses démarches. Concernant les décomptes, il s’agissait d’une incompréhension, les libellés des comptes de la BCI n’étant pas les mêmes que ceux utilisés par l’intimé qui faisait référence à l’IBAN. Une gestionnaire du SPC semblait d’ailleurs elle-même le reconnaître dans un courriel interne du 25 mai 2022 où elle indiquait que les documents n’étaient pas simples à lire. Quoi qu’il en soit, au décès du mari de l’intéressée, celle-ci avait uniquement conservé le compte 5______). Le compte 4______) appartenait à son fils et le compte 3______) appartenait à son ex-belle-fille et avait été fermé.

Elle a notamment joint divers documents émanant de la banque BPI indiquant que le compte 5______ appartenait au défunt mari de la recourante jusqu’en 2019, avant de passer au nom de son épouse. Il était vide depuis septembre 2021 et avait été clôturé. À teneur des extraits couvrant les périodes du 15 décembre 2018 au 14 janvier 2019, du 14 décembre 2019 au 14 janvier 2020, du 15 décembre 2020 au 14 janvier 2021 et du 14 août au 14 septembre 2021, le contenu de ce compte n’avait jamais excédé EUR 200.-.

La recourante ne comprenait par ailleurs pas pour quel motif le versement de ses prestations complémentaires avait été en partie suspendu dès le mois de février 2022, puis réintroduit en juillet, août et septembre 2022 pour les couper ensuite définitivement, dans une lettre sans signature.

d. Le 6 décembre 2022, l’intimé a persisté dans les termes de sa décision sur opposition, relevant que depuis lors, seuls deux relevés bancaires de BPI couvrant les périodes du 14 décembre 2019 au 14 janvier 2020 et du 15 décembre 2020 au 14 janvier 2021 relative au compte 5______ avaient été déposés. Ces décomptes pouvaient faire office de solde au 31 décembre 2020 et au 31 décembre 2021.

Il a rappelé qu’il avait rendu deux décisions provisoires avec effet ex nunc les 20 janvier et 16 mai 2022, pour tenir compte des nouveaux éléments découverts dans le cadre de la révision périodique du dossier, en particulier l’existence d’un bien immobilier, de deux rentes étrangères et de comptes bancaires portugais. Il a rappelé que ladite révision périodique ne pouvait être finalisée et donner lieu à une décision ex tunc, compte tenu des éléments découverts, qu’une fois les justificatifs encore manquants produits.

e. Le 5 janvier 2023, la recourante a relevé une « énorme incompréhension » quant aux relevés de comptes demandés. Elle a rappelé que, comme indiqué et démontré par pièces les 7 juillet et 18 novembre 2022, les comptes 5______, 4______ et 3______ avaient tous été fermés. En outre, parmi ceux-ci, seul le premier lui appartenait. Elle produisait néanmoins par gain de paix les extraits relatifs aux années 2019 à 2022 pour les deux comptes supplémentaires, propriétés de son fils et son ex-belle-fille.

Il était par ailleurs souligné que l’appartement de M. B______ constituait son héritage commun avec son fils et ils n’avaient aucune intention de s’en séparer.

f. Par courrier du 23 février 2023, la recourante, agissant par son représentant, a précisé qu’elle ne pouvait vivre ni en Suisse ni au Portugal avec ses faibles revenus et que si elle devait vendre l’appartement au Portugal, elle devrait obtenir l’accord de son fils, cohéritier, évaluée à EUR 68'000.- pour en obtenir la moitié, soit environ EUR 34'000.-, qui constituerait son unique fortune, en-dessous de celle autorisée par le SPC, ce qui amènerait ce service à l’aider à nouveau.

g. Par courrier du 17 mars 2023, le SPC a relevé que les nouvelles pièces produites, à savoir les relevés de compte 4______ et 3______ des années 2019 à 2022 pouvaient satisfaire à la demande concernant les relevés de comptes 4______ et 3______ pour lesdites années. Les relevés concernant ces comptes avaient été demandés au regard des transferts à destination desdits comptes qui apparaissaient sur certains relevés bancaires portugais de la recourante.

h. Par courrier du 27 mars 2023, la recourante, a soutenu que les documents émanant de la sécurité sociale portugaise avaient déjà été fournis, ainsi que les courriels qu’elle joignait le démontraient. Tous les documents avaient été fournis dans les temps et elle n’était pas responsable « si les demandes ne correspond[aient] pas à la réalité ». Elle ne s’était jamais soustraite à la loi et joignait une copie de sa déclaration d’impôts 2021 et une copie, déjà fournie, d’un document relatif à la valeur vénale de l’appartement en 2022 et de l’extrait de la sécurité sociale pour 2022. Elle n’avait pas pu faire sa déclaration 2022, faute d’avoir reçu l’attestation du SPC concernant ses gains cette année-là. Elle n’était ni une menteuse ni une tricheuse et « on n’est pas loin de l’acharnement, voire du harcèlement moral ».

Elle a joint diverses pièces, pour certaines partiellement caviardées, notamment :

-          un échange de courriels avec Monsieur G______, employée de la banque BPI, selon lequel le compte 2______ avait été ouvert le 12 juillet 2019 de sorte qu’il n’existait pas d’extrait au 31 décembre 2018 ;

-          une déclaration du Centro nacional de pensoes de Lisbonne du 31 janvier 2021, en portugais, faisant état des pensions de vieillesse et de veuve pour les années 2020 et 2021 ;

-          une autre datée du 12 janvier 2022, pour les années 2021 et 2022 ;

-          un document de l’administration fiscale cantonale du 14 mars 2022 pour l’année 2021, faisant état du bien immobilier au Portugal, dont l’estimation était de CHF 52'194.- ;

-          une décision de l’office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS) du 25 juillet 2019, faisant état du versement d’une rente AVS dès le 1er août 2019, ainsi que le document d’adaptation de la rente pour les années 2020 et 201, daté de décembre 2020 ;

-          une déclaration en portugais de l’agence immobilière E______, en lien avec un bien immobilier à Portalegre appartenant à la recourante, pour une valeur sur le marché de EUR 68'000.- ou de location mensuelle de
EUR 350.- ;

-          une attestation de la Dre H______, psychiatre, du 26 mars 2023.

i. Par courrier du 17 avril 2023, le SPC s’est étonné de ce que la recourante ait produit des pièces caviardées, au niveau de l’adresse de correspondance électronique et des expéditeurs et récipiendaires des courriers, alors qu’il lui appartenait de produire des justificatifs fiables et émis par les autorités/institutions compétentes. Il a également noté la formule familière de salutations utilisée dans le courriel du 24 mars 2023 entre l’employée de la banque BPI et le fils de la recourante, alors que le document était destiné à une instance officielle. Les indications relatives aux rentes étrangères vieillesse et de veuve, pour la période antérieure à 2020, n’émanaient pas d’une autorité nationale compétente et n’étaient pas claires. Aucune décision permettant de déterminer la naissance du droit aux rentes n’avait été produite. L’estimation de la valeur vénale et de la valeur locative du bien immobilier avait déjà été produite le 20 septembre 2022 avec l’opposition, mais n’entrait pas en cause dans la suspension des prestations.

j. Par courrier du 27 avril 2023, la recourante a déposé les courriels déjà produits le 27 mars 2023, dans une version non caviardée, indiqué que le document relatif à la rente portugaise l’avait été en annexe au courriel correspondant, « donc transmis et acceptés, comme tous les précédents provenant du même bureau ». Elle avait touché la rente de retraite à l’âge ordinaire de la retraite au Portugal, soit 65 ans et 7 mois, correspondant vraisemblablement à fin août 2018 et de veuve depuis le 4 juillet 2019, date du décès de son époux, et avait transmis tous les documents. Elle avait été soutenue depuis février 2023 par Pro Senectute et par l’Hospice général en mars et avril 2023. Elle a précisé que tout le monde se connaissait dans sa ville au Portugal, ce qui expliquait la formule familière employée.

Elle a joint à son envoi une déclaration du Centro nacional de pensoes de Lisbonne du 31 janvier 2021, en portugais, faisant état des pensions de vieillesse et de veuve pour les années 2020 et 2021, ainsi que plusieurs courriels des 23 et 24 mars 2023, notamment de Madame I______, présentée comme employée de la sécurité sociale portugaise, selon lequel il n’existait pas de relevé pour l’année 2019, parce qu’elle n’avait pas touché ce à quoi elle avait droit, le document indiquant pour l’année 2020 « pensions antérieures jusqu’en 2020 ».

k. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux PCF à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de PCC, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

3.             Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC - J 4 20]; art. 43 LPCC).

4.             Le litige porte sur la suppression des prestations complémentaires de la recourante du fait de la violation de son obligation de collaborer.

5.             Il n'est pas contesté ni contestable que le SPC était en droit d'initier une révision périodique du dossier de l’intéressée, dans le cadre de laquelle il n'était pas lié par l'appréciation qu'il avait faite jusque-là des éléments constituant tant les dépenses reconnues que le revenu déterminant et ainsi de déterminer le droit de l’intéressée aux prestations complémentaires. Selon l'art. 30 de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité du
15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301), les services chargés de fixer et verser les prestations complémentaires doivent réexaminer périodiquement, mais tous les quatre ans au moins, les conditions économiques des bénéficiaires.
L'art. 13 LPCC prévoit aussi la révision périodique du droit aux PCC.

Il n'est pas davantage sujet à discussion que le bénéficiaire de prestations complémentaires est tenu, dans le cadre d'une procédure de révision comme en cas de demande initiale, de collaborer à l'établissement des faits pertinents pour que le droit aux prestations et le montant de ces dernières puissent être respectivement établi et fixé, ainsi que cela résulte de l'art. 28 LPGA. Sans doute la procédure en matière d'assurances sociales est-elle régie par la maxime inquisitoire, voulant que l'assureur social prenne d'office les mesures d'instruction nécessaires et recueille les renseignements dont il a besoin pour statuer (art. 43 al. 1 phr. 1 LPGA), sans être lié par les faits allégués, ni par les faits admis, ni par les moyens de preuve invoqués, mais les parties ont l'obligation d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués ; à défaut, elles s'exposent à devoir supporter les conséquences de l'absence de preuve (art. 28 LPGA ; ATF 125 V 193 consid. 2 ; 122 V 157 consid. 1a ; 117 V 261 consid. 3b et les références ; Jacques Olivier PIGUET, in Anne-Sylvie DUPONT / Margit MOSER-SZELESS [éd.], Commentaire romand de la loi sur la partie générale des assurances sociales [ci-après : CR LPGA-Auteur], n. 9 ss ad art. 43 ; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY, Procédure et contentieux, in Ghislaine FRÉSARD-FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, Droit suisse de la sécurité sociale, vol. II, 2015, n. 27 ss.). L'obligation de collaborer que pose l'art. 28 LPGA comprend notamment le devoir de transmettre les documents déterminants (CR LPGA-Guy LONGCHAMP, n. 12 ad art. 28).

6.              

6.1 Aux termes de l'art. 28 al. 2 LPGA, celui qui fait valoir son droit à des prestations doit fournir gratuitement tous les renseignements nécessaires pour établir ce droit et fixer les prestations dues.

Conformément à l'art. 43 LPGA, intitulé « instruction de la demande », l'assureur examine les demandes, prend d’office les mesures d’instruction nécessaires et recueille les renseignements dont il a besoin. Les renseignements donnés oralement doivent être consignés par écrit (al. 1). Si l'assuré ou d’autres requérants refusent de manière inexcusable de se conformer à leur obligation de renseigner ou de collaborer à l’instruction, l’assureur peut se prononcer en l’état du dossier ou clore l’instruction et décider de ne pas entrer en matière. Il doit leur avoir adressé une mise en demeure écrite les avertissant des conséquences juridiques et leur impartissant un délai de réflexion convenable (al. 3).

L'obligation de collaborer ancrée à l'art. 43 LPGA a une portée générale en assurances sociales et vaut ainsi également dans le domaine des PC (arrêt du Tribunal fédéral des assurances 9C_180/2009 du 9 septembre 2009 consid. 4.2.1).

7.              

7.1 En vertu de l'art. 5A de la loi sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 14 octobre 1965 (LPFC - J 4 20), la personne intéressée et les employeurs doivent collaborer gratuitement à l'exécution de la loi (al. 1). Celui qui fait valoir son droit à des prestations doit fournir gratuitement tous les renseignements nécessaires pour établir ce droit et fixer les prestations dues (al. 2).

Selon l'art. 5B LPFC, si l'intéressé refuse de manière inexcusable de se conformer à son obligation de renseigner ou de collaborer à l'instruction de son dossier, le service peut se prononcer en l'état du dossier ou clore l'instruction et décider de ne pas entrer en matière (al. 1). Le refus de collaborer ou de fournir les renseignements nécessaires peut entraîner la suspension du versement des prestations (al. 2). Préalablement, le service adresse à l'intéressé une mise en demeure écrite, l'avertissant des conséquences juridiques et lui impartissant un délai de réflexion convenable (al. 3). En cas de suspension du versement des prestations, le service notifie une décision formelle (al. 4).

7.2 La loi ne prévoit pas expressément la suppression des prestations en cours en cas de violation de l'obligation de renseigner. Selon la doctrine, si des prestations sont déjà en cours, l'administration apprécie librement les preuves en cas de violation de l'obligation de renseigner et peut décider en l'état du dossier. Elle peut en particulier tirer des conclusions du refus de collaborer (Erwin CARIGIET/ Uwe KOCH, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, 3ème éd. 2021, p. 91). Le Tribunal fédéral a confirmé la suppression et la restitution des prestations complémentaires lorsque le droit à celles-ci ne pouvait être établi à la suite d’un défaut de collaboration de l’assuré dans le cadre d’une révision (arrêt du Tribunal fédéral 9C_194/2014 du 21 octobre 2014 consid. 4).

7.3 La violation de l'obligation de renseigner ou de collaborer n'est déterminante que si elle n'est pas excusable (arrêt du Tribunal fédéral 8C_567/2007 du 2 juillet 2008, consid. 6.3). Il doit ainsi s'agir d'une violation fautive, qui suppose que le comportement de l'intéressé n'est pas compréhensible. Cette condition est réalisée dès lors qu'il n'existe aucun fait justificatif (Ueli KIESER, ATSG-Kommentar : Kommentar zum Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts vom 6. Oktober 2000, 2ème éd. 2009, n. 51 ad art. 43).

7.4 Lorsqu'elle se heurte à un refus de collaborer, l'autorité administrative peut déclarer irrecevable la requête dont elle est saisie. Elle doit cependant faire usage de cette possibilité avec la plus grande retenue, uniquement lorsque les éléments disponibles ou pouvant être rassemblés sans difficultés particulières ne permettent pas un examen sur le fond (ATF 108 V 229 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 9C_505/2010 du 2 mai 2011 consid. 3.1 et 9C_736/2016 du 9 octobre 2017, consid. 4.2.1).

8.             Quant aux PCC, elles sont, conformément à l'art. 1A al. 1 LPCC, en cas de silence de ladite loi, régies par la LPC et ses dispositions d'exécution fédérales et cantonales (let. a), ainsi que par la LPGA et ses dispositions d'exécution (let. b).

Conformément à l'art. 11 al. 3 LPCC, le service peut suspendre ou supprimer le versement de la prestation lorsque le bénéficiaire refuse de fournir ou tarde à remettre les renseignements demandés.

Cette disposition a une portée analogue à l'art. 43 al. 3 LPGA qui s'applique.

9.             L'art. 27 LPGA prévoit que, dans les limites de leur domaine de compétence, les assureurs et les organes d’exécution des diverses assurances sociales sont tenus de renseigner les personnes intéressées sur leurs droits et obligations (al. 1). Chacun a le droit d’être conseillé, en principe gratuitement, sur ses droits et obligations. Sont compétents pour cela les assureurs à l’égard desquels les intéressés doivent faire valoir leurs droits ou remplir leurs obligations. Le Conseil fédéral peut prévoir la perception d’émoluments et en fixer le tarif pour les consultations qui nécessitent des recherches coûteuses (al. 2). Si un assureur constate qu’un assuré ou ses proches ont droit à des prestations d’autres assurances sociales, il les en informe sans retard (al. 3).

Cette disposition s’applique à la procédure en matière de prestations complémentaires (arrêt du Tribunal fédéral 8C_624/2007 du 20 mai 2008
consid. 6.3.1.1). Le devoir de conseil a pour but que la personne se comporte de telle sorte que surviennent les conséquences juridiques voulues par la loi (arrêt du Tribunal fédéral 8C_475/2009 du 22 février 2010 consid. 2.1). Il porte sur les droits et les obligations dans le cas concret. L'intéressé doit être conseillé sur les circonstances juridiques ou de fait qui lui permettent de faire valoir ses droits ou de se conformer à ses obligations. Le cas échéant, une recommandation sur les démarches à entreprendre doit être donnée. Le devoir de conseil n'est pas subordonné à une demande dans ce sens de la personne assurée, il doit être mis en œuvre dès que l'assureur constate un besoin de conseil (Ueli KIESER, Kommentar zum ATSG, 4ème éd. 2020, n. 27 ad art. 27 LPGA). Une violation de l’obligation de conseiller peut, le cas échéant, engager la responsabilité de l’assureur, selon l’art.78 LPGA (Guy LONGCHAMP in Commentaire romand LPGA, 2018, n. 40 ad art. 27 LPGA).

10.         Le principe de la proportionnalité, garanti par l’art. 5 al. 2 Cst., exige qu’une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid. 2c p. 222 et les références citées).

11.         En l’espèce, la chambre de céans relève que, si cinq rappels successifs ont effectivement été adressés à la recourante avant la décision litigieuse, il n’en demeure pas moins qu’elle y a systématiquement donné suite (bien que de manière incomplète) et que la situation était particulièrement complexe. En effet, la demande de pièces initiale comportait 30 postes distincts et les pièces demandées ont en outre varié au fil du temps, l’intimé requérant par la suite des informations sur divers comptes au Portugal, dont il s’avère que la recourante n’était pas même titulaire.

Âgée de 70 ans, ne maîtrisant pas le français et ne s’étant jamais chargée de l’administratif jusqu’au décès de son mari en 2019, il est compréhensible que la recourante, même aidée par des amis, ait rencontré des difficultés à comprendre les demandes qui lui étaient faites et à réunir les documents sollicités par l’intimé, dont certains devaient être recherchés au Portugal.

Elle s’est pourtant montrée active dès le début de la procédure de révision périodique. Elle a toujours répondu aux requêtes de l’intimé, lesquelles ont varié au fil du temps (notamment concernant les comptes en banque). Elle a même appelé le SPC (par l’intermédiaire de son amie, Madame D______) en mai afin de clarifier la situation, indiquant qu’elle avait bien déposé les extraits de compte bancaire sollicités. Le gestionnaire qui lui a répondu n’a pas été en mesure de la renseigner, considérant que « les relevés n’étant [ne sont] pas simples à lire » (pièce 18 int.).

Par la suite, la recourante a encore écrit au SPC pour solliciter un entretien afin de discuter de son dossier. Elle a été reçue le 30 juin 2022 par un agent d’accueil. À teneur de la note d’entretien établie par celui-ci, le rendez-vous a essentiellement porté sur la question des comptes BPI dont elle a expliqué une nouvelle fois ne pas être titulaire. La note ne fait en revanche aucune référence à la question des rentes portugaises, ni d’ailleurs à un quelconque renseignement que l’agent d’accueil aurait donné à la recourante concernant son dossier (cf. pièce 22 int.), ce malgré les besoins évidents de conseils de celle-ci au vu de l’historique du dossier et de la demande expresse de rendez-vous pour en parler. Comme elle s’y était engagée lors de l’entretien, la recourante a fourni le 7 juillet 2022 des attestations de la BPI indiquant que les comptes autres que celui qu’elle avait signalé dès le début de la procédure étaient tous fermés.

Pourtant, la seule suite donnée par l’intimé à cet entretien a été sa décision du 6 septembre 2022, supprimant le versement des prestations complémentaires au 30 septembre 2022 au motif qu’elle n’avait pas fourni les renseignements demandés dans le délai imparti. Aucun renseignement complémentaire concernant les documents faisant encore défaut ne figurait dans cette décision très sommaires (pièce 24).

La recourante a formé opposition le 16 septembre 2022, invoquant essentiellement son incompréhension et sa bonne foi et renvoyant pour le surplus aux pièces déjà transmises depuis le début de la procédure de révision périodique (pièce 25 int.).

Quelques jours plus tard, soit le 27 septembre 2022, elle recevait la décision sur opposition confirmant la suppression de son droit au 30 septembre et listant les pièces qui n’avaient pas été fournies, soit :

-          les décisions de la sécurité sociale portugaise, précisant la date du début du droit à la rente de vieillesse et de veuve ;

-          les justificatifs des montants respectifs de la rente de vieillesse et de veuve pour l’année 2019 ;

-          le relevé du compte 2______ au 31 décembre 2018 ;

-          les relevés des comptes 3______ ; 4______ ; 5______ pour les années 2019, 2020, 2021 et 2022.

Concernant ces trois derniers comptes bancaires, il ressort de la note au dossier de l’intimé du 26 septembre 2022, que ceux-ci étaient requis du seul fait que la recourante avait procédé à des virements sur ces comptes depuis son propre compte BPI. La chambre de céans relève cependant que l’intéressée avait déjà indiqué à plusieurs reprises, pièces à l’appui, qu’ils avaient été fermés. En outre, deux d’entre eux ne lui appartenaient pas, mais avaient été la propriété de son fils et de son ex-belle-fille jusqu’à leur clôture. Il est ainsi compréhensible qu’il ait été peu aisé pour la recourante de produire les décomptes y relatifs, s’agissant de comptes de tiers, qui plus est clôturés. Enfin, si tant est que la production de ces documents soit nécessaire à la révision, force est de constater que l’intimé ne les a demandés pour la première fois que le 16 mai 2022, au milieu d’une série d’autres justificatifs requis et en les identifiant simplement par leurs IBAN, ce sans la moindre explication. Il ressort ainsi des notes de rendez-vous du 30 juin 2022 que la recourante n’avait aucune idée de ce à quoi correspondaient ces comptes. Une confusion entre les numéros de comptes IBAN utilisés par l’intimé et les numéros de comptes BPI utilisés par la recourante tout au long de la procédure n’a vraisemblablement pas fluidifié la communication et aidé à ce que les bonnes pièces soient transmises dans les délais. Quand bien même il s’agit d’un élément postérieur à la décision entreprise, la production des extraits sollicités dans le cadre de la procédure de recours tend à démontrer la bonne volonté de la recourante. Elle a d’ailleurs également produit un courriel d’une gestionnaire de la BPI dans son village indiquant qu’un solde du compte 2______ ne pouvait pas être délivré, ce compte ayant uniquement été ouvert en 2019.

Pour ce qui est d’une pièce attestant de la date du début du droit à la rente de vieillesse et de veuve et de son montant, la recourante a déposé le 5 mai 2022 deux attestations relatives à ses rentes de vieillesse et de veuve pour les années 2020 et 2021 émanant du « centro nacional de pensões ». L’intimé allègue que ces attestations seraient « pour le moins floues et n’émanent a priori pas de l’autorité nationale compétente » (observations de l’intimé du 17 avril 2023).

La chambre de céans relève qu’à teneur du site de la Confédération (https://www.eda.admin.ch/countries/portugal/fr/home/services/assurances-sociales /avs-ai.html), le « centro nacional de pensões » constitue le bureau de liaison portugais des assurances sociales, de sorte que la légitimité du document paraît difficilement critiquable, ce d’autant moins que l’intimé ne motive pas son grief à cet égard. Pour le surplus, si dites attestations n’indiquent pas stricto sensu la date de début du versement des rentes, elles stipulent précisément le montant des rentes mensuelles de veuve et de vieillesse, tant pour 2020 et 2021. L’attestation relative à 2020 précise également les montants versés au titre de chacune des pensions pour la période antérieure à 2020.

Les montants indiqués à ce titre font manifestement référence à l’année 2019, dans la mesure où :

-          la rente de veuve n’a vraisemblablement pas été versée avant le décès du mari de la recourante, survenu le 4 juillet 2019 ;

-          concernant la rente de vieillesse, l’âge légal de la retraite au Portugal était de 66 ans et 4 mois en 2019, contrairement à ce qu’indique la recourante qui fait état de 65 ans et 7 mois jusqu’en 2022. Or, l’intéressée a atteint cet âge en mai 2019. En outre, il est peu probable qu’elle ait demandé une retraite anticipée, dans la mesure où, à teneur de l’attestation 2020 du « centro nacional de pensões » le montant total des rentes de vieillesse touchées par l’intéressée avant 2020 (soit EUR 1'743.57), correspond à moins de douze mensualités de cette même rente (EURO 168.05 par mois de rente de vieillesse en 2020, à défaut du montant exact pour 2019).

Ainsi, quand bien même des informations plus précises se seraient avérées utiles, il est possible, au vu des documents produits par la recourante en mai 2022 déjà, de déterminer précisément ce qu’elle a touché des assurances sociales portugaises en 2019, 2020 et 2021 et de l’intégrer dans le calcul du revenu déterminant pour chacune de ces années.

Dans ces circonstances, il appert que la suppression pure et simple du droit aux prestations complémentaires de la recourante ne se justifiait pas dans la mesure où, si tant est que son comportement puisse être considéré comme fautif, il n’est en aucun cas pas inexcusable vu les efforts et démarches qu’elle a régulièrement accomplis et le peu de réponses et de renseignements qu’elle a reçus de l’intimé, malgré ses demandes et malgré l’obligation de renseigner telle qu’elle découle de l’art. 27 LPGA.

En outre, il est rappelé que la possibilité de l’assureur social de ne pas entrer en matière sur une demande de prestations ou encore davantage de supprimer une prestation au titre de sanction du comportement du bénéficiaire doit être utilisée avec la plus grande retenue, lorsqu’un examen au fond n’est manifestement pas possible sur la base du dossier, y compris des pièces que l’assureur pourrait obtenir par lui-même sans démarches excessivement compliquées (cf. notamment arrêt 9C_736/2016, consid. 4.2.1). Or, en l’espèce, la chambre de céans constate que les éléments au dossier permettaient de procéder à un examen au fond, ce qu’il aurait donc dû privilégier. S’il estimait que tel n’était pas le cas, il paraissait quoi qu’il en soit justifié, au vu des circonstances, de privilégier l’octroi d’un délai supplémentaire (précédé même éventuellement d’un entretien informatif avec le gestionnaire du dossier) à la suppression pure simple des prestations complémentaires nécessaires à la couverture des besoins vitaux de la recourante. Le même résultat s’impose d’ailleurs en application du principe général de la proportionnalité.

12.         Pour ces raisons, il convient d’admettre le recours, d’annuler la décision de suppression des prestations complémentaires de l’intimé et de lui renvoyer la cause pour qu’il calcule le droit auxdites prestations au-delà du mois d’octobre 2022, sur la base des pièces en sa possession.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.      Annule la décision sur opposition de l’intimé du 26 septembre 2022.

4.      Renvoie la cause à l'intimé pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

5.      Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Pascale HUGI

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le