Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/697/2025 du 24.06.2025 ( FORMA ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/450/2025-FORMA ATA/697/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 24 juin 2025 1ère section |
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dans la cause
A______ recourant
contre
SERVICE DES BOURSES ET PRÊTS D'ÉTUDES intimé
A. a. A______ (ci-après : le requérant), né le ______1992 au Sénégal, est arrivé en Suisse en 2010. Il s'y est marié en 2012 et a obtenu la nationalité suisse en 2021. Dans le cadre de son divorce, prononcé en 2024, il s'est vu attribuer une garde alternée sur sa fille, aujourd'hui âgée de dix ans.
b. Avant son arrivée en Suisse, A______ a effectué au Sénégal des études de droit qui lui ont permis d'obtenir d'abord un baccalauréat universitaire puis, en 2008, une maîtrise universitaire en droit de l'entreprise.
c. Après son arrivée en Suisse, soit de 2010 à 2013, il a suivi un programme de maîtrise en droit de l'Université de Genève (ci-après : l'université). Son admission à ce programme a impliqué la reconnaissance académique du titre universitaire obtenu au Sénégal comme équivalent à un baccalauréat universitaire en droit d'une université suisse, au sens de l'art. 27 al. 2 et 3 du règlement d'études de la faculté de droit de l'université de Genève.
En février 2013, l'université a délivré à A______ un diplôme de maîtrise universitaire en droit.
d. Au semestre d'automne 2024, le requérant a entamé auprès de l'université (faculté de droit) un cursus d'une durée normale (réduite) de quatre semestres en vue de l'obtention d'un baccalauréat universitaire en droit suisse.
e. Le 21 septembre 2024, il a déposé auprès du service des bourses et prêts d'études (ci-après : SBPE) une demande d'aide financière en relation avec cette formation, concernant plus particulièrement l'année 2024/2025.
f. Invité par le SBPE à compléter sa demande, en particulier à indiquer la raison pour laquelle il reprenait des études menant à un baccalauréat en droit alors qu'il avait déjà obtenu une maîtrise en droit, A______ a expliqué être demeuré actif dans le domaine juridique depuis 2008, notamment en prodiguant gratuitement des conseils juridiques à des proches et à des tiers dans divers domaines ainsi qu'en rédigeant dives actes juridiques. Il souhaitait « officialiser » sa pratique et mettre en œuvre l'expérience acquise en exerçant la profession d'avocat. Pour ce faire, il devait obtenir un baccalauréat universitaire en droit suisse de manière à pouvoir ensuite s'inscrire à l'école d'avocature de Genève (ci‑après : ECAV) puis, sous réserve de la réussite des examens, d'effectuer un stage d'avocat avant, enfin, de passer les examens pour l'obtention du brevet d'avocat. Il avait pu constater que, faute d'être titulaire à tout le moins d'un diplôme de l'ECAV, il lui était impossible de trouver un poste de juriste à Genève, dans le secteur public comme dans le secteur privé.
g. Par décision du 9 janvier 2025, le SBPE a refusé d'octroyer au requérant une bourse ou un prêt d'études. Une nouvelle formation menant à une deuxième maîtrise universitaire ne pouvait faire l'objet d'un financement selon l'art. 11 al. 2 let. c de la loi sur les bourses et prêts d'études du 17 décembre 2009 (LBPE - C 1 20) que lorsque la profession visée le nécessitait, notamment dans l'instruction publique. Le SBPE n'intervenant ainsi que pour les études concluant à une première maîtrise, que le requérant avait déjà obtenue, il ne pouvait financer une nouvelle formation de baccalauréat universitaire.
h. Le 15 janvier 2025, A______ a formé une réclamation contre cette décision.
Le cursus d'études entamé à l'automne 2024 ne devait pas conduire à une deuxième maîtrise mais à l'obtention d'un baccalauréat universitaire, situation visée par l'art. 11 al. 2 let. b LBPE, selon lequel un financement était possible. Il avait expliqué les raisons pour lesquelles il devait obtenir un baccalauréat universitaire en droit suisse, dès lors qu'un tel titre était nécessaire pour être admis à l'ECAV.
Le requérant a, pour le surplus, exposé sa situation professionnelle et financière, justifiant selon lui l'octroi d'une aide financière. Malgré les diplômes qu'il avait obtenus, il en était réduit à exercer une activité d'agent de sécurité à la vallée de Joux, à une heure de voiture de Genève. Il avait dû réduire ses horaires pour suivre ses études et devait prendre soin de sa fille.
i. Par décision sur réclamation du 20 janvier 2025, le SBPE a maintenu sa décision de refus du 9 janvier 2025.
Selon la jurisprudence de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) relative à la possibilité de financer une seconde formation de degré secondaire II, qu'il convenait d'appliquer également aux secondes formations de degré tertiaire, l'octroi d'un prêt au sens de l'art. 11 al. 2 LBPE supposait que l'état ait financé une première formation. Tel n'étant pas le cas en l'espèce, le requérant ne pouvait disposer d'un prêt au sens de l'art. 11 al. 2 let. b LBPE.
Il ne pouvait non plus prétendre à une bourse pour son cursus actuel, menant à l'obtention d'un baccalauréat universitaire en droit. Les cursus de baccalauréat et de maîtrise constituaient en effet les deux phases d'une seule filière d'études, le second faisant suite au premier et offrant un complément et un approfondissement des connaissances dans le domaine choisi ; dans les hautes écoles, la maîtrise représentait généralement le titre de fin d'études. Dans ce contexte, l'octroi d'un prêt pour des études menant à une maîtrise (art. 11 al. 2 let. c LBPE), susceptible d'être converti en cas de réussite (art. 26 al. 1 let. b LBPE), était une incitation à terminer ses études. Dans le cas d'espèce, le requérant, qui avait obtenu une maîtrise universitaire, soit le diplôme de formation initiale le plus élevé, avait atteint l'objectif de terminer ses études et ne pouvait donc prétendre à des prestations financières au sens de la LBPE. Le financement d'un cursus de baccalauréat après l'obtention d'une maîtrise, qui plus est dans la même filière, n'était ainsi pas prévu par cette loi.
B. a. Le 11 février 2025, A______ a formé auprès de la chambre administrative un recours contre cette décision, concluant à son annulation et au renvoi de la cause au SBPE en vue de l'octroi d'une bourse ou d'un prêt d'études en relation avec le cursus de baccalauréat universitaire engagé en automne 2024.
Ce cursus visait à l'obtention d'un baccalauréat universitaire et non d'une maîtrise. Ces deux formations étaient différentes. Les art. 11 al. 1 let. d ch. 1 et al. 2 let. b LBPE prévoyaient expressément que les première et deuxième formations dispensées par les universités et aboutissant à un baccalauréat pouvaient donner droit à une bourse, respectivement à un prêt. Les prestations requises concernaient la formation menant au baccalauréat et non l'ECAV ou une maîtrise. Sa situation financière, devenue difficile en raison de la décision de refus contestée, ne lui permettait pas en l'état de poursuivre dans de bonnes conditions la formation engagée en automne 2024.
b. Dans ses observations, le SBPE a conclu au rejet du recours.
Dans la mesure où il n'avait jamais reçu de prestations de l'état, le recourant, selon la jurisprudence de la chambre administrative, ne pouvait prétendre à un prêt au sens de l'art. 11 al. 2 LBPE.
Ayant déjà obtenu une maîtrise, titre correspondant à une formation complète en droit et permettant aux diplômés d'entrer directement dans le monde du travail, le recourant n'était par ailleurs pas éligible à une bourse au regard des art. 11 al. 2 let. c ou e LBPE.
Selon la jurisprudence de la chambre administrative, la formation dispensée par l'ECAV ne pouvait donner lieu à des prestations au sens de la LBPE, devant être qualifiée de formation approfondie et non de formation de base. Il était certes probable que, faute de disposer d'un titre universitaire lui permettant de suivre la formation dispensée par l'ECAV, le recourant n'ait qu'un accès limité au marché de l'emploi juridique en Suisse. Cette situation résultait cependant du choix qu'il avait fait, lors de son arrivée en Suisse, de privilégier un programme de maîtrise.
c. Le recourant a répliqué, persistant dans son argumentation et ses conclusions.
d. Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 28 al. 3 LBPE).
2. Le litige porte sur le droit du recourant à obtenir une bourse, ou subsidiairement un prêt, pour la formation de baccalauréat en droit qu'il a entamée en septembre 2024 auprès de l'université.
2.1 Le 18 juin 2009, les cantons ont adopté l’accord intercantonal sur l’harmonisation des régimes de bourses d’études (CBE - C 1 19), entré en vigueur pour Genève le 1er juin 2012 (loi autorisant le Conseil d’État à adhérer au CBE du 24 février 2012 - L-CBE - C 1 19.0), qui vise à encourager dans l’ensemble de la Suisse l’harmonisation des allocations de formation du degré secondaire II et du degré tertiaire, notamment en fixant des normes minimales concernant les formations ouvrant le droit à une bourse d’études, la forme, le montant, le calcul et la durée du droit à l’allocation (art. 1 let. a CBE). Selon l’art. 8 CBE, les filières de formation et d’études reconnues et donnant droit à une allocation sont celles du degré secondaire II ou tertiaire exigée pour exercer la profession visée et les mesures obligatoires de préparation aux études du degré secondaire II et tertiaire, de même que les programmes passerelles et les solutions transitoires (al. 1). Le droit à une allocation échoit à l’obtention, au degré tertiaire A, d’un bachelor ou d’un master consécutif, au degré tertiaire B, de l’examen professionnel fédéral, de l’examen professionnel fédéral supérieur ou d’un diplôme d’une école supérieure (al. 2). Aux termes de l’art. 9 CBE, une formation est reconnue lorsqu’elle se termine par un diplôme reconnu au plan suisse par la Confédération ou par les cantons signataires (al. 1). Une formation qui prépare à un diplôme reconnu à l’échelon fédéral ou cantonal peut être reconnue par les cantons signataires (al. 2). Les cantons signataires peuvent reconnaître, pour leurs ayant droits, d’autres formations donnant droit à une allocation (al. 3). Selon l'art. 10 al. 2 CBE, les cantons peuvent également verser des allocations de formation pour une deuxième formation ou une formation continue.
2.2 La LBPE règle l’octroi d’aides financières aux personnes en formation. Le financement de la formation incombe aux parents et aux tiers qui y sont légalement tenus ainsi qu’aux personnes elles-mêmes en formation. Les aides financières sont accordées à titre subsidiaire (art. 1 LBPE).
L'octroi d'aides financières à la formation doit notamment encourager et faciliter l'accès à la formation, permettre le libre choix de la formation et de l'établissement de formation, encourager la mobilité, favoriser l'égalité des chances de formation, soutenir les personnes en formation en les aidant à faire face à leurs besoins (art. 2 LBPE).
Les aides financières sont accordées sous forme de bourses, de prêts ou de remboursement de taxes (art. 5 al. 1 LBPE). Les premières sont des prestations uniques ou périodiques non remboursables, qui permettent aux bénéficiaires d'entreprendre, de poursuivre ou de terminer une formation (art. 4 al. 1 LBPE). Les secondes sont définies comme des prestations uniques ou périodiques, qui doivent être remboursées à la fin de la formation ou en cas d'interruption ou d'échec de la formation (art. 4 al. 2 LBPE).
2.3 L’art. 11 LBPE définit les formations pouvant donner droit à une aide financière.
Selon l'art. 11 al. 1 let. d LBPE, peuvent notamment donner droit à des bourses les formations professionnelles supérieures universitaires (tertiaire A), à savoir les formations dispensées par les universités et les écoles polytechniques fédérales aboutissant à un bachelor (ch. 1) et les formations dispensées par les hautes écoles spécialisées (ci-après : HES) aboutissant à un bachelor (ch. 2).
Aux termes de l’art. 11 al. 2 LBPE, peuvent donner droit à des prêts notamment les deuxièmes formations de niveau HES et universitaire aboutissant à un bachelor (let. b), les études menant à un premier master, celles menant à un deuxième master lorsque la profession visée le nécessite, notamment dans l'instruction publique (let. c), ainsi que les formations de niveau secondaire II ou tertiaire lorsque la personne en formation n’a pas droit à une bourse (let. e).
Selon l’art. 11 al. 3 LBPE, ne donnent toutefois pas droit aux bourses ou aux prêts les formations dispensées dans l’enseignement obligatoire (let. a), la formation continue à des fins professionnelles (let. b), les formations doctorales et les maîtrises universitaires d’études avancées de formation approfondie (let. c), les séjours linguistiques (let. d).
Des bourses pour des cas de rigueur peuvent en outre être octroyées dans les limites des disponibilités budgétaires (art. 23 al. 3 LBPE), en particulier pour les personnes en formation qui, pour des raisons familiales, personnelles ou de santé, se trouveraient dans une situation de précarité (art. 16 du règlement d'application de la loi sur les bourses et prêts d'études du 2 mai 2012 - RBPE - C 1 20.01).
2.4 À teneur des travaux préparatoires – exposé des motifs (MGC 2008-2009 XI/2, p. 14’907 ss, spéc. 14’933 s.) –, concernant l'al. 1 de l'art. 11 LBPE, sont financées par des bourses notamment les formations sanctionnées par les examens professionnels et professionnels supérieurs fédéraux, les écoles supérieures, les HES et les universités jusqu'à l'obtention du baccalauréat (ou bachelor).
S'agissant de l'al. 2, ces travaux préparatoires indiquent que les deuxièmes formations de base sont financées par des prêts remboursables. En effet, l'obligation subsidiaire de l'État de financer la formation ne peut pas aller au-delà du financement d'une première formation qui permet d'intégrer le monde du travail. Le financement de la maîtrise (ou master) est assuré par un prêt, qui sera converti en bourse en cas de réussite. Il s'agit là d'une incitation à terminer ses études. Les formations dispensées, par exemple par l'École hôtelière de Genève, font l'objet de frais de formation plus élevés que les frais de formation dans d'autres établissements. Dans ce cas, la personne en formation pourrait obtenir un prêt en plus d'une bourse.
2.5 Dans un arrêt ATA/39/2018 du 16 janvier 2018, la chambre administrative a examiné la question de savoir si une étudiante ayant déjà achevé une formation initiale du degré secondaire II (un CFC d'employée de commerce) et qui poursuivait des études pour obtenir une maturité gymnasiale au collège, laquelle constituait également une formation initiale du secondaire II, pouvait encore obtenir une bourse, plutôt qu'un prêt, pour cette seconde formation. Après avoir rappelé que l'obligation subsidiaire de l'État de financer la formation ne pouvait pas aller au-delà du financement d'une première formation, la chambre administrative a relevé que, pour que la problématique d'un prêt pour une deuxième formation initiale (secondaire II) se pose, il fallait que l'État ait financé une première formation initiale (secondaire II), ce qui ne ressortait pas du dossier (consid. 5c). Le SBPE aurait donc dû considérer le nouveau cursus scolaire de l'étudiante non pas comme une deuxième formation initiale (secondaire II) mais comme une première formation initiale (secondaire II).
Dans un arrêt ATA/364/2019 du 2 avril 2019 concernant une étudiante qui, après avoir obtenu une maîtrise en arts HES-SO en interprétation musicale avec orientation en concert, sollicitait une bourse afin de suivre une formation conduisant à un baccalauréat universitaire délivré par la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation de l'université, la chambre administrative a relevé que le financement de sa formation de maîtrise avait été assuré par un prêt au sens de l'art. 11 al. 2 LBPE, par la suite converti en bourse d'études non remboursable en application de l'art. 26 al. 1 let. a LBPE. L'étudiante avait ainsi déjà bénéficié d'une bourse lui permettant de mener à bien une première formation, de telle sorte que la nouvelle formation entamée auprès de l'université devait être considérée comme une deuxième formation, pour laquelle elle ne pouvait prétendre qu'à un prêt.
2.6 Selon l'art. 24 de la la loi sur la profession d’avocat du 26 avril 2002 (LPAv - E 6 10), qui traite à son chapitre IV de l'obtention du brevet d’avocat, la personne concernée doit, pour obtenir ce titre, cumulativement, avoir effectué des études de droit sanctionnées soit par une licence ou un master délivrés par une université suisse, soit par un diplôme équivalent délivré par une université de l’un des États qui ont conclu avec la Suisse un accord de reconnaissance mutuelle des diplômes (let. a), avoir effectué une formation approfondie à la profession d’avocat validée par un examen (let. b), avoir accompli un stage (let. c) et avoir réussi un examen final (let. d).
Selon l’art. 25 al. 1 LPAv, pour être admis à la formation approfondie, il faut remplir les conditions cumulatives suivantes : être de nationalité suisse ou ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou de l’Association européenne de libre-échange, à défaut être titulaire d’un permis de séjour, d’établissement ou lié au statut de fonctionnaire international et résider en Suisse depuis cinq ans au moins (let. a) ; avoir une connaissance suffisante de la langue française (let. b) ; avoir l’exercice des droits civils (let. c) ; ne pas avoir fait l’objet d’une condamnation pénale pour des faits incompatibles avec l’exercice de la profession, à moins que cette condamnation ne figure plus sur l’extrait privé du casier judiciaire (let. d) ; ne pas faire l’objet d’un acte de défaut de biens (let. e) ; être titulaire d’une licence en droit suisse, d’un bachelor en droit suisse délivré par une université suisse (let. f). L'art. 25 al. 2 LPav prévoit, dans un cas de figure n'entrant pas en considération dans le cas d'espèce, une dispense de cette dernière condition.
La formation approfondie imposée par l'art. 24 let. b LPav est une condition d'admission au stage d'avocat, lui aussi imposé par l'art. 24 let. c LPav (art. 26 al. 1 LPav). Elle est dispensée par l'ECAV (art. 30A al. 1 LPav).
Selon la jurisprudence de la chambre administrative (ATA/552/2016 du 28 juin 2016 consid. 8a), la formation dispensée par l'ECAV ne correspond à aucune de celles visées par l'art. 11 al. 1 LBPE et ne peut donc donner lieu à l'octroi d'une bourse.
2.7 Il résulte du dossier, dans le cas d'espèce, que le recourant n'a pour l'instant bénéficié d'aucune aide financière du SBPE, que ce soit sous forme d'une bourse ou d'un prêt, remboursable ou non. Conformément à la jurisprudence ATA/39/2018 précitée, que le SBPE, selon ses indications, applique également aux formations relevant du domaine tertiaire, le cursus conduisant à un baccalauréat universitaire en droit suisse entamé en septembre 2024 par le recourant doit être considéré, sous l'angle de la nature de l'aide financière à laquelle il pourrait prétendre, comme une première formation.
Comme l'a retenu le SBPE, c'est donc sous la forme d'une bourse, et non sous celle d'un prêt, qu'une éventuelle aide financière pourra lui être octroyée.
Le principe de l'octroi d'une aide financière pour une formation conduisant à l'obtention d'un baccalauréat universitaire résulte de l'art. 11 al. 1 let. d ch. 1 (pour une première formation) et al. 2 let. b LBPE (pour une deuxième formation). À ce stade du raisonnement, rien ne fait donc obstacle à l'octroi d'une bourse au recourant.
Selon le SBPE, la situation de ce dernier devrait toutefois être analysée sous l'angle de l'art. 11 al. 2 let. c LBPE, selon lequel les études menant à une deuxième maîtrise ne peuvent être financées que lorsque la profession visée le nécessite, notamment dans l'enseignement. Le cursus de maîtrise constituerait en effet le deuxième cycle des études universitaires, faisant suite au baccalauréat. Cette argumentation se heurte cependant à la systématique de l'art. 11 LBPE, qui fait une distinction entre les formations universitaires conduisant à un premier ou un deuxième baccalauréat, donnant droit à une bourse ou à un prêt, et celles conduisant à une première maîtrise, donnant droit à un prêt convertible en bourse en cas de succès, voire à une deuxième maîtrise, ne donnant droit à un prêt qu'à la condition que la profession visée le nécessite. Les deux cycles d'études universitaires sont ainsi distingués par la loi, de même que leur financement. Le fait que le recourant, qui a déjà obtenu une maîtrise, ne pourrait obtenir de financement pour une deuxième maîtrise – qu'il n'a au demeurant pas l'intention d'obtenir – est ainsi sans pertinence pour déterminer son droit à un financement pour une formation conduisant à un deuxième baccalauréat universitaire.
De la même manière, le fait que le recourant ne pourra, selon la jurisprudence, obtenir de bourse pour continuer sa formation à l'ECAV (ATA/552/2016 précité), dès lors qu'il ne s'agit pas là d'une formation de base, n'a pas pour conséquence de le priver d'aide financière en relation avec une deuxième formation de base indispensable pour suivre cet enseignement.
Le SBPE soutient enfin que, ayant obtenu une maîtrise universitaire, le recourant a achevé la formation initiale la plus élevée dans son domaine de compétence. Comme vu ci-dessus cependant, la LBPE permet, sous certaines conditions, le financement d'une deuxième formation initiale. Certes, la particularité du cas d'espèce réside dans le fait que la deuxième formation entamée devrait conduire le recourant à l'obtention d'un titre universitaire en apparence identique à celui qu'il a déjà obtenu au Sénégal, soit un baccalauréat universitaire en droit. Cette identité n'est cependant qu'apparente dans la mesure où le titre universitaire sénégalais du recourant n'a été reconnu en Suisse qu'à des fins académiques, soit dans le cadre de son admission à une formation de maîtrise à l'université, et où, comme le reconnaît le SBPE, il n'offre pas de réelles possibilités d'exercer une activité dans le domaine juridique en Suisse. Comme le recourant l'a exposé dans sa requête, un baccalauréat universitaire en droit suisse lui est nécessaire pour poursuivre sa deuxième formation, ou à tout le moins pour pouvoir exercer une activité dans le domaine juridique. Le fait que, par le jeu d'une reconnaissance académique de ses diplômes sénégalais, il ait été en mesure d'obtenir une maîtrise universitaire en Suisse sans obtenir au préalable un baccalauréat universitaire en droit suisse ne modifie pas cette conclusion.
Il s'ensuit que c'est à tort que le SBPE a retenu que la deuxième formation entamée par le recourant ne pouvait lui permettre de bénéficier d'une aide financière. Le recours sera partant partiellement admis et la cause retournée au SBPE afin que celui-ci examine si les conditions financières à l'octroi d'une bourse sont réalisées.
3. Vu l’issue du litige et la procédure étant gratuite, aucun émolument ne sera prélevé (art. 87 al. 1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée au recourant, qui a agi en personne et qui n’a pas exposé de frais pour sa défense, qu'il a assurée lui‑même (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 11 février 2025 par A______ contre la décision du service des bourses et prêts d’études du 20 janvier 2025 ;
au fond :
l'admet partiellement ;
annule la décision sur réclamation du service des bourses et prêts d’études du 20 janvier 2025 ;
renvoie la cause au service des bourses et prêts d’études pour nouvelle décision au sens des considérants ;
dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;
dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'au service des bourses et prêts d'études.
Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Patrick CHENAUX, Eleanor McGREGOR, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
M. MAZZA
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| la présidente siégeant :
F. PAYOT ZEN-RUFFINEN |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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