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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2544/2022

JTAPI/821/2022 du 12.08.2022 ( MC ) , ANNULE

Descripteurs : MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION
Normes : LEI.76.al1.letb; LEI.80; LEI.96
En fait
En droit
Par ces motifs

 

 

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2544/2022 MC

JTAPI/821/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 12 août 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Luca MINOTTI, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1994 est originaire du Nicaragua.

2.             Le 2 novembre 2018, M. A______ a déposé une demande de permis de séjour pour études dans laquelle il s'est engagé formellement et irrévocablement à quitter la Suisse au terme de ses études et au plus tard à la fin du mois de juin 2022.

3.             Par courrier du 3 avril 2019, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a informé M. A______ de son intention de refuser de lui octroyer une autorisation de séjour pour études et de prononcer son renvoi de Suisse.

4.             Par décision du 27 mai 2019, l'OCPM a refusé de délivrer à M. A______ une autorisation de séjour pour études et a prononcé son renvoi de Suisse en application de l'art. 64 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Un délai au 25 juillet 2019 lui était imparti pour quitter le territoire helvétique.

5.             Par courrier du 24 août 2021, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser d'accéder à sa requête de régularisation de ses conditions de séjour réceptionnée le 27 juillet 2021, de soumettre son dossier avec préavis positif au secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après : SEM) et de son intention de prononcer son renvoi de Suisse.

6.             Le 9 août 2021, il s'est vu notifier une interdiction d'entrée dans le territoire helvétique prononcée par le SEM le 30 juin 2021 et valable jusqu'au 29 juin 2024.

7.             Par décision du 3 novembre 2021, l'OCPM a refusé d'accéder à la requête de M. A______ du 27 juillet 2021 et de soumettre son dossier avec un préavis positif au SEM. Il a prononcé son renvoi de Suisse et lui a imparti un délai au 3 janvier 2022 pour ce faire.

8.             Le 3 décembre 2021, M. A______ a déposé un recours au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre la décision du
3 novembre 2021 de l'OCPM refusant d'accéder à sa demande de régularisation de séjour en Suisse.

9.             Par jugement du tribunal du 7 janvier 2022 dans la cause A/1______ (JTAPI/8/2022), le recours déposé par M. A______ a été déclaré irrecevable faute de paiement de l’avance de frais dans le délai imparti. Un émolument de jugement de CHF 250.- a été mis à la charge de M. A______.

10.         Par arrêt du 22 février 2022 de la chambre administrative de la Cour de justice (ATA/186/2022), le recours du 1er février 2022 déposé par M. A______ contre le jugement du tribunal du 7 janvier 2022 a été déclaré recevable et a été rejeté par ladite chambre. Au préalable, une demande d’avance de frais de CHF 400.- a été adressée à M. A______ le 4 février 2022.

11.         Par courrier du 9 mars 2022, M. B______ a informé l’OCPM que
M. A______ ne vivait plus à son adresse depuis le 1er mars 2022.

12.         Déclaré disparu, le 9 mai 2022, l'OCPM a requis que M. A______ soit inscrit au RIPOL, afin qu'il soit interpellé, dans le but de le renvoyer dans son pays d'origine.

13.         Le 10 août 2022, M. A______ a été interpellé par le Corps des gardes-frontières à la route de Jussy 55, à Thônex, en raison de l'interdiction d'entrée en Suisse et de l’inscription RIPOL dont il faisait l'objet.

14.         Lors de son audition du même jour, M. A______ a reconnu savoir faire l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse. Il avait fait une demande d'autorisation de séjour il y a deux ans, laquelle était toujours en cours de traitement. Il vivait en sous-location avec sa mère à C______, à Vernier. Cette dernière l’aidait également à subvenir à ses besoins.

15.         Prévenu d'infractions à la LEI, il a été mis à disposition du Ministère qui a prononcé à son encontre une condamnation pour les faits ayant conduit à son arrestation.

16.         Le 11 août 2022, à 16h40, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de quatre semaines. Il faisait l’objet d’une décision de renvoi définitive et exécutoire ainsi que d’une interdiction d’entrée en Suisse prononcée par le SEM et valable jusqu’au 29 juin 2024. De plus, depuis le 1er mars 2022, il avait disparu sans laisser d’adresse ce qui avait conduit à son inscription au RIPOL. Il était ainsi permis de considérer qu’il entendait se soustraire à son refoulement au Nicaragua et son comportement permettait de penser qu’il refuserait d’obtempérer aux instructions des autorités.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi au Nicaragua, dans la mesure où il n’avait plus de famille dans ce pays et qu’il s’était habitué à vivre en Suisse.

17.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au tribunal le même jour.

18.         Entendu ce jour par le tribunal, M. A______ a déclaré avoir compris que la décision du commissaire de police concernait son éventuel renvoi dans son pays d'origine. Il savait qu’il était en situation irrégulière en Suisse.

Contrairement à ce qu’il avait indiqué aux gardes-frontières lors de son audition, il ne vivait plus à C______ à l’adresse de M. B______ mais à D_______, 12__ Genève. Il vivait toujours avec sa mère et sa sœur. Ces dernières avaient régularisé leur situation en Suisse et reçu un permis de séjour. Lui-même n’avait pas informé l’OCPM du changement d’adresse mais sa mère l’avait fait pour elle-même mais également pour son compte et celui de sa sœur. Il ne se rappelait plus à quelle date elle avait fait cette annonce mais il avait le souvenir d’avoir signé un courrier à ce sujet préparé par sa mère. Il recevait du courrier à cette nouvelle adresse. Il avait reçu une demande de paiement pour des frais de CHF 400.-, qu’il avait réglée. Puis, dernièrement, probablement la semaine dernière, il avait reçu une nouvelle facture pour des frais de CHF 250.-, qu’il avait également réglée. Dans la mesure où il s’agissait de demandes de paiement de frais de la part du Pouvoir judiciaire, il partait du principe que l'Etat connaissait son adresse.

Il avait été informé des démarches entreprises par l'OCPM pour trouver un vol de ligne à destination de son pays d'origine. Il acceptait cette décision mais n'en était pas pour autant d'accord, dans la mesure où sa famille se trouvait en Suisse et disposait d'un permis de séjour. Il n'avait plus de contacts avec le reste de sa famille au Nicaragua, celle-ci ayant fui au Costa Rica. S'agissant de son oncle, propriétaire d'une pharmacie, lorsqu’il avait fait sa demande de permis d'étudiant, à l'époque il pensait effectivement pouvoir travailler dans son commerce avec lui. Toutefois, par la suite, son pays avait rencontré des problèmes politiques qu’il avait exposés dans son courrier à l'OCPM de sorte qu’il ne pouvait plus retourner dans son pays. D'ailleurs, son oncle avait également quitté le Nicaragua pour rejoindre l'Espagne avec son épouse. Il avait encore quelques amis d'école au Nicaragua, mais certains étaient également partis. Il n’avait plus de contacts avec eux.

Il n’avait pas déposé de demande d’asile en Suisse car on ne lui avait jamais vraiment expliqué en quoi cela consistait. Il ne savait d’ailleurs pas où se diriger.

Depuis qu’il était arrivé en Suisse, il avait toujours voulu travailler. Il avait par ailleurs trouvé une entreprise qui était d'accord de l'employer et qui l'avait encouragé à déposer une demande de permis de séjour. Il avait toujours essayé de trouver une solution pour avoir un permis de séjour, comme sa mère et sa sœur dont la situation avait été régularisée. Il ne parlait pas le français lorsqu’il était arrivé en Suisse et avait suivi tous les cours possibles auprès d’écoles gratuites et avec l'aide de sa sœur, pour apprendre la langue et s'intégrer.

S’il était libéré de sa détention administrative, il était d’accord de prendre le vol qui avait été réservé pour lui le 19 août prochain.

La représentante du commissaire de police a plaidé et conclu à la confirmation de la mise en détention administrative de M. A______. Il faisait l’objet d’une décision de renvoi définitive et exécutoire. De même, deux délais pour quitter le territoire suisse lui avaient été impartis, ce qu’il n’avait pas fait. Il n’était donc pas autorisé à rester en Suisse. Un vol à destination de son pays d’origine avait été réservé pour le 19 août 2022 et la détention prendrait fin ce jour-là. Dans un premier temps il avait expliqué qu’il ne souhaitait pas partir avant de dire le contraire de sorte qu’il y avait un risque qu’il se soustraie à la mesure.

Le conseil de M. A______ a plaidé et conclu à la mise en liberté immédiate de son client. La mise en détention administrative était choquante dans la mesure où M. A______ n’avait pas de casier judiciaire en Suisse et n’avait jamais commis d’infraction ou causé un quelconque problème. Il s’était lui-même, à plusieurs reprises, annoncé aux autorités afin de régulariser sa situation. Il vivait avec sa mère et sa sœur, qui disposaient d’un permis de séjour, à une adresse connue des autorités. Quand bien même il se trouvait en situation illégale, il avait toujours fait face à ses obligations et payé notamment les frais de justice qu’il avait reçus à son adresse. Il était d’accord de retourner dans son pays et de se conformer aux décisions des autorités, raison pour laquelle il n’avait pas sa place en prison. Il avait toujours fait preuve d’honnêteté vis-à-vis des autorités.

19.         Lors de la même audience, le tribunal a entrepris une recherche avec l’identité de la mère de M. A______ dans le fichier central de la population genevoise nommé « CALVIN » et inscrit au procès-verbal « Le tribunal entreprend une recherche dans la base de données CALVIN, avec l'identité de la mère du contraint. Il en ressort que la nouvelle adresse est chez M. E______, D______, 12__ Genève. Il en ressort également que l'adresse a été communiquée le 1er mai 2022. ».

20.         Il ressort en outre de la base de données du Pouvoir judiciaire en lien avec la cause A/1______ qu’une facturation d’un émolument de CHF 250.- a été émise le 28 avril 2022 et que cette somme a été réglée le 3 août 2022.


 

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr ; 9 al. 3 LaLEtr).

2.            En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 11 août 2022 à 16h00.

3.            Le tribunal se prononce au terme d'une procédure orale (art. 9 al. 5 LaLEtr) ; il peut confirmer, réformer ou annuler la décision du commissaire de police ; le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l'étranger (art. 9 al. 3 LaLEtr).

4.            La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (cf. ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.1 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.1).

5.            L'art. 76 al. 1 let. b LEI stipule que lorsqu'une décision de renvoi a été notifiée, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si des éléments concrets font craindre qu'elle entende se soustraire au renvoi, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (ch. 3) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (ch. 4).

6.                  Ces deux dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l’existence d’un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, un risque de fuite existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.2 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_743/2009 du 7 décembre 2009 consid. 4), qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine (cf. ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; 130 II 56 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1139/2012 du 21 décembre 2012 consid. 3.2 ; ATA/315/2014 du 2 mai 2014).

Lorsqu’il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s’il existe des garanties que l’étranger prêtera son concours à l’exécution du renvoi, soit qu’il se conformera aux instructions de l’autorité et regagnera ainsi son pays d’origine le moment venu, c’est-à-dire lorsque les conditions seront réunies. Dans ce cas, le juge de la détention dispose d’une certaine marge d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C.400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1).

7.                  Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.2 ; 2C_142/2013 du 1er mars 2013 consid. 4.2 ; 2C_1017/2012 du 30 octobre 2012 consid. 4.1.1 ; ATA/315/2014 du 2 mai 2014). Ne constituent pas des éléments suffisants le seul fait que l'étranger soit entré en Suisse de façon illégale ou le fait qu'il soit démuni de papiers d'identité (cf. ATF 129 I 139 consid. 4.2.1). De même, le fait de ne pas quitter le pays dans le délai imparti à cet effet n'est pas à lui seul suffisant pour admettre un motif de détention au sens de l'art. 76 al. 1 ch. 3 ou 4 LEI, mais peut tout au plus constituer un indice parmi d'autres en vue d'établir un risque de fuite (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_142/2013 du 1er mars consid. 4.2 in fine ; ATA/315/2014 du 2 mai 2014). En effet, si tel était le cas, il aurait appartenu au législateur d'indiquer expressément à l'art. 76 al. 1 LEI que le non-respect du délai de départ constitue à lui seul un motif justifiant la mise en détention de l'étranger (arrêt du Tribunal fédéral 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.2 et les références citées). Dans la même ligne, le fait de travailler au noir ne constitue pas non plus un indice d'un risque de fuite (ATF 140 II 1 consid. 5.4.2 p. 5). A l'inverse, la circonstance que la personne concernée s'est tenue, assez longtemps et de manière ininterrompue, en un endroit stable à la disposition des autorités plaide en défaveur du risque de fuite (arrêt du Tribunal fédéral 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.2 et les références citées).

8.            En l’espèce, il convient d’analyser s’il existe des éléments concrets permettant de conclure à l’existence d’un risque de fuite ou de disparition.

M. A______ se trouve sur le territoire helvétique depuis 2018. Il y est entré dans l’espoir d’y entreprendre des études universitaires. N’ayant pas obtenu de permis de séjour, il a fait l'objet, le 27 mai 2019, d'une première décision de renvoi de Suisse. Il ne s'est pas conformé à cette décision pas plus qu'il ne s'est conformé à l'injonction de quitter la Suisse au délai qui lui avait été imparti. Il a ainsi démontré, par son comportement, qu'il ne souhaitait pas retourner dans son pays d'origine. Pour autant, il n’a pas disparu dans la clandestinité puisqu’en date du 27 juillet 2021, il a déposé une nouvelle demande de régularisation de ses conditions de séjour laquelle a également fait l’objet d’un refus. Une interdiction d’entrée dans le territoire suisse a par la suite été prise à son encontre par le SEM. M. A______ a persisté à séjourner illégalement en Suisse.

Cela étant, il doit également être relevé qu’il dispose d'un domicile fixe à Genève avec sa mère et sa sœur, lesquelles vivent légalement en Suisse. Le tribunal conçoit que l’OCPM, après avoir reçu le courrier de M. B______ du 9 mars 2022 l’informant que M. A______, sa mère et sa sœur, ne vivaient plus à son adresse, soit parti du principe qu’à tout le moins M. A______ ait pu disparaitre sans laisser de nouvelle adresse. Toutefois, l’OCPM savait cependant que ce dernier, depuis son arrivée en Suisse, avait toujours logé en compagnie de sa mère et de sa sœur. Il est ainsi pour le moins surprenant qu’en date du 9 mai 2022, il ait décidé d’inscrire M. A______ au RIPOL alors que quelques jours avant, il avait changé dans la base de données CALVIN l’adresse de la mère de celui-ci. M. A______ a par ailleurs indiqué en audience qu’il avait également contresigné le courrier de changement d’adresse que sa mère avait adressé à l’OCPM. Il eût été alors possible pour l’OCPM de procéder à des vérifications de l’adresse de M. A______ avant d’entreprendre son inscription au RIPOL. Cela est d’autant plus troublant que M. A______ a reçu une facture du Pouvoir judiciaire qu’il a ensuite réglée.

Le tribunal ne dispose pas non plus d’autres éléments pour affirmer que
M. A______ aurait cherché délibérément à se soustraire à un entretien en ne donnant pas suite à une convocation dûment adressée à sa nouvelle adresse, avant l’inscription au RIPOL et le prononcé de l'ordre de mise en détention litigieux. Rien ne permet au surplus de retenir qu'il n'était pas joignable ou qu'il n'aurait pas pu être aisément contacté à ladite adresse, étant précisé que depuis sa première arrivée en Suisse, il n’a eu de cesse de solliciter l’OCPM pour régulariser sa situation sous différents motifs, démontrant par là qu'il n'entendait pas disparaître dans la clandestinité.

A teneur du dossier, le tribunal ne perçoit pas non plus d’éléments dans le comportement de M. A______, à ce jour, pour conclure qu'il refusera d’obtempérer aux instructions des autorités. Ce dernier n’a jamais essayé de fuir, étant rappelé que selon la jurisprudence susmentionnée, le fait de ne pas quitter le pays dans le délai imparti n'est pas à lui seul suffisant pour admettre un motif de détention au sens de l'art. 76 al. 1 ch. 3 ou 4 LEI.

Il n’y a également pas d’éléments à ce jour pour affirmer qu’il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi puisqu’il n’a pas donné d’indications manifestement inexactes ou contradictoires. De même, il n’a pas laissé clairement apparaître, par ses déclarations lors de son audition par le tribunal, qu'il n'était pas disposé à retourner dans son pays d'origine, quand bien même il a fait part de son souhait de vivre en Suisse. Dûment informé qu’un vol était réservé pour lui, il a indiqué qu’il le prendrait.

9.            Même si un motif de détention existe, la mise en détention doit respecter le principe de la proportionnalité (cf. ATA/201/2017 du 16 février 2017 consid. 6).

10.        Comme toute mesure étatique, la détention administrative en matière de droit des étrangers doit respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Il convient en particulier d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion constitue une mesure appropriée et nécessaire (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 143 I 147 consid. 3.1 ; 142 I 135 consid. 4.1 ; 134 I 92 consid. 2.3 et 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2019 consid. 5.4 ; 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).

11.        En l'occurrence, au vu de la situation personnelle de M. A______, qui vit avec sa mère et sa sœur au bénéfice d'un permis de séjour à une adresse connue des autorités, mais également du fait qu’il n’a, à ce jour, jamais disparu dans la clandestinité, il faut considérer qu’une mise en détention ne se justifie pas sous cet angle. On peut en effet retenir que le risque que M. A______, qui a essayé à plusieurs reprises de régulariser sa situation, disparaisse dans la clandestinité est en l’état suffisamment faible pour qu'il soit remis en liberté.

Compte tenu de ce qui précède, l'ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police sera annulé. La détention administrative sera levée et
M. A______ remis en liberté.

Enfin, l'attention de M. A______ sera expressément attirée sur le fait que le non-respect de ces obligations pourra entraîner un nouvel examen de sa situation, susceptible de conduire à sa mise en détention.

12.        Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEI, le présent jugement sera communiqué à
M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             annule l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 11 août 2022 à 16h40 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de quatre semaines ;

2.             lève la détention de Monsieur A______ et ordonne sa mise en liberté immédiate ;

3.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Endri GEGA

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le 12 août 2022

 

La greffière