Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites
DCSO/625/2024 du 17.12.2024 ( PLAINT ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE A/2852/2024-CS DCSO/625/24 DECISION DE LA COUR DE JUSTICE Chambre de surveillance DU JEUDI 12 DECEMBRE 2024 |
Plainte 17 LP (A/2852/2024-CS) formée en date du 4 septembre 2024 par A______.
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Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par pli recommandé du greffier du ______ à :
- A______
______
______ [GE].
- Office cantonal des poursuites.
A. a. L'Etat de Genève, soit pour lui l'Administration fiscale cantonale, a requis la continuation de la poursuite n° 1______ à l'encontre de A______ le 29 mars 2024.
b. Le 24 juin 2024, l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a adressé au poursuivi un avis de saisie en l'invitant à se présenter le 19 août 2024 en vue d'être interrogé sur sa situation financière.
c. Sur la base des déclarations de A______ lors de son audition et des documents qu'il a fournis, l'Office a retenu qu'il percevait des indemnités de chômage de 4'100 fr. par mois en moyenne, que son épouse réalisait un revenu moyen de 777 fr. par mois, et que leurs charges mensuelles se montaient à 3'494 fr., comprenant le montant de base pour un couple (1'700 fr.), le loyer de l'appartement (1'492 fr.) et d'une place de parking (82 fr.), les frais de transport public (140 fr.) et de recherches d'emploi du poursuivi (80 fr.).
L'Office n'a pas tenu compte des cotisations d'assurance-maladie, au motif qu'elles n'étaient pas payées, ni du loyer relatif à la deuxième place de parking, dès lors que le bail y relatif n'était pas lié à celui du logement et que ces frais ne relevaient pas du minimum vital.
Au regard des revenus respectifs des époux, l'Office a fixé la part du débiteur poursuivi aux charges à 2'937 fr. 35.
d. Les décomptes bancaires de A______ pour la période allant du 1er avril au 31 juillet 2024 font ressortir qu'il a perçu des indemnités de chômage à hauteur de 3'968 fr. 40 le 23 avril 2024, 4'156 fr. 35 le 23 mai 2024, 2'614 fr. 05 le 2 juillet 2024 et 4'156 fr. 35 le 23 juillet 2024, ainsi que les sommes de 1'243 fr. 60 et
146 fr. 90 les 26 juin et 3 juillet 2024 de B______ SA.
Des décomptes bancaires de son épouse concernant cette même période, il ressort qu'elle a touché les sommes de 715 fr. 15 le 4 avril 2024, 908 fr. 05 le 3 mai 2024, 737 fr. 90 le 5 juin 2024 et 749 fr. 15 le 5 juillet 2024 de la société C______ SA.
e. Le 28 août 2024, l'Office a avisé la Caisse de chômage D______ de la saisie des indemnités de chômage de A______ à raison de toute somme supérieure à 2'940 fr. par mois.
f. Le 3 septembre 2024, l'Office a modifié le calcul du minimum vital du débiteur poursuivi en y intégrant les cotisations d'assurance-maladie à hauteur de 274 fr. 65 pour l'époux et 245 fr. 95 pour l'épouse, portant ainsi le total des charges du couple à 4'014 fr. 60, dont 3'375 fr. étaient à la charge du débiteur poursuivi.
Il a, par avis du même jour, informé la Caisse de chômage D______ de ce que les indemnités de chômage de A______ devaient être saisies à raison des sommes supérieures à 3'375 fr.
g. Il ressort du décompte établi par la Caisse de chômage D______ le 24 septembre 2024 qu'un montant de 405 fr. 50 a été prélevé des indemnités de chômage de A______ pour être versé à l'Office.
B. a. Par acte déposé au greffe de la Chambre de surveillance le 4 septembre 2024, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre la saisie de ses indemnités de chômage, concluant à sa réduction à un montant de 150 fr. par mois. Il se plaint d'une atteinte à son minimum vital, reprochant à l'Office d'avoir mal estimé le montant de ses indemnités et des revenus de son épouse et d'avoir omis de tenir compte de ses cotisations d'assurance maladie, des frais de parking et des arrangements de paiement passés avec divers créanciers.
b. Dans son rapport établi le 2 octobre 2024, l'Office conclut au rejet de la plainte. Il expose que les arrangements de paiement pris par le débiteur poursuivi envers certains créanciers, ainsi que le loyer d'une deuxième place de parking, dont le bail n'était pas lié au contrat portant sur le logement, ne font pas partie du minimum vital. Il avait par ailleurs intégré les cotisations d'assurance-maladie dans le calcul opéré le 3 septembre 2024 et adapté la saisie en conséquence, de sorte que la plainte n'avait plus d'objet sur ce point.
c. La cause a été gardée à juger le 28 octobre 2024.
1. 1.1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'office qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP). A qualité pour former une plainte toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou tout au moins touchée dans ses intérêts de fait, par une décision ou une mesure de l'office (ATF 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3). La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).
1.1.2 Lorsque la plainte est dirigée contre la saisie, le délai de dix jours prévu par l'art. 17 al. 2 LP commence à courir avec la communication du procès-verbal de saisie (ATF 107 III 7 consid. 2), avec pour conséquence qu'il ne pourrait être entré en matière sur une plainte déposée avant cette communication (en ce sens : Jent-Sorensen, in BSK SchKG I, 3ème édition, 2021, N 19 ad art. 112 LP; Zondler, in Kommentar SchKG, 2017, Kren Kostkiewicz/Vock [éd.], N 4 ad art. 114 LP). C'est sous la réserve d'une saisie portant une atteinte flagrante au minimum vital du débiteur et de ses proches ou si la mise sous mains de justice met le poursuivi ou ses proches dans une situation absolument intolérable, les privant des objets indispensables au vivre et au coucher, laquelle est nulle au sens de l'art. 22 al. 1 LP (ATF 117 III 39; 114 III 78 consid. 3; décisions de la Chambre de surveillance DCSO/180/2018 du 15 mars 2018; DCSO/394/2015 du 17 décembre 2015; DCSO/513/2007 du 8 novembre 2007).
1.2 Déposée contre l'exécution de la saisie d'indemnités journalières exécutée en mains de la Caisse de chômage, la plainte formée par le débiteur poursuivi pour violation de son minimum vital est recevable.
2. 2.1.1 Selon l'art. 93 al. 1 LP, les revenus relativement saisissables tels que les revenus du travail ne peuvent être saisis que déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital). Cette disposition garantit à ces derniers la possibilité de mener une existence décente, sans toutefois les protéger contre la perte des commodités de la vie; elle vise à empêcher que l'exécution forcée ne porte atteinte à leurs intérêts fondamentaux, les menace dans leur vie ou leur santé ou leur interdise tout contact avec le monde extérieur. Les besoins du poursuivi et de sa famille reconnus par la jurisprudence sont ceux d'un poursuivi moyen et des membres d'une famille moyenne, c'est-à-dire du type le plus courant. Ils doivent toutefois tenir compte des circonstances objectives, et non subjectives, particulières au poursuivi (ATF 134 III 323 consid. 2; 108 III 60 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_912/2018 du 16 janvier 2018 consid. 3.1).
Pour fixer le montant saisissable – en fonction des circonstances de fait existant lors de l'exécution de la saisie (ATF 115 III 103 consid. 1c) – l'Office doit d'abord tenir compte de toutes les ressources du débiteur; puis, après avoir déterminé le revenu global brut, il évalue le revenu net en opérant les déductions correspondant aux charges sociales et aux frais d'acquisition du revenu; enfin, il déduit du revenu net les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur et de sa famille, en s'appuyant pour cela sur les directives de la Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse (BlSchK 2009, p. 196 ss), respectivement, à Genève, sur les Normes d'insaisissabilité édictées par l'autorité de surveillance; arrêt du Tribunal fédéral 5A_919/2012 du 11 février 2013 consid. 4.3.1).
2.1.2 Les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur se composent en premier lieu d'une base mensuelle d'entretien, fixée selon la situation familiale du débiteur, qui doit lui permettre de couvrir ses dépenses élémentaires, parmi lesquelles l'alimentation, les vêtements et le linge, les soins corporels, l'entretien du logement, les frais culturels, la téléphonie et la connectivité, l'éclairage, l'électricité, le gaz, les assurances privées, etc. (art. I NI; OCHSNER, Le minimum vital, op. cit., p. 128). D'autres charges indispensables, comme les frais de logement (art. II.1 et II.3 NI), les cotisations d'assurance-maladie obligatoire (art. II.3 NI), les contributions d'entretien dues en vertu de la loi (art. II.5 NI) ou les frais de formation des enfants (art. II.6 NI), doivent être ajoutées à cette base mensuelle d'entretien, pour autant qu'elles soient effectivement payées (OCHSNER, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 82 ad art. 93 LP).
2.1.3 Chaque époux doit contribuer aux charges de la famille dans une mesure proportionnée à ses revenus (art. 163 al. 1 CC) – quels que soient le régime matrimonial, les conventions internes ou la répartition des tâches –, le calcul du minimum vital d'un débiteur marié vivant en couple prend en compte les charges du couple ainsi que les revenus des deux conjoints, afin de déterminer la part respective des conjoints à leur minimum vital, selon la formule suivante : (minimum vital du couple x revenus du poursuivi) ÷ (revenus du poursuivi + revenus du conjoint) = minimum vital du poursuivi. La quotité saisissable du débiteur résulte ensuite de la soustraction de la part du poursuivi au minimum vital commun du couple des revenus du débiteur (Normes d'insaisissabilité, ch. IV.1; Stoffel/Chabloz, Voies d'exécution, § 5 n° 47; Ochsner, in CR-LP, n. 179 et ss ad art. 93 LP; Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n. 114 ad art. 93 LP; ATF 114 III 12,
JdT 1990 II 118; SJ 2000 II 213; ATF 114 II 12 consid. 3; arrêts du Tribunal fédéral 6B_390/2011 du 6 octobre 2011 consid. 3 et 7B.240/2001 du 18 décembre 2001; DCSO/210/2012 du 31 mai 2012 consid. 6.1).
2.1.4 Les dettes que rembourse chaque mois le débiteur ne font pas partie de son minimum vital, quand bien même il aurait pris des engagements dans ce sens (ATF 102 III 17; ATF 96 III 6, JdT 1966 II 49; Ochsner, op. cit., n° 157 ad art. 93 LP).
2.2 En l'espèce, l'Office a établi la quotité saisissable du plaignant en établissant les revenus et les charges incompressibles du couple qu'il forme avec son épouse.
2.2.1 Le plaignant reproche à l'Office d'avoir mal estimé les revenus du couple, au motif que ses indemnités de chômage et les revenus de son épouse étaient variables.
Les décomptes bancaires de cette dernière sur la période allant du 1er avril au 31 juillet 2024 font ressortir qu'elle a perçu de la société C______ SA les montants de 715 fr. 15 le 4 avril 2024, 908 fr. 05 le 3 mai 2024, 737 fr. 90 le 5 juin 2024 et 749 fr. 15 le 5 juillet 2024, soit un montant mensuel moyen de 777 fr., ce qui correspond à ce que l'Office a retenu.
Des décomptes bancaires du plaignant pour cette même période, il ressort qu'il a touché des indemnités de chômage à hauteur de 3'968 fr. 40 le 23 avril 2024, 4'156 fr. 35 le 23 mai 2024, 2'614 fr. 05 le 2 juillet 2024 et 4'156 fr. 35 le 23 juillet 2024, ainsi que les sommes de 1'243 fr. 60 et 146 fr. 90 les 26 juin et 3 juillet 2024 de B______ SA. Les indemnités journalières et gains intermédiaires perçus par le plaignant représentent ainsi un montant moyen de 4'070 fr., soit un montant légèrement inférieur à ce que le l'Office a retenu à ce titre. Il se justifie donc de revoir la quotité saisissable des indemnités en conséquence.
2.2.2 Concernant les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur poursuivi, l'Office a, dans le cadre de son calcul modifié le 3 septembre 2024, retenu que les charges du couple étaient de 4'014 fr. 60, comprenant le montant de base pour un couple (1'700 fr.), le loyer de l'appartement (1'492 fr.) et d'une place de parking (82 fr.), les cotisations d'assurance-maladie pour le débiteur (274 fr. 65) et son épouse (245 fr. 95), les frais de transport public (140 fr.) et de recherches d'emploi du poursuivi (80 fr.).
Le plaignant ne saurait être suivi lorsqu'il reproche à l'Office de n'avoir pas tenu compte du loyer de son box de parking, puisqu'un montant de 82 fr. a été retenu à ce titre et que le loyer d'une place supplémentaire, non liée au bail du logement, ne constitue pas une charge à prendre en considération dans le calcul du minimum vital.
Il en va de même des arrangements de règlement d'autres créances dont se prévaut le plaignant, dans la mesure où il ne s'agit pas de charges à retenir dans le cadre de la détermination du minimum vital du droit des poursuites.
Le plaignant reproche par ailleurs à l'Office de n'avoir pas tenu compte des cotisations d'assurance-maladie. Il est vrai que dans le cadre de son avis du 28 août 2024, l'Office n'avait pas pris ces cotisations en considération au motif qu'elles n'étaient pas versées. Ces cotisations ont toutefois été intégrées dans le calcul revu par l'Office le 3 septembre 2024, sur la base duquel la saisie des indemnités de chômage a été exécutée, de sorte que la plainte n'a plus d'objet sur ce point.
2.2.3 Compte tenu des indemnités de chômage et gains intermédiaires du débiteur poursuivi, s'élevant à 4'070 fr. par mois en moyenne, des revenus mensuels moyens de son épouse de 777 fr. et des charges incompressibles du ménage représentant 4'014 fr. 60, la part du plaignant à la prise en charge du minimum vital du ménage se monte à 3'370 fr. (4'070 fr. x 4'014 fr. / 4'847 fr.).
La saisie des indemnités de chômage opérée par l'Office à raison des sommes supérieures à 3'375 fr. est en conséquence conforme. La plainte sera donc rejetée.
3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 lit. a OELP) et il n'est pas alloué de dépens (art. 62 al. 2 OELP).
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La Chambre de surveillance :
A la forme :
Déclare recevable la plainte formée le 4 septembre 2024 par A______ contre l'exécution de la saisie de ses indemnités de chômage en mains de la Caisse de chômage D______ du 28 août 2024.
Au fond :
La rejette.
Siégeant :
Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Elise CAIRUS, greffière.
La présidente : Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI |
| La greffière : Elise CAIRUS |
Voie de recours :
Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.