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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1268/2012

ATAS/897/2013 du 17.09.2013 ( LPP ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1268/2012 ATAS/897/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 septembre 2013

1ère Chambre

 

En la cause

Monsieur F__________, domicilié à GLANES, France

demandeur

 

contre

 

FONDATION DE PREVOYANCE DE LA METALLURGIE DU BATIMENT, sise avenue Eugène-Pittard 24, GENEVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître SCHNEIDER Jacques-André

défenderesse

 


EN FAIT

1.        Monsieur F__________, né en 1946, ayant exercé la profession de technicien chauffagiste auprès de la société X__________ SA à Carouge, avait été affilié auprès de la FONDATION DE PREVOYANCE DE LA METALLURGIE DU BATIMENT (ci-après la Fondation) jusqu'au 7 février 1997. Le 5 août 1997, la Fondation lui a confirmé que sa prestation de libre passage, d'un montant de
84'974 fr. 70, était versée à la FONDATION DE LIBRE PASSAGE UBS ZURICH.

2.        Ayant travaillé par la suite pour l'entreprise Y__________ SA au Petit-Lancy, il a été affilié une seconde fois auprès de la Fondation, jusqu'au 14 juin 2002. La nouvelle prestation de sortie de 7'861 fr. 95 a été versée à la FONDATION DE LIBRE PASSAGE DE LA BANQUE CANTONALE DE GENEVE le 18 novembre 2002.

3.        Le 9 septembre 2011, l'intéressé, domicilié en France depuis le 1er janvier 2008, indiquant qu'il serait à la retraite dès le 1er novembre 2011, a demandé à la Fondation quelles étaient les formalités à accomplir pour qu'il puisse toucher son 2ème pilier. Le 20 septembre 2011, la Fondation lui a rappelé que sa prestation de libre passage d'un montant de 7'861 fr. 95 avait été transférée le 19 novembre 2002 à la FONDATION DE LA BANQUE CANTONALE DE GENEVE.

4.        Le 30 septembre 2011, l'intéressé a interrogé la FONDATION DE LIBRE PASSAGE D'UBS SA, se référant expressément à la lettre de la Fondation du 5 août 1997. La FONDATION UBS lui a répondu le 2 novembre 2011 que selon ses archives, elle n'avait reçu aucun versement de la Fondation en 1997.

5.        Par courriers des 1er décembre 2011 et 12 janvier 2012, l'intéressé a à nouveau écrit à la Fondation afin de savoir ce qu'il était advenu de sa prestation de 84'974 fr. 70.

6.        Le 10 janvier 2012, la Fondation a communiqué à l'intéressé copie du formulaire d'ouverture d'un compte de libre passage de l'UBS et son courrier du 5 août 1997 adressé à la FONDATION DE L'UBS, confirmant le versement.

7.        Le 24 janvier 2012, l'intéressé a fait part de son incompréhension auprès de la Fondation.

8.        Le 31 janvier 2012, la Fondation l'a informé qu'elle avait entrepris des recherches plus approfondies et constaté qu'en réalité son versement du 12 août 1997 à la FONDATION UBS avait été annulé, en raison d'un numéro de CCP incorrect, qu'elle avait alors effectué à nouveau ce paiement le 28 août 1997, toutefois directement par mandat postal. Elle a ajouté qu'elle lui avait écrit le 28 mai 1998, pour lui demander "ce qu'il avait fait de cette somme". Elle avait également informé la FONDATION UBS de l'erreur commise, et convenu de la tenir au courant du suivi. Elle relève que l'intéressé n'a pas répondu à son courrier, et n'a en particulier pas contesté avoir reçu le montant en espèces. Elle rappelle par ailleurs que le 1er novembre 2002, elle lui avait également adressé un courrier recommandé concernant sa seconde affiliation, et y avait joint copie de la correspondance de 1998. Il avait dûment retourné le formulaire pour le transfert de sa prestation de sortie de 7'861 fr. 95 le 11 novembre 2002, sans faire aucune allusion à cette correspondance, qui n'avait ainsi suscité aucune réaction de sa part.

9.        Le 16 février 2012, l'intéressé s'est étonné de ce que la Fondation retrouve soudain une lettre datée du 28 mai 1998. Il affirme n'avoir jamais reçu ni ce courrier, ni celui du 1er novembre 2002.

10.    Une recherche auprès de La Poste Suisse a été effectuée quant à l'envoi recommandé du 4 novembre 2002, en vain, vu le délai écoulé. Par courrier du 8 mars 2012 muni des moyens de droit, la Fondation a communiqué le résultat de cette recherche à l'intéressé. Répondant par ailleurs à l'interrogation de l'intéressé, elle explique que "c'est dans les archives de 2002, lors de la fin de votre seconde affiliation chez nous, que nous avons trouvé diverses copies de courriers de 1998". Elle conclut à cet égard que l'intéressé avait bien reçu la lettre recommandée du 1er novembre 2002, puisqu'il avait retourné le 11 novembre 2002 le formulaire "Sortie du cercle des assurés" qui avait été joint à cette lettre.

11.    Le 25 avril 2012, l'intéressé a persisté à demander "où sont passés les 84'974 fr. 70 de mon 2ème pilier".

12.    En réponse, la Fondation a rappelé qu'elle lui avait donné toutes les explications et les justificatifs se rapportant à cette affaire, ainsi que les moyens de recours, et informé l'intéressé qu'elle avait remis le dossier en mains de son avocat.

13.    Par courrier du 25 avril 2012, l'intéressé a saisi la Cour de céans d'une demande dirigée contre la Fondation et visant au paiement de la somme de 84'974 fr. 70, correspondant à son 2ème pilier.

14.    Invitée à se déterminer, la Fondation, par l'intermédiaire de son mandataire, a le 8 juin 2012, conclu à ce que la Cour de céans déboute l'intéressé de ses prétentions.

Elle considère que les droits de l'intéressé sont prescrits, puisqu'elle lui a versé sa prestation de sortie en espèces en 1997. Elle souligne que le versement de la prestation de sortie a mis fin au rapport de prévoyance. L'intéressé ne saurait recevoir deux fois le montant correspondant à sa prestation de sortie (première sortie). Elle rappelle au surplus qu'en septembre 2011, lorsque l'intéressé demande, pour la première fois, des renseignements sur son droit à des prestations de la Fondation, l'obligation de conserver les documents relatifs à sa première affiliation était prescrite.

15.    Par courrier du 31 août 2012, l'intéressé a à nouveau prié la Cour de céans de faire le nécessaire pour éclaircir cette affaire, déclarant que "je ne comprends pas que l'on ne trouve aucune trace d'une telle transaction, ni à La Poste, ni dans les comptes de la fondation de prévoyance, franchement c'est bizarre".

16.    Invitée par la Cour de céans à préciser sur la base de quels documents elle s'était rendue compte que par erreur elle avait versé à l'intéressé le montant de 84'974 fr. 70 par mandat postal à son adresse à Genève, et à produire copie de l'accusé de réception relatif à ce mandat postal ou tout autre document prouvant le versement, la Fondation a, le 22 octobre 2012, expliqué que le 26 mai 1998, l'UBS l'avait contactée téléphoniquement, en lui indiquant qu'elle n'avait pas encore reçu le versement de la prestation de libre passage en faveur de l'intéressé. C'est alors que la Fondation avait procédé aux vérifications et constaté qu'elle avait versé par erreur le montant de 84'974 fr. 70 par mandat postal à l'adresse de l'intéressé. Elle avait immédiatement sommé l'intéressé de lui indiquer ce qu'il avait fait de ce montant, par courrier du 28 mai 1998. Celui-ci ne s'était cependant pas manifesté. Lors de sa seconde sortie, la Fondation avait demandé à l'intéressé, par pli recommandé du 1er novembre 2002, où elle devait lui verser sa prestation d'un montant de 7'861 fr. 95 et lui avait rappelé qu'il n'avait pas donné suite au courrier à lui adressé le 28 mai 1998. Ce courrier recommandé n'avait pas été retourné par La Poste à son expéditeur, et l'intéressé avait remis à la Fondation le formulaire qui était annexé à ce courrier. L'intéressé n'avait pas contesté à ce moment-là avoir reçu la prestation de 84'974 fr. 70.

La Fondation a par ailleurs indiqué que vu le délai de dix ans de conservation des documents et des pièces comptables, lequel avait débuté en 1997, lors du versement de la prestation de libre passage, elle n'avait pas conservé les documents relatifs à la première affiliation de l'intéressé. Elle ne dispose plus non plus des pièces comptables permettant d'attester le versement par mandat postal. La Poste étant soumise au même délai de conservation, celle-ci n'a pas non plus conservé les justificatifs utiles.

17.    L'intéressé s'est déterminé comme suit le 10 janvier 2013 :

"Etant assuré auprès de la Fondation de prévoyance depuis le 1er août 1983, j'aimerais savoir quelle personne a pris la décision de transférer ma prestation de passage sur un compte bloqué à l'UBS et pourquoi ? (…) La fondation m'accuse d'avoir touché ma prestation de libre passage qui s'élevait selon leur lettre du 5 août 1997 à 84'974 fr. 70 par mandat postal, mais n'a aucune preuve valable à fournir. Est-ce bien moi qui ai touché cette somme ou quelqu'un de très malin de la fondation ? La fondation fonde ses accusations sur le seul fait que je n'ai jamais réagi à la réception de leur lettre du 28 mai 1998. Je le répète, cette lettre je ne l'ai jamais reçue. Pourquoi la fondation n'a-t-elle pas de preuve de son envoi d'une lettre si importante ? (…) Comment se fait-il que la fondation ne me donne pas de nouvelles de cette lettre du 28 mai 1998 dans leur réponse du 10 janvier 2012 ? (…) Si cette lettre du 28 mai 1998 se trouvait dans mon dossier le 10 janvier 2012, pourquoi la fondation ne l'a pas annexée avec les deux autres photocopies ? (…) La fondation garde des lettres des années 1997, mais pas de 1998, malgré les délais de prescription de dix ans ? (…) Ce que je conteste dans ma lettre du 30 mars 2012, c'est que la fondation dit y avoir annexé cette fameuse lettre du 28 mai 1998, il n'y a jamais eu de lettre du 28 mai 1998 dans le recommandé du 1er novembre 2002 (et non du 2 comme noté dans le mémoire réponse du 8 juin 2012). J'ai réagi à cet envoi recommandé par plusieurs appels téléphoniques, réponses : personne qui s'occupe du dossier absente, en ligne, on vous rappelle, etc. J'ai envoyé une lettre demandant des explications le 11 novembre 2002, pas de réponse de la part de la fondation. Comme je ne pensais pas que cette phrase en gras du recommandé du 1er novembre avait un lien avec mon 2ème pilier de 1983, versé par la fondation sur un compte bloqué chez eux et comme ces institutions pratiquent la politique de l'autruche (moins on en sait, mieux elle se porte, les adhérents ne savent jamais la somme qu'ils ont versée, ni ce qu'elles font de cet argent), j'ai cru que cette phrase avait un lien avec le versement de mon 2ème pilier à la BANQUE CANTONALE DE GENEVE. J'ai eu plusieurs versements dans différentes banques, c'est pourquoi je n'ai pas réagi à cette phrase. (…) La prescription de dix ans ne me concerne pas, car je n'ai pas touché mon 2ème pilier de 84'974 fr. 70 le 28 mai 1998. A cette somme de 84'974 fr. 70, il faut bien sûr y ajouter les intérêts jusqu'à la fin du litige".

18.    Sur demande de la Cour de céans, la CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION AVS-AI a versé au dossier l'extrait du compte individuel de cotisations de l'intéressé ouvert auprès d'elle, étant précisé que la CAISSE SUISSE DE COMPENSATION, ayant clôturé les comptes pour l'établissement de la rente de vieillesse, il ne lui était plus possible d'obtenir les éventuels comptes détenus par les autres caisses AVS.

19.    Interrogé par la Cour de céans, l'intéressé a expliqué, le 4 avril 2013, qu'il n'avait pas demandé l'ouverture d'un compte de libre passage. Il joint à cet égard copie d'un courrier à lui adressé par la Fondation le 2 juin 1997, aux termes de laquelle

"nous constatons que depuis le 28 février 1997, nous n'avons enregistré aucun salaire dans une entreprise affiliée à notre fondation. De ce fait, à moins que vous ne soyez dans l'incapacité de travailler suite à une maladie ou un accident, vous ne pouvez plus être affilié à notre fondation. Conformément à la loi (art. 27 LPP et suivants) et aux art. 62 et suivants de notre règlement, vous avez droit à une prestation de libre passage calculée au jour de votre sortie du cercle des assurés. En principe, la prestation de libre passage est transférée à l'institution de prévoyance de votre employeur actuel (art. 29 LPP). Exceptionnellement et sur demande écrite de l'assuré, la prestation de libre passage peut être payée lorsque celui-ci :

a)    quitte définitivement la Suisse, ou

b)   s'établit à son propre compte".

Il affirme que la Fondation n'avait pas joint copie de la lettre du 28 mai 1998 à son courrier du 1er novembre 2002. Il relève toutefois que le 10 janvier 2012, alors qu'il venait enfin d'en prendre connaissance, il a expressément demandé des explications sur le sens de la phrase suivante : "En conséquence, nous vous informons que notre fondation se dégage de toute responsabilité en cas de prétention de prestation relative au montant du libre passage qui vous a été versé indûment. Il s'étonne encore une fois que la Fondation ait retrouvé comme par miracle cette fameuse lettre du 28 mai 1998, alors qu'elle prétendait n'avoir plus de dossier à son nom.

Il a par ailleurs précisé qu'après avoir travaillé au service de la société X__________ SA, il n'avait plus retrouvé d'emploi et avait dès lors quitté la Suisse en 2008.

20.    Enfin, la Cour de céans a interrogé la FONDATION INSTITUTION SUPPLETIVE LPP à Zurich, ainsi que la CENTRALE DU 2ème PILIER à Berne, afin de déterminer si l'intéressé avait été affilié auprès de l'INSTITUTION SUPPLETIVE, ou si des institutions de prévoyance avaient géré ou géraient encore des avoirs de prévoyance, des comptes ou des polices de libre passage pour lui.

21.    Le 21 juin 2013, l'intéressé s'est inquiété de savoir où en était l'instruction de sa demande.

22.    Les divers courriers récoltés dans le cadre de l'instruction ont été adressés aux parties le 10 septembre 2013, et la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ; RS E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du code des obligations ; art. 52, 56a, al. 1, et art. sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 ; art. 142 code civil).

2.        La novelle du 3 octobre 2003 modifiant la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 (LPP ; RS 831.40) (1ère révision) est entrée en vigueur le 1er janvier 2005 (sous réserve de certaines dispositions dont l'entrée en vigueur a été fixée au 1er avril 2004 et au 1er janvier 2006; RO 2004 1700), entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de la prévoyance professionnelle (RO 2004 1677). Elle est applicable en l'espèce dès lors que les faits juridiquement déterminants, notamment l’octroi d’une rente d’invalidité dès le 1er juillet 2008, se sont déroulés postérieurement à son entrée en vigueur (ATF 130 V 446 consid. 1 et ATF 129 V 4 consid. 1.2). En revanche, les modifications de la LPP résultant de la 6ème révision AI (premier volet), en vigueur depuis le 1er janvier 2012, ne sont pas applicables.

3.        La LPGA n'est pas applicable aux litiges en matière de prévoyance professionnelle.

4.        Dans le cadre de contestations opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, la compétence des autorités visées par l'art. 73 LPP est doublement définie. Elle l'est, tout d'abord, quant à la nature du litige : il faut que la contestation entre les parties porte sur des questions spécifiques de la prévoyance professionnelle, au sens étroit ou au sens large. Ce sont donc principalement des litiges qui portent sur des prestations d'assurance, des prestations de libre passage (actuellement prestations d'entrée ou de sortie) et des cotisations. En revanche, les voies de droit de l'art. 73 LPP ne sont pas ouvertes lorsque la contestation a un fondement juridique autre que le droit de la prévoyance professionnelle, même si elle devait avoir des effets relevant du droit de ladite prévoyance (ATF 128 V 254 consid. 2a, ATF 127 V 35 consid. 3b et les références). En ce qui concerne, en particulier, la notion d'institution de prévoyance au sens de l'art. 73 al. 1 LPP, elle n'est pas différente de celle définie à l'art. 48 LPP. Il s'agit des institutions de prévoyance enregistrées qui participent au régime de l'assurance obligatoire (art. 48 al. 1 LPP), avec la possibilité d'étendre la prévoyance au-delà des prestations minimales (institutions de prévoyance dites "enveloppantes"; art. 49 al. 2 LPP). Ces institutions doivent revêtir la forme d'une fondation ou d'une société coopérative, ou être une institution de droit public (art. 48 al. 2 LPP et art. 331 al. 1 CO; ATF 128 V 254 consid. 2a).

5.        En l’espèce, l'intéressé demande ce qu'il est advenu de sa prestation de libre passage qui aurait dû être versée à la Fondation de l'UBS. La contestation porte dès lors sur une question spécifique à la prévoyance professionnelle régie par la loi fédérale sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 17 décembre 1993 (loi sur le libre passage, LFLP ; RS 831.42) et relève par là-même des autorités juridictionnelles mentionnées à l’art. 73 LPP.

L’ouverture de l’action prévue à l’art. 73 al. 1 LPP n’est soumise, comme telle, à l’observation d’aucun délai (SPIRA, Le contentieux des assurances sociales fédérales et la procédure cantonale, Recueil de jurisprudence neuchâteloise, 1984, p. 19).

Le for de l’action est au siège ou domicile suisse du défendeur ou au lieu de l’exploitation dans laquelle le demandeur a été engagé (art. 73 al. 3 LPP). En l’espèce, le lieu d’exploitation dans laquelle l'intéressé était engagé se trouve à Genève.

La compétence ratione materiae et loci de la Cour de céans est ainsi établie.

6.        Le litige porte sur le versement de la prestation de libre passage de l'intéressé.

Il a travaillé au service d'une entreprise affiliée auprès de la Fondation jusqu'au 7 février 1997. A cette date, son droit à une prestation de sortie s'est ouvert (art. 2 al. 1 LFLP). La LFLP réglemente le maintien de la prévoyance professionnelle acquise en cas de libre passage. Ainsi, si l'assuré entre dans une nouvelle institution de prévoyance, l'ancienne institution de prévoyance doit verser la prestation de sortie à cette nouvelle institution (art. 3 al. 1 LFLP). Si tel n'est pas le cas, il doit notifier à son institution de prévoyance sous quelle forme admise il entend maintenir sa prévoyance (art. 4 al. 1 LFLP). A défaut de notification, l'institution de prévoyance verse, au plus tard deux ans après la survenance du cas de libre passage, la prestation de sortie, y compris les intérêts moratoires, à l'institution supplétive (art. 4 al. 2 LFLP).

En l'occurrence, selon les instructions de l'intéressé, sa prestation de sortie devait être versée à la Fondation UBS.

7.        La Fondation allègue avoir versé directement à l'intéressé, par mandat postal, la somme de 84'974 fr. 70.

Or, aux termes de l'art. 5 de la loi fédérale sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 17 décembre 1993 (loi sur le libre passage, LFLP ; RS 831.42)

"l’assuré peut exiger le paiement en espèces de la prestation de sortie :

a. lorsqu’il quitte définitivement la Suisse; l’art. 25f est réservé;

b. lorsqu’il s’établit à son compte et qu’il n’est plus soumis à la prévoyance professionnelle obligatoire;

c. lorsque le montant de la prestation de sortie est inférieur au montant annuel des cotisations de l’assuré.

Si l’assuré est marié ou lié par un partenariat enregistré, le paiement en espèces ne peut intervenir qu’avec le consentement écrit de son conjoint ou de son partenaire.

S’il n’est pas possible de recueillir ce consentement ou si le conjoint le refuse sans motif légitime, l’assuré peut en appeler au tribunal."

8.        Force est de constater qu'aucune des conditions permettant le versement en espèces de la prestation de libre passage n'était en l'espèce réunie au moment de la première sortie.

C'est dès lors à tort que la Fondation a versé directement à l'intéressé par mandat postal le montant de 84'974 fr. 70, représentant sa prestation de libre passage. La Fondation ne le conteste pas, expliquant qu'elle avait dans un premier temps eu l'intention de verser cette prestation à la FONDATION DE LIBRE PASSAGE UBS ZURICH, que l'opération avait toutefois été annulée en raison d'un numéro de CCP incorrect, et qu'en effectuant à nouveau le paiement quelques jours plus tard, elle avait par erreur effectué le versement en espèces directement à l'intéressé.

9.        La question de l'obligation de rembourser peut se poser lorsque l'assuré obtient un paiement en espèces, sans que les conditions d'un tel paiement ne soient remplies.

Selon l'art. 35a al. 1 LPP,

"Les prestations touchées indûment doivent être restituées. La restitution peut ne pas être demandée lorsque le bénéficiaire était de bonne foi et serait mis dans une situation difficile."

Le paiement en espèces a pour conséquence de mettre un terme au rapport de prévoyance et ce indépendamment du fait de savoir si les conditions de l'art. 5 al. 1 LFLP sont remplies ou non. Aussi, quand bien même la Fondation n'aurait pas dû effectuer un versement en espèces directement à l'intéressé, le fait qu'elle ait payé la libère-t-elle de toutes ses obligations (ATF 133 V 213 ; Commentaire Stämpfli LPP ET LFLP, Jacques-André SCHNEIDER, Thomas GEISER et Thomas GÄCHTER, pp. 1513 et ss). Il est en effet considéré que dans un tel cas, ni le bénéficiaire de la prestation, ni l'assurance ne sont lésés. Le Tribunal fédéral parle alors non pas d'un paiement contraire au droit, mais d'un paiement "à la fausse adresse", ce qui ne confère pas le droit à la restitution de l'avoir de libre passage (ATF 133 V 214 consid. 4.9). Il y a toutefois lieu de relever que dans le même arrêt, le TF a appliqué l'ancien droit et expressément laissée ouverte la question de savoir quelle décision aurait été prise en application de l'art. 35a al. 1 LPP, entré en vigueur au 1er janvier 2005.

La question peut toutefois ici également être laissée ouverte, dans la mesure où le présent litige ne porte quoi qu'il en soit pas sur une demande de la Fondation qui viserait à obtenir le remboursement des 84'974 fr. 70 versés directement à l'intéressé à tort.

10.    En l'espèce toutefois, l'intéressé allègue n'avoir pas reçu le montant de 84'974 fr. 70.

La Fondation déclare quant à elle avoir effectué ce versement le 28 août 1997 et avoir écrit en ce sens à l'intéressé, ainsi qu'à l'UBS, le même jour. Elle souligne que l'intéressé n'a pas répondu à son courrier et n'a pas non plus contesté le fait d'avoir reçu le montant en espèces.

Celui-ci affirme cependant n'avoir pas non plus reçu le courrier de la Fondation daté du 28 août 1997.

La Fondation relève enfin que le 1er novembre 2002, elle lui avait également adressé un courrier sous pli recommandé et saisi l'occasion de lui rappeler expressément cette correspondance de 1998, ce qui n'avait suscité aucune réaction de la part de l'intéressé.

11.    a. Il s'avère que la Fondation ne peut produire aucun document démontrant qu'elle a versé le montant de 84'974 fr. 70 à l'intéressé, alléguant qu'elle n'a pas gardé ceux relatifs à la première affiliation.

b. Aux termes de l'art. 27 i OPP2, applicable par renvoi de l'art. 41 al. 8 LPP,

"1 Les institutions de prévoyance et les institutions qui gèrent les comptes ou les polices de libre passage sont tenues de conserver toutes les pièces contenant des informations importantes pour l'exercice de droits éventuels des assurés, à savoir :

a.    les documents concernant l'avoir de prévoyance;

b.    les documents concernant les comptes ou les polices de la personne assurée;

c.    les documents concernant toute situation déterminante durant la période d'assurance, tels que les rachats, les paiements en espèces de même que les versements anticipés pour l'accession au logement et les prestations de sortie en cas de divorce ou de dissolution judiciaire du partenariat enregistré;

d.    les contrats d'affiliation de l'employeur avec l'institution de prévoyance;

e.    les règlements;

f.      les correspondances importantes;

g.    les pièces qui permettent d'identifier les assurés.

2 Les documents peuvent être enregistrés sur un support autre que le papier, à la condition toutefois qu'ils demeurent lisibles en tout temps."

L'art. 27 j al. 3 OPP2 précise que

"1 Lorsque des prestations de prévoyance sont versées, l'obligation pour les institutions de la prévoyance professionnelle de conserver les pièces dure dix ans à compter de la fin du droit aux prestations.

2 Lorsqu'aucune prestation de prévoyance n'est versée parce que la personne assurée n'a pas fait usage de son droit, l'obligation de conserver les pièces dure jusqu'au moment où l'assuré a ou aurait atteint l'âge de 100 ans.

3 En cas de libre passage, l'obligation pour l'institution de prévoyance jusque-là compétente de conserver les documents de prévoyance importants cesse après un délai de dix ans dès le transfert de la prestation de sortie à la nouvelle institution de prévoyance ou à une institution qui gère les comptes ou les polices de libre passage."

En l'espèce, le délai de dix ans court dès le versement de la prestation de libre passage, soit dès août 1997, selon les déclarations de la Fondation.

c. L'article 27j OPP 2 relatif au délai de conservation opère une distinction entre les cas d'assurance (al. 1 et 2) et les cas de libre passage (al. 3). Lorsque des prestations de prévoyance sont versées (al. 1), l'obligation de conserver les pièces cesse dix ans après le versement des prestations par l'institution de prévoyance ou l'institution de libre passage. Si l'assuré ne fait pas valoir son droit à une prestation de prévoyance (al. 2), il n'y a aucun terme mettant fin à cette obligation, étant donné que le droit à des prestations sous forme de rentes ne connaît pas de délai de péremption, même si ces prestations périodiques sont soumises à une prescription de cinq ans pour ce qui est du paiement des arriérés. Dans ce cas, l'institution de prévoyance ou l'institution de libre passage doit continuer à gérer ces avoirs, et donc conserver les pièces correspondantes. Cette obligation dure jusqu'au moment où l'assuré a ou aurait atteint l'âge de cent ans (al. 2). Les versements de capitaux se prescrivent en revanche dix ans après leur échéance, ce qui signifie que l'obligation de conserver les dossiers demeure durant un délai de dix ans à l'échéance de la prescription, c'est-à-dire vingt ans après que l'assuré a atteint l'âge de la retraite.

En cas de libre passage (al. 3), l'assuré a droit au versement d'une prestation de libre passage de la part de l'institution de prévoyance. Si cette prestation a été transférée à une nouvelle institution de prévoyance ou à une institution de libre passage, l'obligation de conserver les pièces cesse dix ans après le transfert. En revanche, la pièce relative au transfert doit être conservée par la nouvelle institution de prévoyance ou l'institution de libre passage pendant dix ans après l'âge ordinaire ou réglementaire de la retraite (Commentaire Stämpfli, LPP et LFLP - Lois fédérales sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité et sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, 2010, art. 41 LPP, chiffres 42 et 43, p. 656).

En l'espèce, la prestation n'a pas été versée à une nouvelle institution de prévoyance, comme elle aurait dû l'être, mais à l'intéressé directement. Dès lors ne peut être retenu que le délai de dix ans après le transfert.

d. On ne saurait, au vu de ce qui précède, reprocher à la Fondation de ne pas être à même de produire de documents prouvant qu'elle a effectivement versé le montant de 84'974 fr. 70 directement à l'intéressé le 28 août 1997, le délai de dix ans étant expiré. Le fait est toutefois qu'elle ne peut pas prouver ce versement, alors que l'intéressé affirme quant à lui ne l'avoir pas reçu.

12.    Bien que la LPGA ne soit pas applicable, la jurisprudence rendue à propos de l'art. 61 LPGA, dont la teneur est similaire à la LPA, est de nature à expliciter les exigences de collaboration. Le devoir des parties de collaborer à l’instruction de l’affaire (art. 61 let. c LPGA), comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 I 183 consid. 3.2). Le devoir du juge de constater les faits pertinents ne dispense donc pas les parties de collaborer à l’administration des preuves en donnant des indications sur les faits de la cause ou en désignant des moyens de preuve (ATF 130 I 184 consid. 3.2, 128 III 411 consid. 3.2).

Autrement dit, si la maxime inquisitoire dispense les parties de l’obligation de prouver, elle ne les libère pas du fardeau de la preuve. En cas d’absence de preuve, c’est à la partie qui voulait en déduire un droit d’en supporter les conséquences (ATF 117 V 264 consid. 3), sauf si l’impossibilité de prouver un fait peut être imputée à son adverse partie (ATF 124 V 375 consid. 3). Au demeurant, il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322, consid. 5a). En matière d'assurance-chômage par exemple, l'assuré supporte les conséquences de l'absence de preuve en ce qui concerne les cartes de contrôle et autres pièces nécessaires pour faire valoir le droit à l'indemnité, notamment la liste des recherches d'emploi (Boris Rubin, Assurance-chômage, Schulthess, 2006, page 395 et les références citées: DTA 2000, p. 122, consid. 2a; 1998 p. 281, ATF 119 V 10, consid. 3c bb et RCC 1987 p. 51 cons. 3).

Par ailleurs, la maxime inquisitoire laisse le juge libre dans sa manière d'apprécier les preuves et ne lui interdit pas de renoncer à un moyen de preuve par appréciation anticipée. Ni la maxime inquisitoire, ni d'ailleurs le droit à la preuve d'une partie ne sont violés lorsque le juge refuse une mesure probatoire parce qu'il est déjà convaincu qu'une allégation de fait a été établie ou réfutée (en matière de droit à la preuve, ATF 129 III 18 consid. 2.6 et les arrêts cités). Le principe de la libre appréciation des preuves signifie que le juge apprécie librement les preuves, sans être lié par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves. Dès lors, le juge doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux (ATF 4A_253/2007 du 13 novembre 2007, consid. 4.2).

Au surplus, la maxime inquisitoire sociale ne modifie pas la répartition du fardeau de la preuve (arrêt 4C.185/2003 du 14 octobre 2003, consid. 2.1). Pour toutes les prétentions fondées sur le droit civil fédéral, l'art. 8 CC, en l'absence de règles contraires, répartit le fardeau de la preuve et détermine, sur cette base, laquelle des parties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve (arrêt du Tribunal fédéral 4C.386/2006 du 18 avril 2007 consid. 4.1, non publié in ATF 133 III 323 et ATF 130 III 321 consid. 3.1). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle ne s'applique que si le juge, à l'issue de l'appréciation des preuves, ne parvient pas à se forger une conviction dans un sens positif ou négatif (ATF 132 III 626 consid. 3.4 et ATF 128 III 271 consid. 2b/aa). Ainsi, lorsque l'appréciation des preuves le convainc de la réalité ou de l'inexistence d'un fait, la question de la répartition du fardeau de la preuve ne se pose plus (ATF 128 III 271 consid. 2b/aa). Si, à l'issue de l'appréciation des preuves, le juge reste dans le doute, il ne doit appliquer l'art. 8 CC que s'il n'existe pas une règle spéciale de droit fédéral instituant une présomption (ATF 130 III 321 consid. 3.1). Dès lors qu'il conclut qu'une preuve est apportée, le juge n'a plus à appliquer des règles sur le fardeau de la preuve, à l'exemple de l'art. 8 CC, ou des règles instituant des présomptions.

En ce qui concerne la preuve, le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Il y a vraisemblance prépondérante lorsqu'il est possible que les faits pertinents se soient déroulés différemment, mais que les autres possibilités ou hypothèses envisageables n'entrent pas raisonnablement en considération (arrêt 4A_193/2008 du 8 juillet 2008 consid. 2.1.2; ATF 130 III 321 consid. 3.3 et les références citées). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

Le fardeau de la preuve de la notification d'un acte et de sa date incombe en principe à celui qui entend en tirer une conséquence juridique (ATF 124 V 402 ; ATF 129 I 8 consid. 2.2 p. 10, 124 V 400 consid. 2a p. 402, 122 I 97 consid. 3b p. 100, 114 III 51 consid. 3c et 4 p. 53/54, 103 V 63 consid. 2a p. 65), laquelle supporte donc les conséquences de l'absence de preuve, en ce sens que, si la notification ou sa date sont contestées et s'il existe un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l'envoi (ATF 103 V 63 consid. 2a p. 65). L'envoi sous pli simple ne permet en général pas d'établir que la communication est parvenue au destinataire. Même la présence au dossier de la copie d'une lettre n'autorise pas à conclure avec un degré de vraisemblance prépondérante que cette lettre a été effectivement envoyée par son expéditeur et qu'elle a été reçue par le destinataire (cf. ATF 101 Ia 8). La preuve de la notification d'un acte peut néanmoins résulter d'autres indices et de l'ensemble des circonstances, en particulier, de la correspondance échangée (ATF 105 III 46).

Selon la jurisprudence, si une autorité veut s'assurer qu'un envoi parvienne à son destinataire, elle doit le notifier par lettre recommandée.

Aussi le TF a-t-il jugé que lorsqu'il n'y a pas d'indice permettant de conclure que le recourant s'attendait ou devait s'attendre avec une certaine probabilité à une notification officielle, ou qu'il tentait de s'y soustraire, le fait de le priver de ses moyens de défense pour la seule raison qu'il n'a pas réagi à une notification vainement tentée dont il n'a, en réalité, jamais pris connaissance, constitue une violation de l'art. 4 Cst. Dans un pareil cas, l'intérêt à un déroulement régulier de la procédure doit céder le pas (ATF 101 Ia 8).

Si l'assuré conteste avoir reçu une décision qui lui a été envoyée par lettre ordinaire, il ne suffit pas, pour prouver la notification, que l'autorité ayant rendu la décision certifie que celle-ci a passé en force. La preuve peut cependant être rapportée en se basant sur l'ensemble des circonstances (ATF 105 III 46).

Selon le bulletin de la prévoyance professionnelle n° 128 enfin, relatif au devoir de diligence de l’institution de prévoyance lors du versement d’une prestation en capital, l’institution de prévoyance qui verse une prestation à un tiers non autorisé n’exécute en principe pas le contrat, même si elle le fait de bonne foi. La preuve de l’exécution correcte du contrat incombe à l’institution de prévoyance en sa qualité de débitrice contractuelle. C’est elle qui supporte en règle générale le risque d’une prestation versée à une personne non autorisée (Arrêt du TF du 5 avril 2012, 9C_137/2012 ; art. 37 LPP).

13.    Il résulte de ce qui précède que le fardeau de la preuve incombe à la Fondation.

Celle-ci allègue avoir versé directement à l'intéressé la prestation de libre passage le 28 août 1997. Elle ne peut cependant produire aucune quittance postale attestant de l'existence de l'envoi de la somme de 84'974 fr. 70 à l'intéressé, ni aucun autre document à cet égard. Elle produit copie de la lettre qu'elle a adressée à l'intéressé le 26 mai 1998, et souligne que celui-ci ne s'est alors pas manifesté.

Il y a lieu de constater que cette lettre a été postée sous pli simple. Or, l'assuré soutient ne pas l'avoir reçue. Il résulte dès lors, au vu de la jurisprudence citée au-dessus, qu'il n'est pas établi avec un degré de vraisemblance prépondérante, que cette lettre a été effectivement envoyée par la Fondation et reçue par l'intéressé. On ne peut dès lors reprocher à celui-ci de ne pas avoir réagi. Au surplus, à cette date, soit une année après qu'il ait quitté l'employeur affilié à la Fondation, il n'avait pas à s'attendre à ce que la Fondation lui écrive s'agissant de sa prestation de libre passage.

La Cour de céans constate par ailleurs que la Fondation a fait preuve de négligence pour le moins dans le traitement de ce dossier, en versant à la Fondation UBS le montant litigieux sur un numéro de compte erroné dans un premier temps, puis directement par mandat postal à l'intéressé dans un second temps. Il n'apparaît pas qu'elle ait écrit à l'intéressé au moment du second versement intervenu le 28 août 1997, de sorte que le seul document en mains de l'intéressé est à cet égard le courrier du 5 août 1997 l'informant que conformément à ses instructions, la somme de 84'974 fr. 70 était versée auprès de la Fondation de libre passage de l'UBS. Il est également surprenant que la Fondation n'ait pas adressé de rappel à l'intéressé suite à son courrier du 28 mai 1998 resté sans réponse. Ce n'est qu'en novembre 2002, soit à l'occasion de la seconde sortie de l'intéressé, en effet, qu'elle attire abruptement son attention sur le fait qu'elle se dégage de toute responsabilité au cas où ce dernier viendrait réclamer des prestations en relation avec le montant "qui vous a été versé indûment".

Il est du reste également surprenant que la Fondation UBS soit restée près d'une année sans s'inquiéter de n'avoir pas encaissé le montant annoncé. Elle ne s'adresse à la Fondation que le 26 mai 1998, faisant suite à un appel téléphonique d'un collaborateur de la Fondation.

Il est vrai que l'intéressé, qui ne conteste pas avoir reçu ce courrier du 1er novembre 2002 - il a en effet dûment rempli et retourné le formulaire qui y était annexé - n'a réagi ni au contenu de la lettre du 26 mai 1998, qui y était également jointe, ni à l'avertissement qui y était donné.

Il allègue à cet égard, dans ses écritures du 30 mars 2012, que la copie de la lettre du 26 mai 1998 n'était en réalité pas jointe à l'envoi du 1er novembre 2002 et que ce n'est ainsi que le 31 janvier 2012 qu'il en a pris connaissance pour la première fois. Il relève qu'il a tenté d'obtenir des explications sur le sens de l'avertissement donné par la Fondation, qu'il croyait toutefois liée à sa seconde sortie. Il s'étonne que celle-ci ait retrouvé "comme par miracle" cette fameuse lettre du 28 mai 1998, alors qu'elle prétendait n'avoir plus de dossier à son nom.

On ne saurait soutenir, compte tenu de ces circonstances, que le silence de l'intéressé valait acquiescement.

La Cour de céans considère, dès lors, qu'il peut être établi, au degré de vraisemblance requis par la jurisprudence, que l'intéressé n'a pas reçu la somme de 84'974 fr. 70.

14.    Reste à examiner si l'intéressé a fait valoir son droit en temps utile.

L'art. 41 LPP, dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004, avait la teneur suivante :

"Les actions en recouvrement de créances se prescrivent par cinq ans quand elles portent sur des cotisations ou des prestations périodiques, par dix ans dans les autres cas. Les art. 129 à 142 du code des obligations sont applicables.

L'al. 1 s'applique aussi aux actions fondées sur les contrats conclus entre institutions de prévoyance et institutions d'assurance soumises à la surveillance des assurances".

Depuis le 1er janvier 2005, l'art. 41 LPP règle la prescription du droit aux prestations de la manière suivante :

"Le droit aux prestations ne se prescrit pas pour autant que les assurés n'aient pas quitté l'institution de prévoyance lors de la survenance du cas d'assurance.

Les actions en recouvrement de créances se prescrivent par cinq ans quand elles portent sur des cotisations ou des prestations périodiques, par dix ans dans les autres cas. Les art. 129 à 142 du code des obligations sont applicables".

Lorsque, comme en l'occurrence, la loi ne contient pas de disposition transitoire en ce qui concerne le régime de prescription applicable, la jurisprudence et la doctrine considèrent que la nouvelle réglementation est applicable aux prétentions relevant de l'ancien droit, si celles-ci, bien que nées et exigibles avant l'entrée en vigueur du nouveau droit, ne sont pas encore prescrites ou périmées à ce moment-là (ATF 111 II 193, 107 Ib 203 s. consid. 7b/aa, 102 V 207 consid. 2; Arrêt du 2 février 2006 B 124/04 et les références de doctrine citées).

Le principe de l’imprescriptibilité ne s’applique qu’aux assurés qui n’ont pas quitté l’institution de prévoyance au moment où se réalise le cas d’assurance, puisque l’assuré qui quitte une institution de prévoyance emmène en principe avec lui les prestations acquises. Il s’agit des assurés qui arrivent à l’âge de la retraite, qui décèdent ou deviennent invalides sans être auparavant sortis de l’institution de prévoyance. Le droit à des prestations ne se prescrit ainsi pas vis-à-vis d’une institution de prévoyance, si l’assuré était encore affilié à l’institution de prévoyance au moment du début de la rente AI (PETREMAND, Commentaire LPP, n. 8 et 19 ad art. 41, p. 649ss) ou lors de la survenance de l’invalidité (BRÜHWILER, Obligatorische berufliche Vorsorge in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, 2003/2007, n. 163, p. 2061).

D'une manière générale, est exigible, dans le langage juridique, ce qui peut être aussitôt exigé, ce qui est dû sans terme ni condition. Il en est ainsi d'une créance ou d'une dette dont le paiement peut être immédiatement réclamé, au besoin en justice, sans attendre l'échéance d'un terme ou l'avènement d'une condition (ATF 119 III 18 consid. 3c p. 21 et les références).

Dans le domaine de la prévoyance professionnelle, l'exigibilité d'une prestation se situe lors de la naissance du droit à cette prestation selon les dispositions légales et réglementaires qui lui sont applicables (ATF 132 V 159 consid. 3 p. 162; arrêt 9C_321/2007 du 28 septembre 2007 consid. 3.1). Il convient de distinguer l'exigibilité d'une prestation de la prévoyance professionnelle de son exécutabilité. Si une telle prestation ne peut en effet être exécutée que lorsque la créance en prestations futures n'est plus une simple expectative mais peut être effectivement réalisée, son exigibilité débute en revanche avec la naissance du droit à la prestation (ATF 126 V 258 consid. 3a p. 263; 117 V 303 consid. 2c).

Selon la jurisprudence, la prescription décennale de l'art. 41 LPP court indépendamment de la connaissance qu'a l'assuré de l'existence de son droit à la rente, à l'instar de ce qui prévaut pour les prescriptions décennales des art. 60 et 127 CO (ATF 106 II 134 consid. 2a p. 136; arrêts B 23/06 du 20 avril 2007 consid. 5.1 et les références et B 9/99 du 4 août 2000 consid. 3b, in RSAS 2003 p. 48). En effet, même si la rente LPP est étroitement liée à la reconnaissance d'une invalidité au sens de la LAI, s'il fallait considérer que la prescription décennale ne court pas tant que l'assuré n'est pas fixé sur son droit à une rente AI, le début du délai de prescription pourrait se trouver reporté, selon les circonstances - et singulièrement en cas de recours contre la décision de rente de l'assurance-invalidité - de nombreuses années après la survenance de l'invalidité (ATF 9C_701/2010 du 31 mars 2011 consid. 4.3) (ATAS 1092/2012).

En revanche, les prestations de libre passage ne constituent pas des prestations au sens technique de l'assurance et ne tombent pas sous la règle de l'article 41 al. 1 et 2 LPP relative à la prescription. Elles ne sont pas des prestations comparables aux prestations de vieillesse, de survivants et d'invalidité, mais constituent les bases de financement pour d'éventuelles prestations futures. Elles représentent plutôt des bases de financement acquises pour des prestations futures d'assurance. La prestation de libre passage est exigible avec la sortie. Si la prestation de sortie ne peut, à défaut de notification par l'assuré, pas être transférée, elle doit être versée à l'Institution supplétive (art. 4 al. 2 LFLP). Il en découle que le droit au libre passage n'est soumis à aucune prescription, aussi longtemps qu'il existe une obligation de maintenir la protection de prévoyance (ATF 127 V 315 ; Commentaire Stämpfli, LPP et LFLP - Lois fédérales sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité et sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, 2010, art. 41 LPP, chiffres 14 et 20, p. 650 ss ; bulletin LPP n° 59 du 10 décembre 2001, ATF du 19 octobre 2001, cause E.S. 2/01).

Dès lors qu'il n'a pas été admis, à défaut de preuve, que la Fondation avait versé la somme de 84'974 fr. 70, le devoir de maintenir la prévoyance est demeuré. Aussi la Fondation n'est-elle pas libérée de ses obligations envers l'intéressé, de sorte que le droit de celui-ci à la prestation de libre passage n'est pas prescrit.

15.    En conséquence, la demande en paiement est admise.

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare la demande en paiement recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Condamne la Fondation à verser à Monsieur F__________ la somme de 84'974 fr. 70, plus intérêts dès le 28 août 1997, conformément à l'art. 2 al. 3 et 4 LFLP.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

Doris GALEAZZI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le