Décisions | Chambre civile
ACJC/59/2024 du 16.01.2024 sur JTPI/3800/2023 ( OO ) , RENVOYE
En droit
Par ces motifs
republique et | canton de geneve | |
POUVOIR JUDICIAIRE C/22392/2021 ACJC/59/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU MARDI 16 JANVIER 2024 |
Entre
A______ SA, sise ______ [SG], appelante d'un jugement rendu par la 6ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 24 mars 2023, représentée par Me Pierluca DEGNI, avocat, DEGNI & VECCHIO, rue du Général-Dufour 12, case postale 220, 1211 Genève 8,
et
B______, sise ______ [GE], intimée, représentée par Me Pierre-Damien EGGLY, avocat, RVMH AVOCATS, rue Gourgas 5, case postale 31, 1211 Genève 8.
A. Par jugement JTPI/3800/2023 du 24 mars 2023, notifié à A______ SA le 11 avril 2023, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure ordinaire, a débouté A______ SA des fins de sa demande, faute de légitimation active (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 5'200 fr., compensés avec l'avance fournie par A______ SA et mis à charge de cette dernière (ch. 2), condamné A______ SA à payer à B______ la somme de 10'365 fr. TTC à titre de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).
B. a. Par acte expédié le 15 mai 2023 au greffe de la Cour de justice, A______ SA a appelé de ce jugement, dont elle a sollicité l'annulation. Elle a conclu, avec suite de frais, à ce qu'il soit constaté qu'elle dispose de la légitimation active pour agir contre B______ et à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal pour décision au sens des considérants.
En substance, A______ SA a fait grief au Tribunal d'avoir ignoré des faits allégués et prouvés et de n'avoir pas procédé à un examen des pièces du dossier, "basculant dans le formalisme excessif et la violation du droit d'être entendu".
Au chapitre des faits, elle a soutenu que B______ n'avait jamais allégué avoir formé opposition aux commandements de payer qui lui avaient été notifiés à la suite des réquisitions de poursuite introduites par A______ SA les 29 juin 2020 et 26 janvier 2021.
b. B______ a conclu, avec suite de frais, à l'irrecevabilité de l'appel formé par A______ SA, subsidiairement à son rejet.
Elle a soutenu que l'affirmation de A______ SA selon laquelle elle n'aurait prétendument pas formé opposition aux commandements de payer susmentionnés constituait un allégué nouveau et irrecevable au stade de l'appel. A titre subsidiaire, elle a produit des pièces nouvelles, à savoir les commandements de payer correspondants, frappés d'opposition, et les courriers y relatifs.
c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.
d. Elles ont été informées par avis du 13 octobre 2023 de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les éléments pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour :
a. A______ SA est une société suisse spécialisée dans le recouvrement des rétrocessions perçues par les banques dans le cadre de relations bancaires.
b. B______ (ci-après également "la banque") est une société qui a pour but l'exploitation d'une banque y compris l'exercice à titre professionnel du commerce de valeurs mobilières.
Elle a son siège au 1______ no. ______ - ______, [code postal] Genève et dispose d'une succursale sise 2______ no. ______, [code postal] C______ [ZH].
c. D______ LTD est une société de droit seychellois fondée le 8 juin 2005, dont E______ est devenu l'actionnaire unique le 2 mars 2015.
d. Le 21 décembre 2006, D______ LTD a ouvert un compte en dollars auprès de B______.
e. Parallèlement, elle a conclu un fiduciary agreement avec cette banque.
f. La relation bancaire s'est poursuivie jusqu'au 3 décembre 2014.
g. A______ SA a allégué que les statements of assets fournis par B______ démontraient que la relation bancaire s'opérait "depuis la succursale genevoise de la défenderesse", ce qui n'a pas été contesté.
h. Par courrier du 18 juin 2020 adressé à la succursale [de] C______ de la banque, A______ SA a informé B______ que D______ LTD lui avait cédé ses créances à l'encontre de la banque et a sollicité la restitution des rétrocessions perçues par cette dernière dans le cadre de sa relation contractuelle avec D______ LTD.
i. Par courrier du 31 juillet 2020, la banque a répondu à A______ SA que les rétrocessions perçues s'élevaient à 104'063 fr., à savoir :
- 16'930 fr. en 2010;![endif]>![if>
- 26'949 fr. en 2011;![endif]>![if>
- 24'246 fr. en 2012;![endif]>![if>
- 22'969 fr. en 2013;![endif]>![if>
- 12'969 fr. en 2014.![endif]>![if>
La banque contestait toutefois être tenue au remboursement des rétrocessions puisque le contrat qui la liait à D______ LTD était un contrat de type "execution only".
j. Le 29 juin 2020, A______ SA a adressé à l'Office des poursuites de Genève une réquisition de poursuite contre B______, portant sur un montant de 95'000 fr.
k. Par courrier du 6 août 2020, A______ SA a informé la banque qu'elle maintenait sa position concernant la restitution des rétrocessions, avec intérêts à 5% l'an, soit un total de 147'439 fr. 46.
l. Par courrier du 26 janvier 2021, A______ SA a adressé à l'Office des poursuites une seconde réquisition de poursuite contre la banque, portant sur un montant de 146'890 fr.
m. Par courrier du 26 juillet 2021, A______ SA a réitéré sa demande de reddition de comptes, en réclamant notamment la correspondance client en lien avec les rétrocessions.
n. Le 24 août 2021, la banque a répondu avoir d'ores et déjà remis tous les documents demandés. Elle persistait en outre à contester toute obligation de restitution des rétrocessions, D______ LTD ayant valablement renoncé à une telle restitution.
o. Par courrier du 31 août 2021, A______ SA a sollicité de la banque la remise de la correspondance interne liée au client (ordres d'achat et de vente) ainsi que la correspondance client en lien avec les rétrocessions, soit notamment les conditions générales qui en faisaient mention et les décomptes des rétrocessions perçues.
p. Par courrier du 3 septembre 2021, la banque a notamment fourni à A______ SA la documentation bancaire liée au compte de D______ LTD ainsi que tous les ordres d'achat et de vente des dix dernières années.
q. Par courriel du 26 avril 2022, la banque a encore remis à A______ SA, sur requête de cette dernière, les conditions générales régissant la relation bancaire à laquelle D______ LTD était partie.
D. a. Par demande déposée devant le Tribunal le 9 novembre 2021 en vue de conciliation et introduite au fond le 3 mai 2022, A______ SA a conclu à la condamnation de B______ au paiement des sommes suivantes à titre de restitution des rétrocessions perçues par la banque dans le cadre de ses relations bancaires avec D______ LTD :
- 16'930 fr. avec intérêts à 5% dès la perception des rétrocessions;![endif]>![if>
- 26'949 fr. avec intérêts à 5% dès la perception des rétrocessions;![endif]>![if>
- 24'246 fr. avec intérêts à 5% dès la perception des rétrocessions;![endif]>![if>
- 22'969 fr. avec intérêts à 5% dès la perception des rétrocessions.![endif]>![if>
Elle a notamment allégué que D______ LTD lui avait cédé, par contrat du 18 juin 2020, ses créances contre B______ (allégué no 6).
Cet allégué faisait référence à la pièce 5 demanderesse (ci-après : la pièce 5), désignée dans le bordereau de pièces de A______ SA comme étant le contrat de cession de créances signé le 18 juin 2020 avec D______ LTD.
La pièce en question consistait en réalité en une procuration ("power of attorney") conférée par D______ LTD à A______ SA en vue de faire valoir son droit à l'information à l'encontre de la banque ("to enforce rights to information against B______").
Le contrat de cession de créances du 18 juin 2020 mentionné ci-dessus figurait en revanche aux pièces 10 et 12 du chargé de A______ SA, parmi les annexes aux réquisitions de poursuite adressées par la précitée à l'Office des poursuites de Genève les 29 juin 2020 et 26 janvier 2021 (cf. supra let. C.j et C.l).
Les allégués de la demande renvoyant à ces pièces 10 et 12 se limitaient à indiquer que A______ SA avait requis des poursuites à l'encontre de la banque. Ni les motifs des prétentions déduites en poursuite ("Anspruch auf Erstattung der an die A______ AG abgetretenen Vertriebsentschädigungen aus Kundenbeziehung D______ LTD mit der Bank"), ni les pièces justificatives jointes aux réquisitions adressées à l'Office des poursuites, parmi lesquelles se trouvait le contrat de cession, n'étaient cependant mentionnés.
A______ SA n'a pas développé la question de la validité de la cession de créances du 18 juin 2020 et de sa légitimation active dans la partie "En droit" de sa demande.
Elle a pour le surplus mentionné sur la page de garde de son mémoire que le siège de la banque se trouvait à l'adresse de sa succursale [de] C______, à savoir 2______ no. ______, [code postal] C______.
b. Par réponse du 23 septembre 2022, B______ a conclu à ce que le Tribunal déboute A______ SA de toutes ses conclusions.
Elle a contesté l'allégué no 6 de la demande comme suit : "Contesté que D______ LTD ait valablement cédé ses créances".
Elle n'a formulé aucun allégué propre en relation avec ladite cession. Elle a en revanche fait valoir, dans la partie "En droit" de son mémoire, que la cession signée par D______ LTD en faveur de A______ SA était nulle en raison du caractère incessible des créances cédées, lequel découlait de la nature indivisible de la relation contractuelle entre une banque et son client. La cession péjorait en outre la situation juridique de la banque, qui perdait la faculté d'exercer son droit général de compensation à l'encontre de sa cliente en relation avec les créances cédées. La demande devait dès lors être rejetée, faute de légitimation active de A______ SA.
La banque s'est pour le surplus opposée aux prétentions en restitution des rétrocessions litigieuses au motif que la relation contractuelle qui l'avait liée à D______ LTD était de type "execution only". Il s'ensuivait que les rémunérations perçues par la banque en relation avec les transactions effectuées dans le cadre de cette relation n'étaient pas soumises au devoir de restitution. Ces rémunérations ne pouvaient par ailleurs être qualifiées de rétrocessions au sens de la jurisprudence. D______ LTD avait enfin valablement renoncé à la restitution de ces rémunérations. En tout état, une partie de sa créance en restitution était prescrite.
La banque a pour le surplus mentionné sur la page de garde de son mémoire l'adresse de son siège genevois, à savoir 1______ no. ______ - ______, [code postal] Genève.
c. Par courrier du 29 septembre 2022, A______ SA a sollicité un second échange d'écritures.
d. Par ordonnance du lendemain, le Tribunal a imparti à A______ SA un délai au 28 octobre pour répliquer, en application de l'art. 225 CPC.
e. A______ SA a répliqué le 27 octobre 2022 et persisté dans ses conclusions. Elle a contesté le fait que les créances en restitution des rétrocessions seraient incessibles, contrairement à ce qu'alléguait la banque. Ces créances étaient au contraire clairement identifiées, déterminées et n'étaient pas intimement liées à D______ LTD au point de ne pouvoir faire l'objet d'une cession. La cession litigieuse ne péjorait en outre pas la situation de la banque. Celle-ci avait au surplus donné suite à la reddition de comptes requise, sans invoquer l'invalidité de la cession de créances, faisant uniquement valoir qu'il n'existait aucune obligation de restituer les rétrocessions puisque la relation bancaire était de type "execution only". Son argument selon lequel la cession de créances n'était pas valable était dès lors en contradiction avec le comportement adopté jusqu'alors et paraissait ainsi formulé pour les seuls besoins de la procédure.
f. B______ a dupliqué le 5 décembre 2022 et persisté dans ses conclusions.
Elle a réitéré que la cession de créances en faveur de A______ SA était nulle. Elle a contesté, en particulier, que le fait d'avoir transmis à la précitée des documents en lien avec le compte de D______ LTD emporte une reconnaissance de la validité de la prétendue cession de créances. A cet égard, les pièces produites par A______ SA comportaient une procuration relative à son droit à l'information (cf. pièce 5), en vertu de laquelle la banque lui avait transmis les informations sollicitées. Le comportement de la banque n'avait dès lors "aucun effet sur la question de la validité d'une potentielle cession" et ne pouvait s'interpréter "comme une acceptation tacite d'une soi-disant cession". La banque a persisté à soutenir que la cession était nulle (duplique, ch. 9 et 10).
g. Lors de l'audience du 23 janvier 2023, les parties ont été entendues. Elles ne se sont pas exprimées sur l'existence ou la validité de la cession de créances susmentionnée.
h. Lors de l'audience de plaidoiries du 13 mars 2023, B______ a notamment invoqué l'absence de légitimation active de A______ SA, faute de cession de créances. En effet, la pièce 5 produite sous l'intitulé "Contrat de cession de créances signé le 18 juin 2020 entre D______ LTD et A______ SA" n'était en réalité qu'une procuration délivrée par la première en faveur de la seconde. Faute de contrat de cession, A______ SA ne disposait pas de la légitimation active pour intenter la présente procédure.
A______ SA a répondu que le contrat susmentionné n'avait pas été remis en doute auparavant et qu'il était suffisant. B______ était la seule banque qui contestait la validité de ce document, des accords extrajudiciaires ayant été trouvés avec les autres banques.
Les parties ont persisté dans leurs conclusions pour le surplus.
La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.
i. Par jugement non motivé JTPI/3800/2023 du 24 mars 2023, le Tribunal a débouté A______ SA de sa demande, faute de légitimation active.
j. Par courrier du 30 mars 2023, A______ SA a demandé la motivation du jugement.
k. Le jugement motivé a été expédié pour notification aux parties le 6 avril 2023.
1. 1.1 L'appel a été interjeté contre une décision finale (308 al. 1 let. a CPC), dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), dans le délai utile de 30 jours suivant la notification de la motivation (art. 142 al. 1, 145 al. 1 let. a et 311 al. 1 CPC) et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 131 et 311 CPC). Il est dès lors recevable de ce point de vue (cf. pour le surplus infra, consid. 3.2).
1.2 Sont également recevables la réponse, ainsi que les réplique et duplique respectives, déposées dans les délais légaux, respectivement impartis à cet effet (art. 312 al. 2, 316 al. 1 CPC).
1.3 La Cour revoit le fond du litige avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC) et applique le droit d'office (art. 57 CPC). Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, elle le fait cependant uniquement sur les points du jugement que l'appelant estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante – et, partant, recevable –, pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). Hormis les cas de vices manifestes, elle doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).
2. 2.1 Bien que jouissant d'une certaine autonomie, une succursale est dépourvue d'existence juridique et n'a pas la capacité d'ester en justice. Seule l'entreprise principale à laquelle elle appartient a cette faculté (ATF 120 III 11 consid. 1a; arrêts du Tribunal fédéral 4A_87/2019 du 2 septembre 2019 consid. 1; 4A_510/2016 du 26 janvier 2017 consid. 3.2 et les arrêts cités, résumé in CPC Online, art. 59 CPC, let. D.c; 2C_642/2014 du 22 novembre 2015 consid. 1.2 et les arrêts cités).
2.2 En l'espèce, l'appelante a mentionné, sur la page de garde de sa demande et de sa réplique, l'adresse de la succursale [de] C______ de l'intimée et non celle de son siège genevois. La question de savoir si elle souhaitait, ce faisant, assigner ladite succursale, qui ne dispose pas de la capacité d'ester en justice, et non la société principale, peut toutefois rester indécise.
L'intimée a en effet mentionné l'adresse de son siège genevois sur la page de garde de ses écritures de première instance, sans relever l'informalité susmentionnée, partant vraisemblablement du principe que l'appelante avait voulu assigner la société principale. Le Tribunal s'est également abstenu d'aborder cette question et a mentionné comme partie défenderesse B______, ayant son siège 1______ no. ______ - ______, [code postal] Genève. L'appelante n'a formulé aucune remarque à ce sujet dans ses écritures d'appel, et ce bien qu'elle ait à nouveau inscrit l'adresse de la succursale [de] C______ de la banque en page de garde desdites écritures.
Il convient dès lors de retenir que la mention de l'adresse de la succursale [de] C______ de B______ dans la demande et dans l'appel est sans incidence sur l'identité de la partie défenderesse dans le cadre du présent litige, à savoir B______, sise 1______ no. ______ - ______, [code postal] Genève, qui dispose seule de la capacité d'ester en justice. C'est dès lors cette adresse qui sera mentionnée sur la page de garde du présent arrêt.
3. L'intimée conclut à l'irrecevabilité de l'appel au motif qu'il ne comporte que des conclusions cassatoires.
3.1 Selon l'art. 318 CPC, l'instance d'appel peut confirmer la décision attaquée (al. 1 let. a), statuer à nouveau (al. 1 let. b) ou renvoyer la cause à la première instance si un élément essentiel de la demande n'a pas été examiné ou si l'état de fait doit être complété sur des points essentiels (al. 1 let. c ch. 1 et 2).
L'appel a un effet réformatoire, ce qui signifie que l'instance d'appel a le pouvoir de statuer elle-même sur le fond, en rendant une décision qui se substitue au jugement attaqué (art. 318 al. 1 let. b CPC). Il s'ensuit que la partie appelante ne saurait se limiter, sous peine d'irrecevabilité, à conclure à l'annulation de la décision entreprise, mais doit prendre des conclusions au fond, libellées de telle manière que l'instance d'appel statuant à nouveau puisse les incorporer sans modification au dispositif de sa décision (ATF 137 III 617 consid. 4.3; arrêts du Tribunal fédéral 4A_207/2019 du 17 août 2020 consid. 3.2 n. p. in ATF 146 III 413 et l'arrêt cité). Lorsque les conclusions d'un mémoire d'appel sont insuffisantes, il ne s'agit pas d'un vice réparable au sens de l'art. 132 al. 1 CPC (ATF 137 III 617, SJ 2012 I 373, consid. 4.2 s.; arrêt du Tribunal fédéral 5A_342/2022 du 26 octobre 2022 consid. 2.1.1 résumé in CPC Online, let. A.a.a ad art. 311 CPC ainsi que les arrêts cités).
Il n'est fait exception à l'exigence de conclusions réformatoires précises que lorsque la juridiction de recours, en cas d'admission du recours, ne serait de toute manière pas en situation de statuer elle-même sur le fond et ne pourrait que renvoyer la cause à l'autorité cantonale pour complément d'instruction (ATF 134 III 379 consid. 1.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_186/2022 du 28 avril 2022 consid. 2).
L'application de l'art. 318 al. 1 let. c CPC s'impose, notamment, lorsque le premier juge a considéré comme non remplie une condition de recevabilité, de sorte qu'il n'a pas examiné le fond du litige, a limité la procédure à une question de fait ou de droit au sens de l'art. 125 let. a CPC et qu'il convient de renvoyer pour suite d'instruction, ou encore a rejeté la demande à tort sans examen matériel de la prétention, par exemple en raison de l'absence de légitimation active, de la prescription ou de la péremption du droit (Reetz/Hilber, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2016, n. 34 ad art. 318 CPC; Sterchi, in Berner Kommentar - Schweizerische Zivilprozessordnung ZPO, 2012, n. 9ss ad art. 318 CPC; dans le même sens: Jeandin, in Code de procédure civile, Commentaire romand, 2ème éd. 2019, n. 4a ad art. 318 CPC).
L'effet cassatoire de l'appel par renvoi à l'autorité de première instance selon l'art. 318 al. 1 let. c CPC doit rester l'exception (ATF 137 III 617 consid. 4.3), si bien que cette disposition doit s'interpréter restrictivement (Reetz/Hilber, op. cit., n. 29 ad art. 318 CPC; Jeandin, op. cit., n. 4 ad art. 318 CPC).
3.2 En l'espèce, le Tribunal a considéré, dans le jugement entrepris, que l'appelante ne disposait pas de la légitimation active, faute d'avoir démontré qu'elle était au bénéfice d'une cession des créances litigieuses. Elle devait dès lors être déboutée des fins de sa demande. Le Tribunal n'a dès lors ni instruit, ni tranché la question du bien-fondé des prétentions de l'appelante en restitution des rétrocessions. Il s'ensuit que, dans l'hypothèse où elle admettrait la légitimation active de l'appelante, la Cour ne pourrait pas statuer en réforme; elle devrait retourner la cause au Tribunal afin que celui-ci statue sur les prétentions en question, la cause n'étant pas en l'état d'être jugée sur ces points (art. 318 al. 1 lit. c CPC). Il découle de ce qui précède que les conclusions de l'appelante tendant à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause au Tribunal pour instruction complémentaire et nouvelle décision sont recevables.
4. 4.1 La Cour examine d'office la recevabilité des faits et moyens de preuve nouveaux en appel (Reetz/Hilber, op. cit., n. 26 ad art. 317 CPC).
Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).
4.2 En l'espèce, la question de savoir si l'affirmation contenue dans le mémoire d'appel, selon laquelle l'intimée n'aurait pas allégué en première instance avoir formé opposition aux commandements de payer qui lui avaient été notifiés en 2020 et en 2021 à la requête de l'appelante, constitue ou non un fait nouveau peut souffrir de demeurer indécise. Il en va de même de la recevabilité des nouvelles pièces produites par l'intimée devant la Cour en relation avec ces affirmations. Ces éléments sont en effet dénués de pertinence pour la résolution du présent litige.
5. L'appelante conclut à l'admission de sa légitimation active pour agir à l'encontre de l'intimée.
5.1.1 Conformément à l'art. 164 al. 1 CO, le créancier peut céder son droit à un tiers sans le consentement du débiteur, à moins que la cession n'en soit interdite par la loi, la convention ou la nature de l'affaire.
La cession n'est valable que si elle a été constatée par écrit (art. 165 al. 1 CO). Par la forme écrite, il faut entendre un document signé, soit un support matériel contenant tous les points essentiels pour le transfert de la créance et couvert par la signature manuscrite (Probst, in Code des obligations I, Commentaire romand, 2ème éd. 2021, n. 2 ad art. 165 CO; cf. également arrêt du Tribunal fédéral 4A_248/2008 du 1er septembre 2008, consid. 3.2 et l'arrêt cité).
La déclaration de cession écrite du cédant doit ainsi contenir tous les points objectivement et subjectivement essentiels de la cession. Sont des points objectivement essentiels l'identité des personnes directement concernées (cédant, cessionnaire et débiteur cédé) ainsi que la volonté du cédant de céder une créance déterminée (ou du moins déterminable au moment où elle prend naissance). A la différence du cautionnement, le montant de la créance n'a pas besoin d'être indiqué (Probst, op. cit., n. 5 ad art. 165 CO et les références).
La cession opère la substitution du titulaire d'une créance par un nouveau titulaire. La créance faisant l'objet de la cession est ainsi transférée du patrimoine du cédant à celui du cessionnaire. En vertu de cette opération juridique, le cédant perd le pouvoir de disposition sur la créance cédée, ce qui se manifeste notamment par le fait qu'il ne peut plus la transférer à une autre personne ni la faire valoir en son propre nom, que ce soit pour demander son exécution ou pour procéder à une compensation. L'effet de la cession se produit en principe dès le moment où celle-ci est parfaite et, en cas de cession d'une créance future, dès la naissance de la créance (ATF 130 III 417 consid. 3.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_248/2008 précité, ibidem et les références).
Le fardeau de la preuve de la cession incombe au cessionnaire dans la mesure où il en déduit des droits (art. 8 CC). Dès lors, c'est à lui de prouver l'existence et le contenu de la cession (Probst, op. cit., n. 74 ad art. 164 CO).
5.1.2 La qualité pour agir (légitimation active) et la qualité pour défendre (légitimation passive) sont des questions de droit matériel, de sorte qu'elles ressortissent au droit privé fédéral s'agissant des actions soumises à ce droit (ATF 133 III 180 consid. 3.4, JdT 2010 I 239, SJ 2007 I 387; 130 III 417 consid. 3.1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_127/2022 du 28 juin 2022 consid. 3.3; 4A_1/2014 du 26 mars 2014 consid. 2.3). Elles se déterminent selon le droit au fond et leur défaut conduit au rejet de l'action qui intervient indépendamment de la réalisation des éléments objectifs de la prétention litigieuse (ATF 138 III 537 consid. 2.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_398/2017 du 28 août 2017 consid. 4.1.3).
La légitimation active doit être examinée d'office par le juge (ATF 126 III 59 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_217/2017 du 4 août 2017 consid. 3.4.1). Lorsque la maxime des débats s'applique (art. 55 CPC), cet examen ne peut se faire que sur la base des faits allégués et prouvés (ATF 130 III 550 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_217/2017 précité).
5.1.3 La maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC) impose aux parties d'alléguer les faits et d'offrir les moyens de preuve propres à les établir, le juge ne pouvant pas suppléer ni suggérer des faits qu'une partie n'aurait pas allégués spontanément (arrêt du Tribunal fédéral 4A_312/2019 du 12 mai 2020 consid. 3.3 et l'arrêt cité).
En vertu de l'art. 221 al. 1 let. d CPC, respectivement de l'art. 222 al. 2 CPC, les faits doivent être allégués en principe dans la demande, respectivement dans la réponse pour les faits que doit alléguer le défendeur. Ils peuvent l'être dans la réplique et la duplique si un deuxième échange d'écritures est ordonné ou, s'il n'y en a pas, par dictée au procès-verbal lors des débats d'instruction (art. 226 al. 2 CPC) ou à l'ouverture des débats principaux, avant les premières plaidoiries (ATF 144 III 519 consid. 5.2.1.1 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 4A_194/2020 du 29 juillet 2020 consid. 5.3.1).
Les faits pertinents allégués doivent être suffisamment motivés (charge de la motivation des allégués) pour que, d'une part, le défendeur puisse dire clairement quels faits allégués dans la demande il admet ou conteste et que, d'autre part, le juge puisse, en partant des allégués de fait figurant dans la demande et de la détermination du défendeur dans la réponse, dresser le tableau exact des faits admis par les deux parties ou contestés par le défendeur, pour lesquels il devra procéder à l'administration de moyens de preuve (art. 150 al. 1 CPC), et ensuite appliquer la règle de droit matériel déterminante. Les exigences quant au contenu des allégués et à leur précision dépendent, d'une part, du droit matériel, soit des faits constitutifs de la norme invoquée et, d'autre part, de la façon dont la partie adverse s'est déterminée en procédure: dans un premier temps, le demandeur doit énoncer les faits concrets justifiant sa prétention de manière suffisamment précise pour que la partie adverse puisse indiquer lesquels elle conteste, voire présenter déjà ses contre-preuves; dans un second temps, si la partie adverse a contesté des faits, le demandeur est contraint d'exposer de manière plus détaillée le contenu de l'allégation de chacun des faits contestés, de façon à permettre au juge d'administrer les preuves nécessaires pour les élucider et appliquer la règle de droit matériel au cas particulier (ATF 144 III 519 précité, ibidem; arrêt du Tribunal fédéral 4A_194/2020 précité, ibidem).
Cela étant, même lorsque la maxime des débats est applicable, il n'est pas nécessaire qu'une allégation de fait contienne tous les détails; il suffit que les faits soient allégués dans leur cours ou leurs contours essentiels, d'une manière correspondant aux usages de la vie courante, de sorte qu'une contestation motivée soit possible ou que la preuve contraire puisse être présentée. Une présentation des faits est considérée comme concluante lorsque, supposé qu'elle soit vraie, elle permet de conclure à la conséquence juridique souhaitée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_178/2013 du 31 juillet 2013 consid. 2.3.3, CPC Online, ch. 4 ad art. 221 let. d CPC; cf. également arrêt du Tribunal fédéral 4A_409/2022 du 19 septembre 2023 consid. 8.3.3).
Dans les procès régis par la maxime des débats, le tribunal est lié par les faits allégués par le demandeur (art. 55 al. 1 CPC), comme par les faits non contestés par le défendeur (art. 150 al. 1 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_146/2015 du 19 août 2015 consid. 4.3). Les faits expressément admis par la partie adverse n'ont ainsi pas à être prouvés, sous réserve de la faculté laissée au juge par l'art. 153 al. 2 CPC de faire administrer d'office la preuve d'un fait non contesté lorsqu'il existe des motifs sérieux de douter de sa véracité (arrêt du Tribunal fédéral 4A_386/2016 du 5 décembre 2016 consid. 4.3.1).
Savoir si et dans quelle mesure un fait est contesté relève de la constatation des faits, respectivement de l'appréciation des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 4A_487/2018 du 30 janvier 2019 consid. 4.2.1). Les faits allégués peuvent être reconnus expressément ou tacitement. Concernant la charge de la contestation, chaque partie peut se borner à contester les faits allégués par l'autre, mais elle doit le faire de manière assez précise pour que cette dernière sache quels allégués sont contestés en particulier et qu'elle puisse en administrer la preuve (arrêt du Tribunal fédéral 5A_892/2014 du 18 mai 2015 et les références, RSPC 5/2015, p. 411 ss; cf. également Schweizer, in Code de procédure civile, Commentaire romand, 2ème éd. 2019, n. 12 ad art. 150 CPC).
Doivent ainsi être considérés comme contestés les faits dont la survenance a été niée de manière expresse ou concluante par la partie adverse; doivent en revanche être considérés comme non contestés – et donc comme n'étant pas à prouver – les faits admis de manière expresse ou tacite (Brönnimann, in Berner Kommentar - Schweizerische Zivilprozessordnung ZPO, 2012, n. 12 ad art. 150 CPC). Savoir si un fait est contesté par une partie doit être déterminé non seulement en fonction du contenu de ses écritures et de ses déclarations en audience mais aussi selon son attitude générale (Hasenböhler, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2013, n. 15 ad art. 150 CPC et les références).
5.1.4 En vertu de l'art. 52 CPC, quiconque participe à la procédure doit se conformer aux règles de la bonne foi. Une partie qui n'a pas contesté en première instance l'authenticité d'un acte, ni son contenu, n'est plus habilitée, sans contrevenir aux règles de la bonne foi, à la contester en procédure de recours cantonal ou fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 5A_344/2012 du 18 septembre 2012 consid. 4.4). Le principe de la bonne foi interdit également aux parties de présenter délibérément des allégués mensongers et de contester en connaissance de cause des faits exacts (arrêt du Tribunal fédéral 4A_221/2015 du 23 novembre 2015 consid. 2.1 n.p. in ATF 141 III 549).
5.2 Aux termes du jugement entrepris, le Tribunal a considéré que la pièce sur laquelle s'était fondée l'appelante dans le cadre de sa demande – intitulée dans son bordereau du 3 mai 2022 "Contrat de cession de créances signé le 18 juin 2020 entre D______ LTD et A______ SA" – n'était autre qu'une procuration ("Power of Attorney") délivrée par D______ LTD à l'appelante. Ce document ne faisait aucune allusion à une quelconque cession et n'en remplissait pas les conditions légales. Il ne s'agissait donc que d'une simple procuration pour représenter D______ LTD et non pour procéder à sa place en tant que titulaire d'une créance. En l'absence d'une cession valable, l'appelante ne disposait dès lors pas de la légitimation active et ne pouvait se prévaloir d'aucun droit à l'encontre de l'intimée. Elle devait par conséquent être déboutée des fins de sa demande.
5.3 L'appelante reproche en substance au Tribunal d'avoir retenu que la procuration produite sous pièce 5 ne faisait allusion à aucune cession alors qu'elle contenait précisément de nombreuses références à la convention de cession conclue avec D______ LTD. Le Tribunal avait également omis d'examiner les pièces 10 et 12 – soit les réquisitions de poursuite formées contre l'intimée en juin 2020 et en janvier 2021 – qui comportaient en annexe la convention de cession en question. Le premier juge avait ignoré que l'intimée ne s'était jamais prévalue, au cours de ses échanges avec l'appelante, de l'absence de légitimation active, lui communiquant au contraire le montant des rétrocessions. Il n'avait pas non plus pris en compte le fait que l'intimée n'avait pas invoqué l'absence de cession de créances dans son mémoire de réponse, se prévalant uniquement de l'invalidité de cette cession en raison de la nature de la relation contractuelle qui la liait à D______ LTD. Ce faisant, le premier juge avait constaté les faits de manière inexacte.
Sur le plan juridique, l'appelante fait valoir que la pièce 5 désigne D______ LTD comme étant "assignor", soit la cédante, et elle-même comme étant "assignee", soit la cessionnaire. Les créances visées par cette pièce étaient déterminables dès lors que la procuration permettait à l'appelante de solliciter la reddition de comptes en lien avec les rémunérations perçues par l'intimée. Cette pièce remplissait dès lors les conditions légales d'une cession de créances. A défaut, le Tribunal aurait dû comprendre que la pièce 5 – qui consistait en la quatrième page d'un document – était manifestement incomplète. Conformément à son devoir d'interpellation (art. 56 CPC), il aurait dès lors dû lui impartir un délai pour produire la pièce complète. Alternativement, il aurait dû prendre les pièces 10 et 12 en considération. En négligeant d'examiner l'ensemble de ces éléments, il avait commis un déni de justice formel.
5.4 En l'espèce, l'appelante s'est limitée à alléguer, dans sa demande en paiement, que D______ LTD lui avait cédé ses créances contre l'intimée, en renvoyant par erreur à la pièce 5 de son chargé, à savoir la procuration signée en sa faveur par D______ LTD en vue de faire valoir son droit à l'information vis-à-vis de l'intimée. Sous l'angle de l'art. 165 al. 1 CO, cette allégation était toutefois suffisante, ladite norme se limitant à requérir que la cession soit constatée par écrit. La nature de la créance cédée, à savoir la restitution des rétrocessions perçues par l'intimée dans le cadre de la relation bancaire entretenue avec D______ LTD, la volonté de D______ LTD de céder cette créance ainsi que les personnes concernées par la cession ressortaient en outre explicitement des faits présentés par l'appelante, qui n'ont pas été contestés sous cet angle. Partant, il incombait à l'intimée, si elle entendait contester l'existence même d'une cession de créances alors qu'elle n'avait jamais soulevé cette objection lors de ses précédents échanges avec l'appelante, de motiver sa contestation afin que l'appelante puisse comprendre que ce point-là était désormais litigieux et qu'il lui incombait d'aborder cette question de manière plus approfondie dans le cadre du deuxième échange d'écritures.
L'intimée a cependant contesté l'allégué de l'appelante selon lequel elle intervenait en qualité de cessionnaire de D______ LTD en ces termes: "Contesté que D______ LTD ait valablement cédé ses créances". Elle n'a pour le surplus formulé aucun allégué propre en relation avec ladite cession. Ce faisant, elle n'a pas remis en cause l'existence d'une cession de créances en tant que telle, ni n'a soutenu que la cession ne remplirait pas les conditions de validité formelle mentionnées ci-dessus. Elle a uniquement invoqué l'invalidité de la cession en arguant, dans la partie en droit de sa réponse, que les créances concernées seraient incessibles et que sa situation juridique se trouverait péjorée par la cession. Force est dès lors de considérer qu'elle a ainsi admis, à tout le moins implicitement, la conclusion d'un contrat de cession entre D______ LTD et l'appelante en relation avec les rétrocessions litigieuses.
Eu égard à cette admission, l'appelante n'a, à juste titre, pas jugé nécessaire d'exposer de manière plus détaillée, dans sa réplique, les circonstances entourant la cession au bénéfice de laquelle elle se trouvait et dont elle déduisait sa légitimation active. La présente procédure étant soumise à la maxime des débats, cette admission liait en outre le Tribunal dans le cadre de l'examen de la légitimation active auquel il devait procéder. Peu importait dès lors, à ce stade, que la pièce 5 à laquelle renvoyait l'allégué topique de la demande ne corresponde pas au contrat de cession de créances.
A supposer que l'intimée ait encore pu, en vertu de la règle des deux tours de parole, contester l'existence d'un tel contrat au stade de la duplique, nonobstant l'admission implicite de ce fait dans sa réponse, l'issue du litige n'en serait pas modifiée.
L'intimée a en effet argué, dans sa duplique, qu'elle avait transmis les informations sollicitées par l'appelante en vertu de la procuration produite sous pièce 5. Cette transmission ne pouvait dès lors s'interpréter "comme une acceptation tacite d'une soi-disant cession". L'intimée a toutefois formulé cet argument afin de contrer l'objection de l'appelante – formulée dans la réplique – selon laquelle la remise d'informations relatives aux rétrocessions emportait une reconnaissance de la validité de la cession. L'on ne saurait dès lors lire dans l'argument en question une contestation de l'existence de la cession de créances en tant que telle, dont l'appelante aurait pu déduire qu'elle devait clarifier ce point à l'occasion des débats principaux, sous peine de voir sa légitimation active niée. Il s'ensuit qu'en faisant valoir, lors des plaidoiries finales, qu'aucun contrat de cession n'avait été conclu, l'intimée a contesté pour la première fois l'existence du contrat en question. En l'absence de réalisation des conditions de l'art. 229 al. 1 CPC, elle était toutefois forclose pour ce faire.
L'attitude de l'intimée consistant à invoquer, au stade des plaidoiries finales, l'absence de légitimation active de l'appelante au motif qu'aucun contrat de cession n'avait été produit, paraît même difficilement compatible avec le principe de bonne foi en procédure, lequel interdit au plaideur de contester des faits qu'il sait exacts. Le contrat de cession conclu entre l'appelante et D______ LTD figurait en effet au dossier, puisqu'il était annexé aux réquisitions de poursuite adressées à l'Office des poursuites de Genève et produites par l'appelante sous pièces 10 et 12. Bien qu'il ne soit fait mention de ces annexes ni dans le bordereau de pièces, ni dans les allégués topiques de la demande, il paraît peu plausible que celles-ci aient échappé à l'intimée, laquelle n'a d'ailleurs rien prétendu de tel.
L'issue de la cause ne nécessite toutefois pas de résoudre cette question. Le contenu des écritures déposées par les parties suffisait en effet au Tribunal pour considérer que la cession de créances intervenue en faveur de l'appelante constituait un fait admis. Le Tribunal était dès lors lié sur ce point et ne pouvait par conséquent pas débouter l'appelante au motif qu'elle n'avait pas démontré les faits dont elle déduisait sa légitimation active.
Au vu de ce qui précède, le jugement entrepris sera annulé et la légitimation active de l'appelante admise. L'affaire sera par conséquent renvoyée au premier juge pour reprise de l'instruction et nouvelle décision au fond, et ce sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner le bien-fondé des autres griefs de l'appelante.
6. 6.1 Compte tenu du renvoi de la cause au Tribunal, le sort des frais de première instance sera réglé avec le jugement final de première instance (art. 104 al. 1 CPC).
6.2 Les frais judiciaires relatifs à la procédure d'appel seront arrêtés à 3'000 fr. (art. 2, 17 et 35 RTFMC) et compensés partiellement avec l'avance de frais fournie par l'appelante, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). Ils seront mis à la charge de l'intimée, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Celle-ci sera dès lors condamnée à verser la somme de 2'000 fr. à l’Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à titre de solde des frais judiciaires d'appel et condamnée à verser 1'000 fr. à l’appelante, en remboursement de son avance.
Eu égard à la valeur litigieuse, au caractère non final de la procédure d'appel et à l'activité déployée par les conseils de l'appelante, les dépens d'appel seront arrêtés à 3'000 fr., débours et TVA inclus (art. 95 al. 3 CPC; art. 85, 87 et 90 RTFMC; art. 20 al. 1, 25 et 26 al. 1 LaCC). L'intimée, qui succombe, sera condamnée à les verser à l'appelante.
* * * * *
La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevable l'appel interjeté par A______ SA contre le jugement JTPI/3800/2023 rendu le 24 mars 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/22392/2021-6.
Au fond :
Annule ce jugement.
Renvoie la cause au Tribunal de première instance pour instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants du présent arrêt.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires d'appel à 3'000 fr. et les compense partiellement avec l'avance versée par A______ SA, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.
Met les frais judiciaires à la charge de B______ et la condamne en conséquence à verser 2'000 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à titre de solde des frais judiciaires d'appel.
Condamne B______ à verser à A______ SA la somme de 1'000 fr. à titre de remboursement de son avance de frais.
Condamne B______ à verser à A______ SA la somme de 3'000 fr. à titre de dépens d'appel.
Siégeant :
Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Pauline ERARD et Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.
Le président : Cédric-Laurent MICHEL |
| La greffière : Sandra CARRIER |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.