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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3912/2024

ATA/583/2025 du 27.05.2025 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3912/2024-FPUBL ATA/583/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 mai 2025

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Carole REVELO, avocate

contre

DÉPARTEMENT DES FINANCES, DES RESSOURCES HUMAINES ET DES AFFAIRES EXTÉRIEURES intimé

 



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1997, a été engagé le 1er janvier 2018 en qualité de commis administratif 2 à l’office des poursuites (ci-après : OP) par le département des finances, des ressources humaines et des affaires extérieures ci‑après : le département).

Le 1er janvier 2020 il a été nommé fonctionnaire

Le 1er janvier 2023, il a été promu à la fonction de commis administratif 3.

b. A______ a été absent pour cause de maladie du 31 janvier au 5 février 2024 puis du 10 au 17 avril 2024, selon certificats médicaux du Dr B______ des 1er février et 11 avril 2024.

c. Selon un courrier du Dr B______ du 24 avril 2024, remis le même jour par A______ à sa hiérarchie, il avait été victime d’un accident le 23 avril 2024 vers 21h00. Selon un certificat médical du même jour, sa capacité de travail était nulle du 24 au 30 avril 2024. L’incapacité totale de travail a ensuite été attestée jusqu’au 24 juin 2024, selon certificats médicaux successifs du Dr B______ des 29 avril, 13 et 27 mai et 10 juin 2024.

d. Le 10 juin 2024, le responsable des ressources humaines (ci-après : RH) a indiqué à A______ que ses absences pour motifs de santé totalisaient 163 jours sur trois ans et l’a invité à déposer une demande auprès de l’assurance-invalidité, à défaut de quoi les RH le feraient eux-mêmes.

e. Le 17 juin 2024, les RH ont saisi le médecin conseil pour qu’il se prononce sur l’incapacité de travail alléguée par A______ pour la période du 31 janvier au 24 juin 2024.

Il cumulait les absences. Celles-ci étaient majoritairement intervenues à la suite de mises au point de sa hiérarchie. L’année précédente, il avait été absent de nombreux mois après une rencontre au sujet de ses prestations, dont l’amélioration lui était demandée. Il avait malgré tout accompli son service civil, avait pris des vacances puis avait à nouveau été absent pour cause de maladie. La hiérarchie avait observé qu’il ne respectait pas systématiquement les horaires de connexion lorsqu’il était en télétravail. Le 9 avril 2024, elle l’avait interpellé sur ce point et il avait indiqué avoir tardé car il était au garage. Le lendemain, il était absent pour cause de maladie jusqu’au 17 avril 2024. La veille de l’accident du 24 avril 2024, sa hiérarchie avait eu un échange avec lui au sujet de ses prestations ; les tâches effectuées en télétravail n’étaient pas suffisantes ; elle avait suspendu son activité par télétravail et lui avait demandé de venir au bureau tous les jours ; le lendemain à 07h24 il l’avait avisée qu’il avait subi un accident au sport, qu’il avait passé plusieurs heures aux urgences sans être reçu et qu’il allait voir son médecin traitant. Depuis lors, il n’était pas revenu et n’avait pas voulu faire de télétravail. Il semblait se retrouver en maladie ou accident dès que sa hiérarchie lui demandait d’être présent ou de traiter ses tâches avec plus de célérité, ce malgré un coaching reçu depuis son retour en début d’année pour lui permettre d’être plus efficace. Les absences perlées des derniers mois et la durée de l’absence en lien avec l’accident soulevaient des questions.

f. Le 20 juin 2024, A______ a informé sa hiérarchie avoir reçu le 18 juin 2024 une convocation pour accomplir une période de service civil du 24 juin au 23 août 2024. Il a transmis un certificat du Dr B______ du 21 juin 2024 ramenant la fin de sa période d’incapacité du 24 au 23 juin 2024.

g. Le 27 juin 2024, les RH ont informé A______ de la mission du médecin conseil, l’invitant à délier ses médecins du secret à l’égard de celui-ci et à leur transmettre le formulaire de demande de renseignements médicaux pour qu’ils le complètent et l’adressent au médecin conseil jusqu’au 20 juillet 2024, et l’avertissant que les indemnités pourraient être réduites ou supprimées et que leur restitution pourrait être réclamée.

Le formulaire de demande de renseignements médicaux contient notamment les rubriques suivantes à compléter : (a) le(s) diagnostic(s) avec répercussion sur la capacité de travail ; (b) le(s) diagnostic(s) sans répercussion sur la capacité de travail ; (c) l’évolution, les bénéfices observés et les interventions prévues ; (d) les facteurs psychosociaux (dé)favorables et le lien de causalité entre le contexte professionnel et l’incapacité de travail ; (e) le traitement ; (f) le pronostic concernant la capacité de travail ; (g) le pronostic concernant la capacité de travail dans le poste ; (h) le pronostic concernant la capacité de travail dans une activité adaptée et (i) des remarques, les pièces médicales utiles, rapports d’examen et lettres de sorties pouvant être annexées.

h. Le 17 juillet 2024, le Dr C______ a convoqué A______ pour le 31 juillet 2024.

Selon le rapport médical établi le 31 juillet 2024 par le Dr C______, l’arrêt de travail qui avait débuté le 24 avril 2024 n’était valable que pour une durée d’un mois et la pleine capacité de travail avait été retrouvée le 24 mai 2024.

i. Le 14 août 2024, les RH ont transmis à A______ le rapport du Dr C______ et lui ont indiqué qu’ils envisageaient de déduire, de son solde de vacances de 33 jours, 20 indemnités journalières pour incapacité de travail perçues à tort.

j. Le 22 août 2024, les RH ont indiqué à A______ qu’il était attendu à sa place de travail le 26 août 2024, à défaut de quoi l’indemnité pour incapacité de travail ne lui serait plus versée dès cette date, soit son retour prévu du service civil, ses absences seraient déduites de son droit aux vacances puis son traitement serait supprimé.

k. Le 26 août 2024, les RH ont reçu A______ pour qu’il les éclaire sur ses absences injustifiées et le caractère tardif des informations fournies au sujet de son service civil.

Ils lui ont notamment demandé d’indiquer s’il avait réservé lui-même les dates pour son service civil et s’il avait demandé à son médecin de réduire la durée de la dernière incapacité de travail attestée.

Il a refusé de s’exprimer.

Les RH lui ont indiqué avoir dû lui écrire le 21 décembre 2023 car il ne s’était pas présenté après une absence, et ce sans produire de certificat. Plus aucune absence non justifiée ne serait tolérée. Il devait annoncer la planification de son service civil. Un nouvel écart de conduite conduirait à un entretien de service. Un délai de dix jours lui était imparti pour se déterminer par écrit.

Il s’est plaint de la charge de travail et de la pression qu’il subissait et a refusé de signer le procès-verbal.

l. Le 16 septembre 2024, A______ a contesté les conclusions du Dr C______. Il n’avait pas raccourci la durée de l’incapacité de travail pour effectuer son service civil. Ses propos n’avaient été que partiellement repris dans le procès-verbal du 26 août 2024. Il s’est plaint de s’être vu demander d’envoyer une photo de sa cheville le lendemain de l’accident. Tout en étant conscient qu’une pareille demande était intrusive, il avait accepté d’envoyer une photo sur laquelle sa blessure était clairement identifiable. Le Dr B______ n’avait pas été contacté par le Dr C______. Il était courant que la situation de santé d’un collaborateur évolue et le 21 juin 2024, le Dr B______ avait estimé qu’il pourrait reprendre une activité dès le 24 juin 2024. Il s’opposait à toute restitution des indemnités reçues et à la réduction de son droit aux vacances. Il devait être sursis à toute décision jusqu’à réception du rapport complémentaire qu’il avait demandé au Dr B______.

m. Par décision du 18 octobre 2024, déclarée exécutoire nonobstant recours, le département a constaté que le droit au versement des indemnités pour incapacité de travail d’A______ avait pris fin le 23 mai 2024, a déduit les absences non justifiées du 24 mai au 23 juin 2024 de son solde de vacances à concurrence de CHF 5'600.- bruts, soit 20 jours, et a fixé le solde de son droit aux vacances à CHF 3'640.- bruts, soit 13 jours.

Le 24 avril 2024, il avait informé sa hiérarchie s’être blessé à la cheville et lui avait envoyé spontanément une photo éphémère de sa blessure, laquelle avait ensuite disparu de l’application.

Le 21 juin 2024, s’étonnant de la brièveté du délai d’annonce, ils lui avaient demandé de leur faire parvenir une copie de sa convocation au service civil. Ils avaient par ailleurs appris de la Confédération qu’il avait lui-même proposé depuis plusieurs semaines des dates d’affectation, raison pour laquelle le délai était si court, sans toutefois les en informer.

Ils lui avaient transmis le 26 août 2024 une copie de l’intégralité de son dossier.

Contrairement à ce qu’il affirmait, sans le prouver, ils ne lui avaient pas demandé d’envoyer une photo de sa blessure. Il ne leur appartenait pas de se déterminer sur la base d’une photo. L’incapacité de travail devait être déterminée par le médecin conseil. Celui-ci s’était basé sur le questionnaire complété par le médecin traitant et n’avait aucune obligation de prendre contact avec celui-ci.

Le rapport complémentaire qu’il disait avoir demandé au Dr B______ ne leur était toujours pas parvenu. Il n’avait pas apporté la preuve de son incapacité de travail du 24 mai au 23 juin 2024.

B. a. Par acte remis à la poste le 25 novembre 2024, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation, à ce qu’il soit constaté qu’il avait droit au versement de l’indemnité pour incapacité de travail du 24 mai au 23 juin 2024 et que 20 jours de vacances lui soient restitués. Subsidiairement, la cause devait être renvoyée au département pour nouvelle décision. À titre préalable, l’effet suspensif devait être restitué au recours et le département devait se voir enjoindre de produire l’intégralité de son dossier.

Les faits avaient été appréciés de manière arbitraire. La décision violait la loi et le principe de la bonne foi. Il n’avait vu le Dr C______ que le 31 juillet 2024 alors qu’il avait recouvré sa capacité de travail depuis le 24 juin 2024. Le Dr C______ ne pouvait ainsi se prononcer que sur sa capacité à ce moment-là et pour le futur, et non rétrospectivement pour le mois de juin 2024. Il n’avait pas pris contact avec son médecin traitant et n’avait effectué aucun examen. Il était toujours dans l’attente du rapport complémentaire qu’il avait demandé au Dr B______ et qu’il transmettrait dès réception. En retenant que l’examen du médecin conseil avait une valeur plus grande, le département avait procédé à une appréciation arbitraire.

La convocation par le Dr C______ plus d’un mois après qu’il eut annoncé la fin de son incapacité de travail était contraire au principe de la bonne foi. Il ne pouvait se douter que son incapacité de travail serait remise en cause. L’administration lui avait au contraire laissé croire que son incapacité était admise. En agissant ainsi, le département ne lui laissait aucune possibilité d’adapter son comportement pour le passé.

b. Le 16 décembre 2024, le département s’est opposé à la restitution de l’effet suspensif.

c. Le 10 janvier 2025, le recourant a persisté dans ses conclusions et son argumentation sur effet suspensif. En l’absence de restitution, il serait privé du repos indispensable pendant la durée de la procédure. Si son recours était admis, il ne serait pas libre de prendre l’intégralité du solde de son droit aux vacances de manière consécutive. Il était ainsi exposé à un préjudice irréparable.

d. Par décision du 15 janvier 2025, la chambre administrative a refusé de restituer l’effet suspensif au recours, le recourant ne pouvant obtenir sur mesures provisionnelles ce qu’il demandait au fond, les chances de succès de son recours n’apparaissant pas manifestes et le recourant n’établissant pas un préjudice irréparable dès lors qu’en cas d’admission de son recours, il pourrait prendre le solde de ses vacances.

e. Le 17 janvier 2025, le département a conclu au rejet du recours.

Pour établir son rapport, le Dr C______ avait disposé des informations transmises dans la demande d’avis et des pièces annexées (certificats médicaux et relevé des absences) ainsi que des informations nécessaires transmises par le médecin traitant du recourant.

f. Le 21 mars 2025, le recourant a persisté dans ses conclusions et son argumentation.

Il produisait un courrier du Dr B______ du 23 décembre 2024.

Il ressort de ce document que le Dr B______ confirme qu’il l’avait reçu en urgence le 24 avril 2024 pour un accident survenu la veille « au foot ». Il présentait une importante tuméfaction de la partie latérale de sa cheville droite compatible avec la torsion de cheville survenue lors du match de la veille. L’examen radiologique avait confirmé ce traumatisme. La conclusion du rapport radiologique était « Épanchement talo‑crural. Tuméfaction des tissus mous en regard de la malléole latéral. Ossicule à l’extrémité distale de la fibula, possiblement séquellaire d’une entorse du complexe ligamentaire latéral. Hyperostose sur le versant dorsal du col du talus et antérieurement à l’épiphyse tibiale distale pour des lésions microtraumatiques chroniques (patient footballeur ?) ». Le document conclut : « J’ai revu le 29 avril 2024 Monsieur et en raison de la douleur à l’examen clinique je lui ai prolongé l’arrêt de travail. En raison d’une évolution lente et de la symptomatologie avertie par mon patient l’arrêt de travail a été prolongé. Lors de la consultation du 21 juin 2024 la tuméfaction et la symptomatologie avait diminué et en accord avec mon patient je lui ai livré une reprise de travail à 100% pour le 24 juin 2024 ».

Selon le recourant, ces éléments auraient pu être communiqués au Dr C______ s’il avait pris contact avec le Dr B______. Lors de l’entretien, le Dr C______ ne pouvait que confirmer qu’il était en état de travailler à cette date. Aucun élément ne lui permettait de conclure, un mois après son terme, que l’incapacité de travail n’était pas justifiée. Une force probante plus importante devait être reconnue aux déterminations du Dr B______.

g. Le 25 mars 2025, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

h. Il sera revenu en tant que de besoin dans la partie en droit sur les allégués et les pièces produites par les parties.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             À titre préalable, le recourant a conclu dans son recours à ce que l’intimé se voie enjoindre de produire l’intégralité de son dossier.

2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; 145 I 167 consid. 4.1).

2.2 En l’espèce, l’intimé a indiqué au recourant dans la décision querellée du 18 octobre 2024 lui avoir remis le 26 août 2024 une copie de l’intégralité de son dossier. L’intimé a en outre produit devant la chambre de céans un chargé de pièces avec sa réponse du 20 janvier 2025. Le recourant n’a enfin pas exigé dans sa réplique d’autres pièces et il ne ressort pas du dossier que l’intimé détiendrait d’autres pièces ni que d’autres pièces seraient nécessaires à la solution du litige.

La conclusion a ainsi perdu son objet.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la déduction du solde de vacances du recourant de ses absences du 24 mai au 23 juin 2024 à concurrence de CHF 5'600.- bruts, soit 20 jours, et la fixation du solde de son droit aux vacances à CHF 3'640.- bruts, soit 13 jours.

3.1 Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a) et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

3.2 Le recourant est soumis à la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et au règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01).

3.3 L’art. 53 RPAC prévoit que le traitement du fonctionnaire est fixé dans les limites des lois et règlements (al. 1) et que celui-ci y a droit dès le jour où il occupe sa fonction et jusqu’au jour où il cesse de l’occuper, pour cause de démission ou pour toute autre cause (al. 2).

3.4 Selon l’art. 27 RPAC, les membres du personnel ont droit à une période de vacances annuelles de (a) 5 semaines pour les membres du personnel âgés de plus de 20 ans révolus et (b) 6 semaines pour les membres du personnel jusqu’à l’âge de 20 ans révolus, les fonctionnaires et les employés dès l’âge de 60 ans, ainsi que pour les cadres supérieurs (al. 1). Chaque jour de vacances correspond à un jour de travail (al. 3). L’exercice vacances correspond à l’année civile. (al. 4). Les membres du personnel ont droit à des vacances annuelles proportionnelles à leur taux d’activité (al. 5). Les membres du personnel qui n’ont été qu’une partie de l’année au service de l’État ont droit à des vacances annuelles proportionnelles à la durée de leur activité (al. 6).

3.5 L’art. 54 RPAC prévoit qu’en cas d’absence pour cause de maladie ou d’accident attestée par certificat médical, le traitement est remplacé par une indemnité pour incapacité de travail (al. 1). Moyennant une prime payée par le fonctionnaire, ou l’employé dès la 2e année d’activité, l’État garantit la totalité du traitement à concurrence de 730 jours civils (520 jours de travail) (al. 2). Lorsqu’une absence a dépassé 45 jours ininterrompus pour des raisons médicales, la hiérarchie signale le cas au médecin conseil de l’État. Ce dernier peut prendre contact avec le médecin traitant du membre du personnel et décide de toute mesure pour respecter tant la mission du médecin traitant que l’intérêt de l’État. Le médecin conseil de l’État établit une attestation d’aptitude, d’aptitude sous conditions ou d’inaptitude à occuper la fonction. Il précise les contre-indications qui justifient son attestation (al. 3). L’indemnité pour incapacité de travail peut être réduite ou supprimée en cas d’abus ou lorsque l’accident ou la maladie sont dus à une faute grave du fonctionnaire (al. 4). La durée des prestations prévues à l’al. 2 ne peut dépasser 730 jours civils (520 jours de travail) au total sur une période d’observation de 1'095 jours civils (780 jours de travail) (al. 5). L’État récupère les prestations que le fonctionnaire ou l’employé reçoit des assurances sociales cantonales ou fédérales ainsi que les prestations d’une institution de prévoyance (al. 6).

3.6 L’art. 28 RPAC prévoit que les absences non justifiées sont déduites des vacances (al. 1). En cas d’absence pour cause de service militaire, de service civil, de maladie ou d’accident non professionnel, le droit aux vacances annuelles est réduit proportionnellement après cinq mois d’absence. Il s’éteint après une année d’absence (al. 2).

3.7 À teneur de l’art. 62 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), celui qui, sans cause légitime, s’est enrichi aux dépens d’autrui, est tenu à restitution (al. 1). La restitution est due, en particulier, de ce qui a été reçu sans cause valable, en vertu d’une cause qui ne s’est pas réalisée, ou d’une cause qui a cessé d’exister (al. 2).

3.8 Tant la doctrine que la jurisprudence reconnaissent que le principe de la répétition de l'indu, énoncé aux art. 62 ss CO, constitue une règle générale de l'ordre juridique, applicable en droit public. L'obligation de restituer l'indu se fonde en premier lieu sur les dispositions des lois spéciales qui la prévoient et, à défaut, sur les règles générales de l'enrichissement illégitime au sens des art. 62 à 67 CO. Dès lors que l'on soumet l'obligation de restituer aux art. 62 ss CO, il convient en principe d'appliquer ces dispositions avec leurs avantages et inconvénients respectifs pour l'enrichi et le lésé, sans en dénaturer le sens ou la portée, quand bien même elles s'incorporent dans un système régi en partie par le droit public (ATF 138 V 426 consid. 5.1 ; ATA/368/2022 du 5 avril 2022 consid. 3a ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3e éd., 2011, p. 168-169).

Ainsi, l'administré qui verse à l'État une somme dont il n'est pas redevable est en droit d'en réclamer la restitution, même en cas de silence de la loi, si le versement est intervenu sans cause valable et l'État qui verserait à l'administré une somme dont il n'est pas redevable est en droit d'en réclamer la restitution même si le versement est intervenu sans cause valable, alors même que le cas n'est pas prévu expressément par la loi (ATA/368/2022 précité consid. 3a et les références citées).

Dès lors, sur la base de l’art. 62 CO, qui constitue la règle de principe (Pierre TERCIER/Pascal PICHONNAZ, Le droit des obligations, 5e éd., 2012, n. 1824) ou clause générale (Benoît CHAPPUIS, in Luc THÉVENOZ/ Franz WERRO, Code des obligations I, Commentaire romand, 2e éd., 2012, n. 1 ad art. 62 CO) et selon lequel celui qui, sans cause légitime, s'est enrichi aux dépens d'autrui, est tenu à restitution, une prestation est indue lorsqu'elle repose sur une cause illégitime, soit non valable, qui ne s'est pas réalisée ou qui a cessé d'exister (art. 62 al. 2 CO).

3.9 La chambre de céans a rejeté en 2005 la conclusion en paiement de son salaire d’un fonctionnaire de la Ville de Genève qui avait déclaré suspendre sa prestation et ne s’était plus présenté à son poste. Elle a jugé qu’il il était inhérent à tout le système de la fonction publique que le fonctionnaire qui déclarait sans équivoque, unilatéralement et sans raison médicale, refuser d’effectuer la prestation de travail pour laquelle il avait été engagé, ne pouvait prétendre à son traitement pour la période considérée. Cette conséquence découlait du fondement même du statut et des dispositions régissant les rapports de droit public entre les agents publics et l’État ou la corporation de droit public qui l’employait. Tant le but que la systématique de la loi confirmaient que cette relation était orientée vers une utilisation parcimonieuse des deniers publics, lesquels ne pouvaient servir à rémunérer des fonctionnaires refusant d’offrir la prestation de travail pour laquelle ils avaient été engagés. Il ne pouvait, corrélativement, y avoir d’intérêt privé digne de protection à obtenir un salaire dans ces circonstances et cette solution ne violait pas le principe de la proportionnalité (ATA/221/2005 du 19 avril 2005 consid. 8).

3.10 Selon l’art. 6 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1), constitue une incapacité de travail « toute perte totale ou partielle, de l’aptitude de l’assuré à accomplir dans sa profession ou son domaine d’activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui, si cette perte résulte d’une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique. En cas d’incapacité de travail de longue durée, l’activité qui peut être exigée de lui peut aussi relever d’une autre profession ou d’un autre domaine d’activité ».

3.11 Il incombe à l'employé d'apporter la preuve de l'existence d'un empêchement de travailler (art. 8 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210). Pour ce faire, le travailleur aura le plus souvent recours à un certificat médical, à savoir un document destiné à prouver l'incapacité de travailler d'un patient pour des raisons médicales. Le certificat médical ne constitue toutefois pas un moyen de preuve absolu (arrêts du Tribunal fédéral 8C_619/2014 du 13 avril 2015 consid. 3.2.1 ; 4A_289/2010 du 27 juillet 2010 consid. 3.2 ; ATA/1028/2019 du 18 juin 2019 consid. 4b). L'employeur peut mettre en cause sa validité en invoquant d'autres moyens de preuve. Inversement, le salarié a la faculté d'apporter la démonstration de son incapacité par d'autres biais (ATA/582/2024 du 14 mai 2024 consid. 2.3, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_381/2024 du 3 avril 2025 consid. 3.2).

3.12 Le rôle du médecin conseil consiste à aborder la question de l’aptitude au travail sous un angle plus large qu’un médecin psychiatre par exemple, puisque son examen peut porter sur tous les aspects médicaux en lien avec le cas qui lui est soumis (ATA/1327/2018 du 11 décembre 2018 consid. 3b), en connaissance des besoins et risques concrets afférents aux fonctions concernées, et que les différents paramètres qu’il prend en considération ne sont pas nécessairement de nature à changer au cours du temps (ATA/528/2024 du 14 mai 2024 consid. 2.5 et les arrêts cités).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc ; ATA/48/2020 du 20 janvier 2020 ; ATA/983/2018 du 25 septembre 2018 consid. 7).

Ainsi, à teneur de la jurisprudence, les rôles de chacun des deux praticiens n’étant pas les mêmes, la valeur probante attribuée à chacun des documents doit être différenciée. Une plus grande force probante doit être accordée à la conclusion du médecin conseil, le rapport de proximité entre le médecin traitant et son patient imposant de considérer avec retenue les certificats médicaux établis par celui-ci (ATA/415/2025 du 15 avril 2025 consid. 5.6.2).

3.13 Découlant directement de l'art. 9 Cst. et valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2022 du 21 mars 2023 consid. 5.1).

4.             En l’espèce, le recourant soutient qu’il était incapable de travailler jusqu’au 23 juin 2024 et s’oppose à la déduction du solde de ses vacances de ses absences du 24 mai au 23 juin 2024 à concurrence de CHF 5'600.- bruts, soit 20 jours, et la fixation du solde de son droit aux vacances à CHF 3'640.- bruts, soit 13 jours.

Son médecin traitant, le Dr B______, a établi cinq certificats successifs attestant son incapacité totale de travail les 24 et 29 avril, 13 et 27 mai et 10 juin 2024. Un sixième et dernier certificat du Dr B______, du 21 juin 2024, a ramené la fin de son incapacité de travail du 24 au 23 juin 2024.

Le médecin conseil de l’intimé, le Dr C______, a estimé le 31 juillet 2024 que l’arrêt de travail qui avait débuté le 24 avril 2024 n’était valable que pour une durée d’un mois et que la pleine capacité de travail avait été recouvrée le 24 mai 2024.

L’intimé s’est fondé sur le rapport du Dr C______ pour prononcer la décision querellée.

Le recourant fait tout d’abord valoir qu’il a été convoqué tardivement par le Dr C______. Or, il était encore en incapacité selon le Dr B______, et celle‑ci durait depuis près de deux mois et avait été prolongée par certificats des 29 avril, 13 et 27 mai et 10 juin 2024, lorsque l’intimé a, le 17 juin 2024, communiqué sa mission au médecin conseil. L’intimé a ensuite informé le recourant le 27 juin 2024 de cette mission et l’a invité à délier ses médecins du secret à l’égard du médecin conseil et à leur transmettre le formulaire de demande de renseignements médicaux pour qu’ils le complètent et le lui adressent jusqu’au 20 juillet 2024. Le médecin conseil a ensuite convoqué le recourant le 17 juillet pour le 31 juillet 2024. Il ressort de l’enchaînement des faits que l’intimé s’est inquiété de la durée de l’incapacité à raison d’une entorse lorsque celle-ci a approché les deux mois et a alors pris les mesures d’instruction nécessaires. À son tour, le médecin conseil a convoqué le recourant au terme du délai imparti pour transmettre les documents médicaux. Aucun reproche de tardiveté ne peut être adressé au médecin conseil.

Le recourant reproche ensuite à l’intimé de l’avoir laissé, en le faisant convoquer si tardivement par le médecin conseil, dans une situation où il ne pouvait à aucun moment se douter que son incapacité de travail était mise en doute et sans lui laisser la possibilité d’adapter son comportement pour le passé. Or, il a été vu qu’il ne peut être reproché à l’intimé d’avoir mandaté le médecin conseil une fois que l’incapacité de travail se prolongeait. Par ailleurs, aucune promesse explicite ou implicite ne pouvait être inférée des déclarations ou du comportement de l’intimé. En particulier, le recourant ne pouvait pas déduire de l’attitude de l’intimé que son incapacité de travail ne lui posait aucun problème. C’est le lieu de rappeler que l’intimé l’avait invité le 10 juin 2024 à déposer une demande auprès de l’assurance‑invalidité en raison du nombre de ses absences en deux ans.

Le recourant soutient que lorsque le médecin conseil l’a reçu le 31 juillet 2024, celui-ci ne pouvait évaluer les effets d’un accident survenu plus de trois mois auparavant et alors qu’il avait recouvré sa capacité de travail depuis plus d’un mois. Le recourant perd de vue que le médecin conseil l’a reçu et s’est fondé sur les indications reçues de l’intimé avec sa mission et sur les certificats d’incapacité du médecin traitant transmis avec la mission. Il était ainsi tout à fait possible pour le médecin conseil de se déterminer rétrospectivement sur l’incapacité de travail du recourant.

Le recourant reproche au médecin conseil de ne pas s’être informé auprès de son médecin traitant. Il ne soutient pas que le formulaire remis pas le médecin conseil n’aurait pas été retourné complété par son médecin traitant. Par ailleurs, après avoir pris connaissance du dossier du recourant et l’avoir reçu en consultation, le Dr C______ n’a pas jugé utile de recueillir d’autres informations médicales pour se prononcer sur la durée de l’incapacité de travail liée à l’entorse. Il a été vu que le médecin conseil disposait des informations nécessaires pour se déterminer, étant rappelé que l’objet de sa mission portait sur l’effet sur la capacité de travail du recourant d’une simple entorse de la cheville.

Le recourant produit enfin un rapport de son médecin traitant du 23 décembre 2024.

La première partie du courrier du Dr B______ rapporte les observations du radiologue, lesquelles ne font que constater les séquelles classiques et aisément compréhensibles par le profane (épanchement, tuméfaction) de l’entorse récente ainsi que les séquelles possibles d’autres entorses, sans se prononcer sur la capacité de travail.

Dans la seconde partie du document, le Dr B______ indique avoir revu le recourant le 29 avril et le 21 juin 2024. Il ne dit pas l’avoir revu les 13 et 27 mai et 10 juin 2024, de sorte que les certificats prolongeant l’incapacité de travail établis à ces dates n’apparaissent pas être fondés sur une consultation et un examen du patient. Le document ne se réfère par ailleurs qu’à un constat du médecin, de « douleur à l’examen clinique » le 29 avril 2024, et mentionne pour la suite uniquement les plaintes du patient, soit la « symptomatologie avertie par le patient », ce qui semble corroborer que le médecin traitant n’a alors pas revu le recourant.

Il suit de là que le document produit par le recourant n’est pas de nature à priver l’avis du médecin conseil de la force probante accrue que lui attribue la jurisprudence en cas de contradiction avec l’avis du médecin traitant.

Le recourant n’a fourni aucune autre indication sur son incapacité de travail durant la période considérée alors qu’il avait subi une entorse et accomplissait du travail de bureau et travaillait parfois à distance.

C’est ainsi de manière conforme au droit que l’intimé s’est fondé sur l’avis du médecin conseil pour retenir que le recourant n’était plus incapable de travailler pour des motifs de santé dès le 24 mai 2024 et a ordonné la compensation de 20 jours d’indemnités pour incapacité de travail perçus à tort avec le solde de vacances du recourant et a réduit ce dernier à 13 jours pour l’année 2024.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'200.-, tenant compte de la décision sur effet suspensif, sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

Compte tenu des conclusions du recours, la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110).

 

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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 novembre 2024 par A______ contre la décision du département des finances, des ressources humaines et des affaires extérieures du 18 octobre 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'200.- à la charge de A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Carole REVELO, avocate du recourant, ainsi qu'au département des finances, des ressources humaines et des affaires extérieures.

Siégeant : Michèle PERNET, présidente, Valérie MONTANI, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

M. PERNET

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :