Skip to main content

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/3458/2023

JTAPI/295/2024 du 05.04.2024 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

Normes : LEI.27; OASA.23.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3458/2023

JTAPI/295/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 avril 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Magali BUSER, avocate, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 2003, est ressortissant du Sénégal.

2.             Par décision du 31 août 2022, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a refusé de lui octroyer une autorisation de séjour en application des dispositions légales relatives au regroupement familial et au cas individuel d’extrême gravité. En outre, son renvoi de Suisse était prononcé.

3.             Dans le cadre du recours qu'il a déposé contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (cause A/3242/2022), M. A______ a expliqué en substance que lors de son arrivée à Genève, il avait vécu auprès de sa mère avec ses deux demi-frère et sœur et s'était immédiatement intégré socialement et scolairement en démontrant une excellente progression. Il allait prochainement effectuer des stages afin de préparer un projet professionnel. Il s’était par ailleurs créé un vrai cercle social. Par ailleurs, il était né d’une relation hors mariage, ce en raison de quoi il avait toujours été chassé et battu par sa propre famille. Seul son père, chez qui il avait vécu dans un premier temps, puis son grand-oncle, l’avaient accueilli. Son père était cependant décédé en 2008 et son grand-oncle en 2021, de sorte qu’il n’avait plus aucune attache dans son pays d’origine. De plus, comme il s’était occupé de son grand-oncle malade, il n'avait pas pu terminer son cursus scolaire au Sénégal. Il était tout juste âgé de 19 ans et en cas de renvoi dans son pays, il se retrouverait sans aucune formation. Dans ces conditions, il était certain qu'il ne pourrait pas se réinsérer et qu'il se retrouverait dans une situation plus que précaire.

4.             Par jugement du 2 mai 2023 (JTAPI/478/2023), le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) a rejeté le recours de M. A______. Ce jugement fait l'objet d'un recours pendant devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

5.             Par requête du 2 juin 2023, sous la plume de son conseil, M. A______ s'est adressé à l'OCPM en vue de la délivrance d'une autorisation de séjour pour études. Depuis son arrivée à B______, il était scolarisé à C______, accueil de l'enseignement secondaire II. Très impliqué dans ses études, il avait démontré une excellente progression en réalisant de très bonnes notes. La doyenne de son école avait relevé qu'il était un élève régulier, assidu et intéressé. Il était par ailleurs intéressé par les métiers manuels et par la nature et soucieux d'acquérir une formation professionnelle de qualité qu'il puisse utiliser ensuite au Sénégal. Il avait ainsi été admis en première année à l'Ecole d'horticulture de D______ en vue d'une attestation fédérale de formation professionnelle (AFP). Cette formation durerait deux ans et lui permettrait de retourner au Sénégal afin de développer sa propre entreprise, une fois qu'il aurait acquis les connaissances de base. Actuellement, il ne disposait d'aucune formation lui permettant d'acquérir une indépendance au Sénégal. Cela étant, s'il obtenait d'excellents résultats, il pourrait également envisager d'accéder à un complément de formation pour obtenir le certificat fédéral de capacité d'horticulteur. Cette formation, d'une durée supplémentaire de deux ans, était également organisée par l'Ecole d'horticulture. Quoi qu'il en soit, il s'engageait d'ores et déjà à quitter la Suisse au terme de sa formation initiale de deux ans. Sur le plan financier, il était intégralement pris en charge par sa mère, laquelle s'engageait à poursuivre cette prise en charge jusqu'au terme des études de son fils. Elle réalisait un revenu mensuel net de CHF 3'670.-, n'émargeait pas à l'Hospice général et n'avait pas de dettes. En conclusion, il était primordial pour son avenir professionnel qu'il puisse effectuer la formation susmentionnée en Suisse. Au vu de son âge et du fait qu'il était sorti du parcours scolaire au Sénégal plus de trois ans auparavant, il ne pouvait pas poursuivre et mener à terme une formation dans ce pays. Une formation d'horticulteur lui permettrait de travailler au Sénégal et d'y construire son avenir.

M. A______ a produit plusieurs pièces à l'appui de sa requête.

6.             Informé par l'OCPM de l'intention de cette autorité de refuser sa demande d'autorisation de séjour pour étude, M. A______ a précisé, par courrier du 24 juillet 2023, qu'il était originaire d'un petit village reculé et faisait partie d'une communauté qui n'était pas soutenue par le gouvernement. Il portait sur le visage des marques de scarifications bannies par le gouvernement et qu'il ne pouvait pas cacher. Par conséquent, il ne serait pas en mesure d'intégrer une école professionnelle comme celle de D______, ces dernières se trouvant exclusivement à Dakar, où il ne pourrait se rendre sans subir des discriminations.

7.             Par décision du 19 septembre 2023, l'OCPM a refusé d'octroyer à M. A______ une autorisation de séjour pour études. Il ne remplissait pas toutes les conditions légales pour la délivrance d'une telle autorisation, s'agissant en particulier du critère des qualifications personnelles. Sous cet angle, il fallait relever la présence à B______ de sa mère et de ses demi-frères et sœurs, ainsi que le fait qu'une demande de regroupement familial auprès de sa mère lui avait déjà été refusée. Ceci conduisait à penser que sa demande d'autorisation de séjour pour études pourrait viser en premier lieu à éluder les prescriptions sur les conditions d'admission en Suisse afin de pouvoir y séjourner durablement. Dès lors, sa sortie de ce pays au terme de sa formation n'était pas suffisamment garantie.

Par ailleurs, sous l'angle de l'opportunité, la nécessité qu'il suive une formation d'horticulteur en Suisse, plutôt que de poursuivre sa formation au Sénégal, n'était pas démontrée à satisfaction. Il n'avait pas été démontré en quoi l'obtention de cette formation en Suisse lui serait plus utile au retour au Sénégal que l'obtention d'un diplôme équivalent délivré dans son pays d'origine. Aucun élément ne permettait de retenir qu'il ne pouvait pas suivre une formation équivalente au Sénégal. Enfin, sa mère pouvait continuer à le prendre en charge pendant ses études au Sénégal afin qu'il ne se retrouve pas dans ce pays dans une situation précaire.

8.             Par acte du 20 octobre 2023, M. A______ a recouru auprès du tribunal contre cette décision en concluant à son annulation et à ce qu'il soit mis au bénéfice d'une autorisation de séjour pour études ou, subsidiairement, à ce que la cause soit renvoyée à l'OCPM pour nouvelle décision en ce sens.

L'OCPM s'était trompé en considérant qu'il n'avait pas démontré la nécessité de suivre sa formation en Suisse. Il avait au contraire indiqué, preuves à l'appui, que cette formation ne durerait que deux ans et lui permettrait d'obtenir une attestation fédérale de formation professionnelle horticulteur avec orientation au paysagisme. Cette attestation lui permettrait de retourner au Sénégal afin de développer sa propre entreprise. Actuellement, il ne disposait d'aucune formation lui permettant d'acquérir une indépendance professionnelle dans son pays d'origine et par conséquent, il s'y retrouverait dans une situation plus que précaire. Il avait également expliqué que cette possibilité de formation, adaptée à son niveau, n'existait pas au Sénégal. À peine majeur et sorti du parcours scolaire au Sénégal trois ans auparavant, il n'était pas en mesure de poursuivre et de mener à terme une formation dans ce pays.

