Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/1067/2024 du 31.10.2024 ( DOMPU ) , ADMIS
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 31 octobre 2024
|
dans la cause
Madame A______
contre
Commune de B______
1. Le 11 avril 2024, le service de la gestion des déchets de la commune de B______ (ci-après : la commune) a infligé à Madame A______ une amende administration de CHF 250.- pour dépôt d’un carton libellé à son nom à l’écopoint de la Roselière le 6 mars 2024 à 8h33, ce qui était contraire au règlement communal LC 06 911 relatif à la gestion des déchets puisque le carton aurait dû être déposé dans une benne papier/carton ou à l’ESREC des ______.
Cette décision indiquait notamment que, si A______ n’était pas l’auteure des faits, elle pouvait lui communiquer les coordonnées du responsable de l’infraction.
2. Par courrier non daté et reçu par la commune le 22 avril 2024, Madame A______ a contesté l’amende qui lui avait été infligée. Elle contestait fermement les allégations selon lesquelles elle aurait intentionnellement jeté un carton devant la poubelle à cartons. Elle était convaincue qu’il devait y avoir une explication rationnelle à cet incident : il était possible que quelqu’un eut utilisé son nom pour commander un colis et jeté le carton incriminé sans son consentement.
Elle sollicitait donc la bienveillance de la commune pour réexaminer l’affaire et prendre en considération son hypothèse. Dans cette optique, elle sollicitait la fourniture de toute preuve ou élément à charge dont la commune disposait, notamment les images des éventuelles caméras de surveillance.
3. La commune a répondu à Madame A______ le 30 avril 2024, indiquant que les éléments avancés ne suffisaient pas à apporter la preuve qu’elle n’avait pas déposé elle-même l’objet en question à côté des bennes.
Elle prétendait qu’une personne aurait usurpé son identité pour passer une commande auprès de C______ et que c’était elle qui aurait commis l’infraction : elle demandait ainsi la preuve qu’elle avait bel et bien dénoncé le cas auprès dudit commerçant, lequel pouvait alors lui communiquer le mode de paiement utilisé ainsi que le nom de la personne qui avait procédé à l’achat. Elle lui transmettait une photo du carton libellé à son nom, retrouvé à côté de la benne.
Un délai de 10 jours lui était octroyé pour transmettre les éléments demandés ; sans nouvelles de sa part, elle considèrerait qu’elle était l’auteure de l’infraction.
4. Par acte du 7 mai 2024, Madame A______ (ci-après : la recourante) a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), demandant qu’elle soit « reconsidérée ».
Elle était stupéfaite d’avoir reçu une amende de CHF 250.-. Elle avait vérifié ses commandes récentes et constaté qu’aucune ne correspondait aux dates concernées. Elle avait contesté son amende auprès de la commune : elle avait alors eu en ligne Madame D______, qui s’occupait des déchets, qui lui avait dit que la décision ne serait pas modifiée. La commune n’avait aucun élément pour étayer son accusation, laquelle était non seulement fausse mais aussi profondément injuste. Elle avait offert de coopérer en se faisant identifier pour accéder aux enregistrements de la caméra de surveillance située près des poubelles mais elle avait été informée que la commune ne disposait pas des enregistrements.
Cette situation lui semblait être un abus de pouvoir et était une illustration flagrante de l’injustice dont elle était victime. Rien ne pouvait justifier ce comportement, surtout que l’incident s’était produit à une extrême proximité des poubelles et qu’une simple feuille aurait pu être placée à l’intérieur sans difficulté.
5. La commune a transmis ses observations le 4 juillet 2024, concluant au rejet du recours.
Madame A______ avait commis une faute en déposant son carton hors de la benne, faute correspondant à une infraction au sens de la législation sur les déchets. Suite à la notification de l'amende, elle avait entendu plusieurs fois Madame A______, respectant ainsi son droit d'être entendu. Au fil des échanges, la recourante avait changé plusieurs fois sa version des faits, afin de tenter de justifier la présence du bulletin de commande dans le carton, tout en niant l'avoir déposé. Après avoir d'abord nié la passation d'une commande auprès de l'entreprise et émettre l'hypothèse selon laquelle quelqu'un aurait usurpé son identité pour passer commande, elle avait ensuite affirmé avoir passé une commande lors de son passage en mairie, pour enfin indiquer à Madame D______ par téléphone que la facture était peut-être tombée de sa poubelle lors d'un passage à l'écopoint, pour changer une dernière fois de version dans son recours en indiquant qu'après avoir vérifié ses commandes récentes, aucune ne correspondait aux dates en question. Par conséquent, elle n'avait pas de raison de reconsidérer sa décision, la recourante n'ayant pas pu apporter la preuve selon laquelle elle n'avait pas commis l'infraction.
