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Décisions | Chambre civile

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C/8654/2021

ACJC/1101/2023 du 29.08.2023 sur JTPI/9690/2022 ( OO ) , MODIFIE

Normes : CC.273; CC.274; CC.276; CC.285
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8654/2021 ACJC/1101/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 29 AOÛT 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié c/o Monsieur B______, ______, appelant d'un jugement rendu par la 14ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 23 août 2022, comparant par Me Samir DJAZIRI, avocat, Djaziri & Nuzzo, rue Leschot 2, 1205 Genève, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

Madame C______, domiciliée ______, intimée, comparant par Me Annette MICUCCI, avocate, Merkt & Associés, rue Général-Dufour 15, case postale, 1211 Genève 4, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile.

SERVICE CANTONAL D’AVANCE ET DE RECOUVREMENT DES PENSIONS ALIMENTAIRES (SCARPA), sis rue Ardutius-de-Foucigny 2, 1204 Genève, autre intimé, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/9690/2022 du 23 août 2022, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a prononcé le divorce de A______ et de C______ (ch. 1 du dispositif), attribué à C______ l’autorité parentale exclusive sur l’enfant D______ (ch. 2) ainsi que la garde de ce dernier (ch. 3), renoncé en l’état à fixer un droit de visite sur l’enfant D______ en faveur de A______ (ch. 4) et "rapporté" la curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles (ch. 5). Il a, en outre, condamné A______ à verser à C______, par mois et d’avance, allocations familiales ou d’études non comprises, à titre de contribution à l’entretien de l’enfant D______, 960 fr. jusqu’au 31 août 2023, puis 560 fr. jusqu’à l’âge de 10 ans et 760 fr. de l’âge de 10 ans jusqu’à la majorité, voire au-delà si l’enfant poursuivait une formation ou des études régulières et suivies, mais au plus tard jusqu’à l’âge de 25 ans (ch. 6), attribué à C______ l’intégralité des bonifications pour tâches éducatives (ch. 7), ordonné le partage par moitié des avoirs de prévoyance acquis durant le mariage (ch. 8 et 9) et débouté A______ des fins de sa demande en tant qu’elle était dirigée contre le Service cantonal d’avance et de recouvrement des pensions alimentaires (ci-après : SCARPA) (ch. 10). Il a, enfin, arrêté les frais judiciaires de la procédure à 1'200 fr. (ch. 11), les a mis à la charge de A______ à hauteur de 700 fr. et à la charge de C______ à hauteur de 500 fr. (ch. 12), dit qu’il n’était pas alloué de dépens (ch. 13) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 14).

B. a. Par acte expédié le 30 septembre 2022 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a appelé de ce jugement, qu’il a reçu le 31 août 2022. Il a conclu à l’annulation des chiffres 4, 6 et 14 de son dispositif et, cela fait, à ce qu’un droit de visite sur l’enfant D______ lui soit réservé à raison d’un week-end sur deux et durant la moitié des vacances scolaires, à ce que la Cour fixe l’entretien convenable de l’enfant D______, à ce qu’il lui soit donné acte de son engagement à verser, par mois et d’avance, dès le mois d’avril 2021, 250 fr. au titre de contribution à l’entretien de l’enfant D______, jusqu’à l’âge de 18 ans révolus, voire au-delà en cas d’études suivies et sérieuses mais jusqu’à 25 ans au maximum et à ce que la dissolution du régime matrimonial soit prononcée, sous suite de frais judiciaires et dépens.

b. C______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions, sous suite de frais judiciaires et dépens de la procédure.

c. Invité à se prononcer sur l’appel, le SCARPA a renoncé à se déterminer, rappelant que conformément à la nouvelle jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêt 5A_75/2020 du 12 janvier 2022) il n'avait plus la légitimation passive dans les procédures en modification intentées par le débiteur, indépendamment de l'existence d'avances et, le cas échéant, de leur date ainsi que leur durée.

