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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/8078/2021

ACPR/795/2022 du 11.11.2022 sur OCL/923/2022 ( MP ) , ADMIS

Descripteurs : CLASSEMENT DE LA PROCÉDURE;LÉSION CORPORELLE PAR NÉGLIGENCE;DENTISTE;FAUTE PROFESSIONNELLE
Normes : CPP.319; CP.125

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/8078/2021 ACPR/795/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 11 novembre 2022

 

Entre

A______, domicilié ______[GE], comparant par Me B______, avocat, ______, Genève,

recourant,

contre l'ordonnance de classement rendue le 8 juillet 2022 par le Ministère public,

et

C______, domicilié c/o D______ AG, rue ______, Genève, comparant par Me Marc HOCHMANN FAVRE, avocat, Harari Avocats, rue du Rhône 100, case postale 3403, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 21 juillet 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 8 juillet 2022, notifiée le 11 suivant, aux termes de laquelle le Ministère public a classé sa plainte du 13 avril 2021.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision querellée et au renvoi de la cause au Ministère public pour complément d'instruction, notamment pour qu'il procède à une expertise et à l'audition de plusieurs médecins-dentistes, qu'il énumère.

b. Le recourant a versé les sûretés en CHF 1'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.a. Par courrier du 13 avril 2021, A______ a déposé plainte contre le Dr C______, médecin-dentiste, spécialiste en orthodontie, du chef de lésions corporelles simples par négligence (art. 125 CP) et toute autre infraction pertinente.

En substance, le 28 mai 2020, il avait consulté le cabinet dentaire D______ AG, sis 1______ à Genève, dans le but de faire corriger l'alignement de ses dents. Le 11 juin suivant, il avait accepté de suivre le traitement orthodontique préconisé par le cabinet, consistant en le port de gouttières transparentes, impliquant la pose de taquets [reliefs en composite (résine) placés sur les dents pour exercer une pression durant le traitement] sur certaines de ses dents et la réalisation de strippings [méthode consistant à diminuer l'épaisseur de l'émail des dents, en les limant].

Le 8 juillet 2020, le Dr E______ avait fixé les taquets, procédé au premier stripping et lui avait remis les gouttières. Divers médecins-dentistes du cabinet avaient ensuite contrôlé l'évolution du traitement orthodontique les 9 septembre, 20 octobre, 23 novembre et 23 décembre 2020.

Le 13 janvier 2021, le Dr C______ avait retiré les taquets fixés sur ses dents de la mâchoire supérieure. Alors que le praticien lui avait assuré que l'opération serait rapide et indolore, celle-ci, qui avait été réalisée dans une salle insuffisamment éclairée, avait duré près d'une vingtaine de minutes et avait été très douloureuse. De plus, au terme de l'intervention, il avait découvert, en regardant dans un miroir, "un creux" sur certaines de ses dents et une perte d'émail dentaire. Interpellé à ce propos, le Dr C______ lui avait indiqué qu'un blanchiment dentaire pourrait résoudre le problème. Une fois de retour chez lui, ses proches, "stupéfaits", avaient également constaté l'étendue des dégâts causés à ses dents. Le lendemain de l'intervention, il avait contacté D______ AG, qui lui avait fixé un rendez-vous le 16 janvier 2021, finalement reporté au 21 janvier suivant.

Dans l'intervalle, le 19 du même mois, il avait consulté son médecin-dentiste traitant, le Dr F______, qui lui avait confirmé que l'émail de six de ses dents avait été endommagé, d'après lui, de manière irréversible.

Le 21 janvier 2021, il avait été reçu au sein du cabinet D______ AG par un collègue du Dr C______, soit le Dr G______, qui avait constaté les dégâts causés à sa dentition. Visiblement mal à l'aise, le praticien lui avait proposé de réparer le dommage à l'aide de composite dentaire et lui avait demandé de ne pas reporter cet incident à la direction du cabinet. En raison de ce manque de professionnalisme et de la rupture du lien de confiance, il avait décliné l'offre du praticien.

Le 28 du même mois, il s'était rendu chez le Dr H______, médecin-dentiste auprès de la clinique dentaire I______ à Genève, qui lui avait confirmé que l'émail et la forme de certaines de ses dents avaient été endommagés lors du retrait des taquets. Le 1er mars 2021, afin de poursuivre et terminer son traitement orthodontique, il avait consulté le Dr J______, médecin-dentiste, qui avait retiré les taquets fixés sur ses dents de la mâchoire inférieure. Ce processus avait duré une heure et avait été réalisé sans la moindre douleur ou incident. Le praticien avait néanmoins constaté un problème d'occlusion dentaire et des espaces importants entre ses dents du haut nécessitant, d'après lui, un nouveau traitement orthodontique.

Il avait été particulièrement affecté par la tournure des évènements, ceci d'autant plus que son hygiène dentaire avait toujours été irréprochable. Atteint également dans sa santé psychique, il était désormais suivi par un médecin-psychiatre.

a.b. À l'appui de sa plainte, A______ a produit diverses pièces, parmi lesquelles :

- une copie du devis du traitement orthodontique par gouttières établi par D______ AG le 11 juin 2020, d'un montant de CHF 3'990.- ;

- des photographies de ses dents, prises le 28 mai 2020 – soit avant l'intervention du 13 janvier 2021 – et à la suite de celle-ci. Sur ces dernières images, des taches de couleur jaunâtre/brunâtre sont visibles sur certaines dents ;

- un document intitulé "Information patients", à teneur duquel le traitement orthodontique par "gouttières transparentes" comportait un certain nombre de risques, tel qu'une "dégradation de la santé dentaire", qui était toutefois "rare". Par ailleurs, la durée de vie des dents "pouvait être raccourcie par le traitement" ; dans des cas "extrêmement rares, on assist[ait] à la perte de dents". En cas "d'hygiène buccale insuffisante", le port de gouttières pouvait en outre causer des "caries, une parodontite, une décalcification des dents (marquage permanent) ou une inflammation des gencives ;

- un formulaire de consentement signé de sa main, le 11 juin 2020, selon lequel il déclarait avoir été "informé de manière compréhensible et détaillée sur le traitement à l'aide de gouttières transparentes" et des risques présentés par celui-ci ;

- un rapport établi le 4 février 2021 par le Dr H______, aux termes duquel ce dernier indiquait avoir examiné, le 28 janvier précédent, les dents du plaignant et avoir constaté des "encoches" sur les dents 12, 16 et 23, qui étaient "limitées à l'émail" mais "méritaient" d'être recouvertes par du "matériau composite de restauration dentaire". Par ailleurs, les dents 22 et 26 présentaient une "surface de l'émail rugueuse" à l'endroit où des taquets avaient été posés, ce qui était "compatible" avec l'intervention subie par le plaignant. Un polissage de la surface de l'émail desdites dents était nécessaire "pour finir la procédure".

b. Par ordonnance du 26 août 2021, le Ministère public a ouvert une instruction pénale contre le Dr C______ pour lésions corporelles par négligence (art. 125 CP).

c.a. Par lettre du 8 septembre 2021 au Ministère public, A______ a sollicité, d'une part, la mise en œuvre d'une expertise et la désignation du Professeur K______, médecin-dentiste, en qualité d'expert ; d'autre part, l'audition des divers médecins-dentistes qu'il avait consultés après les faits litigieux, soit les Drs E______, L______, F______, G______, H______, J______ et M______.

Afin de "sauvegarder les preuves", ses dents n'avaient pas été retouchées par les divers praticiens consultés, de sorte qu'elles demeuraient dans l'état dans lequel elles étaient à la suite de l'intervention réalisée par le Dr C______. Une expertise devait par conséquent être ordonnée rapidement, ceci d'autant plus que sa dentition, sujette au tartre et au jaunissement, nécessitait des soins réguliers, qui ne pouvaient être prodigués actuellement en raison de la procédure pénale.

c.b. À l'appui de son courrier, A______ a produit un bordereau de pièces complémentaires, comprenant notamment :

- un "rapport de consultation dentaire" établi le 28 juillet 2021 par la Dresse M______, médecin-dentiste auprès du cabinet dentaire N______, faisant état de "lésions circulaires au niveau de l'émail" des dents 12, 16 et 23 du plaignant. "Ce manque d'émail é[tait] compatible avec le polissage fait pour enlever les taquets". Par ailleurs, "la surface vestibulaire" de la dent 13 – sur laquelle aucun taquet n'avait été fixé – "présent[ait] un manque d'émail au niveau du collet et de la partie mésiale". Afin de "résoudre la problématique", il était nécessaire de recouvrir la "surface vestibulaire" des dents 12, 13, 16 et 23 d'une résine composite, où l'émail avait été "le plus abîmé" ; un polissage des dents 22 et 26 était par ailleurs préconisé pour lisser leur surface. Selon la praticienne, le plaignant devrait réaliser un contrôle annuel pour vérifier l'état du composite, lequel devrait être remplacé "tous les 10-12 ans" ;

- une attestation de la O______ du 11 août 2021, faisant état de "lésions" sur les dents 12, 16, 22, 23, 26 et 13, "même si cette dernière dent ne semblait pas avoir eu de taquet". Ces "rainures" étaient compatibles avec le traitement subi par A______ le 13 janvier 2021. La clinique dentaire était toutefois dans l'impossibilité d'expliquer avec précision ce qu'il s'était passé, mais une "correspondance entre le tableau clinique et la situation décrite par le patient était possible". L'usage de "composite vestibulaire" était nécessaire afin "de rétablir correctement et de manière minimalement invasive la situation" ; et

- des photographies prises les 28 juillet et 11 août 2021 par les deux cliniques susmentionnées, laissant apparaître des taches sur certaines dents du plaignant de couleurs jaunâtre/brunâtre; certaines d'entre elles semblent également présenter un aspect irrégulier.

d. Le même jour, le Dr C______ a été dénoncé à la Commission de surveillance de la santé et des droits des patients par le conseil de A______. L'instruction de cette procédure a été suspendue jusqu'à droit connu dans la procédure pénale.

e. Le 26 octobre 2021, A______ ainsi que les Drs C______ et G______ ont été entendus par le Ministère public lors d'une audience contradictoire.

e.a A______ a expliqué avoir été reçu au cabinet D______ AG par le Dr E______ lors des premières consultations. Des contrôles et strippings dentaires avaient été réalisés les 9 septembre, 20 octobre, 23 novembre et 23 décembre 2020 par ce praticien ou par les Drs C______ et G______, qui s'étaient bien déroulés. Le 13 janvier 2021, les taquets fixés sur ses dents supérieures avaient été ôtés, processus qui avait été douloureux et avait été réalisé "sans loupe"; l'éclairage de la pièce était également "à revoir". Lorsqu'il avait regardé dans un miroir, il avait immédiatement constaté un "creux" sur l'une de ses dents et des rayures sur six autres. Le 21 janvier 2021, le Dr G______, qui avait constaté que son émail dentaire avait été endommagé, lui avait proposé de recouvrir ses dents d'une résine composite. Par ailleurs, le praticien lui avait demandé de revenir hors des horaires d'ouverture du cabinet, car il ne souhaitait pas que la direction soit informée de cette affaire. Le 1er mars 2021, le Dr J______ avait ôté les taquets sur ses dents inférieures, opération qui avait duré environ une heure et durant laquelle il n'avait ressenti aucune douleur, ce qui contrastait avec l'intervention réalisée par le Dr C______.

e.b. Ce dernier a contesté les faits qui lui étaient reprochés, affirmant que A______ n'avait manifesté aucune douleur lors de l'intervention litigieuse, qui s'était déroulée "sans problème technique". Il avait utilisé une "fraise de Tungstène" afin de retirer les "attaches" sur les dents du plaignant, ce qui était une pratique usuelle. Cette fraise laissait une fine couche de composite irrégulière sur les dents, de sorte qu'il convenait ensuite d'utiliser une fraise de polissage. Le jour des faits litigieux, il ne disposait toutefois pas de cet instrument, qui était en rupture de stock et qui avait été commandé. Le traitement n'était donc pas terminé. Il n'avait pas vu l'état des dents du plaignant à la suite de l'intervention, mais avait pris connaissance du dossier transmis par la Commission de surveillance de la santé et des droits des patients le 21 septembre 2021. Il n'y avait "rien de choquant" dans les photographies des dents de A______. L'émail dentaire n'avait pas été touché, étant précisé qu'il était difficile de distinguer celui-ci des résidus de composite. Par ailleurs, il n'utilisait pas de loupe dans le cadre de ses opérations, sauf pour les interventions "plus minutieuses", tels que les traitements de racine. Enfin, il avait contacté le plaignant au mois de mars 2021 pour que celui-ci revienne au cabinet pour retirer les résidus de composite, mais l'intéressé n'avait pas donné suite à ses sollicitations. À la question de savoir pourquoi un rendez-vous – pour terminer le traitement – était prévu seulement deux mois plus tard, le Dr C______ a répondu que c'était en raison du fait qu'il souhaitait "passer à la phase suivante, soit la contention". Cela "faisait avancer le traitement", étant précisé que le port d'une gouttière de contention permettait "d'éviter que les dents [du patient] et les attachements se tachent davantage".

e.c. Le Dr G______ a expliqué avoir reçu A______ le 21 janvier 2021, à la suite "d'un dégât survenu sur ses dents après le retrait d'attaches". Il avait constaté des "irrégularités" sur certaines dents, qui étaient déjà visibles sur les photographies prises avant l'intervention litigieuse. Il n'était pas en mesure de dire si un dommage avait été causé aux dents du plaignant par le traitement réalisé par son collègue, étant précisé que les fraises utilisées par le cabinet dentaire n'abîmaient en principe pas l'émail lors du retrait de taquets. Il contestait avoir été mal à l'aise avec le plaignant, lequel était, pour sa part, "énervé, triste et agacé". Ce dernier lui avait demandé ce qui pouvait être fait pour remédier au problème, ce à quoi il avait répondu qu'il était possible d'ajouter du composite à la fin du traitement, "après avoir retiré les résidus de composite". Il confirmait que le traitement réalisé par son collègue n'était pas terminé et que le cabinet ne disposait pas de fraise de polissage le jour des faits litigieux. Pour le surplus, il n'avait pas demandé au plaignant de revenir hors des horaires d'ouverture du cabinet.

f. Par lettre du 2 novembre 2021 au Ministère public, le Dr C______, sous la plume de son conseil, a réitéré n'avoir causé aucun dommage aux dents de A______. Les "irrégularités ressenties" par ce dernier s'expliquaient par le fait qu'il restait des résidus de composite sur ses dents, aux endroits où des taquets avaient été posés. Le Dr H______ – qui avait effectué un simple examen clinique – ne pouvait pas avoir constaté des encoches dans l'émail dentaire du plaignant. Le Ministère public ne pouvait donc pas s'appuyer sur le rapport établi par ce praticien.

Une expertise devait, par conséquent, être ordonnée. Celle-ci permettrait en effet de déterminer si l'émail dentaire du plaignant avait été endommagé ou non, ce qui était contesté. L'expert désigné pourrait également se prononcer sur les irrégularités constatées sur les dents 12, 13 et 14 du plaignant, différentes de celles dues aux résidus de composite et qui préexistaient au traitement litigieux.

g. Par missive du 3 décembre 2021, A______ a contesté les explications données par le prévenu dans son courrier du 2 novembre 2021, ajoutant qu'il convenait d'ordonner une expertise sans délai.

h. Par avis de prochaine clôture du 10 mai 2022, le Ministère public a informé les parties de son intention de rendre une ordonnance de classement et les a invitées à présenter leurs éventuelles réquisitions de preuve ou requérir une indemnisation.

i. Le 25 mai 2022, C______ a sollicité le versement d'une indemnité à hauteur de CHF 5'946.70.- pour ses frais de défense.

j. A______ a réitéré ses réquisitions de preuve précédemment formulées. Le Dr C______ affirmait que l'opération litigieuse n'était pas terminée et que les dégâts occasionnés à ses dents ne constituaient que de simples "irrégularités". Or, aucun élément du dossier ne permettait de corroborer ces allégations. Pour le surplus, le praticien n'avait pas démontré ni même allégué qu'il était impératif et urgent de retirer les taquets le 13 janvier 2021, alors même qu'il savait qu'il ne disposait pas, ce jour-là, du matériel adéquat pour terminer son intervention dans les règles de l'art.

Le classement de la procédure était injustifié, ceci d'autant plus que les actes d'instruction – essentiels – sollicités n'avaient pas été ordonnés. Ceux-ci auraient pourtant permis de déterminer si l'émail de ses dents avait été abîmé, tel que cela ressortait des divers rapports médicaux versés au dossier.

C. i. Dans sa décision querellée, le Ministère public retient que l'atteinte dont se prévalait A______, à savoir des "irrégularités" dans l'émail dentaire, était une problématique purement esthétique, qui ne pouvait être qualifiée de lésions corporelles au sens du droit pénal. De plus, le plaignant n'avait subi aucune douleur consécutive au traitement litigieux. Dans ces circonstances, les éléments constitutifs de l'infraction de lésions corporelles par négligence (art. 125 CP) n'étaient pas réunis.

En tout état de cause, à la lecture du document intitulé "Information patients", le traitement orthodontique subi comportait un certain nombre de risques, dont une dégradation de la santé dentaire, un raccourcissement de la vie des dents et une perte de dents, auxquels l'intéressé avait consenti.

Partant, le classement de la procédure était ordonné (art. 319 al. 1 let. b CPP).

ii. S'agissant des réquisitions de preuve, le Ministère public considère que les actes d'instruction sollicités, à savoir l'audition des divers médecins-dentistes consultés par le plaignant et la mise en œuvre d'une expertise, n'étaient pas susceptibles d'apporter des éléments inédits et décisifs lui permettant de modifier sa conviction.

D. a. À l'appui de son recours, A______ relève qu'il se plaignait d'une perte définitive et irrémédiable de l'émail dentaire et non de simples "irrégularités" comme l'avait retenu le Ministère public. Atteint dans sa santé psychique également, il était désormais suivi par un médecin-psychiatre. La problématique n'était donc pas d'ordre esthétique.

Pour le surplus, en considérant qu'il avait accepté les risques du traitement orthodontique, l'autorité précédente avait implicitement admis l'existence d'une atteinte à sa santé, à laquelle il aurait, d'après elle, consenti. Or, il n'avait nullement accepté de subir un dommage consécutif à une violation des règles de l'art médical. En effet, si le traitement avait été réalisé de manière conforme à ces dernières, ses dents n'auraient pas été endommagées. Le Dr C______ avait au demeurant admis lui avoir prodigué des soins alors qu'il ne disposait pas du matériel adéquat.

Par ailleurs, il résultait des déclarations du prévenu que celui-ci avait pris connaissance de la plainte pénale le 21 septembre 2021, soit avant l'audience du 26 octobre 2021, de sorte qu'il avait pu "préparer" les arguments à faire valoir devant le Ministère public. Quoiqu'il en fût, les explications du médecin-dentiste étaient en contradiction avec les divers rapports médicaux versés au dossier, lesquels retenaient, de manière concordante, que son émail dentaire avait été touché.

Dans ces circonstances, l'autorité précédente ne pouvait rendre une ordonnance de classement sans avoir procédé à une expertise ainsi qu'aux auditions sollicitées. En refusant d'ordonner les mesures d'instruction requises, le Ministère public s'était livré à une appréciation anticipée des preuves arbitraire et avait, de la sorte, violé son droit d'être entendu.

L'atteinte qu'il avait subie constituait manifestement des lésions corporelles simples. Si par impossible l'infraction prévue à l'art. 123 CP ne pouvait être retenue, il convenait de considérer que le dommage – irréversible – causé à son émail dentaire constituait une voie de fait, au sens de l'art. 126 CP.

b. Dans ses observations, le Ministère public conclut au rejet du recours, sous suite de frais.

La plainte formée par le recourant visait un comportement commis par négligence (art. 125 CP). Aucun des faits décrits par ce dernier ne permettait d'établir, même sous l'angle de la vraisemblance, que le prévenu aurait intentionnellement – ou par dol éventuel – cherché à porter atteinte à son intégrité corporelle. Le recourant ne le soutenait d'ailleurs pas. L'élément constitutif subjectif des infractions visées aux art. 123 et 126 CP n'était donc pas réalisé. Partant, il n'y avait pas lieu d'examiner si l'atteinte alléguée pourrait ou non être qualifiée de voie de fait, cette infraction – de nature contraventionnelle – ne pouvant être commise par négligence.

En ce qui concernait l'infraction prévue à l'art. 125 CP, il n'était pas établi que le recourant présentait des lésions dentaires après l'intervention du 13 janvier 2021. Si le Dr H______ avait constaté des encoches sur certaines dents, il avait néanmoins relevé qu'un polissage de la surface dentaire était nécessaire pour finir la procédure, ce qui tendait à corroborer les propos du prévenu, selon lesquels l'intervention n'était pas terminée. Certes, l'attestation rédigée par la Dresse M______ le 28 juillet 2021 faisait état de "lésions circulaires". Cela étant, cette pièce ne permettait pas de retenir que le manque d'émail constaté était tel qu'une atteinte à la santé du recourant devait être retenue. De plus, le fait qu'il n'ait pas été jugé nécessaire de pratiquer un quelconque traitement médico-dentaire pour pallier au défaut allégué tendait à en confirmer le caractère principalement esthétique. Même à admettre qu'il s'agissait d'une lésion corporelle au sens du droit pénal, un manque d'émail avait également été constaté sur une dent sur laquelle aucun taquet n'avait été posé et, partant, n'avait pas été traitée par le prévenu. Par ailleurs, selon l'attestation établie par la clinique O______ le 11 août 2021, le manque d'émail ne pouvait être expliqué de manière précise. En définitive, le recourant, qui alléguait avoir consulté plusieurs spécialistes après les faits litigieux, n'avait produit que trois attestations, qui ne confirmaient pas ses dires.

S'agissant des réquisitions de preuve, une expertise était disproportionnée, eu égard à la nature des lésions rapportées et aux intérêts en jeu. Les auditions sollicitées n'apporteraient, quant à elles, aucun élément utile et pertinent, étant précisé que le recourant aurait pu produire des attestations écrites des praticiens concernés.

c. Dans ses observations, le Dr C______ conteste le contenu des rapports médicaux versés à la procédure, précisant que les Drs H______ et M______ ne disposaient pas de toutes les informations essentielles pour rendre une appréciation "éclairée". Quant à O______, elle avait effectué un simple contrôle des dents du recourant et n'avait pas non plus distingué l'émail dentaire des résidus de composite. Aussi, dans la mesure où les explications données par le recourant étaient incomplètes, les conclusions de cette clinique dentaire étaient nécessairement biaisées. En définitive, aucun élément du dossier ne permettait de retenir que son patient avait subi des lésions dentaires. Aucune infraction pénale ne pouvait par conséquent lui être reprochée.

Si par impossible, l'ordonnance entreprise devait être annulée, les mesures d'instruction sollicitées devaient être rejetées, à l'exception de l'expertise, laquelle permettrait de déterminer si l'émail dentaire du recourant avait été endommagé – ce qui était contesté – ou s'il s'agissait de résidus de composite. À cet égard, seul un expert était en mesure d'opérer cette distinction, l'usage de colorants spéciaux étant nécessaires à cet effet.

d. Dans sa réplique, A______ réitère que ses dents avaient été endommagées, des "encoches et des lésions circulaires" ayant été constatées par divers praticiens. Il ne s'agissait pas d'irrégularités mais bien d'un dégât visible à l'œil nu. Les rapports médicaux versés à la procédure étaient concordants sur un point essentiel, à savoir qu'il était nécessaire de recouvrir ses dents 12, 13, 16 et 23 de résine composite et de polir les dents 22 et 26, ce qui ne constituait pas une problématique purement esthétique. De plus, il ne restait plus aucun résidu de composite sur ses dents, ce qui avait été confirmé par son médecin-orthodontiste actuel, dont l'audition avait été sollicitée mais refusée par le Ministère public. Le prévenu avait bel et bien ôté les taquets, la colle et une partie de l'émail de ses dents et il n'avait pas été question d'un polissage après cette intervention. D'ailleurs, aucune consultation n'était agendée avec le prévenu. Ce dernier avait effectivement tenté de le joindre afin de lui proposer de réparer les dégâts occasionnés, mais il avait refusé de donner suite à ses sollicitations, ayant perdu confiance en ce médecin.

e. Le Dr C______ maintient sa position dans sa réplique.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du plaignant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant fait grief au Ministère public d'avoir classé sa plainte, et ce, sans avoir procédé aux actes d'enquête sollicités par ses soins.

2.1.  Aux termes de l'art. 319 al. 1 CPP, le ministère public ordonne le classement de tout ou partie de la procédure notamment lorsqu'aucun soupçon justifiant une mise en accusation n'est établi (let. a) ou lorsque les éléments constitutifs d'une infraction ne sont pas réunis (let. b).

La décision de classer la procédure doit être prise en application du principe "in dubio pro duriore", qui découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et art. 2 al. 2 CPP en relation avec les art. 319 al. 1 et 324 al. 1 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2 p. 91). Ce principe vaut également pour l'autorité judiciaire chargée de l'examen d'une décision de classement. Il signifie qu'en règle générale, un classement ou une non-entrée en matière ne peut être prononcé par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un certain pouvoir d'appréciation. La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave. En effet, en cas de doute s'agissant de la situation factuelle ou juridique, ce n'est pas à l'autorité d'instruction ou d'accusation mais au juge matériellement compétent qu'il appartient de se prononcer (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 p. 243; 138 IV 86 consid. 4.1.2 p. 91 et les références citées). L'autorité de recours ne saurait ainsi confirmer un classement au seul motif qu'une condamnation n'apparaît pas plus probable qu'un acquittement (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 p. 243; arrêt du Tribunal fédéral 6B_116/2019 du 11 mars 2019 consid. 2.1).

Lorsqu'il estime que l'instruction est complète, le ministère public rend une ordonnance pénale ou informe les parties de la clôture prochaine de l'instruction en leur octroyant un délai pour présenter leurs réquisitions de preuves (art. 318 al. 1 et 2 CPP). L'instruction est complète quand le ministère public estime qu'il a réuni tous les éléments et procédé à toutes les investigations nécessaires à la manifestation de la vérité. Si les parties requièrent l'administration de certaines preuves, le ministère public doit traiter ces demandes avant de donner suite à la procédure. Il ne peut écarter des propositions de preuve que si elles ont trait à des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité pénale ou déjà suffisamment prouvés (art. 318 al. 2 1ère phrase CPP). La décision négative sur une requête en complément de preuves n'est pas sujette à recours mais la demande peut être réitérée dans le cadre des débats (art. 318 al. 3 CPP) (A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2e éd. Bâle 2019, n. 5 ad art. 319).

2.2.1. L'art. 123 CP réprime les lésions du corps humain ou de la santé qui ne peuvent être qualifiées de graves au sens de l'art. 122 CP. Cette disposition protège l'intégrité corporelle et la santé tant physique que psychique. Elle implique une atteinte importante aux biens juridiques ainsi protégés. À titre d'exemples, la jurisprudence cite l'administration d'injections, la tonsure totale et tout acte qui provoque un état maladif, l'aggrave ou en retarde la guérison, comme les blessures, les meurtrissures, les écorchures ou les griffures, sauf si ces lésions n'ont pas d'autres conséquences qu'un trouble passager et sans importance du sentiment de bien-être (ATF 134 IV 189 consid. 1.1 p. 191 et les références citées ; plus récemment arrêt du Tribunal fédéral 6B_1283/2018 du 14 février 2019 consid. 2.1).

2.2.2. Les voies de fait, réprimées par l'art. 126 CP, se définissent comme des atteintes physiques qui excèdent ce qui est socialement toléré et qui ne causent ni lésions corporelles, ni dommage à la santé. Une telle atteinte peut exister même si elle n'a causé aucune douleur physique (ATF 119 IV 25 consid. 2a p. 26 ; ATF 117 IV 14 consid. 2a p. 15 ss). Une éraflure au nez avec contusion a été considérée comme une voie de fait ; de même une meurtrissure au bras et une douleur à la mâchoire sans contusion (ATF 134 IV 189 consid. 1.3 p. 191 et les référence citées).

2.2.3. Ces deux infractions sont intentionnelles, mais le dol éventuel suffit (ATF 119 IV 1 consid. 5a).

2.3.  L'art. 125 CP réprime le comportement de celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé. Elle suppose la réalisation de trois conditions : une négligence, une atteinte à l'intégrité physique et un lien de causalité naturelle et adéquate entre ces deux éléments.

2.3.1. Les lésions corporelles par négligence constituent une infraction de résultat, qui suppose en général une action, mais qui, conformément à l'art. 11 al. 1 CP, peut aussi être réalisée par le fait d'un comportement passif contraire à une obligation d'agir. N'importe quelle obligation juridique ne suffit pas. Il faut qu'elle ait découlé d'une position de garant, c'est-à-dire que l'auteur se soit trouvé dans une situation qui l'obligeait à ce point à protéger un bien déterminé contre des dangers indéterminés (devoir de protection), ou à empêcher la réalisation de risques connus auxquels des biens indéterminés étaient exposés (devoir de surveillance), que son omission peut être assimilée au fait de provoquer le résultat par un comportement actif (ATF 141 IV 249 consid. 1.1 p. 251 s. ; ATF 134 IV 255 consid. 4.2.1 p. 259 s. et les références citées).

La négligence est l'imprévoyance coupable commise par celui qui, ne se rendant pas compte des conséquences de son acte, agit sans user des précautions commandées par les circonstances et sa situation personnelle. Deux conditions doivent être remplies (art. 12 al. 3 CP).

D'abord, elle suppose que l'auteur ait violé les règles de prudence, c'est-à-dire le devoir général de diligence institué par la loi pénale qui interdit de mettre en danger les biens d'autrui pénalement protégés contre les atteintes involontaires. Un comportement viole le devoir de prudence lorsque l'auteur, au moment des faits, aurait pu et dû, au vu des circonstances, compte tenu de ses connaissances et de ses capacités, se rendre compte qu'il mettait en danger des biens juridiquement protégés de la victime et qu'il excédait les limites du risque admissible (ATF 143 IV 138 consid. 2.1 p. 140 ; ATF 138 IV 124 consid. 4.4.5 p. 128 ; ATF 136 IV 76 consid. 2.3.1 p. 79 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_197/2017 du 8 mars 2018 consid. 4.1 ; 6B_466/2016 du 23 mars 2017 consid. 3.1 et les références).

S'il y a eu violation des règles de la prudence, encore faut-il que celle-ci puisse être imputée à faute, c'est-à-dire que l'on puisse reprocher à l'auteur, compte tenu de ses circonstances personnelles, d'avoir fait preuve d'un manque d'effort blâmable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_170/2017 précité, consid. 2.2, et les références citées).

Enfin, il faut qu'il existe un rapport de causalité naturelle et adéquate entre la violation fautive du devoir de prudence et les lésions corporelles.

2.3.2. Selon la jurisprudence, la particularité de l'art médical réside dans le fait que le médecin doit, avec ses connaissances et ses capacités, tendre vers le résultat désiré, mais n'a pas l'obligation de l'atteindre ou même de le garantir. Les exigences que le devoir de prudence impose au médecin dépendent des circonstances du cas d'espèce, notamment du genre d'intervention ou de traitement, des risques qui y sont liés, du pouvoir de jugement ou d'appréciation laissé au médecin, des moyens à disposition et de l'urgence de l'acte médical. La responsabilité pénale du médecin n'est pas limitée à la violation grave des règles de l'art médical. Il doit au contraire toujours soigner ses malades de façon appropriée et, en particulier observer la prudence imposée par les circonstances pour protéger leur vie ou leur santé. Par conséquent, le médecin répond en principe de tout manquement à ses devoirs (ATF 130 IV 7 consid. 3.3 p. 11 s. et les références citées).

La notion de manquement à ses devoirs ne doit cependant pas être comprise de telle manière que chaque acte ou omission qui, par un jugement a posteriori, aurait provoqué le dommage ou l'aurait évité, entrerait dans cette définition. Le médecin ne doit en principe pas répondre des dangers et des risques qui sont inhérents à tout acte médical ainsi qu'à toute maladie. Par ailleurs, l'état de la science médicale confère souvent une latitude de jugement au médecin, tant en ce qui concerne le diagnostic que les mesures thérapeutiques ou autres, ce qui permet de faire un choix parmi les différentes possibilités qui entrent en considération. Le praticien ne manque à son devoir de diligence que si un diagnostic, une thérapie ou un autre acte médical n'apparaît plus défendable selon l'état général des connaissances de la branche, par exemple s'il ne discerne pas les symptômes typiques d'une maladie grave, prépare de manière insuffisante une opération qui ne s'impose pas, ou ne fait pas appel à un spécialiste (ATF 134 IV 175 consid. 3.2 p. 177 s.; ATF 130 IV 7 consid. 3.3 p. 12).

2.4.  En l'espèce, aucun élément au dossier ne permet de retenir une volonté de l'intimé de faire subir au recourant des lésions corporelles. Ce dernier ne le soutient du reste pas. Les art. 123 et 126 CP – invoqués pour la première fois dans le cadre du recours – ne sauraient dès lors trouver application ici, ces infractions étant de nature intentionnelle. Par conséquent, les faits dénoncés doivent être examinés uniquement sous l'angle de l'art. 125 CP.

En l'occurrence, le recourant soutient que ses dents auraient été endommagées, en particulier au niveau de l'émail dentaire, durant le traitement orthodontique prodigué le 13 janvier 2021 par l'intimé.

Ce dernier conteste, quant à lui, ces accusations, affirmant que le recourant, dont la prise en charge aurait été effectuée dans les règles de l'art médical, n'aurait subi aucune lésion dentaire. Selon le praticien, les "irrégularités" dont se plaindrait l'intéressé seraient dues à la présence de résidus de composite – d'un aspect similaire à l'émail dentaire – sur la surface de ses dents. Ces résidus pouvaient néanmoins être éliminés à l'aide d'un polissage.

Cela étant, le dossier contient des avis médicaux divergents. En effet, il ressort du rapport établi par le Dr H______, le 4 février 2021, que certaines dents du recourant, sur lesquelles des taquets ont été retirés, présenteraient des "encoches". Selon ce médecin-dentiste, lesdites dents devaient être restaurées à l'aide de composite dentaire. D'autres, dont la surface était rugueuse, nécessitaient un polissage.

Ce constat semble partagé par la Dresse M______, médecin-dentiste, qui, dans son rapport du 28 juillet 2021, a relevé l'existence de "lésions circulaires" au niveau de l'émail de trois dents du recourant, sur lesquelles des taquets ont été retirés par l'intimé. La surface vestibulaire desdites dents – où l'émail avait été, d'après cette praticienne, le "plus abîmé" – devait être recouverte de résine composite.

L'attestation de la clinique O______ du 11 août 2021 fait également état de "lésions" et de "rainures" sur six dents du recourant, "compatibles" avec le traitement prodigué par l'intimé le 13 janvier 2021. La clinique dentaire précisait néanmoins ne pas être en mesure de déterminer la cause exacte desdites lésions. Afin de résoudre le problème de la manière la moins invasive possible, l'usage de "composite vestibulaire" était préconisé.

Enfin, le Dr G______, qui a reçu le recourant le 21 janvier 2021, a déclaré au Ministère public ne pas être en mesure d'indiquer si les dents de l'intéressé avaient été endommagées ou non par son collègue au cours de l'intervention du 13 janvier précédent. Il a par ailleurs confirmé que le cabinet dentaire ne disposait pas de fraise de polissage ce jour-là.

Au vu des avis médicaux contradictoires, il n'apparaît pas possible, en l'état, d'établir l'existence et la nature exacte des lésions alléguées par le recourant, ni de déterminer si les soins orthodontiques prodigués par l'intimé étaient conformes aux règles de l'art. Néanmoins, l'intervention en cause suscite quelques interrogations. En effet, le prévenu a expliqué que, le jour des faits litigieux, le cabinet dentaire ne disposait pas de fraise de polissage, pourtant essentielle – d'après le praticien –, pour terminer le traitement orthodontique. De plus, si le médecin-dentiste soutient avoir convenu d'un rendez-vous en vue de retirer les résidus de composite – ce que le recourant conteste fermement –, ladite consultation aurait été prévue au mois de mars 2021, soit deux mois plus tard, ce qui paraît surprenant. Pour le surplus, même à suivre les déclarations du prévenu, selon lesquelles le recourant n’aurait pas bénéficié d’un traitement orthodontique complet, le praticien n'explique pas pour quelles raisons il n'a pas jugé utile de reporter l'intervention – dont l'urgence n'a pas été alléguée –, alors qu'il savait qu'il ne disposait pas du matériel adéquat ce jour-là.

Dans ces circonstances, il aurait été opportun d'ordonner une expertise judiciaire afin d'établir l'existence et, le cas échéant, le type de lésions subies par le recourant, étant précisé que l'intimé a expliqué qu'il n'était pas possible de distinguer, à l'œil nu, des résidus de composite de l'émail dentaire, l'usage de colorants étant nécessaire à cet effet. Une expertise permettrait également de déterminer si les soins prodigués par l'intimé l'ont été dans les règles de l'art, étant encore précisé que le recourant allègue avoir subi de fortes douleurs au cours de l'intervention.

En définitive, en l'absence d'informations essentielles et des questions d'ordre technique qui se posent, l'existence de lésions corporelles et d'une négligence fautive ne peut être exclue, à ce stade. Le classement querellé apparaît dès lors prématuré et, comme tel, infondé. Il appartiendra donc au Ministère public de procéder aux mesures d'instruction complémentaires jugées utiles, notamment à une expertise judiciaire – au demeurant sollicitée tant par le recourant que l'intimé lui-même – et, le cas échéant, aux auditions des médecins-dentistes consultés par le recourant à la suite des faits litigieux.

3.             Fondé, le recours doit être admis; partant, l'ordonnance querellée sera annulée et la cause renvoyée au Ministère public pour qu’il procède dans le sens des considérants.

4.             L'admission du recours ne donne pas lieu à la perception de frais (art. 428 al. 1 CPP), de sorte que les sûretés seront restituées au recourant.

5.             Le recourant, qui obtient gain de cause, a demandé une indemnité pour ses frais de défense.

5.1.  En vertu de l'art. 436 al. 1 CPP, les prétentions en indemnité dans les procédures de recours sont régies par les art. 429 à 434 CPP.

Lors de la fixation de l'indemnité, le juge ne doit pas avaliser purement et simplement les notes d'honoraires qui lui sont le cas échéant soumises, mais, au contraire, examiner si l'assistance d'un conseil était nécessaire puis, dans l'affirmative, apprécier objectivement la pertinence et l'adéquation des activités facturées, par rapport à la complexité juridique et factuelle de l'affaire et, enfin, dire si le montant des honoraires réclamés, même conforme au tarif pratiqué, est proportionné à la difficulté et à l'importance de la cause, c'est-à-dire raisonnable au sens de la loi (cf. ACPR/140/2013 du 12 avril 2013).

5.2.  La Chambre de céans applique un tarif horaire de CHF 400.- si l'avocat concerné a lui-même calculé sa prétention à ce taux-là (ACPR/377/2013 du 13 août 2013), de CHF 350.- pour un collaborateur (ACPR/178/2015 du 23 mars 2015) et de CHF 150.- pour un avocat-stagiaire (AARP/65/2017 du 23.02.2017 consid. 5.1).

5.3.  En l'espèce, l'avocat du recourant a produit deux notes d'honoraires s'élevant, au total, à CHF 22'509.30 (CHF 21'073.30 + CHF 1'436.-) – relatives tant à la procédure de première instance que de recours –, correspondant à 52h15 d'activité (48h55 + 3h20) au tarif horaire de CHF 400.-. Seule la partie inhérente au recours sera rémunérée, la Chambre de céans n'étant pas compétente pour statuer en premier ressort sur les frais liés à la procédure de première instance. En l'occurrence, l'activité déployée dans le cadre de la procédure de recours s'élève, à teneur desdites notes, à 13h20 au total (10 heures pour la rédaction du recours et 3h20 pour les observations).

Compte tenu de l'ampleur de ses écritures (recours de 26 pages, dont une de garde, deux de conclusions et onze de développements juridiques, ainsi que trois pages d'observations), cette durée apparaît excessive, de sorte que l'indemnité sera ramenée à CHF 3'446.40, correspondant à huit heures d'activité au tarif horaire de CHF 400.-, TVA (7.7%) incluse. Cette somme sera mise à la charge de l'État.

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Admet le recours.

Annule, en conséquence, l'ordonnance de classement déférée et renvoie la cause au Ministère public pour qu'il procède dans le sens des considérants.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État et ordonne la restitution des sûretés versées.

Alloue à A______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 3'446.40, TVA (7.7%) incluse, pour la procédure de recours.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, aux parties, soit pour elles à leurs conseils respectifs, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Mesdames Daniela CHIABUDINI et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).