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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/146/2024

ATA/486/2024 du 16.04.2024 ( LOGMT ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/146/2024-LOGMT ATA/486/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 avril 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre

OFFICE CANTONAL DU LOGEMENT ET DE LA PLANIFICATION FONCIÈRE intimé

 



EN FAIT

A. a. À compter du 14 mars 2001, A______ et son épouse B______ ont pris en location un appartement de quatre pièces sis dans un immeuble soumis à la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05).

b. Le 24 mai 2002, le Tribunal de première instance a prononcé le divorce des époux AB______.

c. A______ s’est remarié, le 3 novembre 2008, avec C______. Depuis cette date, le logement est occupé par l’intéressé et son épouse, ainsi que le fils de celle-ci. La fille de C______ l’a également occupé du 7 septembre 2009 au 15 mars 2016.

B. a. Par décision du 25 octobre 2022, l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF) a astreint les époux à la restitution du montant de CHF 8'000.40 à titre d’allocation de logement perçue indûment pour la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2020, au motif que, contrairement à leur devoir d’information, ils n’avaient pas communiqué, spontanément et en temps utile, la modification des revenus réalisés par le groupe de personnes occupant le logement concerné durant cette période.

b. Le 3 novembre 2022, A______ a formé réclamation contre cette décision, faisant valoir que les revenus retenus par l’OCLPF pour les années 2019 et 2020 étaient surévalués et ne reflétaient pas la réalité des revenus effectivement réalisés et admis par l’administration fiscale cantonale.

Pour l’année 2019, il a invité l’OCLPF à ne pas tenir compte du montant de CHF 109'461.- perçu à titre de LPP en tant que revenu, dès lors qu’il s’agissait d’une prestation en capital.

Pour l’année 2020, il a relevé que le montant de CHF 73'222.- était surévalué et ne correspondait pas à celui admis dans l’avis de taxation des impôts cantonaux et communaux daté du 3 juin 2021 pour l’année 2020.

Enfin, sa situation professionnelle et financière s’était péjorée à la suite d’un accident non professionnel survenu le 14 juillet 2022 et il se trouvait en incapacité totale de travailler durant une période indéterminée.

c. Par décision du 14 mars 2023, l’OCLPF a partiellement admis la réclamation et modifié sa décision du 25 octobre 2022, en tant qu’elle portait sur la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2019, compte tenu du fait que l’augmentation significative du montant du RDU provenait essentiellement du montant de CHF 109'461.- versé à titre de capital LPP durant ladite période. Après déduction de ce montant, le revenu pris en compte pour l’année 2019 s’élevait à CHF 64'273.- et le montant du remboursement de l’allocation indûment perçu à CHF 7'181.40.

d. Par courrier du 28 avril 2023, A______ a invité l’OCLPF à revoir sa position portant sur le montant du trop-perçu de l’allocation au logement réclamé et à l’arrêter au montant de CHF 6'362.40 au lieu de CHF 8'000.40. Il a également sollicité une réduction de CHF 819.- (12 x CHF 68.25) pour l’année 2020, correspondant exactement à celle admise pour l’année 2019. Enfin, il a invité l’OCLPF à ne pas tenir compte du montant versé à titre de capital LPP.

e. Par courriel du 28 septembre 2023, A______ a indiqué être inquiet de continuer à recevoir les factures réclamant le montant dû, bien qu’il n’ait pas reçu de réponse suite à son courrier du 28 avril 2023.

f. Par courrier du 3 octobre 2023, l’OCLPF a constaté l’absence de recours contre la décision sur réclamation du 14 mars 2023 et invité l’intéressé à indiquer s’il entendait formellement contester la décision précitée ou s’il sollicitait une reconsidération. Sans nouvelles de sa part, son courrier du 28 avril 2023 serait uniquement traité sous l’angle de la reconsidération.

g. Par décision du 7 décembre 2023, l’OCLPF a refusé d’entrer en matière sur la demande de reconsidération de A______.

Aucun crime ou délit n’avait influencé ses décisions des 25 octobre 2022 et 14 mars 2023. Il n’y avait pas de faits ou de moyens de preuve nouveaux et importants qu’il n’avait pas déjà invoqués dans le cadre de sa réclamation à l’encontre de sa décision rétroactive du 25 octobre 2022, étant relevé que les arguments avaient été partiellement admis sur réclamation. Il n’existait aucun fait pertinent et déterminant survenu après la prise de sa décision rétroactive du 25 octobre 2022.

C. a. Par acte posté le 15 janvier 2023, A______ a saisi la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) d’un recours contre la décision de reconsidération du 7 décembre 2023. Il souhaitait « faire entendre [s]es droits », faisant valoir que, contrairement à ce qu’avait retenu l’OCLPF, il avait communiqué la majoration de son salaire. Il contestait la prise en compte de sa rente LPP comme revenu, ainsi que les montants erronés mentionnés dans ses attestations annuelles 2021 et 2022.

b. Le 7 février 2024, l’OCLPF a conclu au rejet du recours. Il n’existait aucun motif de reconsidération emportant le réexamen obligatoire de la décision sur réclamation du 14 mars 2023. C’était partant à bon droit qu’il avait refusé d’entrer en matière sur sa demande de reconsidération.

c. Par réplique du 14 février 2024, A______ a relevé qu’il remplissait scrupuleusement chaque année un formulaire de renseignements, en fournissant tous les détails de son salaire.

d. Le 29 février 2024, A______ a rappelé qu’il n’avait jamais omis de fournir les informations nécessaires à l’intimé. Il s’interrogeait sur l’absence d’augmentation de l’allocation, son salaire ayant diminué.

e. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Est litigieux le refus de l'intimé de reconsidérer sa décision sur réclamation du 14 mars 2023 sollicitant le remboursement du montant de l’allocation de logement indûment perçue pour la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2020, soit un montant de CHF 7'181.40, correspondant à la différence entre l’allocation de logement rectifiée pour la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2020 et les paiements effectués durant cette période.

2.1 L’autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n’est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l’art. 48 al. 1 LPA. Une telle obligation existe lorsque la décision dont la reconsidération est demandée a été prise sous l’influence d’un crime ou d’un délit (art. 80 let. a LPA) ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 let. b LPA ; faits nouveaux « anciens » ; ATA/1027/2023 du 19 septembre 2023 consid. 2.1).

Une telle obligation existe également lorsque la situation du destinataire de la décision s’est notablement modifiée depuis la première décision (art. 48 al. 1 let. b LPA). Il faut entendre par là des faits « nouveaux » (nova proprement dits), c’est‑à‑dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l’état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l’autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/757/2023 du 11 juillet 2023 consid. 3.1). Pour qu’une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l’état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l’autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/1027/2023 précité consid. 2.1).

Une demande de reconsidération ne doit pas permettre de remettre continuellement en cause des décisions entrées en force et d’éluder les dispositions légales sur les délais de recours (ATF 136 II 177 consid. 2.1). C’est pourquoi, en principe, l’administré n’a aucun droit à ce que l’autorité entre en matière sur sa demande de reconsidération, sauf si une telle obligation de l’autorité est prévue par la loi ou si les conditions particulières posées par la jurisprudence sont réalisées (ATF 120 Ib 42 consid. 2b). La procédure de reconsidération ne constitue pas un moyen de réparer une erreur de droit ou une omission dans une précédente procédure (ATF 111 Ib 211 consid. 2 ; ATA/995/2023 du 12 septembre 2023 consid. 3.2).

2.2 En l’espèce, le recourant a contesté la décision du 14 mars 2023 par courrier du 28 avril 2023. La question de savoir si, comme l’a retenu l’intimé, son courrier devait être considéré comme une demande de reconsidération – et non comme un recours – peut rester ouverte. En effet, même à considérer que ce courrier du constituait un recours contre la décision sur réclamation du 14 mars 2023, celui-ci aurait en tout état été rejeté.

Les conditions d’une reconsidération ne sont dès lors pas remplies.

En tant que le recourant conteste la prise en compte en tant que revenu du montant de CHF 109'461.- provenant de son 2ème pilier, il perd de vue que la décision sur réclamation du 14 mars 2023 lui a donné raison sur ce point et a déduit ce montant de son RDU pour l’année 2019.

S’agissant ensuite du grief relatif aux montants erronés qui auraient été pris en compte dans les attestations annuelles du RDU 2021 (année de référence 2019) et 2022 (année de référence 2020), force est de constater que les calculs opérés par l’OCLPF se fondent sur les RDU établis par le centre de compétences du RDU, qui s’est basé sur les bordereaux de taxation du recourant. Rien ne permet de considérer que les avis de taxation ou la détermination du RDU seraient entachés d’erreur, ce que le recourant ne soutient d’ailleurs pas. Il se plaint uniquement de ce que le RDU 2022 (année de référence 2020) ne reflèterait pas sa situation économique puisqu’il mentionne un RDU socle de CHF 54'123.-, alors que son avis de taxation 2020 du 3 juin 2021 retient un revenu total 2020 de CHF 45'337.- et une fortune nulle. Il ressort toutefois du détail du RDU socle, annexé à l’attestation annuelle 2022, que le RDU a été fixé sur la base du revenu brut de CHF 50'731.- retenu par l’administration fiscale dans le bordereau du 3 juin 2021, auquel ont été ajoutés les allocations familiales et le rendement de fortune, sous déduction des frais professionnels et déductions liées à l’acquisition du revenu. Quant à la fortune, elle résulte également des éléments retenus par l’administration fiscale, en particulier de la fortune brute du couple de CHF 275'255.- et des dettes hypothécaires de CHF 110’710.-. Un tel procédé, conforme aux art. 4 à 7 de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU - J 4 06), n’est pas critiquable.

Quant à l’argument selon lequel il aurait toujours fourni les informations nécessaires à l’intimé, le recourant n’a aucunement démontré avoir informé l’OCLPF des nouveaux éléments concernant sa fortune, lesquels étaient à l’origine de l’augmentation de son RDU pour l’année 2020.

Enfin, et dans la mesure où le recourant se prévaut d’une diminution de salaire depuis son accident survenu en juillet 2022, force est de constater que ce fait porte sur une période postérieure à la période concernée par le présent litige, qui concerne l’allocation de logement pour la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2020. Ce grief excède ainsi l’objet du litige.

Les considérants qui précèdent conduisent ainsi au rejet du recours. Cette issue ne serait pas différente si le courrier du 28 avril 2023 devait être considéré comme une demande de révision. En effet, le recourant ne fait pas valoir que la décision aurait été prise sous l’influence d’un crime ou d’un délit. Par ailleurs, aucun des motifs invoqués à l’appui de son recours ne constitue des faits ou moyens de preuve nouveaux et importants qu’il ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente. En effet, tant l’argument contestant la prise en considération en tant que revenu du capital provenant de son 2ème pilier que celui par lequel le recourant remet en cause les revenus figurant sur les attestations de son revenu déterminant unifié (ci-après : RDU) ont été invoqués dans son opposition du 3 novembre 2022. Quant au fait que l’intimé n’aurait pas tenu compte qu’il avait dûment communiqué son augmentation de salaire, il ne s’agit pas d’un fait nouveau que le recourant ne pouvait invoquer dans la procédure précédente, ce que le recourant ne prétend d’ailleurs pas.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

3.             Compte tenu de la nature du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera en outre allouée, dès lors que le recourant succombe (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 janvier 2024 par A______ contre la décision de l’office cantonal du logement et de la planification foncière du 7 décembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à l'office cantonal du logement et de la planification foncière.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :