Skip to main content

Décisions | Chambre civile

1 resultats
C/12661/2021

ACJC/175/2025 du 04.02.2025 sur JTPI/5606/2024 ( OO ) , JUGE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/12661/2021 ACJC/175/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 4 FEVRIER 2025

 

Entre

1) Monsieur A______, domicilié ______ [GE], recourant contre un jugement rendu par la 24ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 6 mai 2024, représenté par Me Alireza MOGHADDAM, avocat, BAROKAS, rue de l'Athénée 15, case postale 368, 1211 Genève 12,

et

2) B______ SA, sise ______ [GE], intimée, représentée par Me Bénédict FONTANET, avocat, Fontanet & Associés, Grand-Rue 25, case postale 3200, 1211 Genève 3,

3) C______, sise ______ [ZH], autre intimée,

4) C______/D______, sise ______ [GE], autre intimée, représentées toutes deux par Me Michel BERGMANN, avocat, rue de Hesse 8, case postale, 1211 Genève 4.


EN FAIT

A. a. A______ est titulaire de l'entreprise individuelle A______/E______ dont le but est l'exploitation d'un bureau d'architecte.

b. Le 3 décembre 2004, A______, qui était alors représenté par le courtier en assurances F______ Sàrl pour la souscription et la gestion de son portefeuille d'assurance, a contracté auprès de C______ (précédemment G______) une police d'assurance responsabilité civile professionnelle, n° 1______.

Cette police prévoyait une somme de base garantie de 5'000'000 fr. pour des dommages corporels et matériels avec des sublimites qui renvoyaient à des couvertures différenciées selon le type de dommage assuré. Cette liste mentionnait une couverture maximale de 100'000 fr. pour les défauts et dommages aux ouvrages ainsi que les préjudices de fortune avec une franchise de 3'000 fr. plus 20% des prestations, 50'000 fr. au maximum.

c. Au mois de novembre 2014, A______, au travers de son entreprise, a conclu un contrat d'architecte avec B______ SA, intervenant en qualité de maître de l'ouvrage et de promoteur, en vue de la réalisation d'un immeuble à H______ [GE] comprenant sept appartements en PPE.

A teneur de ce contrat, A______ était en charge de la totalité du projet, à savoir la phase du projet, la phase préparatoire, la phase d'exécution et la phase finale. Son activité était couverte par une assurance responsabilité civile.

d. Le chantier des sept appartements s'est déroulé entre 2016 et 2018 avec une livraison fin février 2018.

Après la réception de leurs biens, plusieurs propriétaires ont adressé à B______ SA des avis des défauts.

e. Le 5 décembre 2019, A______ a annoncé à C______ un sinistre survenu le 21 novembre 2019, soit des infiltrations d'eau à l'intérieur d'appartements.

f. A la demande des propriétaires et de B______ SA, A______ et les entreprises possiblement impliquées, avec leurs assureurs responsabilité civile professionnelle, ont accepté de mettre en œuvre une expertise technique commune portant sur les problèmes d'étanchéité de l'enveloppe du bâtiment, sur le respect des normes phoniques entre certains appartements et sur l'étanchéité des douches.

g. Un expert a été mandaté le 18 janvier 2021.

h. Le portefeuille d'assurance de A______ a été géré par C______/D______ à compter du 3 mai 2021.

B. a. Par acte expédié au greffe du Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) le 10 janvier 2022, A______ a notamment conclu à la condamnation de B______ SA à lui verser le montant de 53'850 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 27 juillet 2019.

Il a allégué que ce montant correspondait au solde de ses honoraires qui restait impayé, précisant qu'en participant aux expertises des défauts allégués, son assurance responsabilité civile s'était engagée à honorer les prétentions éventuelles de B______ SA dans l'hypothèse où les experts constateraient que les conditions d'une responsabilité civile étaient réalisées.

b. Selon le rapport d'expertise daté des 20, 23 mai et 10 novembre 2022, la responsabilité de l'architecte était engagée dans un degré qualifié de moyen à important pour presque tous les défauts recensés.

Les travaux de réfection des dommages ont été évalués à 822'892 fr. 77 TTC par l'expert.

c. Le 1er mars 2023, C______ a autorisé le paiement d'un montant de 50'000 fr. compte tenu de la police d'assurance de A______, dont 12'400 fr. correspondant à la franchise à verser directement par l'assuré.

d. Le 19 mai 2023, C______ a ainsi versé le montant de 37'600 fr. à B______ SA.

e. Dans sa réponse du 8 juin 2023, B______ SA a requis le déboutement de A______ de toutes ses conclusions.

Sur demande reconventionnelle, elle a conclu à la condamnation de celui-ci à lui verser plusieurs montants en raison des défauts ainsi qu'à titre de provision pour travaux à venir, ce qui représentait une somme totale de 603'369 fr.

f. Le 2 octobre 2023, C______ a conclu une convention d'indemnisation avec B______ SA au sujet du sinistre du 21 novembre 2021. Cette convention prévoyait que B______ SA convenait avec C______ et A______/E______ ainsi que toutes les personnes assurées par la police n° 1______, chacune étant représentée par C______, pour toutes les conséquences actuelles et futures du sinistre susmentionné, d'une indemnité de 40'000 fr. TTC.

g. Cette indemnité a été versée le 2 octobre 2023.

h. Dans sa réponse à la demande reconventionnelle du 10 janvier 2024, A______ a conclu au déboutement de B______ SA de toutes ses conclusions et a sollicité que C______ et C______/D______ (ci-après : les sociétés d'assurance) soient appelées en cause, celles-ci devant être conjointement et solidairement condamnées à lui verser 603'369 fr. pour le cas où B______ SA obtiendrait gain de cause.

Il a reproché aux sociétés d'assurance d'avoir failli à leur devoir de conseil et d'information (art. 3 al. 1 let. b Loi sur le contrat d'assurance) envers lui en omettant d'attirer son attention sur le caractère inusuel de la clause de sa police d'assurance limitant sa couverture à concurrence de 100'000 fr. ainsi que sur le risque qu'il prenait avec une telle clause. Cette clause, qui devait être considérée comme insolite, ne le liait donc pas. Il était ainsi protégé par son assurance responsabilité civile à hauteur d'un montant de 5'000'000 fr. Dès lors, s'il devait succomber sur demande reconventionnelle, le Tribunal devrait condamner les sociétés d'assurance au paiement du montant de 603'369 fr.

i. B______ SA a conclu au rejet de l'appel en cause.

Elle a relevé que C______ l'avait dédommagée en lui versant le montant de 77'600 fr. – soit 100'000 fr. sous déduction de la franchise contractuelle de 22'400 fr. à verser directement par A______ – de sorte que ce dernier ne disposait plus de prétentions à l'encontre de son assureur qui s'était exécuté selon la police qui les liait. Par ailleurs, le débat autour de la clause insolite sortait du cadre du litige et devait faire l'objet d'un procès séparé entre A______ et son assureur.

j. C______ et C______/D______ ont conclu à l'irrecevabilité de l'appel en cause, et si par impossible ce dernier était recevable, au déboutement de A______ de toutes ses conclusions envers elles.

Elles ont soutenu que A______ n'avait pas suffisamment motivé l'appel en cause et que ses prétentions ne présentaient pas un lien de connexité avec les prétentions principales. Les reproches formulés par A______ au sujet d'un défaut de conseil au moment de la conclusion de la police d'assurance ou tout au long de la relation contractuelle visaient en réalité le courtier en assurance en charge de son portefeuille d'assurance mais pas elles. En outre, les prétentions invoquées ne dépendaient pas du sort de l'action principale et A______ n'avait pas d'intérêt à une action récursoire contre elles dans la mesure où C______ s'était déjà acquittée de la somme d'assurance prévue pour ce type de dommage.

k. A réception des dernières écritures, le Tribunal a gardé la cause à juger sur l'appel en cause.

C. Par jugement JTPI/5606/2024 du 6 mai 2024, le Tribunal a déclaré irrecevable l'appel en cause de C______ et C______/D______ déposé par A______ le 10 janvier 2024 (ch. 1 du dispositif), laissé les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., à la charge de A______, les compensant avec l'avance de frais du même montant effectuée par ce dernier (ch. 2), condamné A______ à verser à B______ SA le montant de 1'000 fr. TTC à titre de dépens (ch. 3), condamné A______ à verser à C______ et C______/D______, prises conjointement et solidairement, le montant de 1'000 fr. TTC à titre de dépens (ch. 4) et réservé la suite de la procédure (ch. 5).