La recourante avait demandé de visionner les images de vidéosurveillance. Cela n'avait pas été possible puisque celles-ci avaient été supprimées dans le délai imposé par la législation en matière de protection des données. Cela étant, le fait qu'un bulletin de livraison au nom de la recourante ait été trouvé dans le carton constituait une preuve suffisante lui permettant de lui notifier l'amende administrative contestée.
Force était malheureusement de constater que les incivilités en matière de gestion des déchets étaient fortement grandissantes et que ce phénomène était constaté dans la plupart des communes, qui mettaient tout en œuvre pour préserver l'environnement, faire respecter la législation en la matière et responsabiliser les citoyens. Lorsque la sensibilisation des citoyens au tri des déchets et la prévention en la matière ne suffisaient pas, la responsabilisation devait inévitablement passer par la notification de sanctions administratives lorsque des infractions étaient commises et constatées. Par ailleurs, en vertu du principe de l'égalité de traitement, il n'était pas envisageable pour une autorité de traiter les administrés de manière différente pour des faits semblables.
Bien qu'il fut compréhensible et humain que la recourante ait tenté de faire annuler la sanction, aucun motif ne justifiait une reconsidération de la décision. En effet, le fait que le carton déposé hors de la benne, avec le bon de livraison au nom de Madame A______, constituait une preuve suffisante sur laquelle elle pouvait se fonder pour notifier une amende administrative. La recourante, bien que niant fermement être l'auteure de l'infraction, n'en apportait pas la contre-preuve. Au contraire, le fait qu'elle ait changé plusieurs fois de versions prouvait qu'elle ne pouvait pas l'apporter. Ainsi, elle ne commettait aucun abus de pouvoir en maintenant sa décision et ne faisait qu'appliquer la loi en matière de gestion des déchets.
6. Madame A______ a répliqué le 23 juillet 2024, maintenant ses conclusions tendant à l’annulation de la décision, sous suite de frais et dépens.
Elle n’avait pas changé de version. Elle avait contrôlé ses commandes et constaté qu’aucune ne correspondait aux alentours de la date de l’infraction. Par ailleurs, elle avait reçu les images après le dépôt du recours, où son nom ne figurait toujours pas sur le carton.
Les photos produites par la commune n’étaient pas des moyens de preuve suffisants dans la mesure où la facture apparaissait à proximité d’un carton vide et entièrement ouvert. Cela pouvait être le fait de n’importe qui et ne démontrait pas que le carton lui appartenait. Ainsi, en déduire sa culpabilité sur la base d’une facture prétendument à proximité d’un carton – ce dont elle ne pouvait obtenir la preuve étant donné l’absence de vidéo-surveillance – était contraire à la bonne foi.
La photo de la facture était à moitié coupée, on ne voyait pas la date de la commande. Or, cette dernière datait d’il y avait plus de deux ans selon la pièce annexée, et elle ne pouvait croire, en recevant l’amende, qu’il s’agissait d’une facture de plus de deux ans. Cette façon de faire violait son droit d’être entendu, l’empêchant de se déterminer de manière correcte sur les faits.
En l’absence de preuve tangible, la sanction administrative était arbitraire.
7. La commune a intégralement persisté dans ses observations et conclusions dans son courrier du 30 juillet 2024.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par la commune de B______ en application de la loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999 (LGD - L 1 20) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 50 LGD).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.
Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2).
4. L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'elle ou il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/185/2020 du 18 février 2020 consid. 2b). La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer. L'objet d'une procédure administrative ne peut donc pas s'étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés.
5. Lorsque les preuves font défaut ou s’il ne peut être raisonnablement exigé de l’autorité qu’elle les recueille pour les faits constitutifs d’un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l’administré d’établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l’administration de démontrer l’existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b et les références citées).
6. La loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999 (LGD - L 1 20) a pour but de régler la gestion de l'ensemble des déchets résultant d’activités déployées sur le territoire du canton ou éliminés à Genève, à l'exclusion des déchets radioactifs ; elle constitue la loi d'application des dispositions prévues en matière de déchets par la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) et de ses ordonnances d'applications (cf. art. 1 LGD).
7. Sont qualifiés de déchets toutes les choses provenant de l'activité ménagère, artisanale, commerciale, industrielle ou agricole dont le détenteur se défait ou dont l'élimination est commandée par l'intérêt public (art. 3 al. 1 LGD), étant précisé que sont qualifiés de déchets ménagers les déchets provenant de l'activité domestique, y compris les déchets organiques devant faire l'objet de collectes sélectives (art. 3 al. 2 let. a LGD).
8. Il est interdit d'éliminer ou de déposer des déchets hors des installations publiques ou privées autorisées par le département ou des emplacements aménagés à cet effet et désignés par voie de règlement (art. 10 al. 1 LGD).
9. L'art. 16 al. 1 RGD précise que les communes sont tenues de collecter, de transporter et d'éliminer les déchets ménagers conformément au plan cantonal de gestion des déchets.
Selon l'art. 17 RGD, ces dernières peuvent édicter des règlements communaux sur le bon fonctionnement de leurs infrastructures de collecte et sur leur gestion des déchets ménagers (al. 1), ces règlements pouvant prévoir les sanctions et les mesures prévues par la loi (al. 2).
10. Le règlement édicté par la commune de B______ relatif à la gestion des déchets du 1er décembre 2020 (LC 06 911) (ci-après : le règlemnt) fixe les modalités de la collecte, du transport et de l'élimination des déchets urbains sur son territoire (cf. art. 1 al. 1).
11. À teneur de l'art. 5 al. 1 du règlement, les tournées de ramassage et les postes de collecte des déchets sont à la disposition exclusive des résidents de la commune.
L'art. 9 du règlement prévoit que le service technique communal s’accorde le droit de rechercher les personnes ayant déposé des déchets ne répondant pas aux critères de ramassage, en dehors des levées régulières, à des emplacements non prévus à cet effet ou en dehors des bennes. Une amende administrative sera adressée aux contrevenants, conformément au chapitre VI du présent règlement.
12. L'art. 15 al.1 du règlement précise que les points de récupération des déchets sont strictement réservés aux ménages bellevistes (particuliers).
Les points de récupération sont placés sous la surveillance du service technique communal et de la police municipale (al. 2).
Des caméras de surveillance peuvent être installées à proximité des déchetteries, pour en assurer la sécurité, prévenir des dépréciations et veiller à la bonne application du Règlement. L’accès aux images est régi par l’art. 24 de la loi sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles du 5 octobre 2001 (LIPAD ‑ A 2 08) (al. 3).
13. Enfin, selon l'art. 28 al. 1 du règlement, est passible d’une amende administrative de CHF 200.- à CHF 400'000.- tout contrevenant à la LGD et au RGD (let. a), au présent règlement (let. b), aux ordres donnés par le Conseil administratif, un employé du service technique communal ou la police municipale en application de la LGD, du RGD et du présent règlement communal (let. c).
Il est tenu compte, dans la fixation de l’amende, notamment du degré de gravité de l’infraction et du cas de récidive (al. 2).
14. Selon la jurisprudence constante, les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions, pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C'est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (cf. not, ATA/1472/2017 du 14 novembre 2017 ; ATA/313/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/263/2016 du 22 mars 2016; ATA/163/2014 du 18 mars 2014 ; ATA/74/2013 du 6 février 2013).
15. En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG – E 4 05), les art. 1 à 110 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP – RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif aux infractions prévues par la législation genevoise, sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal, comme notamment les art. 34ss, 42ss, 56ss, 74ss, 106 al. 2 et 3 et 107 CP (not. ATA/1472/2017 du 14 novembre 2017 ; ATA/313/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/824/2015 du 11 août 2015 ; ATA/886/2014 du 11 novembre 2014 ; ATA/791/2013 du 3 décembre 2013).
Il est ainsi en particulier nécessaire que le contrevenant ait commis une faute (cf. not. ATA/1472/2017 du 14 novembre 2017 ; ATA/124/2016 du 9 février 2016 ; ATA/886/2014 du 11 novembre 2014 ; ATA/147/2014 du 11 mars 2014).
16. L'autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d'une sanction doit faire application des règles contenues aux art. 47ss CP (principes applicables à la fixation de la peine). La culpabilité doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle, ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure (cf. ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 ; 134 IV 17 consid. 2.1 ; 129 IV 6 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_28/2016 du 10 octobre 2016 consid. 5.1 ; 6B_1276/2015 du 29 juin 2016 consid. 2.1 ; cf. aussi ATA/124/2016 du 9 février 2016 ; ATA/1305/2015 du 8 décembre 2015 ; ATA/824/2015 du 11 août 2014 ; ATA/791/2013 du 3 décembre 2013 ; ATA/74/2013 du 6 février 2013) et ses capacités financières (cf. ATA/719/2012 du 30 octobre 2012 ; G. STRATRENWERTH, Schweizerisches Strafrecht - Allgemeiner Teil II : Strafen une Massnahmen, 2ème éd., 2006, p. 75 § 75 S. CHIMICHELLA, Die Geldstrafe in Schweizer Strafrecht, 2006, p. 39).
17. L’amende doit faire l’objet d’une évaluation globale, dans laquelle l’autorité administrative qui sanctionne - partant le juge qui contrôle sa décision - doit prendre en compte, dans un calcul d’ensemble, la nature, la gravité et la fréquence des infractions (ATA/886/2014 du 11 novembre 2014 ; ATA/558/2013 du 27 août 2013 ; Günter STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrecht - Allgemeiner Teil II : Strafen und Massnahmen, 2ème éd., 2006, p. 75 § 75 ; Sandro CHIMICHELLA, Die Geldstrafe in Schweizer Strafrecht, 2006, p. 39).
18. Enfin, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité garantie par l'art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101 ; ATA/313/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/871/2015 du 25 août 2015 ; ATA/824/2015 du 11 août 2015), lequel commande que la mesure étatique soit nécessaire et apte à atteindre le but prévu et qu'elle soit raisonnable pour la personne concernée (cf. ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2 ; 139 I 218 consid. 4.3).
19. En l’espèce, la commune reproche à la recourante d’avoir déposé un carton libellé à son nom à l’écopoint de la Roselière et lui a infligé une amende de CHF 250.-. Elle retient que la facture de la C______ se trouvait dans le carton. A l’appui de ses allégations, elle produit deux photos, soit celle d’un carton déplié ne portant aucune inscription/logo d’une entreprise, déposé à côté d’une benne et une autre d’une partie d’une facture de la C______ sur laquelle apparaissent le nom de la recourante et des numéros de référence ; aucune date n’est visible et il n’est pas possible de déterminer l’environnement dans lequel la photo a été prise.
La recourante conteste avoir déposé le carton en dehors des bennes et produit une copie de la facture de la C______, laquelle date du 22 juillet 2022 et porte les mêmes numéros de référence.
En analysant les pièces du dossier, le tribunal arrive à la conclusion qu’il n’est pas possible de déterminer avec certitude, sur la base des photos produites par la commune, que la facture photographiée se trouvait bel et bien dans le carton incriminé. Il ne peut pas non plus être retenu que le carton incriminé était libellé au nom de la recourante puisque sur la photo il est vierge de toute inscription. Ainsi, il est tout à fait envisageable que la facture se soit retrouvée à proximité du carton sans toutefois être en lien avec ce dernier.
Au vu de ce qui précède, la commune a échoué à apporter la preuve formelle que le carton a bien été jeté par la recourante en dehors de la benne. Dès lors, la culpabilité de la recourante n’a pas été démontrée à satisfaction de droit par la commune et il conviendra donc d’admettre le recours et d’annuler la décision litigieuse.
20. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante qui obtient gain de cause, est dispensée du paiement d’un émolument. L’avance de frais de CHF 150.- versée à la suite du dépôt du recours lui sera restituée.
21. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée, la recourante n’y ayant pas conclu (art. 87 al. 2 LPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 8 mai 2024 par Madame A______ contre la décision de la commune de B______ du 11 avril 2024 ;
2. l'admet ;
3. renonce à percevoir un émolument et ordonne la restitution à Madame A______ de l’avance de frais de CHF 150.- ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Siégeant : Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Loïc ANTONIOLI et Damien BLANC, juges assesseurs.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Sophie CORNIOLEY BERGER
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
| La greffière |