Quant au fait qu'il n'existait pas une garantie suffisante qu'il quitte le territoire suisse au terme de sa formation, il avait expliqué qu'après son apprentissage, il aurait toutes les chances de trouver un emploi au Sénégal et de pouvoir ainsi subvenir à ses besoins de manière autonome. Il s'était engagé sur l'honneur à quitter la Suisse au terme de sa formation. Il avait mis toute son énergie dans sa formation, dans laquelle il s'investirait entièrement. Il n'y avait donc pas lieu de douter de l'honnêteté de son engagement. En considérant l'ensemble de sa situation et notamment son excellente intégration, sa motivation à bien faire et à réussir, il serait arbitraire de déduire du seul fait de la procédure en cours pour cas de rigueur, que sa sortie de Suisse ne serait pas suffisamment garantie. Ce faisant, l'OCPM avait versé dans l'arbitraire. Un tel point de vue reviendrait à exclure systématiquement toutes les demandes d'autorisation de séjour pour études d'étrangers ayant un séjour antérieur ou une procédure de demande antérieure. Il suivait actuellement les cours de l'Ecole de D______ où, pièce à l'appui, il était considéré comme un bon élève, tant en pratique qu'en théorie.

9.             Par écritures du 19 décembre 2023, l'OCPM a répondu au recours en concluant à son rejet. À teneur des dispositions légales relatives aux qualifications personnelles requises, celles-ci étaient suffisantes notamment lorsqu'aucun séjour antérieur, aucune procédure de demande antérieure ni aucun autre élément n'indiquait que la formation invoquée visait uniquement à éluder les prescriptions générales sur l'admission et le séjour des étrangers. En l'espèce, M. A______ était arrivé en Suisse avec un visa de tourisme en ayant l'intention de s'installer définitivement dans ce pays auprès de sa mère. Il avait déposé sa demande d'autorisation de séjour pour études parallèlement à une procédure contentieuse en cours concernant l'octroi d'un titre de regroupement familial et subsidiairement d'un permis de séjour pour cas individuel d'extrême gravité. Ces circonstances permettaient de conclure que le but principal du séjour n'était pas de suivre temporairement des études en Suisse.

10.         Par décision du 23 janvier 2024, la chambre administrative a suspendu l'instruction de la procédure pendante devant elle dans la cause A/3______, dans l'attente de l'issue de la présente procédure (ATA/4______).

11.         M. A______ a répliqué par écritures du 5 février 2024. L'OCPM ne tenait pas compte du fait qu'il avait déposé sa demande d'autorisation de séjour le 2 juin 2023 parce qu'il avait été admis au sein du Centre de formation professionnelle nature et environnement de D______ le 27 avril 2023. Cette admission constituait un fait nouveau ouvrant la voie de l'autorisation de séjour pour études. Évidemment, s'il avait obtenu un permis de séjour pour cas de rigueur, il n'aurait pas eu besoin de déposer une demande d'autorisation de séjour pour études. Il s'agissait néanmoins du seul lien existant entre ces deux demandes. En réalité, elles étaient toutes deux indépendantes l'une de l'autre et l'on ne pouvait suivre l'argumentation de l'OCPM sur le fait qu'il tentait d'éluder les prescriptions de droit des étrangers plus stricts liés au regroupement familial et au cas individuel d'extrême gravité. Comme il l'avait déjà exprimé, un tel raisonnement reviendrait à exclure systématiquement les demandes d'étrangers ayant un séjour antérieur ou une procédure de demande antérieure, ce qui était contraire au principe d'égalité de traitement.

12.         La décision litigieuse violait en outre le principe de la bonne foi, étant donné que c'était le département de l'instruction publique, soit une autorité genevoise, qui l'avait admis au sein de l'Ecole d'horticulture, faisant naître en lui l'espoir qu'une autorisation de séjour pour suivre ses études lui serait ensuite délivrée par l'OCPM.

13.         Enfin, la décision litigieuse était disproportionnée dans la mesure où les études entreprises ne dureraient que deux ans, en lui permettant d'acquérir une autonomie professionnelle. À ce jour, il avait déjà effectué plus de la moitié de la première année, ce qui correspondait à l'achèvement de 25 % de son cursus.

14.         Par courrier du 19 février 2024, l'OCPM a indiqué n'avoir pas d'observations complémentaires à formuler.

 

 

 

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             À teneur de l’art. 27 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), un étranger peut être admis en vue d’une formation ou d’une formation continue aux conditions suivantes :

-          la direction de l’établissement confirme qu’il peut suivre la formation ou la formation continue envisagées (let. a) ;

-          il dispose d’un logement approprié (let. b) ;

-          il dispose des moyens financiers nécessaires (let. c) ;

-          il a le niveau de formation et les qualifications personnelles requises pour suivre la formation ou la formation continue prévues (let. d).

4.             Les qualifications personnelles (art. 27 al. 1 let. d LEI) sont suffisantes notamment lorsqu'aucun séjour antérieur, aucune procédure de demande antérieure ni aucun autre élément n'indiquent que la formation ou la formation continue invoquée vise uniquement à éluder les prescriptions générales sur l'admission et le séjour des étrangers (art. 23 al. 2 OASA).

5.             Suite à la modification de l’art. 27 LEI, entrée en vigueur le 1er janvier 2011 (RO 2010 5957 ; FF 2010 373, notamment p. 391), l’absence d’assurance de départ de Suisse de l’intéressé au terme de sa formation ne constitue plus un motif justifiant à lui seul le refus de délivrance d’une autorisation de séjour pour études (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-4647/2011 du 16 novembre 2012 consid. 5.4 ; C-7924/2010 du 7 mars 2012 consid. 6.3.1). Néanmoins, cette exigence subsiste en vertu de l’art. 5 al. 2 LEI, à teneur duquel tout étranger qui effectue un séjour temporaire en Suisse, tel un séjour pour études, doit apporter la garantie qu’il quittera la Suisse à l’échéance de celui-là (ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 6 ; ATA/103/2014 du 18 février 2014 ; ATA/718/2013 du 29 octobre 2013 ; ATA/690/2013 du 15 octobre 2013). L’autorité la prend en considération dans l’examen des qualifications personnelles requises au sens des art. 27 al. 1 let. d LEI et 23 al. 2 OASA (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-2333/2013 ; C-2339/2013 du 28 octobre 2014 consid. 7.2.2 ; C-2291/2013 du 31 décembre 2013 consid 6.2.1 ; C-4733/2011 du 25 janvier 2013 consid 6.3 ; ATA/269/2014 du 15 avril 2014).

Lors de l’examen des qualifications personnelles, aucun indice ne doit par conséquent porter à croire que la demande poursuivrait pour objectif non pas un séjour temporaire en vue de suivre la formation, mais en premier lieu d’éluder les prescriptions sur les conditions d’admission en Suisse afin d’y séjourner durablement. Aussi convient-il de tenir notamment compte, lors de l’examen de chaque cas, des circonstances suivantes : situation personnelle du requérant (âge, situation familiale, formation scolaire préalable, environnement social), séjours ou demandes antérieurs, région de provenance (situation économique et politique, marché du travail indigène pour les diplômés des hautes écoles) (cf. directives LEI, ch. 5.1.1.1).

6.             Les conditions posées par l’art. 27 al. 1 LEI étant cumulatives, une autorisation de séjour pour l’accomplissement d’une formation ne saurait être délivrée que si l’étudiant étranger satisfait à chacune d’elles (cf. not. arrêt du Tribunal administratif fédéral C-1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 5.3 ; ATA/709/ 2016 du 23 août 2016 consid. 5a).

Cela étant, même dans l’hypothèse où toutes ces conditions sont réunies, l’étranger n’a pas un droit à la délivrance d’une autorisation de séjour, à moins qu’il ne puisse se prévaloir d’une disposition particulière du droit fédéral ou d’un traité lui conférant un tel droit (cf. ATF 135 II 1 consid. 1.1 et la jurisprudence citée ; cf. également arrêts du Tribunal fédéral 2C_167/2015 du 23 février 2015 consid. 3 ; 2C_1032/2014 du 15 novembre 2014 consid. 3 ; 2D_28/2009 du 12 mai 2009), ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Autrement dit, l’autorisation doit être refusée lorsque ces conditions ne sont pas remplies, mais lorsqu’elles le sont, l’autorité n’en dispose pas moins d’un large pouvoir d’appréciation pour statuer sur la requête, dont elle est tenue de faire le meilleur exercice en respectant les droits procéduraux des parties (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-7279/2014 du 6 mai 2015 consid. 7.1 ; C-6582/2013 du 12 août 2014 consid. 7.1 ; C-5485/2013 du 23 juillet 2013 consid. 5.3 ; C-1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 5.3).

Conformément à l’art. 96 LEI, il convient de procéder à une pondération globale de tous les éléments en présence afin de décider de l’octroi ou non de l’autorisation de séjour pour études (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-517/2015 du 20 janvier 2016 consid. 7.2 ; C-5718/2013 du 10 avril 2014 ; C-3139/2013 du 10 mars 2014 consid. 7.2 ; C-2291/2013 du 31 décembre 2013 consid. 7.2 ; cf. aussi ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 8).

7.             Lors de l’admission d’étrangers, l’évolution sociodémographique de la Suisse est prise en considération (cf. art. 3 al. 3 LEI). La Suisse ne peut accueillir tous les étrangers qui désirent y séjourner, que ce soit pour des séjours de courte ou de longue durée, raison pour laquelle la jurisprudence considère qu’il est légitime d’appliquer une politique restrictive d’admission (cf. ATF 122 II 1 consid. 3a ; cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral C-1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 6.1 ; ATA/677/2015 du 23 juin 2015 consid. 6a).

Compte tenu du grand nombre d’étrangers qui demandent à être admis en Suisse en vue d’une formation ou d’un perfectionnement, les conditions d’admission fixées à l’art. 27 LEI, de même que les exigences en matière de qualifications personnelles et envers les écoles (art. 23 et 24 OASA), doivent être respectées de manière rigoureuse. Il y a lieu de tout mettre en œuvre pour empêcher que les séjours autorisés au motif d’une formation ou d’un perfectionnement ne soient exploités de manière abusive afin d’éluder des conditions d’admission plus sévères (directives LEI, ch. 5.1 ; cf. aussi ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 7).

8.             En l'espèce, la décision litigieuse se fonde à la fois sur le fait que le recourant n'aurait pas les qualifications requises au sens des art. 27 al. 1 let. d LEI et 23 al. 2 OASA – dont le contenu a été rappelé plus haut – et, sous l'angle du pouvoir d'appréciation de l'autorité intimée, sur le fait que le recourant pourrait tout aussi bien suivre dans son pays d'origine la formation qu'il a entamée en Suisse.

9.             S'agissant du premier point, l'autorité intimée n'a fait qu'appliquer à bon escient l'art. 23 al. 2 OASA. En effet, il convient de ne pas oublier que, dans le cadre de la procédure judiciaire A/3______, le recourant a détaillé devant le tribunal de céans les raisons pour lesquelles il était selon lui tout à fait inenvisageable qu'il doive quitter la Suisse et celles pour lesquelles il était tout aussi inenvisageable qu'il puisse se réintégrer au Sénégal. Dans ces conditions, il est tout à fait logique de considérer, comme l'a fait l'autorité intimée dans la décision litigieuse, que la demande d'autorisation de séjour pour études formulée par le recourant s'inscrit dans le cadre des circonstances qui, selon l'art. 23 al. 2 OASA, excluent l'octroi d'une telle autorisation. C'est toutefois en vain que le recourant soutient qu'une telle argumentation reviendrait à exclure systématiquement des requêtes, puisque l'art. 23 al. 2 OASA permet d'apprécier de telles circonstances, qui peuvent varier d'une situation à l'autre et permettre, exceptionnellement, de retenir que la formation visée en Suisse n'a pas essentiellement pour but d'éluder des prescriptions plus strictes sur le séjour en Suisse.

Le recourant soutient en outre qu'il n'y a pas de lien entre, d'une part, sa demande d'autorisation de séjour pour regroupement familial et pour cas individuel d'extrême gravité et, d'autre part, sa demande d'autorisation de séjour pour études. La preuve du contraire réside dans le fait qu'encore aujourd'hui, tout en affirmant dans le cadre de la présente procédure qu'il s'engage à quitter la Suisse au terme de ses études, il maintient parallèlement devant la chambre administrative un litige dans le cadre duquel il a expliqué qu'il avait désormais entièrement recréé son centre de vie en Suisse et qu'un départ de ce pays était inenvisageable. Quant au fait que son admission auprès du Centre de formation professionnelle nature et environnement de D______ le 27 avril 2023 serait un fait nouveau qui l'aurait en quelque sorte logiquement amené à déposer sa demande d'autorisation de séjour pour études, le recourant inverse l'ordre des choses, puisque cette admission découle elle-même des démarches qu'il a faites au préalable à cette fin, toujours vraisemblablement dans le but d'éviter de devoir quitter la Suisse.

10.         Le recourant reproche également à l'autorité intimée, cette fois sous l'angle de l'exercice de son pouvoir d'appréciation, d'avoir considéré qu'il pouvait se former au Sénégal, alors qu'il serait en réalité victime de discrimination de la part du gouvernement en raison de ses origines communautaires, l'empêchant ainsi d'avoir accès aux écoles qui, à E______, dispensent un enseignement comparable à celui du Centre de formation professionnelle nature et environnement de D______. À cet égard, le tribunal relèvera tout d'abord que, dans le cadre de cette argumentation, le recourant admet l'existence d'écoles dispensant, au moins à E______, une formation telle que celle qu'il souhaite suivre en Suisse. Ensuite, le recourant ne fait qu'alléguer, sans chercher d'aucune manière à le rendre vraisemblable, qu'il pourrait faire l'objet de discrimination empêchant son inscription auprès de l'une de ces écoles. Il échoue par conséquent à démontrer que l'autorité intimée aurait abusé de son pouvoir d'appréciation. À cela s'ajoute que, dans la mesure où le recourant ne bénéficie pour l'heure que d'une formation scolaire générale lui ouvrant indifféremment la porte à une multitude de choix pour la suite de ses études ou pour une formation professionnelle, la question n'est pas restreinte au fait de savoir s'il pourrait trouver au Sénégal une école comparable au Centre de formation professionnelle nature et environnement de D______, mais s'il pourrait accéder à des études ou une formation professionnelle lui permettant de devenir financièrement autonome. Sous cet angle, on ne saurait admettre quoiqu'il en soit que le recourant se trouverait au Sénégal devant des difficultés particulières pour trouver une solution adaptée, ce d'autant que, comme relevé par l'autorité intimée, il pourra disposer dans son pays d'origine du soutien financier que sa mère serait prête à lui apporter s'il demeurait en Suisse.

11.         Le recourant critique également la décision litigieuse sous l'angle du principe de la bonne foi, arguant du fait que le département de l'instruction publique aurait fait naître en lui l'espoir de pouvoir suivre sa formation en Suisse. Cet argument est à la limite de la témérité et sera rejeté sans plus ample examen, le recourant étant assisté d'un Conseil parfaitement versé dans le domaine du droit des étrangers et qui n'ignore donc pas qu'une admission d'un ressortissant étranger dans n'importe quelle école en Suisse reste subordonnée à l'octroi d'une autorisation de séjour pour études.

12.         Enfin, le recourant considère que la décision litigieuse est disproportionnée, dès lors que ses études ne dureraient que deux ans et qu'il en aurait déjà accompli un quart. Ce grief ne tient pas compte du fait que le principe de la proportionnalité ne s'applique que pour autant que la loi laisse à l'autorité compétente un pouvoir d'appréciation dans le cadre duquel elle effectue une pesée des intérêts publics et privés en présence. Or, en l'occurrence, comme vu ci-dessus, l'une des conditions légales cumulatives permettant à l'autorité intimée d'exercer ce pouvoir d'appréciation n'est pas réalisée. Ce grief devra donc lui aussi être écarté.

13.         Intégralement non fondé, le recours sera rejeté.

14.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais de même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

15.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 20 octobre 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 19 septembre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière