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DAAJ/53/2025 du 22.04.2025 sur AJC/508/2025 ( AJC ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE AC/1793/2024 DAAJ/53/2025 COUR DE JUSTICE Assistance judiciaire DÉCISION DU MARDI 22 AVRIL 2025 |
Statuant sur le recours déposé par :
Monsieur A______, domicilié ______, représenté par Me B______, avocate,
contre la décision du 3 février 2025 de la vice-présidence du Tribunal civil.
A. a. Par arrêt du 3 mars 2022, la Cour de justice (ci-après : la Cour), statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a condamné A______ (ci-après : le recourant) à verser à son épouse une contribution d'entretien de 6'330 fr. par mois ainsi qu'une contribution mensuelle à l'entretien des trois enfants du couple de 3'800 fr., 3'670 fr. et 3'450 fr.
La Cour, se basant sur les dépenses effectuées par la famille – alors entièrement assumées par le recourant – pour couvrir leur train de vie, avait retenu que ce dernier disposait d'une capacité contributive de 30'000 fr. par mois au minimum, montant qui lui a été imputé à titre de revenu mensuel net.
b. Par acte déposé le 9 juillet 2024 au Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), le recourant a formé une demande en modification des mesures protectrices de l'union conjugale (C/1______/2024), faisant valoir qu'il ne disposait plus des moyens financiers suffisants pour s'acquitter des contributions d'entretien fixées par l'arrêt du 3 mars 2022. Il a conclu en dernier lieu à ce que le Tribunal supprime toutes les contributions d'entretien dès le 1er juillet 2023.
Le recourant a obtenu le bénéfice de l'assistance juridique pour cette action.
c. Par jugement JTPI/765/2025 du 20 janvier 2025, reçu par le recourant le 24 janvier 2025, l'aînée de la fratrie étant devenue majeure, le Tribunal a réduit les contributions d'entretien dues aux deux enfants mineurs à 1'300 fr. et 1'800 fr. pour les mois de juillet et d'août 2024, dispensé le recourant à verser toute contribution d'entretien pour la période de septembre 2024 à février 2025 inclus, condamné le recourant à verser une contribution à l'entretien des enfants de 1'100 fr. et 1'600 fr. dès le 1er mars 2025 et dit qu'aucune contribution d'entretien n'était due entre époux à compter du 1er juillet 2024.
En substance, le Tribunal a considéré que la situation financière du recourant était beaucoup moins favorable qu'elle ne l'était au moment du prononcé de l'arrêt de la Cour de justice du 3 mars 2022, quand bien même il était difficile de déterminer avec précision ses revenus réels. Ainsi, durant les mois de juillet et août 2024, un revenu mensuel net de 6'949 fr. pouvait être retenu alors que dès septembre 2024, il n'était plus en mesure de couvrir ses propres charges et donc celles de ses enfants, dès lors qu'il bénéficiait des prestations de l'Hospice général. Toutefois, le Tribunal a considéré que le recourant disposait d'une capacité de travail pleine et entière, de sorte qu'il lui a imputé un revenu hypothétique mensuel net de 6'154 fr. dès le mois de mars 2025.
S'agissant des charges, le Tribunal a tenu compte du fait que le recourant vivait avec une compagne qui pouvait participer pour moitié aux frais communs, soit le loyer et l'entretien de base. Les charges mensuelles du recourant s'élevaient ainsi à 3'241 fr. 68 comprenant sa part du loyer de l'appartement (1'413 fr., moitié du montant allégué de 2'826 fr.), le loyer du parking (200 fr.), le loyer d'un dépôt secondaire (90 fr.), la prime d'assurance-maladie obligatoire (421 fr. 25), la charge fiscale (267 fr. 43) et la moitié de l'entretien de base pour couple selon les normes OP (850 fr.).
Il est indiqué que cette décision peut faire l'objet d'un appel par devant la Cour de justice dans les 30 jours suivant sa notification.
B. Le 24 janvier 2025, le recourant a sollicité l'assistance juridique pour interjeter appel contre ce jugement.
Il fait valoir que sa faillite n'avait pas pu être prise en compte, celle-ci ayant été prononcée simultanément au jugement. En outre, ce dernier était entaché d'erreurs, notamment s'agissant du montant de son loyer qui n'était pas de 2'800 fr. mais de 3'100 fr. C'était également à tort que le jugement mentionnait un délai d'appel de 30 jours alors qu'il n'était que de 10 jours. Ce délai réduit lui imposait de solliciter dans les plus brefs délais une confirmation quant à l'octroi de l'assistance juridique pour la procédure d'appel, sa situation financière demeurant inchangée, voire s'étant aggravée, sa concubine ne participant aucunement aux finances du foyer.
C. Par décision du 3 février 2025, reçue par le recourant lendemain, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique précitée, au motif que la cause du recourant était dénuée de chances de succès.
Elle a considéré que le prononcé de la faillite de la société du recourant n'était pas un fait déterminant dès lors que le Tribunal avait imputé au recourant un revenu hypothétique dès le mois de mars 2025, que le recourant ne semblait pas contester le montant de celui-ci, ni le moment à partir duquel ce montant lui avait été imputé par le Tribunal. Par ailleurs, c'était vraisemblablement à juste titre que le premier juge n'avait pas tenu compte des frais de parking dès lors que le recourant n'avait pas démontré la nécessité de disposer d'un véhicule dans l'exercice de son travail. Les autres erreurs de calcul n'avaient pas été mentionnées et ne pouvaient donc pas être examinées.
D. a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 6 février 2025 à la Présidence de la Cour de justice. Le recourant conclut, sous suite de dépens, à être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire pour l'appel qu'il entend interjeter à l'encontre du jugement du Tribunal du 20 janvier 2025.
Le recourant produit des pièces nouvelles.
b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.
1. 1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).
1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.
1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).
2. Le recourant a produit des pièces nouvelles et articulé des allégations nouvelles, soit les arguments qu'il entend faire valoir dans le cadre de son appel contre le jugement de mesures protectrices de l'union conjugale. Il fait valoir que le délai pour former sa demande d'assistance juridique étant restreint, il allait de soi que la motivation qui l'accompagnait ne pouvait pas être développée de manière exhaustive, raison pour laquelle il se permettait, dans le cadre du présent recours, de mettre en exergue que la décision querellée n'avait pas pleinement pris en considération des éléments substantiels et que, de surcroît, de nouveaux éléments permettaient d'envisager avec un degré accru de probabilité une issue favorable en appel.
2.1.1 Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.
2.1.2 Selon l'art. 117 CPC, une personne a droit à l'assistance judiciaire si elle ne dispose pas de ressources suffisantes (let. a) et si sa cause ne paraît pas dépourvue de toute chance de succès (let. b).
Applicable à la procédure portant sur l'octroi ou le refus de l'assistance judiciaire, la maxime inquisitoire est limitée par le devoir de collaborer des parties (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).
Ce devoir de collaborer ressort en particulier de l'art. 119 al. 2 CPC qui prévoit que le requérant doit justifier de sa situation de fortune et de ses revenus et exposer l'affaire et les moyens de preuve qu'il entend invoquer (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).
Le juge doit inviter la partie non assistée d'un mandataire professionnel dont la requête d'assistance judiciaire est lacunaire à compléter les informations fournies et les pièces produites afin de pouvoir vérifier si les conditions de l'art. 117 CPC sont remplies (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et la référence citée). Ce devoir d'interpellation du tribunal, déduit des art. 56 et 97 CPC, vaut avant tout pour les personnes non assistées et juridiquement inexpérimentées. Il est en effet admis que le juge n'a pas, de par son devoir d'interpellation, à compenser le manque de collaboration qu'on peut raisonnablement attendre des parties pour l'établissement des faits, ni à pallier les erreurs procédurales commises par celles-ci. Or, le plaideur assisté d'un avocat ou lui-même expérimenté voit son obligation de collaborer accrue dans la mesure où il a connaissance des conditions nécessaires à l'octroi de l'assistance judiciaire et des obligations de motivation qui lui incombent pour démontrer que celles-ci sont remplies. Le juge n'a de ce fait pas l'obligation de lui octroyer un délai supplémentaire pour compléter sa requête d'assistance judiciaire lacunaire ou imprécise (arrêts du Tribunal fédéral 5A_771/2023 du 20 mars 2024 consid. 4.3; 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).
Le fait de ne pas accorder un délai supplémentaire à la partie assistée pour compléter sa demande n'est pas constitutif de formalisme excessif (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).
2.2 En l'espèce, on ne saurait suivre le recourant lorsqu'il fait valoir qu'il ne pouvait pas déposer une demande d'assistance juridique détaillée dès lors que le délai pour déposer cette demande était restreint. En effet, le délai pour former appel contre le jugement sur nouvelles mesures protectrices de l'union conjugale étant de 30 jours, selon la nouvelle teneur de l'art. 314 al. 2 CPC, le conseil du recourant n'était pas obligé de déposer sa requête d'assistance juridique le jour même de la réception de la décision querellée et pouvait prendre le temps nécessaire pour déposer une requête d'assistance juridique complète s'agissant des griefs qu'il entendait formuler à l'encontre de la décision du Tribunal.
En dehors de cette question de temps, le recourant ne critique pas la décision attaquée mais se limite à faire, pour la première fois, la liste des éléments qu'il entend faire valoir en appel. Or, les allégués de faits dont le recourant n'a pas fait état en première instance et les pièces nouvelles ne peuvent pas être prises en considération.
Par surabondance, on relèvera que le recourant ne reproche, à juste titre, pas au premier juge de ne pas l'avoir interpellé pour qu'il complète sa requête d'assistance juridique, et il ne fait pas non plus valoir qu'il aurait sollicité un délai pour ce faire et que celui-ci lui aurait été refusé.
Infondé, le recours sera, dès lors, rejeté.
3. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens.
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PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :
A la forme :
Déclare recevable le recours formé le 6 février 2025 par A______ contre la décision rendue le 3 février 2025 par la vice-présidence du Tribunal de première instance dans la cause AC/1793/2024.
Au fond :
Le rejette.
Déboute A______ de toutes autres conclusions.
Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.
Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me B______ (art. 137 CPC).
Siégeant :
Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Victoria PALAZZETTI, greffière.
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Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.