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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1921/2018

ATA/563/2020 du 09.06.2020 ( AIDSO ) , REJETE

Descripteurs : OBJET DU LITIGE;ASSISTANCE PUBLIQUE;PRESTATION D'ASSISTANCE;AIDE FINANCIÈRE;RESSORTISSANT ÉTRANGER;DROIT COMMUNAUTAIRE;ACCORD SUR LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES;DROIT DE DEMEURER;ACTIVITÉ LUCRATIVE;TRAVAILLEUR;INCAPACITÉ DE TRAVAIL
Normes : LPA.65; Cst.12; Cst-GE.39; LIASI.11.al1; LIASI.11.al2; LIASI.11.al4; RIASI.17; RIASI.19; ALCP.4 Annexe I; ALCP.24 Annexe I; OLCP.22
Résumé : Rejet du recours interjeté contre la décision du SPC accordant au recourant, au bénéfice d’une rente de l’assurance-invalidité, une aide financière exceptionnelle en application de la LIASI, le sort du titre de séjour de l’intéressé n’ayant pas encore été tranché par l’OCPM au moment du dépôt de la demande.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1921/2018-AIDSO ATA/563/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 juin 2020

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Caritas Genève, soit pour lui Monsieur Alexandre Schmid, juriste

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

 



EN FAIT

1) Originaire d’Espagne, Monsieur A______, né le ______ 1962, a travaillé en Suisse entre 1988 et 2003.

Selon le registre de l’office cantonal de la population et des migrations
(ci-après : OCPM), M. A______ réside à Genève depuis octobre 2002 et a été mis au bénéfice d’autorisations successives de courte durée jusqu’en 2008. En juillet 2009, il s’est vu octroyer une autorisation de séjour, qui est arrivée à échéance en avril 2012.

2) Dès 2004, M. A______ a été mis au bénéfice des prestations financières de l’Hospice général (ci-après : l’hospice).

3) Par décision du 15 juin 2017, l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI) a mis M. A______ au bénéfice d’une rente ordinaire de
l’assurance-invalidité (ci-après : AI), partielle du 1er décembre 2012 au 31 janvier 2017 (pour un degré d’invalidité de 60 %) puis entière à compter du 1er février 2017 (pour un degré d’invalidité de 100 %).

4) Le 26 septembre 2017, M. A______ a déposé auprès du service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) une demande de prestations complémentaires à l’AVS/AI (ci-après : PC).

5) Par décision du 17 octobre 2017, le SPC a refusé d’entrer en matière sur la demande de M. A______ au motif qu’il n’était au bénéfice d’aucun titre de séjour valable.

Cette décision n’ayant pas été contestée, elle est entrée en force.

6) Le 26 octobre 2017, M. A______ a déposé auprès du SPC une demande d’aide sociale.

7) Par décision du 19 mars 2018, le SPC a octroyé à M. A______ des prestations d’aide sociale à compter du 1er octobre 2017.

8) Le 18 avril 2018, M. A______ a formé opposition contre cette décision, ne comprenant pas les montants alloués, qui n’étaient pas suffisants pour subvenir à ses besoins.

9) Par décision du 30 avril 2018, le SPC a rejeté l’opposition de M. A______.

Les montants octroyés au titre de l’aide financière exceptionnelle en application de la loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04) étaient corrects, les dépenses reconnues et les revenus déterminants ayant été arrêtés conformément aux dispositions légales applicables.

Cette décision indiquait qu’elle pouvait être contestée auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

10) Par acte expédié le 1er juin 2018, M. A______ a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales) contre cette décision, concluant à son annulation, subsidiairement au renvoi du dossier au SPC pour l’octroi de PC « ordinaires », voire de prestations d’aide sociale « ordinaires ».

Le SPC justifiait sa décision par la longueur de la procédure de renouvellement de son autorisation de séjour, ce qui était critiquable au regard des dispositions de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30) et de la jurisprudence rendue dans ce cadre, au regard de son domicile constant en Suisse depuis de nombreuses années. Quand bien même son autorisation de séjour était en cours de renouvellement, il devait être mis au bénéfice de PC.

11) Le 5 juin 2018, la chambre des assurances sociales a transmis le dossier à la chambre administrative comme objet de sa compétence au vu des voies de droit indiquées dans la décision contestée, ce dont elle a informé M. A______.

12) Le 20 juin 2018, le SPC a conclu au rejet du recours.

Le statut de « personne étrangère sans autorisation de séjour » de M. A______ justifiait le versement d’une aide financière exceptionnelle en application de la LIASI.

13) Le 30 août 2018, M. A______ a répliqué, persistant dans les conclusions de son recours. Il n’avait pas contesté la décision refusant sa demande de PC, pensant qu’il pourrait se voir octroyer l’aide sociale, qui s’était toutefois révélée être plus basse que l’aide versée en son temps par l’hospice.

14) a. Le 24 septembre 2018, le juge délégué a ordonné une comparution personnelle des parties, qui a eu lieu le 4 octobre 2018.

b. M. A______ a indiqué avoir sollicité des nouvelles de l’état d’avancement de son dossier auprès de l’OCPM en mai 2018, mais n’avait alors pas obtenu de réponse.

c. Selon la représentante du SPC, le dernier refus de PC en faveur de M. A______ datait du 17 octobre 2017. Dans l’hypothèse où un permis lui serait accordé, des prestations ne pourraient lui être octroyées qu’à compter de cette date.

15) Le 4 octobre 2018, le juge délégué a sollicité de l’OCPM des renseignements au sujet de l’état du dossier de M. A______ s’agissant du renouvellement de son autorisation de séjour.

16) Le 21 décembre 2018, l’OCPM lui a répondu que le dossier de M. A______ était en cours d’examen par ses services.

17) Le 14 janvier 2019, le juge délégué a prononcé la suspension de la procédure, d’entente entre les parties.

18) Le 13 janvier 2020, le juge délégué a sollicité des parties des renseignements concernant l’état d’avancement de la procédure.

19) Le 21 janvier 2020, M. A______ a informé le juge délégué que la demande de renouvellement de son autorisation de séjour avait été préavisée favorablement par l’OCPM et était en cours d’examen par le Secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) depuis plusieurs mois.

20) Le 22 janvier 2020, le SPC a fait savoir au juge délégué que M. A______ était toujours au bénéfice d’une aide financière exceptionnelle en application de la LIASI.

21) Le 24 février 2020, M. A______ a informé le juge délégué que son permis de séjour avait été renouvelé.

22) Le 26 février 2020, le juge délégué a prononcé la reprise de la procédure, impartissant au SPC un délai pour se déterminer sur l’incidence du renouvellement du permis de séjour de M. A______ sur la décision litigieuse.

23) Le 15 avril 2020, le SPC a persisté dans ses précédentes conclusions.

M. A______ était au bénéfice d’une aide financière exceptionnelle en application de la LIASI, qui se justifiait au regard de son statut de « personne étrangère sans autorisation de séjour ». À la suite du renouvellement de son autorisation de séjour, son droit aux PC et à l’aide sociale ordinaire ferait toutefois l’objet d’un examen à compter du 1er février 2020, date à laquelle les prestations qu’il servait pouvaient prendre naissance, pour autant que les autres conditions légales soient également réunies.

24) Le 24 avril 2020, M. A______ a persisté dans les conclusions et termes de son recours.

Le renouvellement de son autorisation de séjour était resté en suspens depuis 2012 auprès de l’OCPM, qui avait attendu le résultat de la demande d’AI pour statuer. Sa situation était ainsi différente de celle des personnes demandant une autorisation de séjour et dont la présence était tolérée par les autorités, puisqu’il était déjà au bénéfice d’une autorisation de séjour et qu’il bénéficiait d’un droit à en obtenir la prolongation en application de l’accord entre la Confédération suisse, d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d’autre part, sur la libre circulation des personnes du 21 juin 1999 (ALCP - RS 0.142.112.681). C’était dès lors à tort que le SPC considérait qu’à compter du mois de février 2020 seulement il pouvait prétendre aux prestations ordinaires servies par le SPC.

25) Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 3 al. 2 et 52 LIASI, ATA/166/2020 du 11 février 2020 consid. 3d).

2) a. Selon l’art. 65 al. 1 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. La juridiction administrative chargée de statuer est liée par les conclusions des parties, mais ne l’est pas par les motifs qu’elles invoquent (art. 69 al. 1 LPA).

L’objet du litige est principalement défini par l’objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. L’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/242/2020 du 3 mars 2020 consid. 2a). La contestation ne peut excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer. L’objet d’une procédure administrative ne peut donc pas s’étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/369/2020 du 16 avril 2020 consid. 3b).

b. En l’espèce, le recourant a conclu, dans son acte de recours adressé à la chambre des assurances sociales, principalement à l’annulation de la décision entreprise et, subsidiairement, à l’octroi de PC « ordinaires », voire de prestations d’aide sociale « ordinaires », fondant l’essentiel de son argumentation sur les dispositions de la LPC en lien avec la question du renouvellement de son autorisation de séjour.

Il ressort toutefois de la décision entreprise, de même que de la décision de l’autorité intimée du 19 mars 2018 statuant sur sa demande d’aide sociale, que celle-ci a trait à l’aide financière exceptionnelle octroyée par le SPC en application de la LIASI. Les conclusions en lien avec l’octroi de PC sont dès lors exorbitantes à l’objet du litige, ce d’autant que le recourant n’a pas contesté la décision du SPC du 17 octobre 2017 refusant d’entrer en matière sur cette demande présentée le 26 septembre 2017 et que la chambre de céans n’est, en tout état de cause, pas compétente en cette matière, qui ressortit à la cognition de la chambre des assurances sociales (art. 134 al. 1 let. a ch. 3 et al. 3 let. a LOJ).

Le litige a ainsi trait à la question de savoir si le SPC, en application de la LIASI, était fondé à octroyer au recourant des prestations financières extraordinaires au regard de son statut en Suisse ou s’il devait, au contraire, sur cette base, lui allouer des prestations financières ordinaires, comme il le prétend.

3) Aux termes de l’art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d’être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.

L’art. 39 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst - GE - A 2 00) reprend ce principe en prévoyant que toute personne a droit à la couverture de ses besoins vitaux afin de favoriser son intégration sociale et professionnelle.

4) a. En droit genevois, la LIASI et son règlement d’exécution du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01) concrétisent ces dispositions constitutionnelles.

La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1 LIASI), ainsi que de soutenir les efforts des bénéficiaires de la loi à se réinsérer sur le marché du travail et dans la vie sociale en général. Elle vise aussi à garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 LIASI). Ses prestations sont fournies notamment sous forme de prestations financières (art. 2
let. b LIASI), qui sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9
al. 1 LIASI).

b. La LIASI prévoit trois barèmes d’aide financière différents, soit l’aide financière ordinaire (art. 11 al. 1 et 21 ss LIASI ; chapitre I RIASI), l’aide financière exceptionnelle (art. 11 al. 4 LIASI ; chapitre II RIASI) et l’aide d’urgence (art. 45 LIASI ; chapitre VI RIASI).

c. Ont droit à des prestations ordinaires d’aide financière instaurées par l’art. 2 let. b LIASI, les personnes majeures (art. 8 al. 1 LIASI), ayant leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève (art. 11 al. 1
let. a LIASI), qui ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien ou à celui des membres de leur famille dont elles ont la charge (art. 11 al. 1 let. b LIASI) et répondent aux autres conditions de la loi (art. 11 al. 1 let. c LIASI), soit aux art. 21 à 28 LIASI. Les conditions du domicile et de la résidence effective sur le territoire du canton de Genève sont cumulatives, de sorte que des prestations d’aide financière complète ne sont accordées qu’aux personnes autorisées à séjourner dans le canton de Genève, soit aux personnes d’origine genevoise, aux confédérés et aux étrangers bénéficiant d’un titre de séjour (ATA/456/2020 du 7 mai 2020 consid. 5 et les références citées).

d. L’aide financière exceptionnelle, qui peut être inférieure à l’aide financière ordinaire et/ou limitée dans le temps, peut être allouée lorsque sont réalisées les conditions fixées par le Conseil d’État (art. 11 al. 4 LIASI) aux personnes suivantes qui n’ont pas droit aux prestations ordinaires prévues par l’art. 2
let b LIASI : les étudiants et les personnes en formation (let. a) ; les jeunes adultes sans formation, âgés entre 18 et 25 ans révolus, lorsqu’ils ne suivent aucune formation (let. b) ; les personnes qui ont le droit de se rendre à Genève pour y chercher un emploi et celles qui ont le droit d’y rester après la fin d’un emploi d’une durée inférieure à une année, en vertu de l’ALCP (let. c) ; les personnes exerçant une activité lucrative indépendante (let. d) ; les personnes étrangères sans autorisation de séjour (let. e) ; les personnes de passage (let. f) ; les personnes au bénéfice d’une allocation destinée à la création d’une activité indépendante au sens de l’art. 42C al. 8 LIASI (let. g).

Le cercle des personnes étrangères sans autorisation de séjour visé à l’art. 11 al. 4 let. e LIASI pouvant bénéficier de l’aide financière exceptionnelle est précisé à l’art. 17 RIASI. Il s’agit de toute personne non titulaire d’une autorisation de séjour, qui s’est annoncée à l’OCPM en vue d’en obtenir une et qui a obtenu de cet office une attestation l’autorisant à séjourner pendant le temps nécessaire à l’examen de sa demande, inclus le temps allant jusqu’à ce qu’il soit statué sur un éventuel recours de celle-ci. En pratique, à teneur de la disposition réglementaire précitée, l’attestation délivrée par l’OCPM sert à établir l’existence d’une procédure en cours visant à la régularisation des conditions de séjour.

L’étendue de l’aide exceptionnelle accordée en vertu de l’art. 17 al. 1 RIASI est définie à l’art. 19 RIASI. Elle est accordée au requérant et aux membres de sa famille (art. 19 al. 1 RIASI), et son contenu est précisé à l’art. 19 al. 2 let. a à h, 3 et 4 RIASI. Elle inclut un forfait d’entretien, de l’argent de poche, des frais de vêtements, de transport, de logement, d’assurance-maladie et d’autres prestations spécifiques précisées.

e. Pour les personnes qui ne peuvent bénéficier ni des prestations ordinaires ni des prestations exceptionnelles, le RIASI prévoit encore des prestations d’aide d’urgence, fournies en principe en nature, qui sont accordées aux personnes dont la demande d’asile a fait l’objet d’une décision de non-entrée en matière passée en force, ainsi qu’aux requérants d’asile déboutés faisant l’objet d’une décision de renvoi exécutoire avec délai de départ (art. 43 LIASI ; art. 24 RIASI).

5) Selon l’art. 4 al. 1 Annexe I ALCP, les ressortissants d’une partie contractante ont le droit de demeurer sur le territoire d’une autre partie contractante après la fin de leur activité économique. L’art. 4 al. 2 Annexe I ALCP renvoie à cet égard, conformément à l’art. 16 ALCP, au règlement 1251/70/CEE (ci-après : le règlement CEE) et à la directive 75/34/CEE dans leur teneur à la date de la signature de l’ALCP. L’art. 2 par. 1 let. b du règlement CEE prévoit qu’a le droit de demeurer sur le territoire d’un État membre le travailleur qui, résidant d’une façon continue sur le territoire de cet État depuis plus de deux ans, cesse d’y occuper un emploi salarié à la suite d’une incapacité permanente de travail. Si cette incapacité résulte d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ouvrant droit à une rente entièrement ou partiellement à charge d’une institution de cet État, aucune condition de durée de résidence n’est requise. Dans tous les cas, pour pouvoir prétendre à demeurer en Suisse sur la base de l’art. 4 Annexe I ALCP en relation avec l’art. 2 par. 1 let. b du règlement CEE, il est indispensable qu’au moment où survient l’incapacité permanente de travail, le travailleur ait encore effectivement ce statut et que celui-ci ait ainsi été perdu pour cette raison (ATF 141 II 1 consid. 4). L’art. 5 par. 1 du règlement CEE précise encore que le bénéficiaire dispose d’un délai de deux ans pour exercer son droit de demeurer depuis le moment où le droit a été ouvert en application de l’art. 2 par. 1 let. b du règlement CEE.

Aux termes de l’art. 22 de l’ordonnance sur l’introduction de la libre circulation des personnes du 22 mai 2002 (OLCP - RS 142.203), les ressortissants de l’Union européenne (ci-après : UE) qui ont le droit de demeurer en Suisse selon l’ALCP reçoivent une autorisation de séjour UE/AELE. Les personnes ayant obtenu une décision positive quant à l’octroi d’une rente AI peuvent se prévaloir d’une incapacité permanente de travail leur permettant d’invoquer le droit de demeurer en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_79/2018 du 15 juin 2018 consid. 4.2.2 et les références citées). Selon la jurisprudence, lorsqu’une demande de rente AI a été déposée, il convient toutefois d’attendre la décision de l’OAI avant que l’autorité administrative ne se prononce sur un éventuel droit de demeurer en Suisse de l’intéressé, étant précisé que les autres conditions doivent également être réalisées, à savoir que la personne en cause a cessé d’occuper un emploi à la suite d’une incapacité de travail et qu’elle a exercé son droit de demeurer en Suisse dans le délai de deux ans en application du règlement CEE (ATF 144 II 121 consid. 3.2 ; ATF 141 II 1 consid. 4.2.1 ss).

6) En l’espèce, le recourant prétend devoir être mis au bénéfice de l’aide financière ordinaire au regard de son statut en Suisse, qui ne s’apparenterait pas à celui d’une « personnes étrangères sans autorisation de séjour ».

Il ressort du registre de l’OCPM que le recourant, après avoir bénéficié de plusieurs autorisations de séjour de courte durée entre 2002 et 2008, s’est vu octroyer en 2009 une autorisation de séjour, qui est arrivée à échéance en avril 2012 et dont le renouvellement, resté pendant auprès de l’OCPM pendant près de huit ans, a été accordé en début d’année 2020. S’il est vrai que la situation du recourant est particulière de ce point de vue, notamment au regard de la durée d’examen de ses conditions de séjour, il n’en demeure pas moins qu’elle ne saurait être assimilée à celle de l’étranger titulaire d’une autorisation de séjour, dès lors que, précisément, il ne disposait alors pas d’une telle autorisation formalisée par une décision de l’autorité compétente après examen de sa situation.

Le recourant soutient toutefois qu’il disposait d’un droit à l’obtention de ladite autorisation, en application de l’ALCP.

S’il est vrai que la portée des autorisations UE/AELE n’est pas constitutive mais simplement déclaratoire (ATF 136 II 329 consid. 2.2), il ressort du dossier que l’OAI n’a mis le recourant au bénéfice d’une rente, d’abord partielle puis entière, qu’à compter respectivement du 1er décembre 2012 et du 1er février 2017, et non pas à la fin de sa dernière activité lucrative en 2003. Dès lors que l’OAI, dont la décision n’a pas été contestée par le recourant, a considéré que ce dernier n’était devenu incapable de travailler de manière permanente qu’à compter du 1er décembre 2012, cette date est également déterminante s’agissant d’un éventuel droit de demeurer en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_755/2019 du 6 février 2020 consid. 4.3.1), de sorte qu’il ne saurait être considéré que le recourant a cessé d’occuper son emploi à la suite de son incapacité. Par ailleurs, au moment où son incapacité permanente est survenue, le recourant ne bénéficiait plus du statut de travailleur, puisque sa dernière activité lucrative remontait à 2003.

Le recourant ne peut pas davantage se prévaloir d’un droit à séjourner en Suisse pour les personnes n’exerçant pas d’activité lucrative (art. 24 annexe I ALCP), puisqu’il ne dispose pas des moyens financiers suffisants pour ne pas faire appel à l’aide de l’État, qu’il s’agisse des PC qu’il a requises ou de l’aide sociale qu’il a perçue dès 2004 par l’hospice et dont il a demandé le versement à l’autorité intimée dans le cadre de la présente procédure à la suite de la décision de l’OAI le mettant au bénéfice d’une rente AI, qui ne lui permet au demeurant pas d’assurer sa subsistance (ATF 135 II 265 consid. 3.6).

Il résulte de ce qui précède que c’est à juste titre que l’autorité intimée a mis le recourant au bénéfice d’une aide exceptionnelle en application de la LIASI, dont il ne conteste au demeurant pas le calcul, au regard de son statut en Suisse au moment du dépôt de sa demande.

Il s’ensuit que le recours sera rejeté.

7) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu son issue, il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er juin 2018 par Monsieur A______ contre la décision du service des prestations complémentaires du 30 avril 2018 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, soit pour lui Caritas Genève, ainsi qu’au service des prestations complémentaires.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Tombesi, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :