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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/3390/2021

CAPH/19/2024 du 06.03.2024 sur JTPH/43/2023 ( OS ) , PARTIELMNT CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3390/2021 CAPH/19/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MERCREDI 6 MARS 2024

 

Entre

A______ SARL, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 14 février 2023 (JTPH/43/2023), représentée par Me Yann LAM, avocat, MBLD ASSOCIES, rue Joseph-Girard 20, case postale 1611, 1227 Carouge,


et


Monsieur B
______, domicilié ______, intimé, représenté par Me Andrea VON FLÜE, avocat, KÖNEMANN & VON FLÜE, rue de la Terrassière 9, 1207 Genève,

CAISSE DE CHOMAGE C______, sise ______, partie intervenante.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/43/2023 du 14 février 2023, le Tribunal des prud'hommes (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure simplifiée, a déclaré recevables la demande formée le 12 juillet 2021 par B______ contre A______ SARL, ainsi que la demande reconventionnelle formée par cette dernière et la demande d’intervention formée par la CAISSE DE CHOMAGE C______ (chiffres 1 à 3 du dispositif), renoncé à retirer du dossier les pièces 11 et 13 produites par B______ le 12 juillet 2021 (ch. 4), renoncé à ordonner la production par la police de la main courante du 19 juin 2020 (ch. 5) et déclaré irrecevable la conclusion de B______ tendant au paiement de 453 fr. nets avec suite d'intérêts (ch. 6).

Au fond, le Tribunal a condamné A______ SARL à verser à B______ les sommes brutes de 717 fr. 30 avec intérêts à 5% dès le 1er juin 2020 (ch. 7) et 7'966 fr. 90 avec intérêts à 5% dès le 19 juin 2020 (ch. 8), ainsi que la somme nette de 11'919 fr. avec intérêts à 5% dès le 19 juin 2020 (ch. 9) et à verser à la CAISSE DE CHOMAGE C______ la somme nette de 1'930 fr. 10 avec intérêts à 5% dès le 7 octobre 2021 (ch. 10), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 11), dit qu'il n'était pas perçu de frais ni de dépens (ch. 12) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 13).

B. a. Par acte expédié le 17 mars 2023 à la Cour de justice, A______ SARL forme appel contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation des chiffres 5, 7, 8, 9, 10, 11 et 13 du dispositif.

Cela fait, elle conclut à ce que la Cour ordonne la production de la main courante concernant l'intervention de la police du 19 juin 2020, à ce que B______ et la CAISSE DE CHOMAGE C______ soient déboutés de leurs conclusions et, à titre reconventionnel, à ce que B______ soit condamné à lui verser la somme de 4'098 fr. 55 avec suite d'intérêts dès le 19 juin 2020.

b. B______ a conclu au rejet de l'appel.

c. La CAISSE DE CHOMAGE C______ s'en est rapportée à justice.

d. A______ SARL et B______ ont répliqué et dupliqué, en persistant dans leurs conclusions respectives.

e. Les parties ont été informées par avis de la Cour du 31 août 2023 de ce que la cause était gardée à juger.


 

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure.

a. A______ SARL (ci-après : A______ SARL ou la Clinique) est une société sise à Genève dont le but est la gestion de centres destinés à offrir toutes les prestations usuelles en matière d’hygiène dentaire.

D______ en est l’associé gérant avec signature individuelle.

b. Par contrat de travail du 7 novembre 2019, A______ SARL a engagé B______ en qualité de médecin-dentiste à 40%, à partir du 12 novembre 2019.

c. Selon le contrat de travail, le salaire convenu s’élevait à 33% de l’honoraire de l’employé, calculé de la manière suivante :

- honoraire de l’employé = CA n (prestations médicales fournies) - impayés évitables (tous les patients dont l’employé n’a pas respecté les procédures décrites) ;

- CA n (prestations médicales fournies) = CA (chiffre d’affaires brut facturé) - Mat (matériel spécifique) - Lab (laboratoire).

Le droit aux vacances était inclus dans le salaire de l’employé au taux de 8.33%.

Le délai de résiliation était de trois mois pour la fin d’un mois après le temps d’essai.

d. Lorsqu'il a activé son adresse électronique de la Clinique, B______ a demandé à D______ si celle-ci servait exclusivement en interne ou également avec les patients. Ce dernier lui a répondu qu'elle servait en interne pour faire passer des messages importants, de nouveaux protocoles, des demandes de vacances ou des fiches de salaire et pour que les médecins puissent communiquer entre eux.

B______ a dès lors contacté des patients avec une adresse électronique privée portant le nom de domaine "gmail.com" qu’il utilisait à titre professionnel. Il a déclaré devant le Tribunal que son employeuse ne lui avait pas demandé de créer une adresse privée à cette fin ; elle ne l’avait pas interdit non plus et il n’y avait pas de directives.

e. Au mois de février 2020, une employée a fait part à D______ de problèmes concernant la prise en charge en urgence des patients et la facturation de B______. Par message Whats app du 8 février 2020, D______ a indiqué à ce dernier qu'il ne pouvait pas facturer 453 fr. pour une extirpation et 244 fr. pour une extraction de la même dent.

e.a Les témoins E______ et F______, médecins-dentistes et anciens collègues de B______, ont confirmé avoir constaté à quelques reprises des surfacturations de la part de ce dernier.

Selon E______, il s'agissait clairement d'erreurs en lien avec les codes de facturation. Selon F______, c'était des petites erreurs. B______ était là depuis peu de temps et, arrivant de France, il n'était pas forcément au courant des codes de tarification suisses. A la demande de l'employeuse, le témoin l'avait coaché sur ce sujet. Il arrivait également que la réception corrige la facturation en cas d'erreurs de code. Cela lui arrivait encore aujourd'hui, rarement.

F______ a confirmé que la facturation d'une extirpation et d'une extraction d'une même dent relevait d'une surfacturation et non d'une négligence car il s'agissait de deux gestes différents. Les effectuer ensemble n’avait aucun sens, l'un servant à sauver la dent et l'autre à la retirer.

f. Par courrier du 29 mai 2020 remis en mains propres à B______, A______ SARL a résilié son contrat de travail pour le 31 août 2020, sans indication de motif.

g. Le 19 juin 2020, A______ SARL a résilié le contrat de travail de B______ avec effet immédiat, au motif que celui-ci avait volontairement rompu le lien de confiance.

g.a A l'appui du licenciement immédiat, l'employeuse reproche à B______ de nombreux manquements dans le traitement de ses patients et sa tendance à la surfacturation. En allègue trois événements en particulier, à savoir : avoir planifié une intervention dentaire d’une durée de plus de sept heures sur un patient, durée qui apparaissait complètement démesurée, sans se préoccuper plus avant des conséquences sur la santé et le confort dudit patient, avoir utilisé ses coordonnées privées pour planifier ses rendez-vous et s’entretenir avec les patients de la clinique et, enfin, avoir enregistré la discussion au sujet du licenciement du 29 mai à l’insu de l’employeur.

B______ a contesté tous les griefs qui lui étaient reprochés. Il a indiqué qu'il lui était arrivé de planifier des interventions de trois à quatre heures, à la demande du patient, mais aucune intervention de sept heures. Il avait certes contacté des patients avec une adresse électronique privée qu’il utilisait à titre professionnel, en raison du fait que son adresse électronique auprès de A______ SARL n’était pas utilisée pour contacter les patients, selon l’instruction expresse de D______. Enfin, il a contesté avoir enregistré l’entretien du 29 mai 2020 ainsi que toute surfacturation intentionnelle, précisant que des erreurs de saisie pouvaient arriver. Il n'avait d'ailleurs entendu parler de cette problématique de surfacturation que dans le cadre de la présente procédure.

g.b Suite à l'annonce de son congé immédiat, B______ a, selon les dires de son employeuse, refusé de quitter les lieux de son plein gré, la contraignant à faire appel à la police et à déposer une main courante. L'employé a, pour sa part, expliqué avoir exigé un document écrit selon lequel il était licencié avant de partir, craignant de se voir reprocher un abandon de poste.

h.a Les témoins E______ et G______, entendus par le Tribunal, n'ont pas remis en cause la qualité de travail de B______.

E______ a déclaré avoir entendu des rumeurs accusant B______ de vols de données et de la mauvaise qualité de son travail. Elle n'avait, pour sa part, pas constaté que ce dernier avait mal fait son travail lorsqu'ils étaient collègues. Elle avait dû à une reprise refaire l'une de ses interventions, ce qui n'était cependant pas inhabituel et lui arrivait à elle aussi. Les patients n'étaient pas mécontents du travail de B______, certains d'entre eux étant même déçus de son départ.

Quant à G______, il a confirmé que B______ était un très bon dentiste, qui s'appliquait à exécuter des traitements de très bonne qualité et prenait du temps pour les patients. Il n'avait jamais travaillé avec lui au sein de A______ SARL, mais pouvait malgré tout fournir une appréciation car il travaillait avec le cabinet qui employait actuellement B______.

h.b Le témoin F______ a indiqué pour sa part que B______ avait des lacunes techniques.

Il a expliqué qu'après le départ de B______, beaucoup de traitements de ses patients (entre dix et quinze) avaient dû être repris. Le témoin avait notamment dû reprendre le cas d'une fausse route (synonyme de perforation), ce qui ne lui était personnellement jamais arrivé. Il pouvait lui arriver de devoir reprendre, en moyenne, un traitement par année. Il a ajouté que lorsque le médecin-dentiste était encore là, c'était lui qui s'occupait de reprendre le traitement et s'il n'était plus là, un autre médecin de la Clinique s'en occupait, les frais étant assumés par la Clinique, qui prenait en charge ce traitement. Concernant le licenciement immédiat de B______, il avait entendu des rumeurs au niveau des assistantes selon lesquelles ce dernier avait enregistré D______. Il n'avait toutefois pas lui-même vu l'enregistrement. Il a ajouté qu'il était interdit pour les médecins-dentistes de communiquer de manière privée avec les patients, les communications étant gérées par la réception.

i. B______ a sollicité, le 16 juillet 2020, le paiement de son dernier salaire et de ses congés payés ainsi que la transmission des documents nécessaires à son inscription au chômage.

En réponse, A______ SARL a indiqué avoir découvert des irrégularités et des manquements graves, engendrant un dommage considérable. Elle compensait le dommage subi à concurrence des quelques éléments de rémunération qu’elle pouvait encore lui devoir.

j. Durant les rapports de travail, B______ a perçu les rémunérations suivantes :

- 4'834 fr. 75 bruts en décembre 2019, dont 371 fr. 75 de vacances ;

- 751 fr. 50 bruts en janvier 2020, dont 57 fr. 80 de vacances ;

- 6'158 fr. 70 bruts en février 2020, dont 473 fr. 55 de vacances;

- 4'818 fr. 40 bruts en mars 2020, dont 370.50 de vacances;

- 4'749 fr. 50 bruts en avril 2020, dont 180 fr. 70 de vacances et 2'398 fr. 75 d’indemnités "RHT"»;

- 2'983 fr. 95 bruts en mai 2020, dont 229 fr. 45 de vacances et

- 3'002 fr. 35 bruts en juin 2020, dont 230 fr. 85 de vacances.

D. a. Par demande simplifiée, non conciliée et introduite le 12 juillet 2021 par-devant le Tribunal à l'encontre de A______ SARL, B______ a conclu notamment au versement de la somme totale de 28'882 fr. 12, qui se décompose comme suit :

- 779 fr. 05 bruts, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 31 mars 2020, à titre de différence sur provision ;

- 1’919 fr. nets, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 19 juin 2020, à titre de salaire du mois de juin 2020 ;

- 1'278 fr. 65 bruts, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 31 mai 2020, à titre de différence de salaire pour le mois de mai 2020 ;

- 1'260 fr. 25 bruts, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 19 juin 2020, à titre de différence de salaire pour le mois de juin 2020 ;

- 10'191 fr. 20 bruts, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 19 juin 2020, à titre de salaire relatif au délai de congé ;

- 453 fr. nets, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 19 juin 2020, à titre de perte de contribution patronale à l’institution de prévoyance pendant le délai de congé et

- 13’000 fr. nets, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 19 juin 2020, à titre d’indemnité pour licenciement immédiat injustifié.

