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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3163/2022

ATAS/347/2023 du 19.05.2023 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3163/2022 ATAS/347/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 mai 2023

Chambre 5

 

En la cause

A______

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


 

 

EN FAIT

A.           a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née en ______ 1962, souffre d’une hypertension pulmonaire post-embolique et a subi une angioplastie percutanée des artères pulmonaires en 2016 et en 2018. Au bénéfice d’une formation juridique, elle a travaillé, depuis mars 2006, en tant qu’adjointe au responsable du fichier central puis de senior compliance officer, au sein de la banque B______ SA (ci-après : Société Générale), qui a procédé à un plan social de licenciement collectif, ce qui a conduit au licenciement de l’assurée, avec fin des rapports de travail au 30 septembre 2017.

b. En raison de ses problèmes de santé, notamment des problèmes d’essoufflement, de dyspnée et de dépression, l’assurée a déposé une demande de prestations d’invalidité qui a été reçue, le 5 décembre 2018, par l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI ou l’intimé). La division de réadaptation professionnelle de l’OAI a rédigé un rapport d’évaluation du 7 mai 2019, retenant comme troubles de la santé, un état dépressif, une embolie pulmonaire et une apnée du sommeil, avec une incapacité de travail depuis le 24 mars 2017, qui correspondait à la date de l’arrêt de travail de l’assurée pour raison de maladie. Il était mentionné que l’assurée avait des soucis quant à son avenir professionnel après son licenciement, notamment une grande peur de ne plus retrouver un emploi, au vu de son âge et du secteur économique très compétitif dans lequel elle évoluait.

c. Afin de réinsérer l’assurée, l’OAI a décidé de la soutenir dans une reprise progressive et a, notamment, pris en charge un entraînement à l’endurance, selon décision du 24 juillet 2019, puis un entraînement progressif chez OuiStart, par décision du 22 octobre 2019, prolongé par décision du 17 février 2020 puis par décision du 10 mars 2020. Parallèlement, l’assurée a consulté régulièrement un psychiatre en raison d’un état anxiodépressif entraînant un important manque d’énergie et d’intérêt avec une perte de confiance ainsi qu’un manque de l’estime de soi.

d. Compte tenu des troubles psychiques, l’OAI a considéré qu’une expertise psychiatrique était nécessaire et a mandaté le professeur C______, psychiatre et psychothérapeute FMH, qui a rendu un rapport d’expertise psychiatrique en date du 2 décembre 2020, dans lequel il a mentionné les diagnostics de trouble de la personnalité anankastique (F60.5) décompensé depuis 2017, épisode dépressif sévère, dès mars 2017, en rémission depuis juillet 2019 et a rappelé le trouble somatique soit l’hypertension artérielle pulmonaire avec status post embolie pulmonaire en 2014, sous anticoagulant et status post angioplastie des artères pulmonaires en 2016 et en 2018. L’expert a conclu, avec effet au 31 mars 2017, à une incapacité de travail durable de 100%, à une capacité de travail de 0% dans l’activité habituelle et de 0% dans une activité adaptée. La capacité de travail dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles de l’assurée était estimée à 30% dès le 2 décembre 2020 et susceptible d’évoluer vers un 100% sous 12 mois.

e. Dans son rapport du 4 février 2021, la division réadaptation professionnelle de l’OAI a résumé le parcours de l’assurée et a conclu à la prolongation d’un reclassement sous la forme d’un stage en entreprise avec un job coaching. Par communication du 15 juin 2021, l’OAI a pris en charge des mesures professionnelles, sous la forme d’une prolongation d’un reclassement auprès du world economic forum (ci-après : WEF), assorti d’un job coaching assuré par les établissements pour l’intégration (ci-après : ÉPI) ; le reclassement a été prolongé par communication du 28 septembre 2021. Un rapport du même jour de la division réadaptation professionnelle constatait que l’assurée avait réussi à augmenter son taux de travail à 60 % dès le 12 juillet 2021 puis à 70 % dès le 16 août 2021, l’augmentation devait se poursuivre jusqu’à un taux de 80 % avec la perspective d’un contrat de durée déterminée (ci-après : CDD) en janvier 2022 si l’état de santé de l’assurée le permettait.

f. En date du 9 décembre 2021, l’assurée s’est inscrite auprès de l’office régional de placement (ci-après : ORP), indiquant être disponible, dès le 1er janvier 2022, pour un taux d’activité de 100 % et mentionnant comme motif de son inscription la fin du versement des indemnités journalières de l’assurance-invalidité, au 31 décembre 2021.

g. Par courrier du 14 janvier 2022 à l’OAI, les ÉPI ont confirmé qu’à l’issue du stage de neuf mois auprès du WEF, l’assurée était parvenue à augmenter son taux d’activité jusqu’à 80% ; ses compétences et sa rigueur avaient été reconnues par son responsable. Cette activité correspondait aux attentes de l’assurée en termes de compétence et d’analyse et elle voyait les bienfaits de son investissement dans le temps. Les ÉPI ajoutaient qu’il était prévu qu’à la fin de la mesure, l’assurée signerait avec le WEF un CDD à 100 %, de trois mois, avec effet au 1er janvier 2022.

h. Un CDD d’une durée de trois mois, se terminant le 31 mars 2022, a été signé avec le WEF, l’OAI octroyant, conjointement, une allocation d’initiation au travail (ci-après : AIT), pendant cette période. Dans son rapport final du 11 avril 2022, la division de réadaptation professionnelle de l’OAI a résumé les mesures prises pour l’assurée et a conclu, en comparant le revenu annuel actualisé sans invalidité, attesté par la Société Générale (soit : CHF 166'495.-) et le revenu déterminant annuel d’invalide fixé à CHF 89'200.-, que le taux d’invalidité s’élevait à 46%.

B. a. Par projet de décision du 18 avril 2022, l’OAI a proposé l’octroi d’un quart de rente d’invalidité en fixant un taux d’invalidité de 46%, dès le 1er avril 2022 avec refus de mesures professionnelles. Le point de départ du délai d’un an était fixé au 24 mars 2017.

b. Sans mention d’une contestation de la part de l’assurée à l’issue de la procédure d’audition, le projet a été confirmé, par une décision de l’OAI du 3 juin 2022 reprenant en tous points les termes du projet du 18 avril 2022 et octroyant un quart de rente d’invalidité, dès le 1er avril 2022.

C. a. En date du 4 août 2022, l’assurée a contacté par courriel l’OAI et a demandé la suppression de sa rente AI au motif qu’elle avait récupéré sa pleine capacité de travail, dans toute activité à 100 %, depuis la fin des mesures de réinsertion et qu’elle était inscrite, depuis le 1er avril 2022, auprès de l’assurance-chômage et en recherche active d’un emploi à 100 %. Elle ajoutait que son médecin traitant venait de partir en vacances mais que dès son retour, fin août 2022, il serait en mesure de confirmer sa situation actuelle.

b. En date du 15 août 2022, l’OAI a fait parvenir à l’assurée un projet de décision prévoyant la suppression de la rente invalidité après avoir « réexaminé le droit à une rente d’invalidité ». L’autorité s’était fondée sur l’ensemble des documents versés au dossier et sur la demande de l’assurée selon laquelle son état de santé s’était amélioré et qu’elle avait recouvré une pleine capacité de gain dans toute activité et que son degré d’invalidité était inférieur à 40 %, ce qui ne lui donnait pas droit à une rente. Il était précisé que le quart de rente actuelle serait supprimé après la notification de la décision « pour la fin du mois suivant ». Il était pris note que l’assurée était inscrite auprès de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) qui pouvait lui fournir les prestations nécessaires afin de la soutenir dans ses démarches de retour en emploi. L’OAI ajoutait que dans le cas de la procédure d’audition, l’assurée pouvait communiquer ses éventuelles objections motivées ou demander des renseignements complémentaires sur le projet.

c. En date du 1er septembre 2022, l’OAI a reçu la copie du formulaire de certificat médical complété par le médecin traitant de l’assurée, le docteur D______, spécialiste FMH en médecine interne, daté du 14 mars 2022. Ce dernier certifiait que la capacité de travail de l’assurée était de 100% dès le 1er avril 2022 et ajoutait à la main « pleine capacité de travail dans toute activité ».

d. Par note d’entretien téléphonique entre un gestionnaire de l’OAI et l’assurée, en date du 5 septembre 2022, il était relaté que l’assurée avait confirmé ne plus avoir besoin de consulter son psychiatre, depuis le début de l’année 2022, ce qui lui convenait ; elle n’était désormais suivie que par son médecin de famille, le Dr D______. La note d’entretien téléphonique se terminait sur les conclusions de l’assurée qui confirmait au gestionnaire, une nouvelle fois, que sa capacité de travail était de 100 % dans toute activité, qu’elle était en recherche active d’emploi avec l’aide, notamment, de l’assurance-chômage et n’avait plus besoin des prestations de l’OAI.

e. Par décision du 16 septembre 2022, l’OAI a supprimé la rente d’invalidité de l’assurée, en reprenant la motivation du projet de décision du 15 août 2022.

D. a. Par écriture postée le 28 septembre 2022, l’assurée a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) contre la décision de l’OAI, exposant qu’elle se sentait en forme pour travailler, qu’elle avait suivi une formation complémentaire en « Risk management » et qu’elle ne souhaitait pas une décision de suppression de sa rente, mais une décision d’annulation de la rente, à dater du 1er avril 2022, date de son inscription auprès de l’office régional de placement (ci-après : ORP), de manière à obtenir la correction, en sa faveur, des indemnités de chômage, à compter de cette date. Parmi les pièces jointes au recours, figurait un courriel, daté du 21 septembre 2022, adressé à l’OAI par l’assurée, dans lequel cette dernière expliquait s’être inscrite au chômage depuis le 1er avril 2022 et chercher un emploi à 100 %. Sa situation correspondait au certificat de son médecin de famille qui énonçait qu’elle avait une pleine capacité de travail dans toute activité depuis le 1er avril 2022. Elle demandait une rectification du courrier du 16 courant [la décision de l’OAI du 16 septembre 2022] en ce sens qu’il fallait remplacer le terme « suppression de la rente AI » par « annulation de ladite rente », car cette décision lui permettrait non seulement d’obtenir la restitution des sommes qu’elle avait reçues de la caisse de compensation mais également la correction, en sa faveur, des indemnités payées par l’assurance-chômage. Elle expliquait encore que l’emploi du mot « suppression » entraînait un « préjudice majeur en ma défaveur par la non équivalence du terme ». Selon la recourante, la précision dans les mots ainsi que leur cohérence étaient indispensables et requéraient de procéder à cette rectification par un nouveau courrier, qui devait annuler et remplacer la décision du 16 septembre 2022.

b. Dans sa réponse au recours, l’OAI, par écriture du 24 novembre 2022, a informé la chambre de céans, qu’après examen de la situation, l’intimé revenait sur sa décision et considérait que les conditions permettant une révision du droit à la rente de l’assurée n’étaient pas réalisées. C’était à tort que l’OAI avait supprimé le droit à la rente de la recourante. La motivation de la détermination de l’OAI était que les motifs avancés par la recourante ne portaient pas sur la façon dont sa situation de santé avait évolué au regard de l’assurance-invalidité, mais sur le fait que la reconnaissance d’un degré d’invalidité par l’OAI la lèserait au regard de l’assurance-chômage, ce qui n’était pas un argument susceptible d’influer sur la manière de déterminer le degré d’invalidité de l’assurée. L’OAI mentionnait le courriel de l’assurée, daté du 4 août 2022, par le truchement duquel l’assurée avait exposé être inscrite à l’ORP et ne plus avoir besoin du versement de la rente d’invalidité. Ce nonobstant, l’OAI considérait que la recourante n’avait fait état d’aucune modification des circonstances propres à influencer son degré d’invalidité, se contentant d’affirmer qu’elle disposait d’une pleine capacité de travail dans toute activité ; or, l’évaluation du degré d’invalidité établi à 46% dans la décision du 13 juillet 2022, tenait déjà compte d’une pleine capacité de travail. À la lumière de ces développements, l’OAI concluait à l’annulation de la décision attaquée. 

c. Par courrier du 1er décembre 2022, la chambre de céans a invité la recourante à se déterminer sur la proposition de l’OAI d’annuler la décision querellée. Par réplique du 8 décembre 2022, la recourante a tout d’abord remercié l’OAI de l’avoir accompagnée et soutenue pour un retour progressif à l’emploi, avec des mesures de réadaptation. Selon elle, sa période d’activité au WEF lui avait permis de reprendre un travail réel et actif et de regagner sa confiance en elle car elle avait été traitée comme ses collègues, n’avait bénéficié d’aucun privilège et son employeur avait été très satisfait. Au chômage depuis lors, elle recherchait ardemment un emploi et voulait idéalement travailler jusqu’à ses 65 ans ; elle avait d’ailleurs terminé une formation de « Risk Manager », afin d’accroître ses compétences et son attractivité sur le marché de l’emploi. Elle se considérait en bonne santé, avec une capacité de travail intacte, sans besoin d’une activité adaptée, ne souffrait d’aucune diminution, ni de limitations fonctionnelles. Elle mentionnait encore que le Dr D______ l’avait suivie durant son épisode dépressif et avait constaté, en 2022, sa totale récupération. Elle n’avait plus besoin de suivi psychiatrique depuis longtemps et son burn-out appartenait « heureusement au passé ». Elle persistait dans ses conclusions selon lesquelles la rente AI devait être annulée, rétroactivement au 1er avril 2022 car « ne se justifi[ait]e pas et ne lui correspond[ait] pas ».

d. Sur ce, la chambre de céans a informé les parties que la cause était gardée à juger.

e. Les autres faits seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

En l’occurrence, la décision querellée concerne une assurée âgée de plus de 55 ans au 1er janvier 2002 mais porte sur la suppression d’une rente dont le droit est né le 1er avril 2022, soit postérieurement au 31 décembre 2021, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.

5.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

6.             Le litige porte sur le maintien ou la suppression du quart de rente d’invalidité octroyé à la recourante, accessoirement et éventuellement, sur la date à partir de laquelle la suppression de la rente devrait intervenir.

7.             Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

8.             L’assuré a droit une rente pour autant qu’il ait présenté une incapacité de travail d’au moins 40 % en moyenne, durant une année sans interruption notable (art. 28 al. 1 let. b LAI)

9.              

9.1 On peut envisager quatre cas dans lesquels un conflit peut surgir entre une situation juridique actuelle et une décision de prestations, assortie d'effets durables, entrée en force formelle : une constatation inexacte des faits (inexactitude initiale sur les faits) peut, à certaines conditions, être corrigée par une révision procédurale conformément à l'art. 53 al. 1 LPGA. Lorsqu'une modification de l'état de fait déterminante sous l'angle du droit à la prestation (inexactitude ultérieure sur les faits) survient après le prononcé d'une décision initiale exempte d'erreur, une adaptation peut, le cas échéant, être effectuée dans le cadre d'une révision de la rente au sens de l'art. 17 al. 1 LPGA. Si la décision est fondée sur une application erronée du droit (application initiale erronée), il y a lieu d'envisager une révocation sous l'angle de la reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA). Enfin, il est des cas où une modification des fondements juridiques déterminants intervient après le prononcé de la décision (ATF 135 V 215 consid. 4.1 ; ATF 127 V 10 consid. 4b).

9.2 L’art. 17 al. 1er LPGA dispose que si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée. Il convient ici de relever que l’entrée en vigueur de l’art. 17 LPGA, le 1er janvier 2003, n’a pas apporté de modification aux principes jurisprudentiels développés sous le régime de l’ancien art. 41 LAI, de sorte que ceux-ci demeurent applicables par analogie (ATF 130 V 343 consid. 3.5).

9.3 Tout changement important des circonstances, propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l’art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 134 V 131 consid. 3 ; ATF 130 V 343 consid. 3.5). Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à une accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 141 V 9 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_622/2015 consid. 4.1). Il n'y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3; ATF 112 V 371 consid. 2b; ATF 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier. La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 111/07 du 17 décembre 2007 consid. 3 et les références). Un changement de jurisprudence n'est pas un motif de révision (ATF 129 V 200 consid. 1.2).

9.4 Le point de savoir si un changement notable des circonstances s’est produit doit être tranché en comparant les faits tels qu’ils se présentaient au moment de la dernière révision de la rente entrée en force, soit dans le cas présent, la décision d’octroi d’une rente invalidité en date du 3 juin 2022 et les circonstances qui régnaient à l’époque de la décision litigieuse, soit dans le cas d’espèce, le 16 septembre 2022. C’est en effet la dernière décision qui repose sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et une comparaison des revenus conformes au droit, qui constitue le point de départ temporel pour l’examen d’une modification du degré d’invalidité lors d’une nouvelle révision de la rente (ATF 133 V 108 consid. 5.4; ATF 130 V 343 consid. 3.5.2).

Si les conditions de la révision sont données, les prestations sont, conformément à l’art. 17 al. 1 LPGA, modifiées pour l’avenir dans le sens exigé par le nouveau degré d’invalidité. Chaque loi spéciale peut fixer le point de départ de la modification ou encore exclure une révision en s’écartant de la LPGA (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 806/04 du 15 mars 2005 consid. 2.2.).

9.5 Dans le domaine de l’assurance-invalidité, le point de départ d’une modification du droit aux prestations est fixé avec précision. En cas de modification de la capacité de gain, la rente doit être supprimée ou réduite avec effet immédiat si la modification paraît durable et par conséquent stable (première phrase de l'art. 88a al. 1 RAI) ; on attendra en revanche trois mois au cas où le caractère évolutif de l'atteinte à la santé, notamment la possibilité d'une aggravation, ne permettrait pas un jugement immédiat (deuxième phrase de la disposition; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 666/81 du 30 mars 1983 consid. 3, in RCC 1984 p. 137 s.). En règle générale, pour examiner s'il y a lieu de réduire ou de supprimer la rente immédiatement ou après trois mois, il faut examiner pour le futur si l'amélioration de la capacité de gain peut être considérée comme durable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_32/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1).

En vertu de l’art. 88bis al. 2 RAI, la diminution ou la suppression de la rente prend effet, au plus tôt le premier jour du deuxième mois qui suit la notification de la décision (let. a), ou rétroactivement à la date où elle a cessé de correspondre aux droits de l’assuré, s’il se l’est fait attribuer irrégulièrement ou s’il a manqué, à un moment donné, à l’obligation de renseigner qui lui incombe raisonnablement selon l’art. 77.

10.         En matière d'assurance-invalidité, l'art. 88bis al. 2 let. a RAI prévoit que la diminution ou la suppression de la rente, de l'allocation pour impotent ou de la contribution d'assistance prend effet au plus tôt le premier jour du deuxième mois qui suit la notification de la décision. L'art. 88bis al. 2 let. b RAI permet cependant à l'assurance de diminuer ou de supprimer ladite prestation avec effet rétroactif à la date où elle a cessé de correspondre aux droits de l'assuré, si ce dernier se l'est fait attribuer irrégulièrement ou s'il a manqué, à un moment donné, à l'obligation de renseigner qui lui incombe raisonnablement en vertu de l'art. 77 RAI. L'obligation de l'assuré de communiquer immédiatement à l'office AI tout changement important qui peut avoir des répercussions sur le droit aux prestations, en particulier les changements qui concernent l'état de santé et la capacité de gain ou de travail (art. 77 RAI; cf. aussi art. 31 al. 1 LPGA), est l'expression du principe de la bonne foi entre administration et administré. Pour qu'il y ait violation de l'obligation de renseigner, il faut qu'il y ait un comportement fautif; d'après une jurisprudence constante, une légère négligence suffit déjà. La possibilité pour l'office AI de réviser avec effet rétroactif les prestations qu'il a allouées, ne présuppose plus, depuis le 1er janvier 2015, qu'il existe un lien de causalité entre le comportement à sanctionner (la violation de l'obligation d'annoncer) et le dommage causé (la perception de prestations indues; art. 88bis al. 2 let. b RAI dans sa teneur en vigueur à partir du 1er janvier 2015; arrêt du Tribunal fédéral 9C_33/2021 du 24 juin 2021 consid. 3.2.1 et les références).

11.         En vertu de l’art. 53 al. 2 LPGA, l’assureur peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu’elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable. Cette réglementation l’emporte sur celle de la révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5). Ainsi, l’administration peut aussi modifier une décision de rente lorsque les conditions de la révision selon l’art. 17 LPGA ne sont pas remplies. Si le juge est le premier à constater que la décision initiale était certainement erronée, il peut confirmer, en invoquant ce motif, la décision de révision prise par l’administration (ATF 125 V 368 consid. 2 et les références).

12.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références; cf. ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

13.         En l’espèce, la recourante conclut à l’annulation de la décision de suppression de sa rente d’invalidité au motif qu’après réception du projet de rente, elle s’était informée auprès de l’OAI qui lui avait assuré qu’elle ne serait pas pénalisée lors du versement mensuel des indemnités de chômage ; or, la caisse de chômage lui a expliqué que le versement d’une rente AI à 40 % péjore le montant du gain assuré, ce qui s’est avéré lorsqu’elle a reçu les indemnités de chômage du mois de juillet 2022 qui étaient bien inférieures au montant attendu, raison pour laquelle elle a initié la révision de son cas le 4 août 2022, concluant à la suppression de sa rente d’invalidité.

À l’aune des conclusions prises par la recourante, il apparaît toutefois que cette dernière, qui conclut formellement à l’annulation pure et simple de la décision du 16 septembre 2022 - ce qui aurait pour effet de rétablir la précédente décision d’octroi de rente du 3 juin 2022 – devrait plutôt conclure à la réforme de la décision de suppression, en ce sens que le versement de la rente d’invalidité doit bien être annulé, mais avec effet au 1er avril 2022, en lieu et place du mois suivant la notification de la décision (soit le mois d’août 2022).

L’intimé de son côté a, dans un premier temps, donné suite à la demande de l’assurée, en supprimant la rente AI avec effet à la fin du mois suivant la notification de la décision, puis a modifié son point de vue, après avoir pris connaissance de la motivation du recours de l’assurée, expliquant notamment qu’après examen de la situation, les conditions permettant une révision du droit à la rente n’étaient pas remplies, dès lors que la demande de l’assurée ne faisait état d’aucune modification des circonstances propres à influencer son degré d’invalidité. Compte tenu de ces éléments, l’intimé considère avoir supprimé à tort le droit à la rente de la recourante découlant de la décision du 3 juin 2022 et conclut à l’annulation de la décision attaquée.

14.          

14.1 S’agissant de l’argumentation de la recourante, il sied tout d’abord de relever qu’elle ne fournit aucun détail, nom de personne ou document, quant aux circonstances dans lesquelles un renseignement erroné lui aurait été dispensé par l’OAI concernant son droit aux allocations chômage. Il s’agit, dès lors, d’une allégation toute générale, qui ne saurait entraîner une application éventuelle du principe de la bonne foi.

14.2 Sur le fond, la motivation du recours est essentiellement fondée sur des raisons financières, la recourante se plaignant que la prise en compte de sa rente AI diminuerait le montant des indemnités de chômage qui lui sont servies, raison pour laquelle elle s’est adressée à l’OAI, le 4 août 2022, pour demander la suppression de ladite rente. Ainsi, et contrairement à ce qu’elle semble alléguer dans sa réplique du 8 décembre 2022, ce n’est pas tant l’image qu’elle a d’elle-même selon laquelle la rente d’invalidité « ne lui correspond pas », mais bel et bien les conséquences financières de la rente - qui ont pour effet de diminuer le montant des indemnités de chômage - qui motivent son recours.

En cela, l’intimé ne peut être contredit lorsqu’il déclare que cet argument financier au regard de l’assurance-chômage n’est pas de nature à influer sur la manière de déterminer le degré d’invalidité de la recourante.

14.3 Il sied de rappeler que lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3; ATF 112 V 371 consid. 2b ; ATF 112 V 387 consid. 1b), il n’y a pas motif à révision.

Le seul changement de circonstances que la recourante pourrait faire valoir pour demander la révision de la décision, se fonde sur le certificat médical de son médecin traitant, attestant, de manière extrêmement succincte, qu’elle dispose d’une capacité de travail de 100 % dans toute activité dès le 1er avril 2022.

Or, pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 125 V 261 consid. 4). La tâche du médecin dans le cadre d'une révision de la rente selon l'art. 17 LPGA consiste avant tout à établir l'existence ou non d'une amélioration de l'état de santé de l'assuré en comparant les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la décision initiale avec la situation au moment de son examen (ATF 125 V 369 consid. 2).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3).

La pièce fournie par la recourante n’est pas suffisante pour admettre, au degré de la vraisemblance prépondérante, que cette dernière serait apte à travailler dans toute activité et bénéficierait, réellement, d’une capacité de travail de 100%. À cela s’ajoute que, comme le souligne l’intimé, la décision du 13 juillet 2022, qui fixait le taux d’invalidité à 46%, tenait déjà compte d’une pleine capacité de travail, mais dans une activité adaptée.

Compte tenu de ces éléments, la chambre de céans considère qu’il n’y a pas de motif de révision, mais une nouvelle appréciation de son cas, par la recourante, uniquement soutenue par le bref certificat médical de son médecin traitant ; partant, les conditions pour une révision, qui ont abouti à la décision querellée, ne sont pas remplies.

14.4 Afin d’être complet, il sera encore mentionné que, même en l’absence de conditions pour une révision, l’art. 53 al. 2 LPGA, permet au juge, s’il est le premier à constater que la décision initiale était certainement erronée, de confirmer, en invoquant ce motif, la décision de révision prise par l’administration (ATF 125 V 368 consid. 2 et les références).

En l’état, comme cela ressort des éléments de preuve examinés supra rien ne permet de considérer que la décision initiale d’octroi d’un quart de rente datée du 3 juin 2022 était « certainement erronée ». Dès lors, la décision de révision supprimant la rente du 16 septembre 2022 ne peut pas être confirmée.

Étant précisé que l’assurée conserve la possibilité de présenter une nouvelle demande de révision à l’OAI, fondée sur des pièces médicales idoines afin de démontrer un éventuel changement important de circonstances propres à influencer le degré d’invalidité.

15.         Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis et la décision du 16 septembre 2022 sera annulée.

16.         La recourante n’étant pas assistée d’un mandataire professionnellement qualifié et n’ayant pas allégué ou démontré avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacre à la gestion courante de ses affaires, n'a pas droit à des dépens.

17.         La procédure n'étant pas gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.-.

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

À la forme :

1.      Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement et annule la décision rendue par l’intimé en date du 16 septembre 2022.

3.        Dit qu’il n’est pas octroyé de dépens.

4.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le