d. Dans leur réplique et duplique des 16 décembre 2022 et 18 janvier 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

e. Le 23 janvier 2023, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant
(ci-après : le Tribunal de protection) a transmis à la Cour un courrier du 18 janvier 2023 des curateurs en charge d'organiser et de surveiller les relations personnelles entre D______ et son père, l'informant que le Point Rencontre avait suspendu, le 4 mai 2021, les visites de A______ en raison de ses nombreuses absences injustifiées. Depuis lors, A______ n'avait pas cherché à reprendre contact avec son fils et ne s'était pas inquiété de la situation de celui-ci. Il n'y avait depuis lors aucun contact entre le père et l'enfant. Ce dernier se portait bien et évoluait favorablement pour son âge. Il était chez une maman de jour et était prévu qu'il commence l'école en août 2023. Il poursuivait son traitement chez une pédopsychiatre, qui travaillait sur les questionnements que D______ pouvait avoir sur son père. Les curateurs ont donc demandé à ce que la curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles soit levée.

Ce courrier a été transmis aux parties le 24 janvier 2023.

f. Par avis du 21 février 2023, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les éléments pertinents suivants résultent de la procédure :

a. A______, né le ______ 1979, et C______, née le ______ 1985, tous deux de nationalité marocaine, se sont mariés le ______ 2017 à E______ (Genève), sans conclure de contrat de mariage.

Ils sont les parents de D______, né le ______ 2018.

A______ est également le père de F______, né en 2017 d’une précédente relation, sur lequel il exerce un droit de visite d'un week-end sur deux et une soirée une semaine sur deux, le mercredi soir, lorsque l'enfant passe le week-end avec sa mère.

b. Les parties se sont séparées au cours de l’année 2018. Les modalités de leur vie séparée ont été réglées par jugement sur mesures protectrices de l’union conjugale du 28 janvier 2019. Dans cette décision, le Tribunal a notamment attribué la garde de l’enfant D______ à C______ et réservé à A______ un droit de visite devant s’exercer deux heures par semaine, en présence de C______ et d’un tiers agréé par celle-ci, et instauré une curatelle d’organisation et de survenance des relations personnelle en faveur de D______. Il a, en outre, prononcé la séparation de biens des parties.

c. Par décision du 7 février 2019, le Tribunal de protection a ordonné que le droit de visite de A______ s’exerce au Point Rencontre à raison d’une heure et demie par semaine. Ce droit a été ramené à une semaine sur deux à la demande de A______ en raison de son droit de visite sur son fils F______.

d. Le 30 avril 2021, A______ a formé une demande unilatérale en divorce devant le Tribunal. Outre au prononcé du divorce, il a conclu, s’agissant des points encore litigieux en appel, à ce qu'un large droit de visite sur l’enfant D______ lui soit réservé, à ce que l’entretien convenable de l’enfant soit fixé à 201 fr. 10, à ce qu’il lui soit donné acte de son engagement à verser, par mois et d’avance, dès le mois d’avril 2021, 250 fr. au titre de contribution à l’entretien de l’enfant D______, jusqu’à l’âge de 18 ans révolus, voire au-delà en cas d’études suivies et sérieuses mais jusqu’à 25 ans au maximum et réserve ses conclusions en lien avec la liquidation du régime matrimonial.

e. Lors de l’audience du 5 octobre 2021, A______ a indiqué ne plus avoir vu son fils D______ depuis le mois de juin 2021.

f. Dans son rapport du 15 février 2022, le SEASP a préconisé l’attribution de l’autorité parentale exclusive et de la garde de l’enfant D______ à C______, à ce qu’il soit renoncé en l’état à fixer des relations personnelles entre le père et l’enfant et à ce que la mesure de curatelle soit "rapportée".

Il a notamment constaté que les visite au Point Rencontre avaient été suspendues après plusieurs absences non motivées ni annoncées de A______. Ce dernier refusait désormais de se rendre à des visites au Point Rencontre et, bien qu’invité par le Service de protection des mineurs à prendre contact avec les intervenants autour de l’enfant, il n’avait eu qu’un seul contact téléphonique avec la pédiatre.

g. Dans sa réponse du 11 mai 2022, C______ a notamment conclu à ce qu’il soit renoncé en l’état à fixer un droit de visite en faveur de A______ et à ce que ce dernier soit condamné à lui verser une contribution d’entretien en faveur de l’enfant de 1'950 fr. 20 jusqu’au 31 août 2023, puis 1'200 fr. jusqu’au 31 août 2027 et 1'400 fr. au-delà, jusqu’à la majorité de l’enfant ou la fin d’études régulières. Elle a également conclu à ce que A______ soit condamné à lui verser 7'189 fr. 80 à titre de liquidation du régime matrimonial, soit 5'434 fr. de primes d'assurance-maladie et 1'755 fr. 80 de factures médicales, qu'elle a allégué avoir payées durant le mariage.

h. A l’issue de l’audience du 28 juin 2022, les parties ont persisté dans leurs conclusions et le Tribunal a gardé la cause à juger.

D. Dans la décision querellée, le Tribunal a retenu, s’agissant des points encore litigieux en appel, qu’il était inenvisageable que le lien entre le père et le fils se rétablisse de manière non encadrée dès lors que cela faisait plus d’une année que le droit de visite n’avait pas été exercé. Comme le père refusait désormais de se rendre au Point Rencontre et n’entreprenait aucune démarche en vue de la reprise des relations personnelles, en dehors des conclusions qu’il prenait dans la procédure de divorce, il se justifiait de suivre les recommandations du SEASP et de renoncer, en l’état, à fixer un droit de visite entre A______ et son fils D______.

Par ailleurs, l'entretien convenable de l'enfant D______ était de 959 fr. jusqu'au 31 août 2023, de 559 fr. dès le 1er septembre 2023 compte tenu de l'entrée de l'enfant à l'école et de 759 fr. dès l'âge de 10 ans.

C______, sans revenus jusqu'au mois de juillet 2022, était en apprentissage en vue de l'obtention d'un CFC en soins et santé communautaire depuis le mois d'août 2022. Sa formation devrait durer trois ans. Son salaire d'apprentie serait de 740 fr. par mois la première année, 960 fr. la deuxième année et de 1'550 fr. la troisième année. Ses charges étaient de 2'326 fr. de sorte qu'elle était financièrement soutenue par l'Hospice général.

A______, chauffeur, réalisait un salaire mensuel net de 4'621 fr., lequel serait de 4'800 fr. hors "achat de vacances". Ses charges s'élevaient à 3'601 fr., comprenant le loyer (1'325 fr., ½ de 2'355 fr.), la prime d'assurance-maladie (406 fr.), les frais de transport (70 fr.), la contribution à l'entretien de l'enfant F______ (600 fr.) et son entretien de base selon les normes OP (1'200 fr.). Le Tribunal a notamment considéré que A______ partageait son logement avec son frère, locataire principal, de sorte qu'il devait en partager le loyer et qu'en tout état il lui incomberait de réduire la charge de loyer, hors de proportion avec son revenu et avec ses besoins de parent vivant seul et accueillant son fils F______ pour un droit de visite d'une nuit par semaine, en sous-louant une partie des locaux. Il a également écarté les frais de véhicule dès lors que A______ n'avait pas établi être domicilié à G______ [GE] chez son frère et qu'il soit nécessaire qu'il dispose d'un véhicule privé pour se rendre tôt le matin (6 h) sur son lieu de travail à H______ [GE].

La prise en charge en nature de l'enfant étant assumée exclusivement par la mère, les besoins financiers de l'enfant devaient être assumés exclusivement par le père qui disposait d'un solde mensuel de 1'009 fr. lui permettant de s'acquitter d'une contribution à l'entretien de l'enfant D______ de 960 fr. jusqu'au 31 août 2023, de 560 fr. dès le 1er septembre 2023 et de 760 fr. dès que l'enfant aurait atteint l'âge de 10 ans.

Par ailleurs, le Tribunal a débouté C______ de ses prétentions tendant au remboursement par son époux de 5'434 fr. de primes d'assurance-maladie et de 1'755 fr. 80 de factures médicales. Aucune preuve n'avait été apportée s'agissant des primes d'assurance-maladie et C______ n'avait pas prouvé s'être acquittée des factures médicales.

E. a. A______, qui travaille en qualité de chauffeur pour la société I______ AG depuis 2018, débute son activité entre 6h et 6h45 du matin, selon les besoins d'exploitation de l'entreprise, à H______ où la société possède une succursale.

En 2021, son salaire mensuel brut était de 4'950 fr., versé 13 fois l'an. Il a perçu un salaire mensuel net moyen de 4'710 fr.

En 2022, selon ses fiches de salaires, son salaire mensuel brut était de 5'000 fr. Compte tenu d'une déduction de 95 fr. bruts pour "Ferienkauf", de 8,576 % de charges sociales et de 287 fr. de cotisations LPP, son salaire mensuel net s'élevait à 4'197 fr. En sus, il a perçu une prime d'équipe de 300 fr. bruts au mois de janvier, de sorte que, pour ce mois, son salaire net a été de 4'472 fr.

b. Le 1er novembre 2021, le frère de A______, B______, alors domicilié no. ______ chemin 1______ à J______ [GE], a pris à bail un appartement au no. ______ chemin 2______ à G______, pour un loyer de 2'355 fr. par mois, dont 140 fr. relatifs à une place de parking.

B______, alors domicilié no. ______ chemin 1______ à J______, a versé au bailleur 2'355 fr. le 27 octobre 2021. Les bulletins de versement suivants, prouvant qu'il s'est acquitté du loyer les 2 avril, 1er et 7 juin 2022, mentionnent qu'il est domicilié au no. ______ chemin 2______.

A______ a produit un contrat de sous-location selon lequel il loue l'appartement situé au no. ______ chemin 2______ à son frère, pour un loyer de 2'355 fr., depuis le 1er novembre 2021. Le bail pouvait être résilier au plus tôt le 30 septembre 2022 puis pour la fin d'un mois moyennant d'un délai de trois mois. Il est indiqué sur ce document que le bail principal a été signé le 1er novembre 2021.

A______ a produit un courrier non daté signé par son frère et adressé à l'Office cantonal de la population par lequel B______ a attesté sous-louer son appartement à A______ depuis le 1er novembre 2021.

c. A______ s'acquitte d'une contribution à l'entretien de F______ de 600 fr. par mois.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance, dans les causes dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

Savoir si l’affaire est de nature patrimoniale dépend des conclusions de l’appel. Si tel est le cas, la valeur décisive pour l’appel est celle des conclusions qui étaient litigieuses immédiatement avant la communication de la décision attaquée (arrêt du Tribunal fédéral 5D_13/2017 du 4 décembre 2017 consid. 5.2 ; Tappy, CR CPC, 2019, n. 64 ad art. 91 CPC ; Baston Bulletti, PC CPC, 2020, n. 6 ad art. 308 CPC).

En l'occurrence, le litige porte notamment sur l'étendue du droit de visite du père, soit sur une affaire non pécuniaire dans son ensemble, de sorte que la voie de l'appel est ouverte indépendamment de la valeur litigieuse (arrêt du Tribunal fédéral 5A_611/2019 du 29 avril 2020 consid. 1).

1.2 Déposé en temps utile et dans la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1, 143 al. 1 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.3 Sont également recevables la réponse de l'intimée (art. 312 al. 1 et 2 CPC) ainsi que, conformément au droit inconditionnel de réplique, les déterminations spontanées déposées postérieurement par l'appelant (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1; 142 III 48 consid. 4.1.1) alors que la cause n'avait pas encore été gardée à juger.

1.4 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit. En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4 ;
138 III 374 consid. 4.3.1).

Hormis les cas de vices manifestes, la Cour doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).

1.5 La présente cause est soumise aux maximes d'office et inquisitoire illimitée dès lors qu'elle concerne l’enfant mineur des parties (art. 277 al. 3 et 296 al. 1 et al. 3 CPC), de sorte que la Cour n'est liée ni par les conclusions des parties sur ce point (art. 296 al. 3 CPC) ni par l'interdiction de la reformatio in pejus
(ATF 129 III 417 consid. 2.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_843/2018 du 12 février 2020 consid. 5.2).

La maxime des débats s’applique à la procédure concernant le régime matrimonial (art. 277 al. 1 CPC), ainsi que le principe de disposition (art. 58 al. 1 CPC; arrêts du Tribunal fédéral 5A_728-756/2020 du 12 janvier 2022 consid. 3.1).

2. L’appelant reproche au Tribunal de ne pas lui avoir octroyé un droit de visite usuel sur l’enfant D______.

2.1.1 Aux termes de l'art. 273 al. 1 CC, le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde, ainsi que l'enfant mineur, ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances.

Autrefois considéré comme un droit naturel des parents, le droit aux relations personnelles est désormais conçu à la fois comme un droit et un devoir de ceux-ci (cf. art. 273 al. 2 CC), mais aussi comme un droit de la personnalité de l'enfant; il doit servir en premier lieu l'intérêt de l'enfant, celui des parents venant en seconde position (ATF 136 I 178 consid. 5.3). A cet égard, il est unanimement reconnu que le rapport de l'enfant avec ses deux parents est essentiel et qu'il peut jouer un rôle décisif dans le processus de recherche d'identité de l'enfant (ATF 130 III 585 consid. 2.2.2; 127 III 295 consid. 4a; 123 III 445 consid. 3c; arrêts du Tribunal fédéral 5A_887/2017 du 16 février 2018 consid. 5.3; 5A_184/2017 du 8 juin 2017 consid. 4.1; 5A_586/2012 du 12 décembre 2012 consid. 4.2).

Quand les contacts ont été interrompus depuis longtemps, il est possible de prévoir un droit de visite restreint, si cela permet d'envisager une reprise progressive des relations (arrêt du Tribunal fédéral 5A_875/2017 du 6 novembre 2018 consid. 3.3).

2.1.2 Le droit aux relations personnelles n'est pas absolu. Si les relations personnelles compromettent le développement de l'enfant, si les père et mère qui les entretiennent violent leurs obligations, s'ils ne se sont pas souciés sérieusement de l'enfant ou s'il existe d'autres justes motifs, le droit d'entretenir ces relations peut leur être retiré ou refusé (art. 274 al. 2 CC).

2.1.3 Pour trancher le sort des enfants, le juge peut avoir recours aux services de protection de l'enfance ou de la jeunesse pour demander un rapport sur la situation familiale, une enquête sociale pouvant avoir son utilité en cas de situation conflictuelle et de doute sur la solution adéquate pour les enfants
(ATF 142 III 617 consid. 3.2.3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_277/2021 du 30 novembre 2021 consid. 4.1.2; 5A_381/2020 du 1er septembre 2020 consid. 4.1).

Le juge n'est pas lié par les conclusions du SEASP. Le rapport de ce service (lequel constitue une preuve au sens des art. 168 et 190 CPC) est soumis, à l'instar des autres preuves, au principe de la libre appréciation consacrée par l'art. 157 CPC. Cependant, une portée particulière peut être conférée au rapport d'évaluation sociale, qui prend en compte toute une série d'éléments objectifs, fondés sur les déclarations d'intervenants scolaires, médicaux ou sociaux. Il contient également des appréciations subjectives, découlant souvent d'une grande expérience en la matière, mais qui ne sauraient toutefois remplacer le pouvoir de décision du juge (ACJC/256/2021 du 2 mars 2021 consid. 6.1.2; ACJC/826/2020 du 16 juin 2020 consid. 2.1.2; ACJC/1311/2017 du 11 octobre 2017 consid. 3.1.2).

2.2 En l'espèce, l’appelant fait valoir en appel qu’il n’existe aucun élément permettant de douter de ses capacités parentales et qui s’opposerait à la fixation d’un droit de visite usuel. Il relève qu’il exerce un tel droit de visite sur son second fils, F______, et que le fait qu’il n’ait vu son fils D______ jusqu’à présent qu’au Point Rencontre ne justifie aucunement que cette situation perdure.

L'appelant perd toutefois de vue que l'enfant D______ est encore très jeune et que, ne l'ayant plus vu depuis le mois d'avril 2021, alors qu'il était âgé de deux ans et demi, cette longue séparation a eu pour conséquence que l'appelant n'est plus un familier de l'enfant. Il pourrait ainsi être perturbant pour l'enfant, qui pour l'heure se porte bien, de devoir se rendre chez une personne qu'il ne connait plus, un week-end sur deux, et ce même si l'appelant est apte à s'en occuper. Il est donc nécessaire qu'une reprise progressive des contacts ait lieu préalablement.

Dès lors que l'appelant refuse pour l'heure de se rendre au Point Rencontre pour une reprise progressive des relations personnelles, c'est à juste titre que le premier juge a, en l'état, renoncé à fixer un droit de visite sur l’enfant D______ en faveur de l'appelant, selon les termes souhaités par ce dernier.

Par conséquent, le chiffre 4 du dispositif du jugement attaqué sera confirmé.

3. L’appelant reproche au Tribunal d’avoir fixé une contribution à l’entretien de l’enfant trop élevée au regard de ses revenus et de ses charges.

3.1.1 Selon l'art. 276 CC, auquel renvoie l'art. 133 al. 1 ch. 4 CC, l'entretien de l'enfant est assuré par les soins, l'éducation et des prestations pécuniaires, ces trois éléments étant considérés comme équivalents (ATF 147 III 265 consid. 5.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_117/2021 du 9 mars 2022 consid. 4.2). Aux termes de l'art. 276 al. 2 CC, les parents contribuent ensemble, chacun selon ses facultés, à l'entretien convenable de l'enfant et assument en particulier les frais de sa prise en charge, de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger.

Selon l'art. 285 al. 1 CC, la contribution d'entretien due à l'enfant doit correspondre aux besoins de celui-ci ainsi qu'à la situation et aux ressources des père et mère, compte tenu de la fortune et des revenus de l'enfant.

3.1.2 Selon la méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille fixée par le Tribunal fédéral (ATF 147 III 265 in SJ 2021 I 316; 147 III 293 et 147 III 301), soit la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent (dite en deux étapes), il convient, d'une part, de déterminer les moyens financiers à disposition, à savoir les revenus effectifs (revenus du travail, de la fortune et les prestations de prévoyance) ou hypothétiques et, d'autre part, de déterminer les besoins de la personne dont l'entretien est examiné (entretien convenable, qui n'est pas une valeur fixe, mais dépend des besoins concrets et des moyens à disposition). Les ressources à disposition sont ensuite réparties entre les différents membres de la famille, selon un certain ordre de priorité, de manière à couvrir le minimum vital du droit des poursuites, respectivement en cas de moyens suffisants, le minimum vital du droit de la famille. Enfin, l'éventuel excédent est réparti par "grandes et petites têtes", soit à raison de deux parts par adulte et d'une part par enfant mineur, ou de manière équitable en fonction de la situation concrète, en tenant compte de toutes les circonstances entourant la prise en charge de l'enfant et des particularités du cas d'espèce (ATF 147 III 265 consid. 7).

Les besoins sont calculés en prenant pour point de départ les lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP (ATF 147 III 265 consid. 7). Seuls les frais de logement effectifs ou raisonnables doivent être pris en considération dans le calcul des charges des époux, menant à celui de la contribution d’entretien. Les charges de logement d’un conjoint peuvent ne pas être intégralement retenues lorsqu’elles apparaissent excessivement élevées au regard de ses besoins et de sa situation économique concrète. Si le coût effectif du logement est déraisonnable, un délai est laissé à l’intéressé pour adapter ses frais de logement ; ce délai équivaut en principe au prochain terme de résiliation du bail (ATF 129 III 526 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_679/2019 et 5A_681/2019 du 5 juillet 2021 consid. 16.1.1 et les arrêts cités).

3.2.1 En l'espèce, en 2022, le salaire mensuel net moyen de l'appelant a été de 4'570 fr. ((4'472 + 4'197 fr. x 12) / 12). Il n'est pas avéré que l'appelant ait de nouveau "acheté" des périodes de vacances en 2023 et il peut être exigé de lui qu'il y renonce compte tenu de la situation financière des parties. Son salaire mensuel net était ainsi de 4'641 fr. (5'000 fr. – 8,576% de charges sociales – 287 fr. de cotisations LPP, versé 13 fois l'an).

L'appelant reproche au premier juge de ne pas avoir tenu compte de l'intégralité du loyer de 2'355 fr. de l'appartement sis no. ______ chemin 2______ à G______. Il fait valoir que le Tribunal a arbitrairement écarté cette charge alors qu'il a produit un contrat de sous-location ainsi que le courrier de son frère annonçant la sous-location à l'OCPM. Outre qu'il n'est pas établi que ce dernier courrier ait été envoyé à l'OCPM, l'appelant n'a pas prouvé s'acquitter d'un loyer en faveur de son frère, les seuls documents produits n'attestant que du paiement du loyer par son frère en faveur du bailleur. A cela s'ajoute qu'un loyer de 2'355 fr. par mois s'avère disproportionné par rapport aux revenus de l'appelant qui sont de l'ordre de 4'600 fr. par mois en moyenne. Compte tenu du fait que l'appelant ne reçoit l'enfant F______ en visite qu'une nuit par semaine, il peut être exigé de lui qu'il occupe un appartement de trois pièces, et, compte tenu de ses faibles revenus, il peut prétendre à un appartement à loyer modéré. Le loyer mensuel moyen pour des logements contrôlés ou subventionnés loués à Genève en 2022 à un nouveau locataire selon l'Office cantonal de la statistique du canton de Genève se monte à 1'044 fr. pour un logement de trois pièces (https://statistique.ge.ch/domaines/05/05_04/ tableaux.asp#5; T 05.04.2.02), montant auquel peut être ajouté des charges estimées à 150 fr., soit un montant total de 1'200 fr., de sorte que la somme de 1'325 fr. retenue par le premier juge à titre de loyer pour l'appelant peut être confirmée.

Par ailleurs, dès lors que les transports publics genevois débutent leur activité à 5h du matin, l'appelant dispose du temps nécessaire pour rejoindre son lieu de travail à H______ pour 6h du matin même en venant en bus depuis G______. Par conséquent, c'est à juste titre que le premier juge n'a tenu compte que d'un abonnement de transports publics dans les charges de l'appelant.

Les charges de l'appelant s'élèvent ainsi à 3'001 fr. comprenant le loyer (1'325 fr.), la prime d'assurance-maladie (406 fr.) les frais de transport (70 fr.) et son entretien de base selon les normes OP (1'200 fr.).

Compte tenu de ce qui précède, le solde mensuel de l'appelant était de 1'569 fr. (4'570 fr. – 3'001 fr.) en 2022 et de 1'640 fr. (4'641 fr. – 3'001 fr.) en 2023, ce qui lui permet de s'acquitter non seulement de la contribution à l'entretien de F______, qui s'élève actuellement à 600 fr. par mois, mais également de verser les contributions à l'entretien de l'enfant D______, telles que fixées par le Tribunal, le montant le plus élevé étant de 950 fr. par mois, étant relevé que l'appelant n'a pas critiqué les montants retenus à titre d'entretien convenable pour l'enfant par le premier juge.

Enfin, c'est à juste titre que le premier juge a statué que les contributions susmentionnées seraient dues dès le prononcé du jugement, ce dernier ne pouvant pas revenir rétroactivement sur le jugement sur mesures protectrices de l'union conjugale du 28 janvier 2019 qui a continué de déployer ses effets pendant la durée de la procédure (ATF 142 III 193 consid. 5.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_97/2017 du 23 août 2017 consid. 11.1).

Par conséquent, le chiffre 6 du dispositif du jugement querellé sera confirmé.

4. L’appelant reproche au premier juge de ne pas avoir prononcé la "dissolution du régime matrimonial" après avoir débouté l'intimée de ses conclusions en liquidation du régime matrimonial.

L'intimée, qui ne conteste pas le jugement en tant qu'il l'a déboutée de ses conclusions en liquidation du régime matrimonial, considère pour sa part qu'il s'agit d'une simple erreur matérielle qui peut être rectifiée par le Tribunal en application de l'art. 334. al. 1 CPC.

4.1 Lorsque les époux sont soumis au régime matrimonial de la participation aux acquêts, s’il y a divorce, séparation de corps, nullité de mariage ou séparation de biens judiciaire, la dissolution du régime rétroagit au jour de la demande (art. 204 al. 2 CC).

Au moment du divorce, le régime matrimonial doit être liquidé. Chacun des conjoints reprend ses biens propres, les acquêts sont partagés entre les deux conjoints et les époux règlent leurs dettes réciproques (art. 205 ss CC).

4.2 En l'espèce, même si elles n'ont pas pris de conclusions formelles sur ce point, il résulte des écritures des parties qu'elles n'ont plus aucune prétention à faire valoir l'une envers l'autre du chef de la liquidation du régime matrimonial. En effet, l'intimée n'a pas appelé du jugement la déboutant de ses conclusions sur ce point et l'appelant n'a formulé aucune prétention à l'encontre de l'intimée du chef de la liquidation du régime matrimonial.

Par conséquent, le jugement querellé sera complété en ce sens qu'il sera constaté que le régime matrimonial des parties est liquidé.

5. Les frais judicaires d'appel, arrêtés à 1'250 fr. (art. 30 et 35 RTFMC), seront mis à la charge de chaque partie par moitié, compte tenu de la nature familiale du litige (art. 107 al. 1 let c. CPC). 

Les deux parties plaidant au bénéfice de l'assistance juridique, ces frais seront provisoirement laissés à la charge de l'Etat de Genève, lequel pourra en réclamer le remboursement ultérieurement aux conditions de l'art. 123 CPC

Chaque partie supportera ses propres dépens d'appel, vu la nature familiale du litige (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *

 

 



 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 30 septembre 2022 par A______ contre le jugement JTPI/9690/2022 rendu le 23 août 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/8654/2021.

Au fond :

Constate que le régime matrimonial des parties est liquidé, les parties n'ayant plus aucune prétention à faire valoir l'une envers l'autre de ce chef.

Confirme ce jugement pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'250 fr., les met à la charge de A______ à concurrence de 625 fr. et de C______ à concurrence de 625 fr.

Dit que les frais judicaires seront provisoirement supportés par l'Etat de Genève.

Dit que chaque partie supportera ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.