A l'appui de ses conclusions, B______ a allégué en substance que, d’après ses calculs, les chiffres d’affaires figurant sur ses fiches de salaire étaient inférieurs à la réalité. A l’appui de sa prétention, il a produit des décomptes établis par ses soins, indiquant divers montants à titre de chiffres d’affaires réalisés et dépourvus de détails. Par ailleurs, à partir du mois de mars 2020, un praticien extérieur était venu travailler à la Clinique. Lui-même s’était alors progressivement retrouvé à effectuer davantage d’actes d’urgence, qui étaient moins rémunérateurs et ses plages horaires avaient été réduites unilatéralement, ne lui garantissant plus son taux d'activité à 40% et le salaire correspondant, qu'il réclamait au titre de demeure de l'employeuse. Enfin, il a considéré son licenciement immédiat comme étant injustifié, sollicitant une indemnité y relative ainsi que le salaire afférent au délai de congé.

b. LA CAISSE DE CHOMAGE C______ a formé une demande d’intervention principale et a conclu au paiement de 1'930 fr. 10, avec intérêts dès le 7 octobre 2021, correspondant aux indemnités versées à B______ pour le mois d’août 2020.

c. Par mémoire de réponse et demande reconventionnelle, A______ SARL a conclu au déboutement de B______ et de la CAISSE DE CHOMAGE C______ de toutes leurs conclusions.

Elle a préalablement conclu à la production, par la police, de la main courante relative à l’intervention du 19 juin 2020. Sur demande reconventionnelle, elle a conclu à la condamnation de B______ au paiement, après compensation, de 4'098 fr. 55, avec intérêts moratoires à 5% dès le 19 juin 2020, à titre de remboursement du dommage causé.

A l’appui de sa réponse, A______ SARL a notamment allégué que le chiffre d’affaires était calculé sur la base des données entrées dans le logiciel par les médecins eux-mêmes. Des corrections pouvaient être effectuées par la réception uniquement dans le cadre d’erreurs de saisie ou de surfacturation. Son employé n’avait d'ailleurs jamais contesté ses décomptes de salaire. Quant à la baisse des honoraires de l'employé pour les mois de mai et juin 2020, elle résultait d'une baisse générale du chiffre d'affaires due à la pandémie du Covid-19. A titre reconventionnel, la Clinique, se prévalant du time-sheet établi pour chaque patient qui avait dû être repris, a allégué que les nombreuses erreurs professionnelles que B______ avait commises lui avaient causé un dommage à hauteur de 6'017 fr. 55.

d. Les parties ont procédé à un deuxième échange d'écritures, concluant chacune au déboutement de leur partie adverse et persistant dans leurs propres conclusions.

e. Lors des audiences des 28 septembre et 28 novembre 2022, le Tribunal a entendu les parties ainsi que les témoins cités, dont les déclarations ont été reprises ci-dessus dans la mesure utile.

E. Dans le jugement querellé, le Tribunal a considéré que l'employeuse avait établi la rémunération de l'employé conformément aux conditions contractuelles, en tenant compte du chiffre d'affaires facturé, déduction faite des frais de matériel et de laboratoire ainsi que des impayés. Les griefs émis à cet égard par l'employé reposaient uniquement sur ses propres décomptes personnels, dépourvus de force probante, et n'avaient du reste jamais été invoqués pendant les rapports de travail. Le montant de 779 fr. 05 réclamé à titre de différence de provision devait dès lors être rejeté.

En revanche, s'agissant des prétentions alléguées à titre de différence de salaire, le Tribunal a retenu que la baisse d'activité de l'employé après son licenciement était due aux mesures imposées durant la pandémie de Covid-19, ayant entraîné des annulations de rendez-vous et une baisse générale du chiffre d'affaires. Toutefois, il revenait à l'employeuse de fournir suffisamment de travail à ses employés et de garantir le paiement des salaires. Dès lors, il lui incombait d'entreprendre les démarches nécessaires afin de mettre en œuvre les mesures de réduction de l'horaire de travail, ce qui aurait permis à B______ de percevoir des indemnités correspondant au 80% de son salaire en mai et juin 2020 également. Partant, le Tribunal a condamné l'employeuse à verser à son employé la différence entre le salaire versé et le 80% du salaire convenu, calculé sur un revenu moyen.

S'agissant du licenciement immédiat, le Tribunal a considéré que les motifs invoqués à la base de celui-ci n'étaient pas prouvés pour certains d'entre eux ou ne justifiaient pas une résiliation avec effet immédiat. L'employé était ainsi fondé à recevoir le montant brut de 9'897 fr. afférent à son délai de congé ainsi que le montant net de 10'000 fr. à titre d'indemnité.

Enfin, le Tribunal a rejeté les prétentions reconventionnelles de l'employeuse aux motifs que les prétendus manquements professionnels de l'employé ne pouvaient être déterminés qu'à l'aide d'une expertise et que, quoi qu'il en soit, il ressortait de la procédure que les frais de reprise de traitements étaient généralement pris en charge par l'employeuse et non par les employés.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable pour avoir été interjeté, en temps utile et selon la forme prévue par la loi (art. 311 CPC), contre une décision finale de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC) rendue dans une cause patrimoniale dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

1.2 La valeur litigieuse étant inférieure à 30'000 fr., la procédure simplifiée est applicable (art. 243 al. 1 CPC), de sorte que la cause est soumise aux maximes inquisitoire (art. 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC).

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par les juges de première instance et vérifie si ceux-ci pouvaient admettre les faits qu'ils ont retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

2. A titre préalable, l'appelante réitère sa demande portant sur la production de la main courante du 19 juin 2020 par la police genevoise, reprochant aux premiers juges de ne pas y avoir donné suite.

2.1 Conformément à l'art. 316 al. 3 CPC, l'instance d'appel peut librement décider d'administrer des preuves lorsqu'elle l'estime opportun.

Elle peut néanmoins renoncer à ordonner une mesure d'instruction lorsque celle-ci paraît, selon une appréciation anticipée des preuves, manifestement inadéquate, porte sur un fait non pertinent ou n'est pas de nature à ébranler la conviction qu'elle a acquise sur la base des éléments déjà recueillis (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1-4.3.2; 130 III 734 consid. 2.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_86/2016 du 5 septembre 2016 consid. 5.2.2). L'autorité jouit d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 142 III 413 consid. 2.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_37/2017 du 10 juillet 2017 consid. 3.1.2).

2.2 En l'espèce, la production de la pièce requise porte sur les circonstances dans lesquelles l'appelante a fait appel à la police lors de l'entretien du 19 juin 2020. Or, il n'est pas contesté que la police est intervenue sur appel de l'appelante, l'intimé ayant lui-même admis avoir refusé de quitter les lieux sans avoir reçu un document écrit attestant de son licenciement, craignant de se voir reprocher un abandon de poste. L'appelante n'explique pas quels autres faits pertinents elle entend prouver par sa réquisition de preuve. De plus, comme l'a relevé le Tribunal, l'intervention de la police ne porte pas sur les motifs invoqués à l'appui du licenciement immédiat, mais uniquement sur les faits survenus postérieurement à l'annonce du congé. La main courante n'est dès lors pas susceptible d'apporter des éléments supplémentaires pertinents pour trancher le litige.

La demande préalable de l'appelante sera donc rejetée, la Cour s'estimant suffisamment renseignée pour statuer sur le sort du litige.

3. L'appelante reproche au Tribunal de l'avoir condamnée à verser à l'intimé la somme de 717 fr. 30 pour les mois de mai et juin 2020, ayant considéré, à tort, que celui-ci avait droit au 80% de son salaire moyen malgré la baisse d'activité du cabinet, dès lors qu'il aurait pu percevoir les indemnités de réduction de l'horaire de travail et qu'il revenait à l'employeuse d'entreprendre les démarches nécessaires à cette fin pour garantir le paiement des salaires.

3.1 En vertu de l'art. 322 al. 1 CO, l’employeur paie au travailleur le salaire convenu, usuel ou fixé par un contrat-type de travail ou par une convention collective.

Si l’employeur empêche par sa faute l’exécution du travail ou se trouve en demeure de l’accepter pour d’autres motifs, il reste tenu de payer le salaire sans que le travailleur doive encore fournir son travail (art. 324 al. 1 CO).

En cas de réduction de l'horaire de travail due à des motifs d'ordre économique (RHT), les travailleurs ont droit, à certaines conditions, à une indemnité, laquelle est régie par la loi sur l’assurance-chômage (LACI). L'objectif de cette indemnité est de préserver les emplois en évitant des licenciements à court terme, consécutifs à un recul temporaire de la demande de biens et de services, et la perte de travail qui en résulte (ATF 121 V 362 consid. 3a: arrêt du Tribunal fédéral 8C_322/2022 du 30 janvier 2023 consid. 4.3.2).

Conformément à l’art. 31 al. 1 LACI, les travailleurs dont la durée normale du travail est réduite ou l’activité suspendue ont droit à l’indemnité lorsqu'ils sont tenus de cotiser à l’assurance ou qu’ils n’ont pas encore atteint l’âge minimum de l’assujettissement aux cotisations AVS (let. a), que la perte de travail est due à des motifs économiques, est inévitable et représente au moins 10% du temps de travail (let. b), que le congé n'a pas été donné (let. c) et que la réduction de l’horaire de travail est vraisemblablement temporaire et si l’on peut admettre qu’elle permettra de maintenir les emplois en question (let. d).

Selon l'art. 34 al. 1 LACI, l’indemnité s’élève à 80% de la perte de gain prise en considération. Est déterminant, jusqu’à concurrence de la limite supérieure du gain à prendre en considération pour le calcul des cotisations, le salaire contractuel versé pour la dernière période de paie avant le début de la réduction de l’horaire de travail (art. 34 al. 2 LACI). L’indemnité est versée pendant douze périodes de décompte au maximum, dans une période de deux ans (art. 35 al. 1 LACI). Est réputé période de décompte, un laps de temps d’un mois ou de quatre semaines consécutives (art. 32 al. 5 LACI).

Afin de surmonter l'épidémie de Covid-19, le Conseil fédéral a été autorisé à prendre des mesures dans le domaine de l'assurance chômage et en particulier concernant les indemnités RHT. Selon l'art. 17 de la Loi COVID-19 du 25 septembre 2020, le Conseil fédéral était ainsi autorisé à édicter des dispositions dérogeant à la Loi sur l'assurance-chômage concernant en particulier les l'indemnités RHT pour les formateurs qui s'occupaient des apprentis ou pour les travailleurs sur appel, la prolongation des délais-cadres et le déroulement de préavis et d'indemnisation de la réduction de l'horaire de travail ainsi que sur la forme du versement de l'indemnité.

Ainsi, différentes mesures ont été successivement prises pendant la pandémie Covid-19 afin de simplifier le processus RHT et d'élargir le cercle des bénéficiaires (Directives du SECO "Actualisation des règles spéciales dues à la pandémie", n. 2020/06 du 9 avril 2020; 2020/08 du 1er juin 2020; 2020/10 du 22 juillet 2020; 2020/12 du 27 août 2020; 2020/15 du 30 octobre 2020).

3.2 En l'espèce, n'est plus discuté à ce stade le fait que la baisse d'honoraires subie par l'intimé résultait d'une baisse générale de l'activité de l'appelante, directement impactée, de par son domaine d'activité, par les mesures imposées lors de la pandémie du Covid-19. L'intimé a d'ailleurs bénéficié d’une indemnité "RHT" de 2'398 fr. 75 au mois d'avril 2020, selon ses fiches de salaire, ce qui tend à démontrer, si besoin est, que la baisse d'occupation résultait de motifs d'ordre économique, indépendants de la volonté de l'employeuse.

Contrairement à ce qui a été retenu en première instance, on ne saurait faire grief à l'appelante de ne pas avoir entrepris les démarches nécessaires pour obtenir les indemnités RHT en faveur de ses employés. D'une part, comme susmentionné, l'appelante a effectué lesdites démarches, puisqu'elle a obtenu une indemnité en faveur de l'intimé pour le mois d'avril 2020. D'autre part, l'intimé a été licencié de manière ordinaire le 29 mai 2020, de sorte que les rapports de travail étaient résiliés lors des périodes de décompte de mai et juin 2020. Or, le travailleur qui s'est vu signifier son congé ne peut plus bénéficier des indemnités RHT, conformément à l'art. 31 al. 1 let. c LACI. Le Tribunal a d'ailleurs relevé dans sa motivation concernant le calcul du salaire afférent au délai de congé que les indemnités RHT ne s’appliquaient pas une fois le contrat de travail résilié (cf. jugement entrepris, p. 10 b), p. 22).

Contrairement à l'avis de l'intimé, les dispositions spéciales adoptées lors de la pandémie n'aboutissent pas à une solution différente. Si elles ont permis de faciliter le processus et d'élargir le cercle des bénéficiaires en y intégrant des travailleurs qui n'y avaient d'ordinaire pas droit (tels que les personnes ayant un contrat de durée déterminée, apprentis, ou travailleurs sur appel), ces dispositions ne sont en revanche, à aucun moment, revenues sur la condition d'octroi découlant de l'art. 31 al. 1 let. c LACI exigeant que les rapports de travail ne soient pas résiliés. Les Directives du SECO adoptées tout au long de l'année 2020 ont du reste systématiquement et expressément rappelé que les personnes dont le contrat de travail avait été résilié demeuraient dans la catégorie des personnes qui n’avaient pas droit aux prestations.

Par conséquent, l'intimé ne pouvait plus être soumis au régime de RHT à partir du mois de mai 2020. Il n'y a ainsi pas lieu de condamner l'appelante à lui verser la somme de 717 fr. 30 au motif qu’elle n’avait pas entrepris les démarches visant à obtenir de telles indemnités.

L'appel se révèle fondé sur ce point et le chiffre 7 du dispositif entrepris sera annulé.

4. L’appelante reproche au Tribunal d’avoir violé l’art. 337 CO en considérant que le licenciement immédiat du 19 juin 2020 était injustifié.

4.1 L’employeur et le travailleur peuvent résilier immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs (art. 337 al. 1 CO).

Sont notamment considérées comme de justes motifs toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d’exiger de celui qui a donné le congé la continuation des rapports de travail (art. 337 al. 2 CO).

Selon la jurisprudence, la résiliation immédiate pour justes motifs est une mesure exceptionnelle et doit être admise de manière restrictive. Seul un manquement particulièrement grave peut justifier une telle mesure; si le manquement est moins grave, il ne peut entraîner une résiliation immédiate que s'il a été répété malgré un avertissement (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1 ; 130 III 28 consid. 4.1; 213 consid. 3.1; 129 III 380 consid. 2.1). Par manquement, on entend généralement la violation d'une obligation découlant du contrat de travail, mais d'autres incidents peuvent aussi justifier une telle mesure. Ce manquement doit être objectivement propre à détruire le rapport de confiance essentiel au contrat de travail ou, du moins, à l'atteindre si profondément que la continuation des rapports de travail ne peut raisonnablement être exigée. De surcroît, il doit avoir effectivement abouti à un tel résultat (ATF 142 III 579 consid. 4.2; 137 III 303 consid. 2.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_595/2018 du 22 janvier 2020 consid. 3.1).

Une résiliation immédiate peut intervenir alors que le congé a déjà été signifié de manière ordinaire. Toutefois, il convient de se montrer d'autant plus strict dans l'admission du caractère justifié du licenciement immédiat que la durée du contrat qui reste à courir est faible (arrêts du Tribunal fédéral 4A_168/2018 du 2 octobre 2018 consid. 4.2 et 4.4 ; 4C.265/2004 du 1er octobre 2004 consid. 3.2). En outre, un licenciement immédiat durant le délai de congé ne peut en principe pas intervenir pour les mêmes motifs que ceux ayant conduit au licenciement ordinaire du travailleur en cause (Carruzzo, Le contrat individuel de travail, 2009, n. I ad art. 337 CO, p. 556; Wyler, Droit du travail, 4ème éd., 2019, p. 747-748; Aubert, in Commentaire romand, CO I, 2e éd. 2012, n. 14 ad art. 337 CO).

La partie qui entend se prévaloir d'un fait justifiant la résiliation immédiate du contrat de travail doit agir sans tarder, sous peine de forclusion. Si elle tarde, elle est réputée avoir définitivement renoncé à la résiliation immédiate. Un délai de réflexion de deux à trois jours ouvrables est à cet égard présumé approprié (Gloor, in Commentaire du contrat de travail, 2ème édition, 2022, Dunand/Mahon [éd.], n. 73 ad art. 337 CO). Dans certains cas, il faut tenir compte du temps nécessaire pour élucider les faits, étant précisé que l'employeur qui soupçonne concrètement l'existence d'un juste motif doit prendre immédiatement toutes les mesures qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour clarifier la situation (ATF 138 I 113 consid. 6.3.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_251-253/2015 du 6 janvier 2016 consid. 3.2.2 et les références citées).

Selon l'art. 8 CC, il appartient à la partie qui se prévaut de justes motifs d'une résiliation immédiate d'apporter la preuve de leur existence (ATF 130 III 213 consid. 3.2).

4.2 En l'espèce, l'appelante a résilié le contrat de travail de l'intimé une première fois de manière ordinaire le 29 mai pour le 31 août 2020 et une seconde fois avec effet immédiat le 19 juin 2020.

Selon elle, le congé immédiat était justifié en raison de plusieurs manquements professionnels qu'elle imputait à son employé et qu'elle considérait suffisamment graves pour mettre un terme à leur relation contractuelle sans attendre l'expiration du délai de congé.

S'agissant du grief en lien avec le prétendu enregistrement de la conversation relative au congé donné le 29 mai, le dossier ne contient aucun élément susceptible d'étayer le fait que l'intimé aurait effectivement procédé à l'enregistrement en question. Cette allégation ne repose que sur des rumeurs, sans que l'appelante ait pris la peine de procéder à de simples vérifications, comme, par exemple, interroger les assistantes auprès desquelles les rumeurs circulaient. Compte tenu des conséquences importantes de la résiliation immédiate, l'appelante se devait de prendre les mesures que l'on pouvait raisonnablement exiger d'elle pour clarifier la situation, ce d'autant plus qu'une condamnation hâtive est susceptible de nuire à la réputation de l'intimé dès lors qu'elle porte sur des faits qui, comme l'appelante le relève elle-même, sont pénalement répréhensibles (art. 179ter CP).

En ce qui concerne l'intervention d’une durée de sept heures, l'intimé a contesté l’avoir planifiée, soutenant qu'elle avait été "inventée" pour les besoins de la cause. Les pièces figurant au dossier sont contradictoires à cet égard. En effet, une telle opération de sept heures ne figure pas dans les plannings produits par l'intimé, tandis qu'elle ressort des plannings produits par l'appelante, sans que l'on puisse cependant établir l'auteur de cette inscription, ni même la date à laquelle elle a été ajoutée dans l'agenda. Quoi qu'il en soit, comme l'a relevé le Tribunal, il ressort des pièces du dossier qu'un patient avait expressément fait la demande de prévoir de longues séances (sans indication de durée) afin de limiter ses déplacements, ce qui avait été déconseillé par l'intimé. Quand bien même cette demande pouvait émaner d'un autre patient, il en ressort néanmoins que l'intimé attirait expressément l'attention de ses patients sur les conditions inconfortables de longues séances et que celle qu'il a planifiée faisait suite à la demande expresse du patient, dûment informé. Ce faisant, l'intimé n'a pas ignoré le bien-être des patients, ni porté atteinte à celui-ci ; il n’a pas davantage mis à mal la confiance que les patients avaient en la clinique de l'appelante, contrairement à ce que celle-ci soutient. De plus, le seul fait de prévoir une longue plage horaire pour une intervention ne signifie pas encore que celle-ci aurait effectivement duré le temps prévu, étant relevé qu'aucune longue intervention n'a au final été effectuée. Dans ce contexte, on ne saurait retenir que l'intimé a agi en violation crasse de son devoir de fidélité envers son employeuse, de manière à rompre tout lien de confiance.

En ce qui concerne l'utilisation d'une messagerie privée, il ressort de la procédure que l'intimé a expressément interpellé l'appelante à ce sujet en lui demandant si l'adresse électronique de la Clinique devait être utilisée pour contacter les patients, ce à quoi l'appelante a répondu qu'elle servait seulement pour un usage interne, sans qu'aucune mise en garde ou une quelconque interdiction de contacter directement les clients n'ait été signifiée ou rappelée à l'intimé. Bien que le témoin F______ ait déclaré devant le Tribunal qu'il était interdit aux médecins-dentistes de communiquer avec les patients, il n'est pas établi que cette directive ait été transmise à l'intimé, étant précisé que selon un échange de messages Whats app du 19 juin 2020, l'appelante savait depuis quelques temps déjà que l'intimé avait utilisé une adresse électronique privée. Quant à la teneur des communications que l'intimé a eues avec les patients, il ressort des éléments au dossier qu'il s'est contenté de répondre à un message provenant d'un patient en l'invitant à prendre contact avec la réception de la Clinique. Dans ces circonstances, on ne saurait retenir une intention de nuire de la part de l'intimé ou d'adopter un comportement violant son devoir de fidélité envers son employeuse. Le fait que les échanges portent sur des données médicales sensibles n'est, au vu des circonstances, pas suffisant pour justifier un licenciement immédiat sans aucun avertissement préalable.

Enfin, les reproches de surfacturation ne sont pas non plus constitutifs d'une faute particulièrement grave empêchant la continuation des rapports de travail. Selon les témoignages recueillis en cours de procédure, il s'agissait de petites erreurs en lien avec les codes de facturation qui pouvaient se produire, ce d'autant plus que l'intimé venait de France et ne connaissait pas le système de tarification suisse. Il n'était du reste pas le seul dont les factures étaient par la suite corrigées, ses collègues étant eux aussi confrontés aux mêmes difficultés. Les problèmes plus importants de surfacturation allégués par l'appelante en lien avec une extirpation et une extraction d'une même dent datent du mois de février 2020. A cette époque, les parties se sont entretenues à ce sujet, l'appelante ayant indiqué à l'intimé, par message Whats app, qu'il ne pouvait procéder de la sorte. Il n'est pas établi que d'autres problèmes de ce genre soient à nouveau survenus par la suite. L'appelante ne saurait ainsi se fonder sur ces faits pour justifier, quatre mois plus tard, le congé immédiat.

Au vu de ce qui précède, la plupart des griefs invoqués par l'appelante étaient déjà connus au mois de mai 2020 lors du licenciement ordinaire. L'appelante n'a pas été en mesure d'établir l'existence de motifs particulièrement graves survenus depuis lors, étant rappelé que l'enregistrement illicite n'est pas établi et que la planification d'une intervention de sept heures n'est pas suffisante, même en admettant qu’elle soit établie. Contrairement à ce que soutient l’appelante, les différents motifs invoqués, mêmes pris dans leur ensemble, ne constituent pas des manquements graves au point de rompre le lien de confiance et de justifier un licenciement immédiat sans avertissement préalable. A cela s'ajoute le fait que le délai de congé avait déjà débuté et qu’il ne restait à l’intimé que quelques semaines d’activité avant la fin des rapports de travail.

Partant, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu que la résiliation immédiate par l’appelante des rapports de travail n'était pas justifiée.

L'appel, infondé, sera rejeté sur ce point.

5. L'appelante conteste le montant de l'indemnité ainsi que le montant afférent au délai de congé alloués à titre de licenciement immédiat injustifié.

5.1 Aux termes de l'art. 337c al. 1 CO, lorsque la résiliation immédiate du contrat est injustifiée, le travailleur a droit à ce qu’il aurait gagné si les rapports de travail avaient pris fin à l’expiration du délai de congé ou à la cessation du contrat conclu pour une durée déterminée.

Lorsque le salaire est variable, par exemple en cas de rémunération à la commission, de participation au chiffre d’affaires ou de variation du temps de travail, il convient de fixer l’indemnité en fonction des valeurs moyennes obtenues par le passé. Il sied de déterminer le plus exactement et le plus concrètement possible ce que le travailleur aurait réellement gagné s'il avait été licencié de façon ordinaire et s’il avait continué à travailler pendant le délai de résiliation. En principe, les revenus hypothétiques qui auraient été réalisés pendant ce délai sont décisifs, et non le gain moyen réalisé par le passé (ATF 125 III 14 consid. 2b, trad. in SJ 1999 I p. 315 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_544/2015 du 17 mars 2016 consid. 2.1; 4A_556/2012 du 9 avril 2013 consid. 6.1 et les références citées; Wyler/Heinzer, Droit du travail, 4ème éd. 2019, pp. 761 s.; Bruchez/Mangol/Schwaab, in Commentaire du contrat de travail, 4ème ed. 2019, n. 2 ad art. 337c CO, p. 428).

Le juge peut en outre allouer au travailleur une indemnité dont il fixera librement le montant, en tenant compte de toutes les circonstances, mais sans dépasser l'équivalent de six mois de salaire (art. 337c al. 3 CO).

Cette indemnité, qui s'ajoute aux droits découlant de l'art. 337c al. 1 CO, revêt une double finalité, à la fois réparatrice et punitive, quand bien même elle ne consiste pas en des dommages-intérêts au sens classique, car elle est due même si la victime ne subit ou ne prouve aucun dommage. Revêtant un caractère sui generis, elle s'apparente à la peine conventionnelle. Sauf cas exceptionnel, elle doit être versée pour tout licenciement immédiat dénué de justes motifs (ATF 135 III 405 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_173/2018 du 29 janvier 2019 consid. 5.1).

L'indemnité est fixée d'après la gravité de la faute de l'employeur, la mesure de l'atteinte portée aux droits de la personnalité du travailleur et la manière dont la résiliation a été annoncée. D'autres critères tels que la durée des rapports de travail, l'âge du lésé, sa situation sociale, une éventuelle faute concomitante et les effets économiques du licenciement entrent aussi en considération. Statuant selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 4A_173/2018 du 29 janvier 2019 consid. 5.1; 4A_161/2016 du 13 décembre 2016 consid. 3.1).

5.2 En l'espèce, le Tribunal a alloué à l'intimé 9'897 fr. afférents à son délai de congé et 10'000 fr. à titre d'indemnité.

5.2.1 Le contrat de travail ayant été résilié le 29 mai pour le 31 août 2020, conformément au préavis contractuel, l'intimé a droit à ce qu'il aurait gagné jusqu'à cette dernière date.

Pour calculer le montant dû, le Tribunal s'est fondé sur le revenu moyen réalisé par l'intimé entre les mois de décembre 2019 et avril 2020, sans compter les mois de mai et juin 2020 au motif que l'intimé "aurait dû être soumis au régime de l'indemnité pour réduction de l'horaire de travail, étant précisé que ces indemnités ne s'appliquent pas une fois le contrat de travail résilié".

Ce raisonnement ne peut être suivi. En effet, la jurisprudence impose de calculer le plus concrètement possible ce que le travailleur aurait réellement gagné s'il avait été licencié de façon ordinaire et s’il avait continué à travailler pendant le délai de résiliation. Le gain moyen réalisé par le passé perd de son importance s'il ne représente pas ce que le travailleur aurait pu réaliser pendant ce délai. Dans ce cas, il convient de privilégier l'estimation d'un revenu hypothétique. En l'occurrence, compte tenu de la survenance de la pandémie du Covid-19 au mois de mars 2020 et de la baisse d'activité qu'elle a entrainée pour la société appelante, l'intimé ne pouvait espérer percevoir les mêmes revenus que ceux réalisés par le passé lorsque l'activité était plus importante. De plus, le contrat de travail a été résilié en mai 2020, de sorte que, comme évoqué plus haut, l'intimé n'était dès ce mois plus éligible aux indemnités RHT. Il n'aurait ainsi pas pu les percevoir pendant le délai de congé, contrairement à ce que semble retenir le Tribunal.

Ainsi, il se justifie de retenir que l'intimé aurait réalisé, pendant le délai de congé, un revenu moyen calculé sur les salaires réalisés durant les mois de mars à juin 2020, sans tenir compte des indemnités RHT, ce qui représente un revenu mensuel moyen de 3'290 fr. arrondis ([4'818 fr. 40 + 2'350 fr. 75 {4'749 fr. 50 – 2'398 fr. 75 d'indemnités RHT} + 2'983 fr. 95 + 3'002 fr. 35] / 4).

L'intimé a droit au paiement de deux mois de salaire, à savoir juillet et août 2020, soit 6'580 fr. (2 x 3'290 fr.). L'intimé a également droit au paiement de son salaire pour la période du 19 juin au 30 juin 2020, soit sept jours ouvrables, correspondant à 1'071 fr. (3'290 fr. x 7 jours / 21.75). Le montant total dû à ce titre s'élève donc à 7'651 fr. bruts (6'580 fr. + 1'071 fr.), avec intérêts dès le 19 juin 2020 correspondant à la fin des rapports de travail.

L'intimé a déjà perçu la somme nette de 1'930 fr. 10 sous forme d'indemnités de chômage pour le mois d'août 2020, la Caisse de chômage étant dès lors subrogée dans les droits de l'intimé à concurrence du montant versé.

En définitive, l'appelante sera condamnée à verser, d'une part, à l'intimé 7'651 fr. bruts à titre de salaire afférent au délai de congé, sous déduction de 1'930 fr. 10 nets et, d'autre part, 1930 fr. 10 nets à la CAISSE DE CHOMAGE C______. Quoi qu'en dise l'appelante, cette manière de procéder répond aux droits et obligations de chaque partie en ce sens qu'elle met à la charge de l'appelante le montant qu'elle aurait dû régler si elle n'avait pas procédé au licenciement immédiat injustifié, permet à l'intimé de percevoir le montant qui lui revient et à la Caisse de chômage de se voir rembourser le montant qu'elle a avancé à son assuré. Pour le surplus, l'appelante n'expose pas en quoi ce procédé aboutirait à un résultat erroné, comme elle le prétend de manière toute générale.

Dès lors, le chiffre 8 du dispositif attaqué sera réformé en ce sens que l'appelante sera condamnée à verser à l'intimé la somme brute de 7'651 fr., sous déduction de 1'930 fr. 10 nets, avec suite d’intérêts dès le 19 juin 2020.

Le chiffre 10 sera quant à lui confirmé en tant qu'il condamne l'appelante à verser la somme nette de 1'930 fr. 10 à la Caisse de chômage.

5.2.2 S'agissant de l'indemnité au sens de l'art. 337c al. 3 CO, le Tribunal a alloué le montant de 10'000 fr., ce qui représente environ 2.5 mois de salaire moyen en tenant compte de l'ensemble de la rémunération perçue entre décembre 2019 et juin 2020.

Les premiers juges ont tenu compte du fait que le licenciement avec effet immédiat avait été prononcé alors que le contrat de travail était déjà résilié, pour des motifs de peu d'importance, en partie fondés sur de simples rumeurs (enregistrement) ou qui n'étaient pas préjudiciables à l'appelante (planification de longues séances) ou encore qui ne pouvaient être reprochés à l'intimé vu les directives reçues par ce dernier (utilisation d'un mail privé). Quoi qu'en dise l'appelante, elle n'a pas réussi à démontrer la consistance des reproches dirigés à l'endroit de son employé ni l'important préjudice qu'elle allègue avoir subi. Il convient d'ajouter qu'elle n'a procédé à aucun avertissement préalable, ne laissant aucune chance à l'intimé d'adapter son comportement. Contrairement à ce qu'elle soutient, il n'y a pas lieu de tenir compte d'une faute concomitante de l'intimé, qui justifierait de réduire, voire d’exclure, toute indemnité.

La manière dont les rapports de travail ont pris fin avec l'intervention de la police a également été prise en compte. A cet égard, il est admis que l'intimé a refusé de quitter les lieux avant d’avoir obtenu un document écrit attestant de son licenciement avec effet immédiat. Aucune autre raison qui l’aurait conduit à refuser de quitter les lieux ni un quelconque comportement violent de sa part n’ont été allégués. Partant, il aurait suffi à l'appelante de lui fournir le document requis pour obtenir son départ. Ces faits peuvent, sans arbitraire, être pris en compte dans l'appréciation de la situation, indépendamment de la production de la main courante, dès lors qu'ils ne sont pas contestés et qu'aucun autre fait n'est allégué justifiant la production de cette pièce.

Bien que les rapports de travail aient été de courte durée et que la situation financière de l'intimé n'ait pas été durablement impactée par son licenciement immédiat, ce qui doit également être pris en compte dans la balance des intérêts en présence, il n'y a néanmoins pas lieu de "fortement" réduire, voire d’exclure toute indemnité, au vu du comportement de l'appelante, ce qui conduirait notamment à vider de toute substance le caractère punitif de l'indemnité.

Compte tenu des circonstances, le montant de 10'000 fr. fixé par les premiers juges n'apparaît pas critiquable. Le jugement querellé sera confirmé sur ce point.

6. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir rejeté ses prétentions reconventionnelles. Elle conclut au paiement de la somme de 4'098 fr. 55 à titre de réparation du dommage causé par les manquements professionnels allégués à l'endroit de l'intimé.

6.1 Selon l'art. 321e al. 1 CO, le travailleur répond du dommage qu'il cause à l'employeur intentionnellement ou par négligence.

Comme toute responsabilité contractuelle, la responsabilité du travailleur suppose la réalisation de quatre conditions: un dommage, la violation d'une obligation contractuelle, un rapport de causalité adéquate entre ladite violation et le dommage ainsi qu'une faute, laquelle est présumée (ATF 144 III 327, in SJ 2019 I p. 121, arrêts du Tribunal fédéral 4A_210/2015 du 4 octobre 2015 consid. 4.1; 4A_310/2007 du 4 décembre 2007 consid. 6.2).

Il appartient à l'employeur de prouver la violation du contrat, le dommage et le rapport de causalité; pour sa part, le travailleur peut apporter la preuve libératoire de son absence de faute (arrêt du Tribunal fédéral 4A_332/2007 du 15 novembre 2007 consid. 3.1).

6.2 En l'espèce, il ressort certes de la procédure que plusieurs traitements effectués par l'intimé ont dû être repris. Cela étant, la reprise de patients n'était pas inhabituelle selon le témoignage des employés travaillant pour le compte de l'appelante, étant précisé que cela leur était aussi arrivé. Bien que les reprises dues à l'intimé soient au nombre de dix à quinze selon le témoin F______, il n'est pas établi que les motifs de ces reprises soient constitutifs d'un manque de diligence de la part de l'intimé ou d'une violation des règles de l'art dépassant le risque professionnel inhérent à ce genre d'intervention. De plus, il est établi que lorsque des erreurs survenaient, le patient était repris par un médecin de la clinique, les frais étant alors assumés par l'appelante, ce qu'elle a elle-même admis. Il s'ensuit que ces reprises de traitement font partie intégrante de l'activité de l'appelante et ne constituent pas un dommage particulier que l'intimé doit être tenu de réparer.

L'appelante n'ayant pas suffisamment établi les conditions de la responsabilité de l'intimé, ses prétentions reconventionnelles doivent être rejetées.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

7. Lorsque la valeur litigieuse est inférieure à 50'000 fr. devant la Cour de justice, la procédure est gratuite (art. 116 CPC; art 19 al. 3 let. c LaCC et art. 71 a contrario RTFMC). Aucun frais judiciaire ne sera donc prélevé.

Selon l’art. 22 al. 2 LaCC, il n’est pas alloué de dépens ni d’indemnité pour la représentation en justice dans les causes soumises à la juridiction des prud’hommes. Aucun dépens ne sera donc alloué.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel interjeté le 17 mars 2023 par A______ SARL à l'encontre du jugement JTPH/43/2023 rendu le 14 février 2023 par le Tribunal des prud’hommes dans la cause C/3390/2021.

Au fond :

Annule les chiffres 7 et 8 du dispositif de ce jugement et statuant à nouveau sur ces points:

Condamne A______ SARL à verser à B______ la somme brute de 7'651 fr., sous déduction de 1'930 fr. 10 nets, avec intérêts à 5% dès le 19 juin 2020.

Invite la partie qui en a la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais d'appel :

Dit que la procédure est gratuite et qu’il n’est perçu aucun frais judiciaire.

Dit qu'il n’est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Paola CAMPOMAGNANI, présidente; Monsieur Pierre-Alain L'HÔTE, Madame Filipa CHINARRO, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.