En substance, le Tribunal a retenu que ce n'était que dans le cas où un éventuel mauvais conseil émanait d'un intermédiaire "lié" que le preneur d'assurance pouvait s'en prendre à l'assureur, à charge pour lui de se retourner, le cas échéant, contre son intermédiaire. Dans la mesure où A______ avait lui-même reconnu avoir été conseillé par des courtiers non liés à C______, il n'avait pas suffisamment motivé sur quelles bases les appelées en cause seraient responsables du conseil en assurance. Par ailleurs, la prétention de A______ envers les appelées en cause était certes en lien avec le procès principal, dans la mesure où il n'agirait contre son assurance que s'il était condamné à verser un montant à B______ SA du fait des défauts. Toutefois, sa prétention ne dépendait pas du résultat du procès principal puisqu'une condamnation ne suffirait pas à engager la responsabilité des appelées en cause. En effet, C______ avait déjà versé à B______ SA la somme assurée pour ce type de dommage en application de la police d'assurance, à savoir 77'600 fr. L'action récursoire contre cette société n'était dès lors plus ouverte. Ce n'était qu'au travers d'une action en dommages et intérêts contre les appelées en cause que A______ pourrait obtenir le versement d'une somme plus importante que celle déjà versée au motif qu'il se serait trouvé dans l'erreur et que le contrat couvrirait en réalité un montant plus important que ce qui était indiqué. Il s'agissait là d'une action indépendante à intenter contre les appelées en cause.

D. a. Par acte expédié le 6 juin 2024 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a formé un recours contre ce jugement, qu'il a reçu le 7 mai 2024. Il a conclu à l'annulation de cette décision et, cela fait, à ce que l'appel en cause de C______ et de C______/D______ qu'il a déposé le 10 janvier 2024 soit déclaré recevable, sous suite de frais judiciaires et dépens. Il a préalablement conclu à la suspension du caractère exécutoire de la décision entreprise jusqu'à droit jugé.

b. Par arrêt ACJC/780/2024 du 17 juin 2024, la Cour a refusé l'effet suspensif et dit qu'il serait statué sur les frais liés à sa décision dans l'arrêt au fond.

c. Dans leurs réponses respectives, B______ SA, d'une part, et C______ et C______/D______, d'autre part, ont conclu au rejet du recours, sous suite de frais judiciaires et dépens.

d. Les parties ont répliqué et dupliqué en persistant dans leurs conclusions respectives.

e. Elles ont été informées par avis de la Cour du 7 novembre 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Le jugement entrepris ayant été communiqué aux parties avant le 1er janvier 2025, le présent recours demeure régi par l'ancien droit de procédure (art. 404 al. 1 et 405 al. 1 CPC), sous réserve des dispositions d'application immédiate énumérées à l'art. 407f CPC.

2. 2.1 La décision refusant l'appel en cause, comme celle qui l'admet (cf. art. 82 al. 4 CPC), est susceptible de faire l'objet d'un recours limité au droit selon l'art. 319 let. b ch. 1 CPC (arrêt du Tribunal fédéral 5A_191/2013 du 1er novembre 2013 consid. 3.1 et les références doctrinales citées).

La décision rejetant une requête d'appel en cause est qualifiée par le Tribunal fédéral de décision partielle au sens de l'art. 91 let. b LTF, dès lors qu'elle met fin à la procédure à l'égard des appelées que le défendeur assigne en justice (arrêt du Tribunal fédéral 4A_25/2024 du 2 septembre 2024 consid. 1) et peut être assimilée pour le CPC à une décision finale (arrêt du Tribunal fédéral 5A_191/2013 du 1er novembre 2013 consid. 3.1). La qualification de décision partielle (finale) a pour conséquence que le recours prévu par l’art. 82 al. 4 CPC peut être introduit dans un délai de 30 jours (art. 321 al. 1 et 2 CPC; Bastons Bulletti, ATF 146 III 290 commenté in Newsletter CPC Online du 10 septembre 2020; cf. également dans le même sens : arrêts de la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal vaudois HC/2021/458 du 26 mai 2021 consid. 1.1 et HC/2020/422 du 8 juin 2020 consid. 1.1; arrêts de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal de Fribourg n. 101 2019 383 consid. 1 et n. 101 2014 226 du 16 avril 2015 consid. 1 et les références citées).

2.2 Par conséquent, le présent recours est recevable, pour avoir été interjeté à l'encontre d'une décision refusant l'appel en cause dans le délai utile et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 142 et 321 al. 1 et 3 CPC).

2.3 En matière de recours, la cognition de la Cour est limitée à la constatation manifestement inexacte des faits et à la violation du droit (art. 320 CPC).

2.4 B______ SA sera désignée ci-après comme "intimée", C______ et C______/D______ étant désignées comme les "appelées en cause".

3. Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

Il s'ensuit que les faits nouvellement allégués par les parties, qui ne reposent au demeurant sur aucune pièce nouvelle, sont irrecevables.

4. Le recourant reproche au Tribunal d'avoir rejeté sa requête d'appel en cause en considérant, à tort, qu'il n'avait pas suffisamment motivé sur quelle base les appelées en cause pourraient être tenues responsables du montant dus à l'intimée et que le lien de connexité entre les deux procédures ferait défaut.

4.1.1 Chaque partie au procès principal peut appeler en cause un tiers contre lequel elle estime avoir des prétentions pour le cas où elle succomberait sur la demande principale (art. 81 al. 1 CPC).

L'appel en cause permet le traitement des prétentions de différentes parties dans un seul procès au lieu de procédures individuelles successives. Le procès s'élargit ainsi en une procédure collective ou multipartite, dans laquelle il est statué aussi bien sur l'obligation de prestation du défendeur (procès principal) que sur la prétention de la partie perdante à l'égard d'un tiers (procès sur appel en cause). Il s'agit toutefois de juger deux prétentions séparées. L'élargissement à une procédure globale ne change rien au fait que la demande principale et l'appel en cause forment chacun un lien d'instance spécifique avec des parties et des conclusions propres. L'appelé en cause n'est donc pas partie au procès principal. Il peut cependant participer au procès principal en qualité d'intervenant accessoire (ATF 142 III 271 consid. 1.1; 142 III 102 consid. 5.3.2; 139 III 67 consid. 2.1 ; Bonhet, CPC Augmenté, 2025, n. 2 ad art. 81 CPC). Il peut ainsi être statué dans un seul procès sur les prétentions des diverses parties (ATF 147 III 166 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_25/2024 précité consid. 3 et les références citées).

Si les conditions de l'appel en cause sont réunies, le code de procédure civile n'offre pas au juge la possibilité d'écarter celui-ci en raison de sa complexité (ATF 139 III 67 consid. 2.2. et 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_25/2024 précité consid. 4.2.2).

4.1.2 Procéduralement, dans une première étape, l'appelant en cause dépose une requête d'admission de l'appel en cause (art. 82 al. 1 CPC), qui doit être introduite avec la réponse (si l'appel en cause est formé par le défendeur) ou avec la réplique (si l'appel en cause est formé par le demandeur).

Après avoir entendu la partie adverse et l'appelé en cause (art. 82 al. 2 CPC), le tribunal statue sur l'admissibilité de l'appel en cause, décision qui peut faire l'objet d'un recours limité au droit de l'art. 319 let. b ch. 1 CPC (art. 82 al. 4 CPC).

Ce n'est que dans une deuxième étape, en cas d'admission de l'appel en cause, que l'appelant déposera sa demande dans l'appel en cause (art. 82 al. 3 CPC), laquelle, comme toute demande en justice, doit satisfaire aux conditions de recevabilité (art. 59 CPC; ATF 147 III 166 consid. 3.2; 142 III 102 consid. 3; 139 III 67 consid. 2.4).

4.1.3 En ce qui concerne la première étape, l'art. 82 al. 1 2e phr. CPC dispose que la requête d'admission de l'appel en cause doit énoncer les conclusions que l'appelant en cause entend prendre contre l'appelé en cause, et les motiver succinctement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_25/2024 précité consid. 3.3).

La prétention revendiquée dans l'appel en cause doit présenter un lien de connexité matérielle avec la demande principale. Cela découle de la formulation du texte de la norme, selon laquelle l'action en dénonciation de litige doit avoir pour objet une prétention que la partie dénonçant le litige « estime avoir en cas de défaite contre la partie appelée en cause ». Ainsi, seules les prétentions qui dépendent de l'existence de la demande principale peuvent être exercées dans l'appel en cause. Il s'agit notamment des prétentions en garantie contre un tiers, des prétentions récursoires ou en dommages-intérêts, ainsi que des droits de recours contractuels ou légaux. Si de telles prétentions sont invoquées, le lien matériel avec la prétention principale existe et l'intérêt à la protection juridique est également donné. Il suffit que ce lien objectif résulte de l'exposé de l'appelant et qu'il en découle l'existence d'un potentiel droit de recours (ATF 139 III 67 consid. 2.4.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_25/2024 précité consid. 3.1).

Si les deux demandes (principale et appel en cause) peuvent exister indépendamment l'une de l'autre, il n'y a pas de relation de dépendance entre les deux demandes et donc pas de lien de connexité matériel (arrêt du Tribunal fédéral 5A_753/2021 du 27 janvier 2022 consid. 2.3; Bonhet, CPC Augmenté, 2025, n. 5 ad art. 81 CPC

La motivation "succincte" permet au juge de vérifier qu'est bien remplie la condition de la connexité matérielle entre la créance qui est l'objet de l'appel en cause et la demande principale. Il suffit donc que la motivation présentée par l'auteur de l'appel en cause fasse apparaître que sa propre prétention dépend de l'issue de la procédure principale et qu'il démontre ainsi son potentiel intérêt à l'appel en cause (ATF 147 III 166 consid. 3.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_25/2024 précité consid. 3.3.1 et les arrêts cités).

Il est également nécessaire que ces prétentions soient soumises à la même compétence matérielle et à la même procédure (ATF 139 III 67 consid. 2.4.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_25/2024 précité consid. 3.1).

En revanche, la vraisemblance des prétentions n'est pas une condition de recevabilité de l'appel en cause. Le juge appelé à statuer sur la requête d'appel en cause n'examine pas si les prétentions du dénonçant contre le dénoncé sont justifiées matériellement, de sorte qu'il n'est pas nécessaire que l'appelant en cause rende vraisemblable la réalisation des conditions de la prétention qu'il invoque dans l'appel en cause (ATF 147 III 166 consid. 3.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_25/2024 précité consid. 3.3.1 et les arrêts cités ; Bonhet, CPC Augmenté, 2025, n. 4 ad art. 81 CPC).

4.1.4 Les conclusions qui doivent être prises dans la requête d'appel en cause sont les mêmes que celles que l'appelant fera valoir dans la demande d'appel en cause elle-même (ATF 147 III 166 consid. 3.3.2; 146 III 290 consid. 4.3.1). Comme pour toute action tendant au paiement d'une somme d'argent (art. 84 al. 2 CPC), les conclusions doivent être chiffrées (ATF 147 III 166 consid. 3.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_25/2024 précité consid. 3.3.2 et les arrêts cités).

4.2 En l'espèce, le recourant a motivé son appel en cause en expliquant que les sociétés d'assurance devaient lui rembourser les montants qu'il pourrait être condamné à verser à l'intimée car, selon lui, la clause contractuelle limitant sa couverture d'assurance responsabilité civile à 100'000 fr. n'est pas valable, faute pour les appelées en cause de l'avoir valablement conseillé lors de la conclusion de son assurance responsabilité civile. Le recourant a donc exposé succinctement mais clairement sur quelle base juridique il entendait tenir les appelées en cause pour responsable de la couverture de son dommage, soit la violation par celles-ci de leur devoir de conseil et d'information découlant de l'art. 3 al. 1 let. b Loi sur le contrat d'assurance.

Compte tenu des allégations du recourant, la prétention de celui-ci envers les appelées en cause est en lien de connexité avec le procès opposant le recourant à l'intimée puisque le recourant prétend obtenir des appelées en cause qu'elles s'acquittent du montant qu'il pourrait être condamné à verser à l'intimée du fait de sa couverture d'assurance. Ainsi, les deux procédures ne peuvent pas exister indépendamment l'une de l'autre puisque le recourant ne pourra élever une prétention à l'encontre des appelées en cause que s'il est reconnu responsable de défauts dans le cadre de son activité et condamné à en payer les réparations.

C'est à juste titre que le recourant reproche au Tribunal d'avoir examiné les chances de succès de la prétention qu'il invoque dans son appel en cause puisqu'il ne s'agit pas d'une condition de la recevabilité de la requête. A ce stade, il ne peut être exigé du recourant qu'il rende vraisemblable que sa prétention est fondée. La question de savoir si le recourant obtiendra gain de cause envers les appelées en cause sur la base alléguée de la violation de leurs obligations contractuelles, alors même qu'il avait été conseillé par un courtier indépendant et que l'assurance avait déjà versés les montants contractuellement prévus, n'avait pas à être examinée par le Tribunal à ce stade de la procédure. Les développements des parties sur cet aspect du litige ne sont donc, en l'état, pas pertinentes. Par conséquent, la motivation soulevée par le recourant dans sa requête d'appel en cause était suffisante au regard des conditions posées les art. 81 et 82 al. 1 CPC et il n'avait pas à en formuler d'autres.

Pour le surplus, il n'est pas contesté que les autres conditions de l'appel en cause, à savoir la compétence matérielle et le type de procédure applicable, sont remplies.

Au vu de ce qui précède, le recours est fondé.

Le jugement entrepris sera ainsi annulé et la requête d'appel en cause de C______ et de C______/D______ sera admise, ce qui implique que les appelées en cause deviendront parties à la présente procédure opposant le recourant à l'intimée, étant relevé que cela ne préjuge en rien du bien-fondé des prétentions récursoires du recourant envers les appelées en cause, cette question devant être tranchée dans le cadre du litige au fond.


 

5. 5.1 Lorsque la Cour de céans statue à nouveau, elle se prononce sur les frais fixés par l'autorité inférieure (art. 318 al. 3 CPC).

Il n'y a pas lieu de revoir la quotité des frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr. conformément aux dispositions légales applicables et compensés à due concurrence avec l'avance fournie par le recourant, qui reste acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).

La répartition desdits frais, ainsi que l'allocation d'éventuels dépens liés à la procédure d'appel en cause seront cependant renvoyées à la décision finale (art. 104 al. 1 CPC).

5.2 Les frais de recours, y compris la décision rendue sur effet suspensif, seront arrêtés à 1'200 fr. (art. 13, 20 et 38 RTFMC) et compensés à due concurrence avec l'avance fournie par le recourant, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Compte tenu de l'issue de la procédure de seconde instance, ils seront répartis à hauteur de 200 fr. à la charge du recourant (qui a succombé dans le cadre de sa requête d'effet suspensif) et de 1'000 fr. à la charge de l'intimée et des appelées en cause, soit 500 fr. pour chacune d'entre elles (art. 106 CPC), de sorte qu'elles seront condamnées chacune à verser 400 fr. au recourant (art. 111 al. 2 CPC) et 100 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaires.

Les appelées en cause, conjointement et solidairement, et l'intimée seront condamnées à verser au recourant la somme de 1'000 fr. à titre de dépens de recours, débours et TVA compris (art. 85 et 90 RTFMC ; 25 et 26 LaCC), soit 500 fr. chacune, étant relevé que le conseil du recourant n'a déposé que deux écritures succinctes.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 6 juin 2024 par A______ contre le jugement JTPI/5606/2024 rendu le 6 mai 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/12661/2021.

Au fond :

Annule le jugement entrepris et, statuant à nouveau :

Admet la requête d'appel en cause formée par A______ et dit en conséquence que C______ et C______/D______ deviennent parties à la procédure C/12661/2021 opposant A______ à B______ SA.

Dit que la répartition des frais judiciaires de première instance liés à la requête d'appel en cause, arrêtés à 1'000 fr. et compensés avec l'avance de frais versée par A______, ainsi que l'allocation de dépens de première instance y relatifs sont renvoyés à la décision finale qui sera rendue par le Tribunal.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de recours à 1'200 fr. et les compense à due concurrence avec l'avance de frais fournie par A______, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Met à la charge de A______ la somme de 200 fr. de frais judiciaires.

Met à la charge de B______ SA la somme de 500 fr. et de C______ et C______/D______, prises conjointement et solidairement, la somme de 500 fr. de frais judiciaires.

Condamne en conséquence B______ SA à verser à A______ 400 fr. à titre de frais judiciaires de recours.

Condamne en conséquence C______ et C______/D______, prises conjointement et solidairement, à verser à A______ 400 fr. à titre de frais judiciaires de recours.


 

Condamne en conséquence B______ SA à verser aux Services financiers du Pouvoir judiciaire 100 fr. à titre de solde des frais judiciaires de recours.

Condamne en conséquence C______ et C______/D______, prises conjointement et solidairement, à verser aux Services financiers du Pouvoir judiciaire 100 fr. à titre de solde des frais judiciaires de recours.

Condamne B______ SA à verser à A______ 500 fr. à titre de dépens de recours.

Condamne C______ et C______/D______, prises conjointement et solidairement, à verser à A______ 500 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges;
Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.