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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1606/2004

ATAS/21/2006 (2) du 17.01.2006 ( LAA ) , REJETE

Recours TF déposé le 24.02.2006, rendu le 13.03.2007, REJETE, U 120/06
Descripteurs : ; AA ; CAUSALITÉ ; RÉVISION(DÉCISION) ; EXPERTISE ; EXPERTISE MÉDICALE ; FORCE PROBANTE ; FAITS NOUVEAUX
Normes : LPGA53
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1606/2004 ATAS/21/2006

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 2

du 17 janvier 2006

 

En la cause

Monsieur C__________, domicilié à GENEVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître MARTIN Jean-Jacques

recourant

 

contre

SUVA, CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, Fluhmattstrasse 1, 6002 LUCERNE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître RIVARA Jacopo

intimée

 


EN FAIT

Monsieur C__________ (ci-après le recourant), né en 1962, a travaillé en qualité de manœuvre auprès de l'entreprise X__________ SA et Y__________ SA de 1992 jusqu'au 31 mars 1998, et était à ce titre assuré auprès de la Caisse Nationale Suisse en cas d'accident (ci-après SUVA).

En date du 31 mars 1998, dernier jour de travail du recourant, celui-ci a chuté alors qu'il travaillait dans une piscine en construction, ce qui lui a causé des douleurs au dos et un choc à la tête. Il a été en incapacité totale de travail depuis.

La SUVA a pris en charge le cas et versé au recourant des indemnités journalières.

Par décision du 28 septembre 1998, la SUVA a informé le recourant qu'elle mettait fin aux prestations au 30 septembre 1998, au motif que ses troubles actuels n'étaient plus en lien de causalité avec l'accident, mais correspondaient à des troubles dégénératifs.

Suite à l'opposition du recourant, la SUVA a confirmé sa décision en date du 25 juin 1999. Cette décision sur opposition est entrée en force.

En date du 20 février 2004, le recourant a déposé une demande de révision auprès de la SUVA, concluant à ce que son dossier soit réexaminé, et à ce qu'une rente entière d'invalidité lui soit accordée. Il se fondait sur les rapports médicaux suivants:

un rapport du Dr L__________, radiologue, du 17 mars 1999. L'imagerie par résonance magnétique dorsale montre une accentuation de la cyphose physiologique à l'étage dorsal supérieur, avec aspect cunéiforme de la vertèbre D2, évoquant un status après tassement vertébral, ainsi que des signes de séquelles d'une maladie de Scheuermann.

un rapport du Dr M__________ du 14 avril 1999. La tomographie dorsale effectuée montre l'aspect cunéiforme de D2. Il existe "en plus une fracture du mur antérieur de D2 sous forme d'une interruption de la corticale".

un rapport du Dr N__________, spécialiste FMH médecine interne, du 14 septembre 2000, qui mentionne une fracture de D2 lors de la chute sur le dos dans la piscine, et le fait qu'il n'est pas douteux que les douleurs dorsales sont à mettre en relation avec les séquelles de l'accident de 1998.

un rapport des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après HUG) du 4 juin 2002, adressé à la Dresse O__________, spécialiste en médecine générale, qui fait état d'un tassement vertébral au niveau de D2 lors de l'accident de 1998.

Un rapport de la Dresse O__________, du 15 avril 2003, qui diagnostique des cervico-dorso-lombalgies chroniques post-traumatiques sur fracture de D2, sur séquelle d'une ancienne maladie de Scheuermann et sur arthrose costo-vertébrale à l'étage dorsal; des lombalgies chroniques sur protrusion discale L4-L5, L5-S1, et sur probable instabilité lombaire; des lésions dégénératives inter apophysaires postérieures; une péritrocantérite de la hanche droite, un status post-traumatique crânio-cérébral; un état anxio-dépressif; un syndrome du tunnel carpien droit; une surdité de type ando-cochléaire à gauche.

Par décision du 4 mars 2004, la SUVA a refusé d'entrer en matière, considérant que les conditions d'une révision procédurale n'étaient pas remplies.

Suite à l'opposition du recourant, la SUVA a confirmé sa décision en date du 26 avril 2004. Il n'y a selon elle aucun fait nouveau ou nouveau moyen de preuve ; de plus, le recourant est tardif, n'ayant pas agi dans les trois mois de la découverte du fait nouveau allégué.

Dans son recours du 27 juillet 2004, le recourant conclut à l'annulation de la décision du 26 avril 2004, à ce qu'il soit ordonné à la SUVA de réexaminer le dossier, à ce qu'une rente entière lui soit octroyée. Il relève que ni la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (ci-après LPGA) ni son ordonnance ne prévoient de délai pour la révision. Il ressort des documents produits qu'il a subi un tassement des vertèbres et souffre de cervico-dorso-lombalgies chroniques post-traumatiques sur fracture de D2. Ces éléments sont nouveaux, puisqu'ils démontrent que son état de santé actuel est la conséquence de l'accident survenu le 31 mars 1998. Les rapports postérieurs à la décision sur opposition doivent ouvrir le droit à la révision.

Dans sa réponse du 27 septembre 2004, la SUVA conclut au rejet du recours. Il n'y a, selon elle, en l'occurrence, ni fait nouveau important, ni nouveau moyen de preuve. Les rapports du Dr L__________ et de la Clinique générale Beaulieu ont été pris en compte par la SUVA, qui les a soumis à son médecin d'arrondissement en juin 1999, qui a confirmé le statut quo sine. Quant au rapport du Dr N__________, il ne s'agit que d'une appréciation différente d'éléments de faits connus, comme c'est le cas du rapport des HUG. Par ailleurs, la demande en révision doit intervenir dans le délai de trois mois selon l'article 67 al. 1 de la loi fédérale sur la procédure administrative (ci-après PA), qui s'applique en matière d'assurances sociales par le biais de l'article 55, al. 1 LPGA.

Le Tribunal a ordonné la comparution personnelle des parties qui s'est tenue le 16 novembre 2004. A cette occasion, le recourant a indiqué que sa demande se basait essentiellement sur la découverte que la vertèbre D2 aurait été fracturée, et non seulement tassée par l'accident. La SUVA s'est dit d'accord de soumettre les pièces médicales produites à son médecin-conseil, en le priant de se déterminer sur l'existence de cette fracture, cas échéant, d'ordonner un examen complémentaire, ainsi que sur les conséquences de celle-ci.

En date du 24 mars 2005, la SUVA a informé le Tribunal que le Dr P__________ avait procédé à l'examen personnel du recourant en février 2005, mais qu'il avait demandé des pièces complémentaires avant de faire part de sa détermination.

En date du 29 juillet 2005, la SUVA a transmis au Tribunal le rapport du Dr P__________. Celui-ci indique qu'immédiatement après l'accident, aucune fracture n'avait été identifiée au niveau vertébral, mais que la région de la deuxième dorsale n'avait pas été investiguée à l'époque. En mars 1999, une déformation cunéiforme de la vertèbre D2 a été identifiée. Cette déformation est compatible avec une ancienne fracture dont l'âge est non précisable. Le Dr P__________ se réfère à un rapport du Dr R__________, professeur à l'institut de radiologie de la clinique W__________, du 17 décembre 2004, auquel il avait demandé un avis sur le dossier radiologique du recourant.

Le professeur R__________ relève que les radiographies de 2002 sont tout à fait superposables à celles du 31 mars 1998. Sur celles-ci, la vertèbre D2 n'est pas visible sur la radiographie de profil ; or, le fait que sur la radiographie de face la vertèbre paraisse normale ne permet pas d'exclure une déformation cunéiforme qui ne serait bien appréciée que sur le profil. À ce moment-là, devant une discordance radio- clinique, il aurait fallu compléter le bilan par un autre examen. Une simple déformation cunéiforme peut traduire soit une lésion liée à un trouble de croissance de la partie antérieure, signe classique de la maladie de SCHEUERMANN, soit une fracture. En l'espèce, cette morphologie bien visible sur les deux I. R. M. et sur les tomographies évoque plutôt une fracture. Il n'est pas possible de donner un âge à ce tassement vertébral, ni à travers la morphologie, ni à travers les éléments métaboliques de la scintigraphie osseuse, ni à travers les anomalies de la moelle osseuse. Il relève cependant que la déformation cunéiforme a bien évolué, car il n'y a pas de troubles statiques vraiment significatifs. L'évolution radiologique de cette pathologie vertébrale est donc plutôt favorable.

Par pli du 31 août 2005, le Tribunal de céans a demandé à la SUVA d'interpeller le Dr P__________ sur les deux questions suivantes: Est-il probable que la fracture de la vertèbre D2 se soit produite lors de l'évènement survenu le 31 mars 1998, compte tenu des circonstances de l'accident et des différents rapports médicaux au dossier? Quelle est la conséquence sur la capacité de travail du recourant de cette fracture en pourcent et en durée?

Le 15 septembre 2005, le recourant s'est adressé à la SUVA pour lui demander formellement le réexamen de son dossier et l'octroi d'une rente entière d'invalidité, suite au rapport complémentaire du Dr P__________ du 17 juin 2005, reconnaissant pour la première fois l'existence d'une fracture de la colonne vertébrale au niveau D2.

Par pli du 4 octobre 2005, l'Office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après OCAI) informait le Tribunal, suite à sa demande du 31 août 2005, que dans le cadre de l'opposition formée à la décision de refus de rente du 18 mars 2003, l'OCAI avait décidé de reprendre l'instruction du dossier, une évaluation pluridisciplinaire de l'état de santé du recourant apparaissant indispensable.

En date du 3 novembre 2005, la SUVA a transmis au Tribunal un rapport complet du Dr S__________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique auprès de la SUVA. Suite à un rappel anatomique, le Dr S__________ a examiné le cas concret du recourant. Après une analyse sur laquelle il sera revenu ultérieurement, le Dr S__________ conclut comme suit: "Je ne crois pas que l'altération de la deuxième vertèbre thoracique ait résulté nécessairement d'une fracture et encore moins, que la chute du 31 mars 1998 ait été impliquée dans son étiologie. Si fracture il y avait, elle était nécessairement antérieure à l'accident qui nous préoccupe. Personnellement, je considère que l'anomalie de la forme de D2 s'inscrit dans le contexte d'une maladie de Scheuermann.".

Par ordonnance du 9 novembre 2005, le Tribunal a transmis au recourant copie de ces documents et lui a fixé un délai au 30 novembre 2005 pour sa détermination, la cause devant ensuite être gardée à juger. Par écritures du 29 novembre 2005, le recourant a mis en doute le bien-fondé du rapport du Dr S__________, malgré son caractère bien documenté et complet. Il a relevé que ses conclusions allaient à l'encontre de celles du professeur R__________, radiologue de renom, et que le Dr S__________ agissait pour le compte de la SUVA. En outre, la SUVA ne s'est pas déterminée sur les conséquences de la fracture en termes de capacité de travail, malgré la demande expresse du Tribunal de céans. Le recourant a demandé ainsi qu'il soit procédé à une expertise judiciaire, confiée à un spécialiste indépendant.

Après transmission de cette écriture à la SUVA par pli du 5 décembre 2005, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales, composé de 5 juges, dont un président et un vice-président, 5 suppléants et 16 juges assesseurs (art. 1 let. r et 56 T LOJ).

Suite à l’annulation de l’élection des 16 juges assesseurs, par le Tribunal fédéral le 27 janvier 2004 (ATF 130 I 106), le Grand Conseil genevois a adopté, le 13 février, une disposition transitoire urgente permettant au Tribunal cantonal des assurances sociales de siéger sans assesseurs à trois juges titulaires, ce, dans l’attente de l’élection de nouveaux juges assesseurs.

Conformément à l'art. 56 V al. 1 let. a ch. 5 LOJ, le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’article 56 LPGA qui sont relatives à la loi fédérale sur l’assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

La LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant de nombreuses modifications dans le domaine de l'assurance-accidents notamment. En l'espèce, la LPGA est applicable, la demande de révision datant du 20 février 2004.

Le recours a été déposé dans les délai et forme légaux, de sorte qu'il est recevable (art. 56 et 60 LPGA, et 106 LAA).

L’article 53 LPGA prévoit que les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si l’assuré ou l’assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants, ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits auparavant (al. 1). Par ailleurs, l’assureur peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu’elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (al. 2). La loi distingue donc entre les motifs exigeant de l’autorité quelle procède à une révision et les motifs qui lui permettent de procéder à une telle révision. La doctrine a précisé, s’agissant des premiers, les cinq hypothèses qui exigent un réexamen. Il faut garder à l’esprit, en effet, les principes de droit administratif, applicables en tout temps et de façon générale.

C’est ainsi que, selon Pierre MOOR, les quatre premières hypothèses forment un groupe, de révision au sens étroit. Elles ont toutes trait à une irrégularité qui affecte la procédure dans laquelle la décision a été prise. Une condition générale leur est commune, c’est que l’intéressé n’a pas été en mesure de faire valoir le grief dans la procédure elle-même ou dans la voie de recours ordinairement ouverte contre la décision prétendument viciée. La première hypothèse est celle où l’administré invoque des faits, antérieurs à la décision, qu’il ignorait, ou des moyens de preuve qu’il ne détenait pas. La deuxième est celle où l’autorité a omis de tenir compte de faits pertinents qui, pourtant, ressortaient du dossier. La troisième est celle où l’autorité a violé une formalité essentielle de la procédure, par exemple en rendant une décision non motivée. La quatrième est celle où des indications erronées ont été données à l’assuré par l’autorité, indications sur lesquelles le particulier s’est fondé sans avoir de motif de les vérifier. Dans ce cas, faits et preuves doivent être pertinents et ils le sont, s’il y a lieu d’admettre qu’ils eussent amené à une décision différente s’ils avaient été connus à temps. Les preuves, quant à elles, doivent servir à prouver soit les faits nouveaux importants qui motivent la révision, soit des faits qui étaient certes connus lors de la procédure précédente, mais qui n'avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant. Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu'il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure. Une preuve est considérée comme concluante lorsqu'il faut admettre qu'elle aurait conduit l'autorité (administrative ou judiciaire) à statuer autrement, si elle en avait eu connaissance, dans la procédure principale. Ce qui est décisif, c'est que le moyen de preuve ne serve pas à l'appréciation des faits seulement, mais à l'établissement de ces derniers. Ainsi, il ne suffit pas qu'une nouvelle expertise donne une appréciation différente des faits; il faut bien plutôt des éléments de faits nouveaux, dont il résulte que les bases de la décision entreprise comportaient des défauts objectifs. Pour justifier la révision d'une décision, il ne suffit pas que l'expert tire ultérieurement, des faits connus au moment du procès principal, d'autres conclusions que l'autorité. Il n'y a pas non plus motif de révision du seul fait que celle-ci paraît avoir mal interprété des faits connus déjà lors de la procédure principale. L'appréciation inexacte doit être, bien plutôt, la conséquence de l'ignorance ou de l'absence de preuve de faits essentiels pour le jugement (ATF 110 V 141 consid. 2; 293 consid. 2a; 108 V 171 ss, consid. 1; ATFA B c/CNA du 19 juin 1996, U 5/95). La cinquième hypothèse est celle où il s’est produit une modification notable des circonstances, soit des faits nouveaux ou une modification du droit (cf. Pierre MOOR, droit administratif, volume 2, pages 341 et 342).

Par ailleurs, s'agissant de l'établissement des faits et de l'appréciation des preuves, on peut rappeler que selon la jurisprudence et la doctrine, l’autorité administrative ou le juge ne doivent considérer un fait comme prouvé que lorsqu’ils sont convaincus de sa réalité (KUMMER, Grundriss des Zivilprozessrechts, 4ème édition Berne 1984, p. 136 ; GYGI, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2ème édition, p. 278 ch. 5). Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5 let. b 125 V 195 consid. ch. 2 et les références). Aussi, n’existe-t-il pas en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5 let. a).

Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; Kieser, Das Verwaltungsverfahren in der Sozialversicherung, p. 212, n° 450 ; Kölz/Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2e éd., p. 39, n° 111 et p. 117, n° 320 ; Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd., p. 274 ; cf. aussi ATF 122 II 469 consid. 4a, 122 II 223 consid. 3c, 120 Ib 229 consid. 2b, 119 V 344 consid. 3c et la référence). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 Cst. (SVR 2001 IV n° 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 94 consid. 4b, 122 V 162 consid. 1d et l’arrêt cité).

Dans un arrêt du 14 juin 1999 (ATF 125 V 351), le Tribunal fédéral des assurances a précisé sa jurisprudence relative à l’appréciation des preuves notamment dans le domaine médical. Le juge doit examiner de manière objective tous le moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Si les rapports médicaux sont contradictoires, il ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre.

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, la jurisprudence a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d’apprécier certains types d’expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, de jurisprudence constante, lorsque aucun indice concret ne permet de douter du bien-fondé des appréciations émises par les médecins de la CNA, les rapports de ces derniers ont valeur de preuve et cela, dans la mesure où la caisse n'était pas partie à la procédure au moment où ils ont été établis (ATF 104 V 209; ATA S. du 29 mars 1994; G. du 9 novembre 1994). Pour ce qui concerne les rapports émanant des médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait relevant de l’expérience que, de par sa position de confident privilégié que lui confère son mandat, le médecin traitant tranchera dans le doute en faveur de son patient (ATF 124 I 175 consid. 4 et les références citées ; Plädoyer 6/94 p. 67).

L'article 53 LPGA ne prévoit pas de délai. En revanche, l'article 55 renvoie à la PA pour les points de procédure qui ne sont pas réglés de manière exhaustive par la loi. Cependant la question de savoir si l'art. 67 PA s'applique en l'espèce peut rester ouverte, vu le résultat du litige.

En l'espèce, on peut constater que les rapports des Dr L__________ et M__________, qui datent respectivement du 17 mars et 14 avril 1999, ne sauraient contenir de faits nouveaux ou constituer un moyen de preuve nouveau puisqu'ils sont antérieurs à la décision sur opposition de la SUVA. Or, la notion de fracture de la vertèbre D2 apparaît déjà dans le rapport de ce dernier. Il est vrai que les rapports des Dr N__________ et O__________ reprennent dans leur diagnostic la notion de fracture et qu'il est apparu dans le cadre de l'instruction du dossier que cet élément n'avait pas été investigué par le médecin-conseil de l'intimé.

Cela ne constitue cependant pas un fait nouveau au sens de la jurisprudence susmentionnée, pour les motifs suivants : d'une part, le rapport du Dr S__________ remplit les conditions jurisprudentielles pour lui reconnaître une pleine valeur probante, et est tout à fait convaincant ; il arrive certes à une conclusion différente de celle du professeur R__________, mais cependant pas diamétralement opposée. En effet, le Dr S__________ ne "croit pas" que l'altération de cette vertèbre ait résulté nécessairement d'une fracture, "encore moins" de l'accident du 31 mars 1998, alors que le Dr R__________ considère que les examens au dossier évoquent "plutôt" une fracture. Par ailleurs, s'il est exact que ni le Dr P__________ ni le Dr R__________ ne se sont déterminés sur les conséquences de cette fracture sur la capacité de travail, on peut clairement en déduire que celle-ci n'en a pas, la déformation cunéiforme de la vertèbre ayant bien évolué selon les constatations de ce dernier. Par conséquent, d'une part l'existence d'une fracture de la vertèbre D2 n'est pas établie, encore moins un lien de causalité avec l'accident ; d'autre part, cette fracture n'est pas à l'origine de l'incapacité totale de travail du recourant dont il se plaint aujourd'hui.

En résumé, s'il y a bien des moyens de preuve nouveaux, notamment le rapport du Dr S__________, il ne sont pas de nature à modifier l'appréciation de la situation.

À noter qu'aucune investigation ne peut plus être menée aujourd'hui à ce sujet comme l'a relevé le professeur R__________ dans son rapport, de sorte qu'une expertise médicale n'est pas justifiée.

Par conséquent, le recours ne peut être que rejeté.

 

***

 

 


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par pli recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu’il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l’enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

 

Le greffier

 

 

 

 

 

 

Pierre RIES

 

La Présidente :

 

 

 

 

 

 

Isabelle DUBOIS

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le