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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1952/2022

ATA/1042/2022 du 17.10.2022 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1952/2022-EXPLOI ATA/1042/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 octobre 2022

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______, agissant au nom de l’entreprise individuelle B______
représentée par Me Pierluca Degni, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'ÉCONOMIE ET DE L'EMPLOI

 



EN FAIT

1) Madame A______ exploitait l’hôtel « C______ », sis à Genève, sous la raison individuelle B______. La société a été radiée le 5 janvier 2022, par suite de cessation d’activité.

2) Par décision du 18 décembre 2020, le département de l’économie et de l’emploi (ci-après : DEE ou le département) lui a accordé une aide de CHF 122'253.50 pour la période du 26 septembre 2020 au 31 décembre 2021, au titre de la loi sur l’aide financière extraordinaire de l’État destinée aux entreprises en complément aux cas de rigueur définis par la loi fédérale Covid-19 du 25 septembre 2020.

3) Le 3 février 2021, A______ a déposé, au nom de l’entreprise individuelle, une demande d’aide financière pour cas de rigueur. Le même jour, elle a signé une convention d’octroi de contributions à fonds perdu (ci-après : la convention), avec le département, qui conditionnait l’octroi de l’aide considérée au respect d’une procédure à mener postérieurement au versement de l’acompte.

4) Le 16 mai 2021, le département a accordé à la raison individuelle une aide de CHF 289'843.90.

5) Le 9 juillet 2021, le DEE, faisant suite à une nouvelle demande d’aide financière extraordinaire de A______, relative à l’indemnisation anticipée des coûts fixes non couverts pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021, a accordé une aide complémentaire de CHF 74'520.40. La décision précisait que le montant définitif de l’aide serait déterminé sur la base de l’examen des états financiers de l’entreprise au 30 juin 2021. Elle devait pour ce faire déposer une nouvelle demande sur la base des états financiers 2020 définitifs et une demande d’aide complémentaire pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021. L’acompte versé se fondait sur l’aide obtenue en 2020, alors que la décision finale qui serait rendue tiendrait compte des chiffres 2020 définitifs et des chiffres du premier semestre 2021. L’attention de l’entreprise était attirée sur le fait que la décision définitive d’indemnisation pouvait potentiellement être moins élevée que le montant versé à titre d’acompte et impliquer, le cas échéant, un remboursement partiel de celui-ci.

6) Le 3 août 2021, le DEE a invité A______ à accomplir les démarches décrites dans sa décision. L’intéressée y a donné suite en produisant les pièces comptables requises, notamment, et en retournant la convention signée le 6 septembre 2021.

7) Par courrier du 23 septembre 2021 et rappel du 28 septembre 2021, le département a rappelé le deuxième volet des démarches à entreprendre en lien avec l’aide financière pour la période allant du 1er janvier au 30 juin 2021, le délai pour accomplir celui-ci étant fixé au 31 octobre 2021.

8) A______ n’ayant pas entrepris les démarches requises dans le délai imparti, le DEE a sollicité, le 25 janvier 2022, le remboursement de l’acompte versé à la suite de la décision du 9 juillet 2021.

Aucune demande d’aide financière pour le premier semestre 2021 n’avait été déposée par l’entreprise dans le délai allant qu’au 31 octobre 2021, ni d’ailleurs par la suite.

9) Par courrier du 18 janvier 2022, A______ a formé une réclamation à l’encontre de cette décision.

Elle avait pensé que le courrier de septembre 2021 se rapportait à une demande d’aide pour le second semestre 2021. En raison de la cessation de son activité depuis septembre 2021 et effective depuis janvier 2022, elle n’entendait pas demander d’aide supplémentaire pour le second semestre. Elle demandait que l’acompte versé soit considéré comme indemnité définitive.

10) Le 5 avril 2022, un courrier a été adressé par le DEE à A______ informant les entreprises éligibles à l’aide pour le seconde semestre 2021 à qui un remboursement avait été demandé que dans l’hypothèse où une telle aide était accordée, le versement se ferait en tenant compte de la part d’indemnisation indûment perçue, dont le remboursement était ainsi provisoirement suspendu.

A______ a déposé une nouvelle demande le 21 avril 2022, pour le second semestre 2021.

11) Par décision du 11 mai 2022, le département a confirmé sa décision de remboursement.

L’intéressée n’avait pas respecté la procédure prescrite. L’acompte avait été versé conformément aux dispositions légales et octroyé dans l’attente de pouvoir déterminer le montant d’aide définitif sur la base des états financiers au 30 juin 2021. L’avenant à la convention, signé par A______ dans le cadre de la demande d’acompte, conditionnait l’octroi de l’aide au respect d’une procédure à mener postérieurement au versement dudit acompte, en deux temps, comme le mentionnait la décision du 9 juillet 2021.

Or, malgré un dernier rappel envoyé le 28 septembre 2021, aucune demande n’avait été déposée. Il ne pouvait y avoir eu confusion relative au contenu de ce courrier. L’intéressée n’avait pas respecté les indications figurant dans la décision d’octroi et les courriers des 3 août, 23 et 28 septembre 2021.

12) Par acte expédié le 13 juin 2022, A______, agissant au nom de l’entreprise individuelle, a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice contre cette décision, concluant au constat que celle-ci était contraire au droit et disproportionnée et devait être annulée. Il convenait d’admettre sa demande d’aide financière pour cas de rigueur, de convertir l’avance accordée en indemnité définitive et de lui donner acte qu’elle renonçait à tout versement complémentaire pour le 1er semestre 2021.

Les conséquences du fait de ne pas se conformer aux deux étapes nécessaires à l’aide accordée sous forme d’acompte ne lui avaient pas été indiquées. Il était uniquement mentionné que la restitution de l’aide versée à tort pouvait avoir lieu. Le courrier du 23 septembre 2021 n’était pas clair, dès lors que le droit à une aide complémentaire pour le premier semestre 2021 s’était déjà concrétisé par l’acompte perçu le 9 juillet 2021. Il fallait le comprendre comme visant à déterminer si une aide complémentaire pouvait être versée. Elle avait compris le courrier du 28 septembre 2021 comme une information se rapportant à une aide pour le second semestre 2021. N’en souhaitant pas puisqu’elle préparait la cessation de son activité, elle n’avait pas donné suite à ce courrier.

Il ressortait des pièces qu’elle avait produites que son hôtel était resté fermé du 31 janvier au 30 juin 2021. Elle n’avait réalisé aucun chiffre d’affaires. Sans vouloir minimiser l’inattention commise, il était excessif de lui réclamer le remboursement de l’acompte perçu. Elle était toujours disposée à ce que celui-ci soit converti en indemnité définitive, quand bien même la perte subie au premier semestre 2021 était supérieure. Lorsqu’elle avait appris, à réception du courrier du 5 avril 2022, que le DEE suspendait sa demande de restitution au motif qu’elle était susceptible de bénéficier d’une aide financière pour le second semestre 2021, elle avait requis cette aide. Or, de manière surprenante, le DEE avait ensuite confirmé sa demande de remboursement.

Un examen diligent des documents qu’elle avait produits avec sa réclamation démontrait qu’elle remplissait les conditions à l’aide financière. Celle-ci aurait ainsi dû lui être accordée, de sorte que son remboursement n’avait pas lieu d’être. Il était contraire au principe de la bonne foi de lui avoir accordé une aide, finalement retirée en raison du manque de rigueur de l’administration dans le suivi du dossier.

Enfin, l’absence des conséquences en cas de non-conformité avec le processus prescrit n’avait pas été annoncée. En outre, il était excessivement formaliste de fonder la demande de remboursement sur le fait qu’elle n’avait pas fourni les éléments permettant de déterminer le montant définitif de l’aide relative au 1er semestre 2021, alors que le DEE avait laissé le formulaire pour communiquer ces informations sur son site jusqu’au 12 décembre 2021.

13) Le département a conclu au rejet du recours.

Il a souligné que le processus en deux étapes ressortait clairement tant du règlement que de la décision du 9 juillet 2021. Certes, le délai pour déposer une nouvelle demande sur la base des états financiers 2020 définitifs ne ressortait pas directement du courrier du 9 juillet 2021. Il était toutefois mentionné à plusieurs reprises dans le règlement 12’938 et dans le ch. 5.1 de l’avenant.

Cette date avait encore été rappelée dans les courriers des 3 août 2021, 23 et 28 septembre 2021. La recourante ne contestait pas avoir adressé les justificatifs hors délai, soit dans le cadre de sa réclamation. La fixation d’une date à respecter se justifiait afin de garantir le respect de l’égalité de traitement et la sécurité du droit. L’intimé n’avait pas violé la loi ni commis un excès de son pouvoir d’appréciation en refusant l’aide « cas de rigueur » et en réclamant le remboursement de l’acompte indûment perçu, faute du respect par la recourante de la date butoir du 31 octobre 2021, rappelée à deux reprises.

14) Dans sa réplique, la recourante a fait valoir que le département violait le droit puisqu’il reconnaissait qu’il n’était pas entré en matière sur les comptes 2021 produits avec la réclamation. Or, s’il l’avait fait, il se serait rendu compte que l’aide n’avait pas été perçue indûment. En omettant d’examiner ces documents, le DEE avait violé son droit d’être entendue ainsi que la maxime inquisitoire.

15) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Est litigieux le remboursement de l’acompte d’aide financière perçu par la recourante le 9 juillet 2021.

a. Le 25 septembre 2020, l’Assemblée fédérale a adopté la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l’épidémie de Covid-19 (loi Covid-19 - RS 818.102).

Le 25 novembre 2020, le Conseil fédéral a adopté l’ordonnance concernant les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises en lien avec l’épidémie de Covid-19 (ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020 ; ci-après : ordonnance Covid-19 - RS 951.262), modifiée à plusieurs reprises, qui prévoyait que la Confédération participait aux coûts et aux pertes que les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises occasionnaient à un canton (art. 1 al. 1). L’entreprise devait remplir un certain nombre d’exigences pour bénéficier du soutien financier (art. 2 et 3 ordonnance Covid-19)

b. Au plan cantonal genevois, le Grand Conseil a adopté, le 29 janvier 2021, la loi 12'863 relative aux aides financières extraordinaires de l’État destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l’épidémie de coronavirus pour l’année 2021 (ci-après : aLAFE 2021), complétée par son règlement d’application du 3 février 2021 (ci-après : aRAFE-2021), dont le but était notamment de limiter les conséquences économiques de la lutte contre l’épidémie pour les entreprises sises dans le canton, conformément à la loi et à l’ordonnance Covid-19 (art. 1 al. 1 aLAFE 2021).

Ladite loi a été abrogée par la loi 12'938 (ci-après : LAFE-2021), adoptée par le Grand Conseil le 30 avril 2021.

c. Selon l’art. 15 al. 1 et 2 LAFE-2021, l’aide financière est accordée sur demande du bénéficiaire potentiel, et adressée au département sur la base d’un formulaire spécifique, accompagné notamment de toutes les pièces utiles nécessaires au traitement de la demande. La liste des pièces requises ainsi que les modalités de dépôt des demandes figurent dans le règlement d’application de la présente loi (at. 13 al. 3 LAFE-2021).

La participation financière indûment perçue doit être restituée sur décision du département (art. 17 al. 1 LAFE-2021). Est indûment perçue la participation financière utilisée à d’autres fins que la couverture des coûts fixes tels que précisés à l'article 3 (art. 17 al. 2 LAFE-2021).

Le Conseil d’État édicte les dispositions nécessaires à l’application de la présente loi (art. 22 LAFE-2021), ce qu’il a fait avec le règlement d’application 12'938 du 5 mai 2021.

d. Selon l’art. 15 al. 1 du règlement 12'938, l’indemnité pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021 est déterminée sur la base d’un examen des états financiers de l’entreprise au 30 juin 2021 et correspond à la différence entre les coûts totaux, hors impôts et taxes, et le chiffre d’affaires de l'entreprise sur cette même période (art. 15 al. 2 du règlement 12'938). Pour toute demande déposée jusqu’au 30 juin 2021 pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021, l'indemnité équivaut à 50 % du montant obtenu en application de l’alinéa 1, calculé sur 12 mois (taux forfaitaire) (art. 15 al. 3 du règlement 12'938). L’indemnité octroyée en application de l’al. 3 est versée à titre d’acompte, selon les modalités prévues par convention conclue en vertu de l’art. 22.

Le montant définitif est déterminé a posteriori sur la base d’un examen des états financiers de l’entreprise bénéficiaire au 30 juin 2021, selon les modalités prévues à l’al. 2 (art. 15 al. 4 du règlement 12'938). L'entreprise bénéficiaire d’une indemnité octroyée à titre d’acompte au sens de l’al. 3 est tenue de remettre au département les états financiers visés à l’al. 4 au plus tard le 31 octobre 2021 (art. 15 al. 5 du règlement 12'938).

e. Selon l’art. 23 al. 1 du règlement 12'938, les demandes pour la période courant du 1er janvier 2020 au 30 juin 2021, accompagnées des justificatifs listés dans le formulaire, sont adressées au département au plus tard le 31 octobre 2021. Les demandes déposées hors du délai mentionné à l’al. 1 sont irrecevables (art. 23 al. 3 du règlement 12'938).

Selon l’art. 27 al. 1 du règlement 12'938, en cas d’octroi d’une aide financière et de versement d’un acompte, une décision rappelant les conditions et les modalités d’octroi et de versement ainsi que les obligations du bénéficiaire est adressée aux entreprises. Cette décision indique les montants de l’aide financière et de l’acompte alloués (art. 27 al. 2 du règlement 12'938).

À défaut de réception par le département des états financiers au 30 juin 2021, les acomptes versés au sens des art. 12 al. 3 et 4 et art. 15 al. 3 et 4 du règlement 12'938 doivent être restitués (art. 29 al. 2 du règlement 12'938).

f. De manière générale, une révocation est possible aux conditions prévues dans la loi (ATF 134 II 1 consid. 4.1) ou, en l’absence de base légale, également lorsqu'un intérêt public particulièrement important l'impose (ATF 139 II 185 consid. 10.2.3 ; 137 I 69 consid. 2.3 ; 135 V 215 consid. 5.2 ; 127 II 306 consid. 7a). La révocation d’une décision pour inexécution d’une obligation ne requiert pas de base légale, si cette obligation est l’une des conditions objectives que la loi pose à l’octroi d’une prestation : il s’agit là de « rétablir » l’ordre légal (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd. 2011, p. 383s.).

g. Le strict respect des délais légaux se justifie pour des raisons d’égalité de traitement et par un intérêt public lié à la sécurité du droit et n’est pas constitutif de formalisme excessif (ATF 142 V 152 consid. 4.2 125 V 65 consid. 1).

3) En l'espèce, le délai pour produire les pièces nécessaires au calcul définitif du droit aux prestations d’aide financière pour le premier semestre 2021, rappelé dans l’avenant signé par la recourante et les courriers qui lui ont été adressés les 3 août, 23 et 28 septembre 2021, est un délai légal, et non un délai d’ordre, puisque la loi prévoit une conséquence stricte en cas de non-respect. En effet, il ressort expressément du règlement d’application que les demandes déposées hors du délai mentionné à l’al. 1 (donc au 31 octobre 2021) sont irrecevables (art. 23 al. 3 règlement 12'938).

La recourante reconnaît avoir omis de produire les pièces justificatives dans le délai fixé au 31 octobre 2021. Elle conteste cependant les conséquences attachées à cette omission, soit l’obligation de rembourser l’acompte versé en juillet 2021.

Or, la décision du 9 juillet 2021 indiquait les démarches à entreprendre et les dates limites pour ces démarches ressortaient tant des normes légales que de l’avenant, signé. La recourante ne pouvait donc, en agissant avec diligence, ignorer cette date qu’il lui appartenait de respecter. En outre, l’avenant mentionnait clairement que si le montant définitif était inférieur à l’acompte versé, l’entreprise bénéficiaire devait restituer la différence dans les 60 jours suivant la notification de la décision. La décision indiquait également que tout montant perçu à tort devait être remboursé.

Comme cela vient d’être évoqué, il appartenait à la recourante d’être attentive à cette date limite et d’en prendre note, celle-ci ne ressortant pas seulement des normes applicables, mais lui ayant en sus été rappelée dans les courriers du département des 3 août, 23 et 28 septembre 2021. Conformément à la jurisprudence constante, le respect d’un délai, in casu fixé au 31 octobre 2021, n’est nullement constitutif d’un formalisme excessif. Au contraire, il permet de garantir l’égalité de traitement entre les administrés et contribue en l’espèce à la bonne gestion des deniers publics.

Le fait que le département ait suspendu au cours de la procédure de réclamation l’obligation de rembourser l’acompte, en vue d’en tenir compte dans l’hypothèse où une nouvelle aide était accordée, pour le second semestre 2021, ne permet pas de retenir, contrairement à ce que la recourante semble croire, que celui-ci se serait trompé ou aurait renoncé à la perception du montant qu’il réclamait. Il a, au contraire, prévu un traitement pragmatique de la nouvelle demande, lui permettant, le cas échéant, de procéder par compensation. La recourante ne saurait non plus tirer argument du fait que le DEE savait ou devait savoir qu’elle avait cessé son activité en janvier 2022, notamment puisque sa raison individuelle avait été radiée, pour en conclure que le courrier du 5 avril 2022 impliquait que l’État renonçait à sa créance. Il était manifeste que ce courrier était un courrier-type adressé à toutes les entreprises ayant fait l’objet d’une décision de restitution. La recourante a d’ailleurs parfaitement compris que la suspension provisoire de la demande de remboursement devait être mise en relation avec l’éventuel octroi d’une aide pour le second semestre 2021, qu’elle ne s’est au demeurant pas privée de requérir, quand bien même elle reconnaît avoir dès septembre 2021 cessé toute activité hôtelière. Conformément à son courrier du 5 avril 2022, le DEE n’a d’ailleurs pas entrepris de démarches en vue de recouvrer sa créance.

Par ailleurs, le système d’aide financière mis en place tant par la Confédération que le canton visait à apporter une aide provisoire immédiate aux entreprises particulièrement touchées par les restrictions induites pour leur activité en raison de la pandémie. Le soutien immédiat était versé sous forme d’acompte, puis déterminé une fois les états financiers définitifs de l’entreprise établis. Cette aide, versée entièrement à fonds perdus par l’État, avait pour corollaire l’obligation des entreprises bénéficiaires de produire leurs états financiers définitifs dans certains délais, afin que le montant exact de l’aide soit déterminé. Ne s’étant pas conformée à cette obligation, la recourante doit se voir opposer son inaction.

Celle-ci a eu pour conséquence que sa demande était irrecevable aux termes de l’art. 23 al. 3 du règlement 12'938. L’acompte versé avait ainsi été accordé sans cause valable et devait être restitué. En outre, les art. 17 al. 1 LAFE-2021 et 29 al. 2 du règlement 12'938 prévoient également des mécanismes de restitution des prestations indûment perçues. Quand bien même il conviendrait de retenir, comme le soutient la recourante, que ces bases légales seraient suffisantes pour fonder la restitution du montant perçu à titre d’acompte, il est rappelé qu’aucune base légale n’est requise pour réclamer la restitution lorsque le bénéficiaire d’une prestation n’a pas répondu à une des conditions objectives à celle-ci, soit in casu le fait de fournir les documents nécessaires dans le délai prescrit.

Le DEE aurait violé le principe de l’égalité de traitement s’il avait tenu compte des pièces fournies hors délai, avec la réclamation. Il n’avait donc, contrairement à ce que lui reproche la recourante, pas à examiner ces pièces et n’a, par conséquent, pas violé le droit d’être entendue de celle-ci en n’en tenant pas compte.

Il résulte des considérations qui précèdent que le DEE n’a pas violé la loi ni n’a commis d’excès ou d’abus de son pouvoir d’appréciation en réclamant à la recourante le remboursement de l’avance, faute pour celle-ci d’avoir remis la documentation comptable dans le délai imparti.

4) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 juin 2022 par Madame A______, agissant au nom de l’entreprise individuelle B______, contre la décision du département de l’économie et de l’emploi du 11 mai 2022 ;

 

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Madame A______ , agissant au nom de l’entreprise individuelle B______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierluca Degni, avocat de la recourante, au département de l'économie et de l'emploi ainsi qu’au Secrétariat d’État à l’économie.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

N. Deschamps

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :