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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/745/2019

ATAS/1154/2021 du 15.11.2021 ( LAA ) , REJETE

Recours TF déposé le 23.12.2021, rendu le 12.05.2022, ADMIS, 8C_818/2021
En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

Arrêt du 15 novembre 2021

10ème Chambre

 

En la cause

MUTUEL ASSURANCE MALADIE SA, service juridique, sise rue des Cèdres 5, MARTIGNY

 

 

recourante

contre

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Fluhmattstrasse 1, LUCERNE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Jeanne-Marie MONNEY

et

Monsieur A______, domicilié c/o Madame B______, à GENTHOD

 

intimée

 

 

 

appelé en cause

EN FAIT

1.             Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1980, carreleur à plein temps, était employé dans une entreprise familiale, C______ Sàrl (ci-après : l'employeur), à Genthod, pour un salaire horaire de base de CHF 32.20 auquel s'ajoutait une indemnité pour vacances/jours fériés de 14.14 % et un pro rata de 13ème salaire (8.33 %). Il était à ce titre assuré contre les accidents professionnels et non professionnels selon la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20) auprès de la SUVA Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : la CNA, l'assurance-accidents ou l'intimée).

2.             Le 14 juin 2018, l'employeur a annoncé à la CNA un accident survenu à Versoix le 11 juin 2018 à 13h. L'assuré avait glissé et s'était fait mal aux côtes, au bras et à la main. Il était décrit des contusions au thorax des deux côtés (ddc), une écorchure au bras droit et une contusion au poignet gauche. L'assuré avait interrompu son travail le 11 juin 2018. Les premiers soins avaient été dispensés à l'Hôpital de la Tour; la suite du traitement était assurée par le docteur D______, spécialiste FMH en médecine interne générale et cardiologie (ci-après : le médecin traitant). La personne de contact chez l'employeur était Madame E______.

3.             Des arrêts de travail successifs ont été délivrés : le 11 juin 2018 par l'Hôpital de la Tour, à 100 % dès le 11 juin, prolongé par le médecin traitant, au 24 juin 2018, puis au 1er juillet 2018.

4.             La CNA a pris le cas en charge, au titre d'accident professionnel, annonçant à l'assuré, par courrier du 22 juin 2018, qu'elle prenait en charge l'indemnité journalière à hauteur de CHF 163.- par jour calendaire, avec effet dès le début de l'incapacité de travail, mais au plus tôt le 14 juin 2018. L'indemnité lui serait versée par l'employeur. Il était invité à informer la CNA pour le cas où une autre assurance sociale lui verserait parallèlement des prestations en espèces (rente ou indemnités journalières), ainsi qu'à avertir l'assurance le plus rapidement possible si les indications fournies par le médecin sur la feuille d'accident ne correspondaient pas à sa capacité de travail effective. Les frais de traitement des médecins et autres prestataires de soins exerçant en Suisse seraient réglés directement.

5.             Le 31 juillet 2018, l'employeur a adressé à l'assurance-accidents une nouvelle annonce de sinistre, pour « rechute ». L'assuré avait à nouveau interrompu son travail dès le 30 juillet 2018, le médecin traitant, visant l'accident du 11 juin 2018, ayant délivré un nouvel arrêt de travail du 30 juillet au 5 août 2018.

6.             Par courrier du 2 août 2018, la CNA a indiqué à l'assuré qu'après avoir alloué les prestations d'assurance pour les suites de l'événement du 11 juin 2018 pour lequel une incapacité de travail avait été attestée jusqu'au 8 juillet, au vu de la nouvelle incapacité de travail attestée dès le 30 juillet 2018, elle était obligée de réexaminer le problème de sa responsabilité et émettait toutes réserves à ce sujet, suspendant le versement de toutes prestations dès ce jour; il serait statué après réception des renseignements médicaux demandés à l'Hôpital de la Tour et au médecin traitant.

7.             L'Hôpital de la Tour a adressé à la CNA son rapport de consultation du 11 juin 2018, relatant ce qui suit : le patient, âgé de 38 ans, avait été admis au service des urgences le 11 juin 2018. Il avait été diagnostiqué une contusion du thorax. À l'anamnèse, le patient consultait car il s'était battu à 14 heures; à terre sur le dos, il avait dû se débattre; en se relevant, il avait ressenti une douleur basicostale antérieure, ddc, plus intense à l'inspiration ou lors de mouvements, sans dyspnée, sans douleurs aux abdos; dermabrasions sur les coudes, sans douleurs aux articulations. À l'imagerie (recherche d'un pneumothorax dans les suites d'un trauma costal), le bilan osseux ne révélait ni pneumothorax ni fracture de côtes; pas de tassement du rachis dorsal. Le patient avait été revu durant la nuit du 30 juillet 2018, aux urgences, pour une ordonnance de traitement antalgique car il n'avait plus de comprimés pour les douleurs basicostales. Il était noté une nette amélioration des douleurs. Prescription de Dafalgan/Irfen en réserve.

8.             Par courrier du 10 août 2018, la CNA a adressé à l'assuré un questionnaire destiné à compléter la déclaration d'accident.

9.             L'assuré a répondu le 20 août 2018 : décrivant l'accident, il a indiqué qu'il était au travail et qu'il avait glissé sur le sol mouillé à Versoix le 11 juin à 13 heures. Au titre de circonstances particulières, il a indiqué : « glissage (sic!) »; il avait immédiatement ressenti des douleurs; il n'y avait pas eu de témoin; il s'était rendu à l'Hôpital de la Tour; enfin, s'agissant de son aptitude au travail, il a répondu oui, à 100 % dès le 27 août 2018. Le traitement était terminé.

10.         Le médecin traitant a répondu à la demande de renseignements de la CNA, par courrier du 5 septembre 2018 : suite à l'événement du 11 juin 2018, il avait vu le patient pour la première fois le 13 juin 2018. Il déclarait s'être bagarré dans le cadre d'une dispute familiale, avoir été plaqué à terre et subi une contusion thoracique. Ayant consulté immédiatement les urgences de l'Hôpital de la Tour, il en était ressorti le même jour avec une prescription d'anti-inflammatoires, d'antalgiques et de topique (Bépanthène Plus). Le jour de sa première consultation, il avait constaté des douleurs à la palpation antérieure du thorax sans ecchymose visible. Le patient était fort affecté par cette altercation. Le 19 juin 2018, à la demande du patient, il avait prescrit six séances de physiothérapie. Le 27 juin 2018, il avait revu l'intéressé : il allait mieux sur le plan physique mais ressentait toujours de vives douleurs lors du port de charges. Rappelant que son patient travaillait dans une entreprise de carrelage, et était appelé à ce titre à porter des charges lourdes, il avait prolongé l'incapacité de travail complète jusqu'au 1er juillet 2018. Le 30 juillet 2018, le patient était revenu le consulter : il aurait dû logiquement reprendre son activité le 2 juillet 2018 mais il lui avait annoncé ce jour-là (30 juillet 2018) qu'il n'avait pas repris le travail. Il n'était pas non plus revenu le consulter. Il se plaignait toujours de vives douleurs au gril costal. Il avait concédé une nouvelle période d'incapacité de travail (100 %) du 30 juillet au 5 août 2018. Il avait également prescrit une nouvelle série de séances de physiothérapie. Il n'avait pas revu le patient depuis lors.

11.         Par courrier du 25 septembre 2018, la CNA a rappelé à l'assuré la teneur de la déclaration de sinistre et de ses propres réponses au questionnaire complémentaire. Elle observait cependant que selon les renseignements en sa possession, il était question d'une bagarre. Force était dès lors d'admettre qu'il y avait une divergence entre la déclaration qu'il avait retournée signée le 20 août 2018 et les documents en possession de l'assurance-accidents. Un délai au 15 octobre 2018 lui était imparti pour se déterminer. Passé cette date, la CNA prendrait formellement position.

12.         Le 25 octobre 2018, faute d'observations de l'assuré dans le délai imparti, la CNA a rendu une décision aux termes de laquelle sa prise en charge était annulée; les indemnités journalières payées à tort du « 2 octobre au 27 novembre 2016 » (sic !) pour un montant de CHF 4'075.- devaient être restituées. Contrairement aux indications que l'assuré avait données, quant aux circonstances de l'accident, l'événement s'était produit lors d'une bagarre. Si un accident s'était bien produit, les circonstances dans lesquelles celui-ci était arrivé ne correspondaient pas aux déclarations de l'assuré. Dans ces conditions et en application de l'art. 46 al. 2 LAA (refus de prestations lorsqu'une fausse déclaration d'accident a été remise intentionnellement à l'assureur), la décision de prise en charge du sinistre devait être annulée et la CNA devait refuser après-coup de lui allouer ses prestations. En tant qu'une éventuelle opposition porterait sur la réduction ou la suppression des prestations en cours, l'effet suspensif serait retiré au sens de l'art. 11 OPGA. Copie de cette décision a été adressée à Mutuel assurance maladie SA, assureur-maladie LAMal de l'assuré (ci-après : MUTUEL, la caisse-maladie ou la recourante).

13.         Le même jour, la CNA a informé l'employeur que sa décision d'acceptation de prise en charge du 22 juin 2018 avait fait l'objet d'une révision procédurale (art. 53 LPGA). En l'espèce, la CNA ne pouvait pas allouer de prestations d'assurance. Une décision susceptible d'opposition était notifiée à l'intéressé. L'employeur était prié de s'adresser directement à ce dernier pour obtenir des informations détaillées.

L'assurance-accidents a également informé l'Hôpital de la Tour, le médecin traitant, ainsi que le physiothérapeute, dans le même sens, en leur précisant qu'elle avait demandé la restitution des frais de traitement directement à la caisse-maladie.

14.         En date du 26 octobre 2018, la CNA Genève a adressé à MUTUEL une facture No 19514812 intitulée « répartition des coûts frais de traitement », pour un montant de CHF 965.85.

15.         Selon une notice téléphonique du 23 novembre 2018, la CNA Lucerne a reçu ce jour-là un appel de Madame E______, au sujet de la décision susmentionnée, et la situation de son petit frère. La situation était « très très compliquée »; il y avait effectivement eu une bagarre entre son frère et son papa  Apparemment, l'assuré (qui incidemment souffrait de problèmes psychiques depuis une dizaine d'années et ne prenait plus ses médicaments) n'était pas même au courant des derniers courriers échangés entre l'employeur et l'assurance-accidents; il ne fallait en l'état pas le contacter. Face à cette situation complexe, la CNA avait convenu que le délai d'opposition était en l'état respecté et ne courait plus; elle avait orienté la sœur de l'assuré auprès de la gestionnaire de sinistres à la CNA Genève.

16.         Selon une notice téléphonique du même jour, 23 novembre 2018, Madame F______ (CNA Genève) a consigné les termes d'un entretien téléphonique avec la sœur de l'assuré. Elle a notamment noté que c'était sur le conseil de cette dernière que l'état de fait (bagarre entre père et fils) n'avait pas été communiqué. Elle ne désirait pas que leurs problèmes soient connus. Elle confirmait toutefois que c'était bien son frère qui avait répondu au questionnaire le 20 août 2018.

17.         Par courrier recommandé du 23 novembre 2018, MUTUEL a formé opposition provisoire à la décision du 25 octobre 2018, sollicitant la communication de l'ensemble du dossier de la CNA pour analyse par le service médical.

18.         Par courrier recommandé du 19 décembre 2018, la caisse-maladie a maintenu son opposition. Elle a conclu à l'annulation de la décision de révision, tout au moins à la prise en charge par la CNA des frais de traitement : selon la jurisprudence (ATF 143 V 393), l'art. 46 al. 2 LAA permettait à l'assureur de réduire ou de refuser les prestations à titre de sanction en cas de fausses informations données intentionnellement. L'assureur devait examiner une telle éventualité pour chaque prestation en particulier, en respectant l'interdiction de l'arbitraire, ainsi que les principes de l'égalité de traitement et de proportionnalité. Au regard de ce dernier principe, les indemnités journalières peuvent être refusées, mais pas les prestations pour soins médicaux (consid. 8. 3). Dans le cas d'espèce, l'employeur a déclaré avoir personnellement et volontairement rédigé une fausse déclaration afin de ne pas divulguer des problèmes familiaux, précisément la situation psychique difficile de l'intéressé et les litiges qui en découlaient avec son père. L'employeur, et a fortiori l'assuré, n'avaient manifestement pas l'intention d'obtenir des indemnités journalières supérieures à celles qui leur étaient dues, mais bien de protéger la réputation familiale. Au vu des faits établis, une dispute avérée entre le père et le fils, une réduction de 50 % des indemnités journalières serait justifiée, comme dans tous les cas de rixes. Par contre, un refus des frais de traitement n'apparaissait pas justifié. La décision de révision déniant le droit de l'assuré à toute prestation violait le principe de la proportionnalité. La nécessité des soins médicaux n'était pas simulée; la finalité de la loi n'était pas de faire supporter les frais médicaux à un autre assureur.

19.         Par décision sur opposition du 24 janvier 2019, la CNA a déclaré l'opposition de MUTUEL irrecevable. Selon l'art. 48 al. 1 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021), a qualité pour agir celui qui est spécialement atteint par la décision attaquée. Or, en l'espèce, dans la mesure où l'assuré a été victime d'un accident, la caisse-maladie n'a aucun intérêt digne de protection et l'opposition devait être déclarée irrecevable. L'art. 46 al. 2 LAA permettait à l'assureur de réduire ou de refuser les prestations en cas de fausses informations données intentionnellement. N'importe quelle fausse information contenue dans la déclaration d'accident suffisait dès lors qu'elle conduisait à l'octroi de prestations d'assurance plus élevées que celles auxquelles l'assuré aurait droit conformément à la situation effective. Dans le cas d'espèce, la CNA s'était limitée à demander à l'assuré le remboursement de l'indemnité journalière versée à tort, alors que dans l'arrêt du Tribunal fédéral évoqué par l'opposante, l'assureur-accidents avait sollicité le remboursement de l'indemnité journalière et des frais de traitement.

20.         Par courriel du 8 février 2019, MUTUEL s'est adressée à la CNA. Se référant à un entretien téléphonique du matin même au sujet de la décision formelle et de la décision sur opposition déclarant l'opposition irrecevable, elle a fait valoir ce qui suit : tant la décision formelle que la décision sur opposition ne mentionnaient pas expressément l'obligation ou le devoir de l'assuré de rembourser les frais médicaux ni le renvoi à sa caisse-maladie. En revanche, la CNA avait clairement écrit au médecin traitant, à l'hôpital et au physiothérapeute (courriers du 25 octobre 2018) qu'elle avait demandé la restitution des frais de traitement directement à la caisse-maladie. Quant à la décision formelle du même jour, elle mentionnait que : « Notre décision de prise en charge doit être annulée et nous devons refuser après-coup de vous allouer nos prestations », ceci sans autre précision. Par conséquent, il découlait de l'ensemble de ces documents que la CNA entendait mettre les frais de traitement à charge de MUTUEL, raison pour laquelle MUTUEL estimait avoir la légitimation nécessaire pour s'y opposer (et cela même si la demande de restitution chiffrée ne concernait que les indemnités journalières). À bien comprendre le raisonnement de la CNA, le fait qu'elle reconnaisse un accident au sens de la LAA, tout en refusant les prestations, protégerait la caisse-maladie de toute obligation de prise en charge des frais médicaux. Or, au vu des documents susmentionnés, MUTUEL pouvait légitimement en douter. D'autre part, en vertu de la loi (art. 64 LPGA), le refus de prestations de la LAA impliquait une prise en charge par la LAMal, ce que MUTUEL refusait dans le cas d'espèce. L'assuré pourrait en outre invoquer l'art. 72 LPGA, ce qui obligerait l'assureur-maladie à verser ses prestations jusqu'à droit connu sur le fond du dossier LAA. Par ailleurs, les principes de célérité et d'unité de la procédure impliquaient de traiter toutes les questions juridiques dans une seule décision, sauf raison particulière. En l'occurrence, il paraissait étrange de séparer la décision sur les indemnités journalières et la décision - informelle ou sous-entendue - sur les frais médicaux. Par conséquent, afin de clarifier la position de la CNA et d'éviter un procès, l'assureur-accidents était prié de bien vouloir, à brève échéance, rendre une décision formelle de prise en charge des frais médicaux liés à cet accident.

21.         Par courriel du 11 février 2019, la CNA a répondu à MUTUEL : « La Suva ne conteste pas que l'assuré a été victime d'un accident mais a refusé d'engager sa responsabilité selon l'art. 46 al. 2 LAA. Dans ce cas de figure, on n'est pas dans un cas d'application de l'art. 49 al. 4 LPGA (et de l'art. 70 LPGA), raison pour laquelle la décision vous a été transmise seulement pour connaissance. La Suva n'entend pas mettre les frais de traitement à la charge de la caisse-maladie. La Suva est d'avis qu'il n'incombe pas à la caisse-maladie de supporter les conséquences de la sanction qu'elle a prononcée. Aucune autre décision ne sera rendue pour le cas d'espèce ».

22.         Il ressort d'une note téléphonique de la CNA Genève du 19 février 2019 avec MUTUEL que cette dernière a pris note, selon courriel du 11 février 2019, que la prise en charge n'incombait pas à l'assureur-maladie; elle observait toutefois avoir reçu deux rappels de la CNA (10 janvier et 1er février 2019) pour la demande de remboursement de prestations de CHF 965.85. L'assureur-accidents était prié d'annuler la demande.

Il ressortait au demeurant du dossier que la CNA n'avait jamais répondu à MUTUEL, s'agissant de lui fournir le détail du montant réclamé.

23.         Selon courriel du 19 février 2019 - dont copie à MUTUEL - la CNA Genève a prié le service de facturation de la CNA d'annuler la demande de remboursement de la facture No 19514812 du 26 octobre 2018 à MUTUEL et de l'adresser à l'assuré.

24.         Par décision du 20 février 2019, adressée par courrier A+ à l'assuré, la CNA a observé qu'après un contrôle des actes, il était apparu que la restitution des frais de traitement n'avait pas été requise par la première décision (25 octobre 2018). Il ne saurait être question d'un report de charge et la prise en charge des frais médicaux ne pouvait être demandée à l'assureur-maladie LAMal. Partant, dès lors que la CNA avait refusé d'intervenir pour la prise en charge de l'événement du 11 juin 2018, de facto, les prestations qui avaient été servies l'avaient été à tort; il devait en être de même pour les prestations en nature. L'intéressé était dès lors prié de rembourser les frais de traitement, ceux-ci s'élevant à CHF 581.75 (sic!).

25.         Par courrier du 22 février 2019, MUTUEL a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans ou la CJCAS) d'un recours contre la décision sur opposition déclarant l'opposition irrecevable rendue le 24 janvier 2019 par la CNA. Elle conclut à l'annulation de la décision entreprise et au renvoi de la cause à l'intimée pour nouvelle décision sur opposition entrant en matière sur la prise en charge des frais médicaux. Dans la décision sur opposition, l'intimée précisait avoir refusé tout droit aux prestations d'assurance et demandait la restitution de l'indemnité journalière versée à tort. Dans sa décision du 25 octobre 2018, la CNA écrivait déjà que sa décision de prise en charge devait être annulée et qu'elle devait refuser après-coup d'allouer ses prestations à l'intéressé, réclamant en conséquence le remboursement des indemnités journalières payées à tort. Mais parallèlement à cette décision, la CNA écrivait aux fournisseurs de prestations pour leur indiquer qu'après réexamen du dossier, la CNA n'était pas engagée. Elle avait demandé le remboursement des frais médicaux à l'assureur-maladie. Le 26 octobre 2018, la CNA a adressé une facture non détaillée réclamant à la recourante sous le titre « répartition des coûts frais de traitement » la somme de CHF 965.85. En substance, entre la décision dont est recours et le dépôt du recours, après intervention de l'assureur-maladie pour clarifier sa position, et celle de la CNA par rapport à la question des frais médicaux, l'intimée avait communiqué à la recourante, par courriel du 19 février 2019, que la facture susmentionnée allait être annulée en tant qu'elle concernait l'assurance-maladie, et allait être ré-adressée à l'assuré.

Il ressort des pièces produites à l'appui du recours que la recourante a réglé au total la somme de CHF 969.10 (pièces 8 à 14 – montants surlignés en jaune) sur l'ensemble des factures qui lui avaient été adressées entre le 19 juin et le 22 novembre 2018 en relation avec l'événement du 11 juin 2018 (Hôpital de la Tour, pharmacie, médecin traitant et physiothérapeute). La recourante avait encore invité la CNA à rendre une décision formelle en ce qui concerne la prise en charge des frais médicaux, ce que cette dernière avait refusé.

Considérant qu'est litigieuse la question de savoir si la CNA était fondée à refuser d'entrer en matière sur l'opposition formée par la recourante, contre sa décision du 25 octobre 2018, singulièrement à la déclarer irrecevable, elle soutenait être directement touchée dans son obligation de verser des prestations pour frais médicaux en faveur de l'assuré, de sorte qu'elle disposait des mêmes droits de recours que l'assuré. Selon le système légal, le traitement est à la charge exclusive d'une seule assurance sociale dans la mesure où il s'agit de prestations prescrites par la loi (art. 64 LPGA qui prévoit en outre un ordre de prise en charge - assurance militaire, assurance accidents, AI, assurance-maladie). L'art. 1a al. 2 let. b LAMal prévoit que l'assurance-maladie sociale alloue des prestations en cas d'accident dans la mesure où aucune assurance-accidents n'en assume la prise en charge. L'assurance-maladie sociale remplit ainsi à la fois un rôle subsidiaire et complémentaire : subsidiaire quand elle a pour tâche de combler dans ce domaine des lacunes d'assurance en raison de sa fonction supplétive; complémentaire lorsqu'elle peut être amenée à prendre en charge des frais non couverts ou couverts partiellement par une assurance-accidents. Ni la LPGA, ni la LAMal ne prévoient des exceptions à l'obligation de prise en charge subsidiaire de l'assureur-maladie en cas de sanctions de la part de l'assurance-accidents LAA. Il en découle que si l'assureur-accidents LAA invoque l'art. 46 al. 2 LAA pour refuser la prise en charge des frais médicaux, il revient à l'assureur-maladie d'intervenir en vertu de l'art. 1a al. 2 let. b LAMal. Finalement, l'art. 70 al. 2 let. a LPGA relatif à la prise en charge provisoire des prestations, précise que l'assurance-maladie est tenue de prendre provisoirement en charge les prestations en nature et les indemnités journalières dont la prise en charge par l'assurance-maladie, l'assurance-accidents, l'assurance militaire ou l'AI est contestée. En l'espèce, la CNA a rendu une décision le 25 octobre 2018 incluant, d'une part, le refus rétroactif du droit aux prestations sans limitation et, d'autre part, une décision de restitution de l'indu fondée sur l'art. 25 LPGA relative aux indemnités journalières. Il s'agit donc bien, comme l'a compris la recourante, d'un refus du remboursement des frais médicaux que la CNA aimerait laisser à la charge de l'assuré lui-même. Son refus est basé sur une sanction prise en application de l'art. 46 al. 2 LAA. L'intimée ne réfutait pas la notion d'accident et elle prétend que, pour cette raison, les prestations ne pourraient pas être facturées, respectivement pas prises en charge par la caisse-maladie. En substance, si la recourante devait suivre le raisonnement de l'intimée - en tant qu'elle considère que la recourante ne peut faire valoir aucun intérêt digne de protection car elle ne serait pas concernée par une demande de remboursement des indemnités journalières réclamées à l'assuré, l'intimée n'avait pas clarifié sa position en rendant une décision formelle sur la prise en charge des frais médicaux, que l'assureur-maladie aurait pu contester; elle devait donc entrer en matière sur l'opposition formulée à l'encontre de sa décision du 25 octobre 2018 qui refusait l'octroi de toutes les prestations, avec pour conséquence, de mettre les frais médicaux à la charge de l'assureur-maladie selon la LAMal.

26.         L'intimée, représentée par un conseil, a répondu au recours par mémoire du 23 avril 2018 (recte : 2019). Elle conclut à son rejet. Le litige était circonscrit par la décision entreprise à la question de savoir si c'était à juste titre que l'intimée avait considéré que l'assureur-maladie de l'assuré n'avait pas d'intérêt digne de protection à interjeter opposition à l'encontre de la décision de restitution des indemnités journalières versées à tort à l'assuré, et partant, qu'elle avait déclaré l'opposition irrecevable. À la motivation de la décision entreprise, à laquelle elle se référait expressément, l'intimée ajoutait ce qui suit : la recourante prétend que le litige porte en réalité sur le refus de la CNA de prendre en charge les frais médicaux liés à l'accident de l'assuré du 11 juin 2018. Elle considère que la décision de restitution du 25 octobre 2018 a une influence directe sur son obligation de prise en charge des frais de traitement, considérant en particulier qu'en tant qu'assureur-maladie, elle est tenue de prendre en charge ces frais à titre subsidiaire. En l'espèce, par décision du 25 octobre 2018, la CNA a considéré que l'assuré avait fait sciemment de fausses déclarations concernant les circonstances de l'accident. Appliquant l'art. 46 al. 2 LAA, aux termes duquel l'assureur peut refuser la prestation lorsqu'une fausse déclaration d'accident lui a été remise intentionnellement, la CNA a demandé à l'assuré la restitution des indemnités journalières versées à tort, pour un montant de CHF 4'075.-. Contrairement à ce que soutient la recourante, cette décision ne portait nullement sur le remboursement des frais médicaux liés à l'accident du 11 juin 2018, mais uniquement sur les indemnités journalières. Il ressortait d'ailleurs du courriel envoyé le 11 février 2019 à la recourante par la CNA, que cette dernière n'entendait pas mettre les frais de traitement à la charge de la caisse-maladie. On ne voyait dès lors pas comment l'assureur-maladie pouvait en conclure que les frais de traitement feraient également partie du litige. Au demeurant, l'argument selon lequel l'assureur-maladie aurait été sollicité pour la prise en charge de certaines factures, pour un montant de CHF 960.10, était erroné. En effet, il ressortait précisément de la pièce produite par la recourante à l'appui de son recours que la CNA avait annulé la demande de remboursement auprès de l'assureur-maladie pour cette somme, partant la recourante avait interjeté opposition sur un élément ne faisant pas l'objet de la décision du 25 octobre 2018. Pour cette raison déjà, l'opposition de l'assureur-maladie était effectivement irrecevable. De surcroît si, conformément à la LAMal, l'assurance-maladie sociale allouait des prestations en cas d'accidents, dans la mesure où aucune assurance-accidents n'en assume la prise en charge, l'art. 28 LAMal précisait bien qu'en cas d'accident au sens de cette disposition, l'assurance obligatoire des soins prenait en charge les coûts des mêmes prestations qu'en cas de maladie; or, le versement d'indemnités journalières ne figure pas au nombre des prestations énumérées par l'art. 25 LAMal. De ce point de vue, le fait pour la CNA de réclamer à l'assuré la restitution des indemnités journalières qui lui ont été versées à tort n'a aucune influence sur l'assurance-maladie. La recourante ne subit dès lors aucun préjudice, notamment économique, du fait de cette décision. Enfin, l'art. 70 al. 2 let. a LPGA (prise en charge provisoire par l'assurance-maladie des prestations en nature contestées) n'est pas applicable en l'espèce. En effet, les indemnités journalières mentionnées dans cet article sont celles des art. 67 et suivants LAMal, soit celles qui sont versées dans le cadre d'une assurance facultative d'indemnités journalières, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Dans la mesure où l'avance des prestations, traitement médical ou indemnités journalières par l'assurance-maladie présuppose un rapport d'assurance avec l'assurance-maladie et un droit aux prestations à avancer, ce qui n'est pas le cas ici, la recourante n'aurait pas à intervenir sur la base de cet article du fait de la demande de restitution des indemnités journalières versées à tort (Cf. FRESARD-FELLAY/FRESARD, in : DUPONT/MOSER-SZELESS, Commentaire romand de la LPGA, ad art. 70 N 20 p. 859).

27.         La recourante a répliqué par courrier du 28 mai 2019. Elle a maintenu ses conclusions. En premier lieu, l'intimée s'employait à faire croire que la décision entreprise, et donc le litige, ne porterait que sur la demande de restitution des indemnités journalières. Or, tel n'est « manifestement » pas le cas, puisque la CNA elle-même, dans sa réponse au recours (en Fait, ch. 6), écrit qu'elle « refuse tout droit aux prestations ». Étant donné que les prestations prévues dans la LAA sont à la fois les frais médicaux et les indemnités journalières, le refus de « tout droit aux prestations » impactait évidemment la prise en charge des frais médicaux. Par conséquent, l'argumentation de l'intimée portant sur les indemnités journalières et la prétendue irrecevabilité de l'opposition, respectivement du recours, n'était pas pertinente et ne lui était d'aucune utilité. Comme déjà exposé dans le recours, la prise en charge par la caisse-maladie LAMal concerne toutes les factures de frais médicaux au sens des art. 24 et suivants LAMal, en relation avec l'accident du 11 juin 2018, qui peuvent être transmises dans le délai de 5 ans de l'art. 24 al. 1 LPGA. Dès lors, la recourante a un intérêt digne d'être protégée et à ce que ladite décision de la CNA soit annulée ou modifiée (art. 59 LPGA). Dans un premier temps, la CNA avait bel et bien demandé le remboursement des frais médicaux à la recourante (ce qui est confirmé par les pièces produites). Dans un second temps, la CNA tentait de déplacer le problème juridique de la prise en charge des factures de soins sur l'assuré. Or, quelle que soit l'opinion de l'intimée, l'assuré conservait son droit de transmettre à l'assurance-maladie, pour remboursement, des factures qu'il aurait réglées lui-même. En troisième lieu, dans sa décision du 20 février 2019, dont la recourante n'avait eu connaissance qu'à réception du bordereau de pièces déposé par la CNA avec sa réponse au recours, cette dernière écrivait à l'assuré, à propos des frais de traitement, « qu'il ne saurait être question d'un report de charge et que, de facto, la prise en charge de ces frais ne peut être demandée à votre assureur-maladie au sens de la LAMal ». Ce faisant, la CNA induisait l'assuré en erreur en laissant entendre qu'il n'aurait pas le droit de demander un remboursement des frais médicaux à son assureur-maladie. De plus, cette décision n'avait été adressée qu'à l'assuré alors qu'elle concernait aussi l'obligation de l'assureur LAMal de prester; la recourante s'opposait donc à cette décision, dont le contenu faisait déjà l'objet de la présente cause. Elle soulignait que l'intimée n'a pas la compétence de choisir à qui elle veut imputer le paiement des frais médicaux. Elle ne peut qu'en refuser la prise en charge en émettant une décision formelle dûment adressée aux parties et susceptible d'être contestée en justice. Et enfin, la CNA n'a pas compris que la somme de CHF 969.10 a été payée directement par la recourante, mais pas sur la base de la demande de remboursement de l'intimée. Les factures justificatives démontraient que les prestataires de soins ou l'assuré avaient été payés et non pas la CNA. La recourante relevait encore que la CNA avait demandé le remboursement de CHF 581.75 à l'assuré, dans sa décision du 20 février 2018 sur les CHF 965.85 réclamés en premier lieu à l'assureur-maladie. De plus, l'intimée n'avait jamais produit les factures relatives à la somme réclamée. Qu'en était-il de la différence ? Il était dès lors établi que la recourante avait un intérêt digne de protection à recevoir une décision de la part de la CNA sur la prise en charge ou non des frais médicaux. Cette dernière avait le devoir d'entrer en matière sur l'opposition formée par la recourante.

28.         L'intimée a dupliqué par courrier du 1er juillet 2019. Elle persistait dans ses conclusions. La recourante se contentait de réitérer des arguments déjà évoqués dans le cadre de son recours. Si la décision du 25 octobre 2018, confirmée sur opposition, indiquait certes que la CNA refusait d'allouer ses prestations à l'assuré, il n'en demeurait pas moins que seul le remboursement des indemnités journalières était réclamé dans le cadre de cette décision. Ainsi, quoi qu'en dise la recourante, l'objet de la contestation portait uniquement sur la question du remboursement des indemnités journalières et non pas sur celle du remboursement des frais médicaux. Les conclusions de la recourante allant au-delà de l'objet de la contestation, c'est à juste titre que l'intimée a considéré que l'opposition était irrecevable. L'assureur-maladie n'étant aucunement tenu de verser des indemnités journalières dans le présent cas, il n'avait aucun intérêt digne de protection à faire opposition à la décision du 25 octobre 2018. Quant à la décision du 20 février 2019 invoquée par la recourante, il s'agissait précisément d'une autre décision, indépendante de celle du 25 octobre 2018, et qui ne faisait pas l'objet de la présente procédure. Par conséquent, il était erroné de prétendre que le contenu de celle-ci concernerait la présente cause.

29.         Par ordonnance du 5 février 2020, la chambre de céans a appelé Monsieur A______ en cause et fixé une comparution personnelle des parties au 20 avril 2020, la possibilité étant réservée à l'appelé en cause de se prononcer par écrit, après audience de comparution personnelle.

30.         La chambre de céans ayant dû annuler l'audience prévue en raison des mesures prises par les autorités dans le cadre de la crise sanitaire du coronavirus, elle a reconvoqué les parties à une audience de comparution personnelle pour le 29 juin 2020.

31.         L'appelé en cause ne s'est pas présenté à l'audience, un courrier du docteur G______, chef de clinique au service de psychiatrie adulte des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) étant parvenu le jour de l'audience à la chambre de céans : ce médecin indiquait à la juridiction que l'assuré ne pourrait pas être présent à l'audience, une telle participation étant contre-indiquée par son état de santé. Le patient était suivi par l'Équipe Mobile de Psychiatrie depuis le 18 août 2019, car il n'arrivait plus à sortir de son domicile pour honorer ses rendez-vous au CAPPI H______. Il présentait depuis presqu'une année une recrudescence de son trouble psychotique. Il avait renversé son rythme nycthéméral depuis des mois, passant la majorité de la nuit éveillé, afin d'éviter que les « présences » qu'il ressentait dans la maison puissent agir sur lui sans son consentement. Dans cette situation, il n'était plus sorti de chez lui que cinq ou six fois sur une année complète. Le médecin soussigné et son infirmier référent le suivaient à domicile à une fréquence de deux fois par semaine. Au moins une fois, presque toutes les semaines, le patient n'arrivait pas à leur ouvrir, car il dormait.

32.         Lors de l'audience, les parties ont procédé à un tour d'horizon, et identifié deux problématiques qui devraient faire l'objet de clarifications : - en ce qui concerne les prétentions chiffrées, en déterminer le détail et la justification (divergence entre le montant initialement réclamé par la CNA et celui que la recourante dit avoir pris en charge dans le cadre des demandes de remboursement reçues des prestataires de soins [Hôpital de la Tour, physiothérapie et médecin traitant]), ces montants différant encore du montant réclamé par la CNA directement à l'assuré; - l'interprétation de la décision dont est recours, la CNA considérant qu'elle ne concernait que l'aspect des indemnités journalières, MUTUEL considérant pour sa part qu'elle concernait l'ensemble des prestations LAA, par conséquent y compris la question des frais médicaux. Dans ce contexte, la CNA considérait que ce dernier aspect avait été l'objet d'une décision distincte du 20 février 2019, dont MUTUEL disait n'avoir eu connaissance qu'à réception de la réponse de la CNA au recours et des pièces produites par l'intimée dans la présente procédure; ce qui n'était pas contesté par l'intimée. Dans la mesure où MUTUEL indiquait dans ses écritures de réplique qu'en tant que de besoin, elle formait opposition à cette dernière décision, la chambre de céans serait, le cas échéant, amenée à renvoyer la cause à la CNA, la décision du 20 février n'étant pas rendue sur opposition.

Sur la base de ces deux problématiques, les parties chercheraient à trouver un accord, raison pour laquelle elles ont sollicité la suspension de la présente cause, en application de l'art. 78 LPA (d'accord entre les parties). La chambre de céans a pris acte de la demande des parties.

33.         La CJCAS a dès lors suspendu l'instruction de la procédure, par ordonnance du 29 juin 2020.

34.         Par courrier du 26 mai 2021, le conseil de la CNA a informé la chambre de céans de ce que les pourparlers transactionnels engagés avec la recourante n'avaient pas abouti. Elle sollicitait la reprise de l'instruction. Elle rappelait que la décision entreprise portait uniquement sur la question du remboursement des indemnités journalières et non pas sur la question du remboursement des frais médicaux. Les conclusions de la recourante allant au-delà de l'objet de la contestation, c'était à juste titre que l'opposition avait été déclarée irrecevable (courrier du conseil de l'intimée du 1er juillet 2019 et les références doctrinales citées [METRAL : Loi sur la partie générale des assurances sociales, DUPONT MOSER-SZELESS (éditrices), Commentaire romand Helbing Lichtenhahn 2018 ad art. 56 N 8 p. 667 et ref. ATF 142 I 155 consid. 4.4.2; ATF 134 V 418 consid. 5.2.1]). Quant à la décision évoquée par la recourante, il s'agissait d'une autre décision, indépendante de celle du 25 octobre 2018 qui ne faisait pas l'objet de la présente procédure judiciaire.

35.         La chambre de céans a ordonné la reprise de l'instruction de la cause et imparti un délai à l'appelé en cause pour se déterminer.

36.         Par courrier du 31 mai 2021, la recourante, réagissant au courrier de l'intimée du 26 mai 2021, a rappelé que la négociation portait uniquement sur la prise en charge des frais médicaux. L'intimée n'avait pas accepté de transiger car elle estimait avoir refusé à juste titre toutes prestations, ce qui – selon la recourante – signifiait bien que la décision du 25 octobre 2018 portait sur le refus de toutes les prestations (frais médicaux et indemnités journalières) contrairement à ce que prétendait l'intimée. Dès lors que la CNA acceptait la notion d'accident mais refusait la prise en charge du cas, cela impliquait de facto un report de charge sur la caisse-maladie, preuve en était que les gestionnaires de l'intimée avaient adressé leur courrier à MUTUEL; de plus, la CNA n'avait pas la compétence de décider si la caisse-maladie devait ou non intervenir; en revanche, elle avait l'obligation de se déterminer sur les décisions avec lesquelles l'intéressé n'était pas d'accord (art. 49 al. 1 LPGA). En l'occurrence, la caisse-maladie avait concrètement payé des frais médicaux à hauteur précisément de CHF 933.65. Ce simple fait fondait son intérêt digne d'être protégé (art. 49 al. 1 LPGA) et le droit d'obtenir une décision sur opposition sur le fond (relative aux frais médicaux). La recourante rappelait que le litige portait actuellement sur la décision sur opposition déclarant l'opposition irrecevable du 24 janvier 2019; or, soit la décision du 25 octobre 2018 portait aussi sur les frais médicaux et touchait donc aussi la caisse-maladie, soit elle ne concernait que les indemnités journalières et la CNA devait rendre une décision formelle sur la prise en charge des frais médicaux, comme le lui avait demandé l'assureur-maladie, ce qu'elle avait finalement fait le 20 février 2019 sans en informer MUTUEL. L'incohérence de la CNA était incompréhensible, alors que la situation n'apparaissait pas compliquée. La décision de la CNA du 25 octobre 2018 correspondait à la procédure standard des assureurs LAA, à savoir d'inclure dans la même décision les frais médicaux, les indemnités journalières et la demande de restitution de l'indu. Les assureurs doivent en principe rendre une seule décision vertu du principe de l'unité de la procédure. Enfin, la décision du 20 février 2019, dont la recourante n'avait eu connaissance qu'à réception du bordereau de pièces déposé par l'intimée dans le cadre de la présente procédure, concernait précisément la prise en charge de ces frais médicaux. La CNA devrait donc de toute manière prendre position sur la question de fond des frais médicaux, même si elle avait cherché à l'éviter (courriel de la CNA du 11 février 2019, pièce 18 chargé recourante). L'opposition formée par MUTUEL dans sa réplique du 28 mai 2019 pouvait lui être transmise formellement comme objet de sa compétence. La recourante estimait que le vice de l'absence de communication de cette décision à l'assureur-maladie pouvait être considéré comme réparé : une motivation complémentaire serait directement adressée « prochainement » à la CNA. MUTUEL maintenait ainsi ses conclusions, dès lors qu'il était établi qu'elle avait un intérêt digne de protection de recevoir une décision sur opposition concernant la prise en charge des frais médicaux.

37.         Par courrier du 22 juin 2021, la mère de l'appelé en cause (ci-après : la mère), se référant à un entretien téléphonique préalable de sa fille avec la greffière de la juridiction de céans, confirmait que son fils n'était actuellement pas en état de répondre aux délais impartis par la chambre de céans pour qu'il se détermine sur la cause, comme il n'était d'ailleurs pas possible actuellement à sa mère de pouvoir lui demander une procuration pour l'habiliter à le représenter. Son fils était à l'AI et souffrait de graves troubles psychiques, ce qui pouvait rendre certaines situations très compliquées à gérer selon son état du moment (comme par exemple son absence à la CP du 29 juin 2020). En conclusion, elle demandait à la chambre de céans de considérer son courrier comme une réponse au délai imparti à son fils pour se déterminer.

38.         Par courrier du 24 juin 2021, la chambre de céans a répondu au courrier précédent, indiquant à la mère que, conformément à l'art. 9 al. 1 et 2 LPA, il lui était loisible en l'occurrence de représenter son fils sans production (obligatoire) d'une procuration. La CJCAS considérait le courrier du 22 juin 2021 comme une demande de prolongation de délai, qui était ainsi accordée au 30 juillet 2021.

39.         Par courrier du 26 juillet 2021, la mère a sollicité de la chambre de céans qu'elle autorise sa fille à représenter son frère, et lui accorde un délai raisonnable à cette fin : en effet, sa fille s'occupait seule de son enfant et était en train de reprendre l'entreprise de son père. Quant à elle, au vu de la situation de son fils, elle s'occupait de toute son administration, ce qui était pesant vu son âge (71 ans) et ses problèmes de santé. Elle avait tenté de se pencher sur ce dossier, mais elle n'y comprenait pas grand-chose. Sa fille sollicitait un entretien avec le président de la chambre de céans, afin qu'il lui explique les tenants et aboutissants de cette procédure, ou alors qu'il la dirige vers une personne compétente pour représenter au mieux l'appelé en cause. Elle avait bien compris qu'il y avait un litige entre l'assurance-maladie « perte de gain (sic !) » et l'assureur-accidents, mais elle ne comprenait pas dans quelle mesure son fils était impliqué dans cette affaire.

40.         Par courrier du 30 juillet 2021, le conseil de l'intimée a persisté à considérer que la décision entreprise ne concernait que le remboursement des indemnités journalières, preuve en était qu'une seconde décision, datée du 20 février 2019, avait été rendue par la CNA, laquelle portait sur le remboursement des frais médicaux. La recourante l'admettait d'ailleurs dans ses écritures, dès lors qu'elle reconnaissait que la CNA avait finalement rendu une décision formelle sur la prise en charge des frais médicaux, comme requis par l'assureur-maladie, dit assureur ayant en outre interjeté opposition à l'encontre de cette décision dans le cadre de sa réplique du 28 mai 2019. Dans ces conditions, c'était à juste titre que la CNA avait considéré que l'opposition à l'encontre de la décision, portant uniquement sur le remboursement des indemnités journalières, était irrecevable. Force était ainsi de considérer, en fin de compte, que la recourante ne contestait plus que la question des frais de traitement, objet de la décision du 20 février 2019, et non pas de la décision entreprise dans le cadre de la présente procédure.

41.         Par courrier du 16 août 2021, la chambre de céans a répondu au courrier de la mère du 26 juillet 2021. Il n'était pas possible à cette juridiction de rencontrer sa fille en dehors d'une audience, laquelle n'apparaissait pas judicieuse à ce stade. Son fils avait été appelé en cause pour des motifs de procédure, dans la mesure où la décision à rendre pourrait le cas échéant lui être opposée. Ainsi, son droit d'être entendu devait lui être réservé, et sa qualité de partie reconnue. Il pouvait, sans nécessairement avoir recours à de longs développements, s'en rapporter à justice en le disant expressément, soit conclure à l'admission ou au rejet du recours, en expliquant brièvement pourquoi. Sa fille pourrait le cas échéant préparer la détermination de son frère, et la faire signer par la mère. À toutes fins utiles, une liste d'organismes compétents pour la conseiller ou représenter son fils était jointe à ce courrier. La CJCAS précisait en tant que de besoin que les renseignements fournis en l'espèce n'avaient pas valeur de conseils mais d'informations toutes générales. Un ultime délai lui était imparti au 17 septembre 2021.

42.         Par courrier du 15 septembre 2021, la sœur de l'assuré a indiqué à la chambre de céans qu'elle s'en remettait à justice, laissant le soin à la juridiction de décider.

43.         Sur quoi, la chambre de céans a indiqué aux parties que la cause était gardée à juger. Aucune d'entre elles ne s'est plus manifestée.

 

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 82a LPGA; RO 2020 5137; FF 2018 1597; erratum de la CdR de l’Ass. féd. du 19 mai 2021, publié le 18 juin 2021 in RO 2021 358).

4.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56ss LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

5.             Le litige porte sur la question de savoir si c'est à juste titre que la CNA a considéré, dans la décision entreprise, que l'opposition de MUTUEL, assureur-maladie de l'assuré selon la LAMal (assurance obligatoire des soins) était irrecevable, faute d'intérêt pour agir, singulièrement de savoir si la décision du 25 octobre 2018, confirmée sur opposition, portait sur le refus de toutes prestations (y compris la prise en charge des frais médicaux) de la part de la CNA par rapport aux suites de l'événement du 11 juin 2018, ou seulement sur la question des indemnités journalières dont le remboursement était sollicité de l'assuré par dite décision.

6.             Selon l'art. 21 al. 1 LPGA, si l'assuré a aggravé le risque assuré ou en a provoqué la réalisation intentionnellement ou en commettant intentionnellement un crime ou un délit, les prestations en espèces peuvent être temporairement ou définitivement réduites, ou dans les cas particulièrement graves, refusées.

7.             Aux termes de l'art. 46 al. 2 LAA, l'assureur (accidents) peut refuser la prestation lorsqu’une fausse déclaration d’accident lui a été remise intentionnellement.

Selon la jurisprudence, l'art. 46 al. 2 LAA permet à l'assureur de réduire ou de refuser les prestations à titre de sanction en cas de fausses informations données intentionnellement. L'assureur doit examiner une telle éventualité pour chaque prestation en particulier, en respectant l'interdiction de l'arbitraire, ainsi que les principes de l'égalité de traitement et de proportionnalité (ATF 143 V 393).

8.             À teneur de l'art. 53 al. 1 LPGA, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si l’assuré ou l’assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits auparavant.

9.             a. En l'espèce, au vu de la déclaration de sinistre de l'employeur, qui ne comportait aucun élément a priori insolite, la description de l'accident faisant apparaître l'événement du 11 juin 2018 comme un cas « bagatelle » (glissade sur sol mouillé ayant entraîné des contusions au thorax des deux côtés (ddc), une écorchure au bras droit et une contusion au poignet gauche ainsi qu'une incapacité de travail complète de durée limitée), la CNA a pris le sinistre en charge, au titre d'accident professionnel, et annoncé à l'assuré, par courrier du 22 juin 2018, qu'elle verserait l'indemnité journalière à hauteur de CHF 163.- par jour calendaire, et que les frais de traitement des médecins et autres prestataires de soins exerçant en Suisse seraient réglés directement; ceci sans procéder à une instruction médicale, selon la procédure simplifiée (art. 51 LPGA).

b. C'est à réception, à fin juillet-début août 2018, d'une déclaration de rechute liée à l'événement du 11 juin 2018 que l'assurance-accidents a estimé nécessaire de solliciter des renseignements médicaux complémentaires de la part de l'Hôpital de la Tour et du médecin traitant, et parallèlement de recueillir de l'assuré des explications personnelles complémentaires quant au déroulement de l'événement initial. À réception des renseignements médicaux de l'Hôpital de la Tour et du médecin traitant, relatant tous deux les renseignements anamnestiques identiques que l'assuré leur avait donnés au sujet des causes des traumatismes, la CNA a réalisé que l'employeur, dans la déclaration de sinistre, et l'assuré dans ses réponses au questionnaire complémentaire, avaient déclaré faussement que l'événement avait procédé d'une chute accidentelle sur un sol mouillé, alors qu'il s'agissait en réalité d'une bagarre entre père et fils.

c. En conséquence, l'intimée a rendu la décision du 25 octobre 2018, en application de l'art. 46 al. 2 LAA, confirmée par la décision entreprise. Au vu des circonstances, la CNA était légitimée à le faire, dans le cadre d'une révision procédurale au sens de l'art. 53 al. 1 LPGA.

10.         La recourante, qui a reçu copie de cette décision, et y a formé opposition, prétend que cette décision couvrait l'ensemble des prestations LAA, soit y compris les frais médicaux exposés par la CNA, et en l'occurrence directement payés aux prestataires de soins.

La recourante ne conteste guère qu'en tant que telle, la décision du 25 octobre 2018 notifiée à l'assuré ne traitait que de la demande de remboursement des seules indemnités journalières versées à tort, compte tenu des déclarations fausses faites à l'assurance-accidents au sujet des circonstances de l'événement du 11 juin 2018. Elle ne conteste pas qu'à ce titre, elle n'était pas concernée en tant qu'autre assureur social amené à verser des prestations de cette nature, et qu'elle ne pouvait dès lors prétendre être particulièrement atteinte par la décision en question, et partant pouvoir faire valoir un intérêt à agir. Elle prétend toutefois que dans la mesure où la décision en question mentionnait précisément que la CNA considérait devoir refuser après coup d'allouer à l'assuré « nos prestations », sans autre précision, cette décision, associée à la démarche parallèle du même jour de la CNA d'informer les prestataires de soins qu'après révision procédurale, elle ne pouvait pas allouer de prestations d'assurance à l'assuré, et qu'elle avait demandé la restitution des frais de traitement directement à la caisse-maladie, - ce qu'elle avait d'ailleurs fait dès le lendemain par l'envoi d'une facture à MUTUEL intitulée « répartition des coûts frais de traitement », pour un montant de CHF 965.85 - on devait considérer que les prestations, refusées après coup dans la décision du 25 octobre 2018, ne concernaient pas seulement les indemnités journalières, mais également les frais médicaux. À cet égard, bien que l'argumentation développée par MUTUEL ne soit, il est vrai, pas insoutenable, la recourante avait finalement admis, au stade de l'opposition, que la décision du 25 octobre 2018, ne portait bien que sur les prestations d'indemnités journalières, dès lors qu'elle avait en définitive, par courriel du 8 février 2019, bien que reprochant à la CNA d'avoir formellement traité distinctement la question des indemnités journalières et des frais médicaux, conclu son argumentation en demandant expressément à la CNA de rendre une décision formelle de prise en charge des frais médicaux liés à l'accident.

11.         Du point de vue technique et juridique, on ne saurait sérieusement faire grief à l'intimée d'avoir traité distinctement la question des indemnités journalières et celle des frais médicaux. Elle aurait certes pu faire cette distinction dans une seule et même décision, quand bien même selon la jurisprudence invoquée par la recourante (ATF 143 V 393), l'assureur-accidents doit, dans le cadre de l'éventualité de refuser ses prestations en application de l'art. 46 al. 2 LAA, examiner une telle éventualité pour chaque prestation en particulier, en respectant les principes de l'interdiction de l'arbitraire, de l'égalité de traitement et de la proportionnalité. On relèvera d'ailleurs à ce sujet que la recourante, alors qu'elle n'était pas directement concernée, a tenté de soutenir, à tout le moins implicitement, que les conditions du refus de prestations sur la base de l'art. 46 al. 2 LAA - courrier recommandé du 19 décembre 2018 confirmant son opposition - ne seraient pas réalisées dans le cas d'espèce : elle relevait en effet que l'employeur avait déclaré avoir personnellement et volontairement rédigé une fausse déclaration afin de ne pas divulguer des problèmes familiaux, précisément la situation psychique difficile de l'intéressé et les litiges qui en découlaient avec son père. Selon la recourante, l'employeur, et a fortiori l'assuré, n'avaient ainsi manifestement pas l'intention d'obtenir des indemnités journalières supérieures à celles, réduites, qui leur étaient dues, mais bien de protéger la réputation familiale. C'est en effet ce qu'a expliqué ultérieurement la sœur de l'assuré; mais au-delà de ces explications, la CJCAS considère, au degré de la vraisemblance prépondérante, qu'en cachant à l'assureur-accidents, pas seulement par omission mais en décrivant intentionnellement le déroulement de l'événement, de manière à le faire apparaître comme un accident et non pas comme le résultat d'une bagarre entre père et fils, l'employeur, et par la suite l'assuré lui-même, ne pouvaient ignorer qu'en présentant les choses conformément à la vérité, ils n'auraient pas eu droit aux mêmes prestations d'assurance, ne serait-ce qu'en raison d'une probable réduction de prestations (à hauteur de 50 % pour participation à une rixe comme le suggérait la recourante sur opposition; et en ce qui concerne les frais médicaux, en évitant que ceux-ci soient pris en charge par l'assureur-maladie, avec pour conséquence l'imputation éventuelle sur la franchise et la quote-part).

12.         En revanche, en adressant directement une facture à MUTUEL pour obtenir le remboursement des frais médicaux qu'elle avait exposés, la CNA n'a pas agi conformément au droit. Comme la recourante le lui a, à juste titre, reproché, l'intimée n'avait pas la compétence de rendre une décision à l'égard de MUTUEL quant à l'obligation éventuelle de prester de cette dernière, respectivement de lui demander le remboursement de prestations que la CNA estimait avoir fournies à tort. La jurisprudence considère en effet qu'un assureur social n'a pas la qualité d'autorité revêtue du pouvoir de rendre une décision à l'égard d'un autre assureur de même rang quant à l'obligation éventuelle de prester de celui-ci (cf. arrêt récent 8C_121/2019 du 29 mai 2020 consid. 5; ATF 120 V 489 consid. 1a p. 491 s.; arrêts du Tribunal fédéral 8C_284/2009 du 20 janvier 2010 consid. 3.2.2, in SVR 2010 UV n° 24 p. 97; 8C_293/2009 du 23 octobre 2009 consid. 4, in SVR 2010 UV n° 5 p. 21; HANS-JAKOB MOSIMANN, in Kommentar zum schweizerischen Sozialversicherungsrecht, UVG, 2018, n° 2 ad art. 78a LAA). L'art. 78a LAA, en vertu duquel l'OFSP statue sur les contestations pécuniaires entre assureurs, a été intégré dans la loi précisément parce qu'un assureur-accidents qui ne s'estime pas compétent pour la prise en charge d'un événement accidentel n'a aucun pouvoir décisionnel à l'égard d'un autre assureur-accidents ou de la Caisse supplétive LAA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_293/2009 consid. 4 précité). Il ne peut dès lors pas contraindre un autre assureur social, par voie de décision, à lui rembourser les prestations allouées à un assuré (ATF 127 V 176 consid. 4a p. 180; 120 V 486 consid. 1a précité). Certes, la jurisprudence a reconnu le droit de l'assureur-accidents de recourir contre la décision d'un autre assureur-accidents déclinant son obligation de prester, puisqu'il pourrait être appelé à octroyer des prestations à la place de ce dernier (supra consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 8C_606/2007 déjà cité consid. 9.2; FRÉSARD/MOSER-SZELESS, L'assurance-accidents obligatoire, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 3ème éd. 2016, p. 1140 n. 901). Cela ne signifie toutefois pas qu'il soit possible pour l'un de réclamer à l'autre, par le biais d'une décision, la restitution de prestations qu'il estime avoir versées à tort, alors même qu'une autorité judiciaire ou l'OFSP n'a pas statué sur le conflit de compétences. La procédure selon l'art. 78a LAA n'interdit pas à l'assureur de rendre une décision, ainsi qu'une décision sur opposition, par lesquelles il notifie à l'assuré (c'est le soussigné qui souligne) son refus d'allouer des prestations, motif pris qu'il s'estime non compétent, tout en communiquant sa décision à l'assureur qu'il tient pour compétent (ATF 125 V 324 consid. 1b p. 327). Selon la jurisprudence, ladite décision peut alors être contestée d'une manière indépendante mais en faveur de l'assuré (« Drittbeschwerde pro Verfügungsadressat ») par ce second assureur, d'abord par une opposition, puis par un recours auprès du tribunal cantonal des assurances. Dans ce cas de figure, le point de savoir quel assureur doit verser les prestations d'assurance est décidé par le tribunal cantonal (arrêt du Tribunal fédéral 8C_606/2007 déjà cité consid. 9.2; ATAS/897/2021 du 26 août 2021 consid. 6 à 8).

En l'espèce, c'est dans ce sens qu'il faut comprendre la demande de MUTUEL à la CNA de rendre une décision formelle au sujet des frais médicaux litigieux, ce que l'intimée a finalement fait en date du 20 février 2019, en réclamant directement à l'assuré le remboursement des frais de traitement, ceux-ci s'élevant, selon cette décision, à CHF 581.75.

13.         Il ressort toutefois implicitement du dossier de l'intimée, et explicitement des écritures de réplique de la recourante que cette décision n'a pas été notifiée à MUTUEL, cette dernière n'en ayant eu connaissance qu'à lecture de la réponse de l'intimée à son recours, et en prenant connaissance du dossier de la CNA versé à la procédure judiciaire.

À teneur de l'art. 49 LPGA, l’assureur doit rendre par écrit les décisions qui portent sur des prestations, créances ou injonctions importantes ou avec lesquelles l’intéressé n’est pas d’accord. L’assureur qui rend une décision touchant l’obligation d’un autre assureur d’allouer des prestations est tenu de lui en communiquer un exemplaire. Cet autre assureur dispose des mêmes voies de droit que l’assuré. Les décisions indiquent les voies de droit. Elles doivent être motivées si elles ne font pas entièrement droit aux demandes des parties. La notification irrégulière d’une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l’intéressé.

La recourante a dès lors indiqué dans sa réplique (28 mai 2019) qu'elle formait opposition à cette décision, considérant que son contenu ferait déjà partie du recours, mais quoi qu'il en soit que l'intimée avait le devoir d'entrer en matière sur cette opposition, dès lors que sur la question des frais médicaux, MUTUEL avait un intérêt digne de protection à recevoir une décision de la part de l'intimée. Dans ses dernières écritures (31 mai 2021), elle a encore précisé que, vu son opposition - du 28 mai 2019 - elle considérait que le vice de l'absence de communication de la décision de la CNA du 20 février 2019 était réparé, l'opposition pouvant être transmise par la chambre de céans à l'intimée, pour motif de compétence, afin que la CNA rende une décision sur opposition.

En substance, l'intimée ne s'y est pas opposée, à juste titre, considérant d'ailleurs que finalement, la recourante ne contestait plus que la question des frais de traitement ayant fait l'objet de la décision du 20 février 2019, laquelle ne faisait pas partie de la décision attaquée dans le cadre de la présente procédure.

14.         Au vu de ce qui précède, la chambre de céans retiendra que la décision du 25 octobre 2018 ne portait en définitive que sur la question des indemnités journalières dont le remboursement était requis de l'assuré, la question des frais médicaux ayant fait l'objet d'une décision distincte. Or, la recourante ne pouvait en effet faire valoir aucun intérêt digne de protection à s'opposer à cette décision, n'étant pas amenée à prester dans ce contexte, de sorte que c'est à juste titre que l'intimée a déclaré l'opposition irrecevable.

Le recours ne peut dès lors qu'être rejeté.

15.         En revanche, la décision du 20 février 2019, - par laquelle la CNA exigeait de l'assuré le remboursement des frais médicaux, aspect touchant l'obligation éventuelle de l'assureur-maladie de prester -, n'ayant pas été immédiatement notifiée à MUTUEL qui y a formé opposition dans son écriture de réplique, n'a à ce stade pas fait l'objet d'une décision sur opposition. La chambre de céans n'étant pas compétente pour en connaître dans le cadre du présent recours, l'opposition de MUTUEL sera transmise à la CNA pour motif de compétence et suite à donner.

16.         Pour le surplus, la procédure est gratuite.

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Transmet l'opposition formée par la recourante le 28 mai 2019 contre la décision du 20 février 2019 à l'intimée, pour motif de compétence, charge à la SUVA Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents de rendre une décision sur opposition.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Mario-Dominique TORELLO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le