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Décisions | Sommaires

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C/19648/2023

ACJC/487/2024 du 15.04.2024 sur JTPI/13510/2023 ( SFC ) , RENVOYE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/19648/2023 ACJC/487/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU LUNDI 15 AVRIL 2024

 

Entre

A______ SA, sise c/o B______, C______, ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 10ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 20 novembre 2023,

et

REGISTRE DU COMMERCE, sis rue du Puits-Saint-Pierre 4, case postale 3597, 1211 Genève 3, intimé.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/13510/2023 du 20 novembre 2023, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire, a ordonné la dissolution de A______ SA et sa liquidation selon les dispositions applicables à la faillite (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 600 fr. (ch. 2), mis à la charge de A______ SA, condamnée à payer à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, la somme de 600 fr. au titre de frais judiciaires (ch. 3 et 4), dit qu'il n'y avait pas lieu à l'allocation de dépens (ch. 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

Le Tribunal a retenu que A______ SA n'avait pas donné suite au délai qui lui avait été imparti pour rétablir la situation légale, de sorte que sa dissolution devait être prononcée en application de l'art. 731 CO.

B. a. Par acte expédié à la Cour de justice le 1er décembre 2023, A______ SA, vraisemblablement sous la signature de "C______", a formé appel contre ce jugement, qu'elle a reçu le 30 novembre 2023. Elle a sollicité une "restitution de délai", faisant valoir que "pour des raisons indépendantes de sa volonté", elle n'avait pas répondu dans le délai qui lui avait été imparti par le Tribunal. Elle avait communiqué au Registre du commerce la nomination d'un nouvel administrateur avant que le jugement entrepris ne soit rendu. Elle a conclu à l'annulation de la dissolution de la société.

b. Par arrêt présidentiel du 4 décembre 2023, la Cour a dit que la requête d'effet suspensif formée par A______ SA était sans objet et qu'il serait statué sur les frais de la décision avec l'arrêt rendu sur le fond.

c. Par réponse du 23 février 2024, le Registre du commerce s'en est rapporté à justice sur la recevabilité de l'appel ainsi que sur le bien-fondé de celui-ci, et a conclu à ce que l'intégralité des émoluments et frais judiciaires soient mis à la charge de A______ SA.

Il a fait valoir que l'administrateur dont l'inscription avait été requise le 22 novembre 2023 n'apparaissait pas domicilié à Genève selon le registre de l'Office cantonal de la population et des migrations.

d. Les parties ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 14 mars 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits suivants ressortent du dossier.

a. A______ SA est inscrite au Registre du commerce de Genève.

Son capital social est de 100'000 fr.

Son unique administrateur, D______, de E______, en a été radié le ______ octobre 2022.

b. Par courrier du 7 juillet 2023, le Registre du commerce a imparti à A______ SA un délai de trente jours pour rétablir la situation légale en ce qui concernait l'organisation de la société, en requérant l'inscription d'un membre du conseil d'administration domicilié en Suisse (art. 718 al. 3 et 4 CO).

c. Le 19 septembre 2023, le Registre du commerce a informé le Tribunal de ce que la société présentait des carences dans son organisation, compte tenu de l'absence d'un administrateur et d'un signataire domicilié en Suisse.

d. Par ordonnance du 23 septembre 2023, le Tribunal a imparti un délai de trente jours à A______ SA pour répondre à la requête du Registre du commerce et produire toutes pièces utiles, ou pour fournir la preuve documentée du rétablissement de la situation légale.

Le pli contenant cette ordonnance n'a pas été retiré par A______ SA. Il lui a été réadressé par pli simple du 10 octobre 2023.

e. A______ SA n'a pas donné suite à l'ordonnance précitée.

f. Le 22 novembre 2023, elle a adressé au Registre du commerce une réquisition d'inscription, portant la signature de F______ et de C______, assortie du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire tenue le 20 novembre 2023 et présidée par C______, lors de laquelle toutes les actions étaient représentées et F______ a été nommé en qualité d'administrateur.

Dans la réquisition il est mentionné que F______, "de France à Genève" est nommé administrateur individuel avec signature individuelle.

La réquisition porte le timbre humide signé du Registre du commerce "Vu pour légalisation de la signature personnelle et commerciale de M. F______, apposée devant nous. Permis B contrôlé".

 

EN DROIT

1. 1.1.1 Selon l'art. 308 al. 1 let. b CPC, l'appel est recevable contre les décisions finales et incidentes de première instance, dans les causes dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions de première instance, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

La valeur litigieuse de la présente cause, qui correspond à la valeur du capital social (arrêt du Tribunal fédéral 4A_387/2020 du 17 septembre 2020 consid. 1.2), est de 100'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.1.2 Les organes exécutifs de la personne morale (et non l'organe législatif ou l'organe de contrôle), mais aussi toutes les personnes qui peuvent valablement représenter la société anonyme dans les actes juridiques avec des tiers en vertu des règles du droit civil, peuvent accomplir des actes judiciaires en son nom, comme signer des écritures, donner procuration à un avocat et comparaître aux audiences. Peuvent ainsi représenter la société en justice: (1) ses organes exécutifs, qui expriment directement la volonté de la société et sont inscrits au registre du commerce (art. 720 CO), (2) des personnes qui sans avoir la qualité d'organes, ont reçu des pouvoirs de représentation.

Sont joints à la demande, le cas échéant, la procuration du représentant (art. 221 al. 2 let. a CPC).

1.2 En l'espèce, l'appel a été déposé dans le délai et la forme prescrits, il est recevable sous cet angle. La validité du pouvoir de représentation du signataire de l'appel n'a pas à être examinée plus avant, compte tenu de ce qui suit.

2. 2.1.1 Les citations, les ordonnances et les décisions sont notifiées par envoi recommandé ou d'une autre manière contre accusé de réception (art. 138 al. 1 CPC).

L'acte est réputé notifié, en cas d'envoi recommandé, lorsque celui-ci n'a pas été retiré : à l'expiration d'un délai de sept jours à compter de l'échec de la remise, si le destinataire devait s'attendre à recevoir la notification (art. 138 al. 3 let. a CPC).

Un rapport procédural, qui impose aux parties de se comporter conformément aux règles de la bonne foi, soit, notamment, de se préoccuper de ce que les actes judiciaires concernant la procédure puissent leur être notifiés, ne prend naissance qu'à partir de la litispendance (ATF 138 III 225 consid. 3.1; 130 III 396 consid. 1.2.3 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 5D_130/2011 du 22 septembre 2011 consid. 2.1, publié in Pra 2012 (42) 300).

L'atteinte causée par le défaut d'une citation valablement notifiée est d'une gravité telle qu'elle ne peut pas être réparée devant l'instance de recours; si cette atteinte est réalisée, la cause doit être renvoyée à l'autorité de première instance
(ATF 138 III 225 consid. 3.3 et les références).

La nullité doit être constatée d'office, en tout temps et par l'ensemble des autorités étatiques; elle peut aussi être constatée en procédure de recours (ATF 137 III 217 consid. 2.4.3; 132 II 342 consid. 2.1; 122 I 97 consid. 3a), y compris en dépit de l'irrecevabilité éventuelle du recours (arrêt du Tribunal fédéral 7B.20/2005 du 14 septembre 2005 consid. 1.3 non publié aux ATF 131 III 652).

2.2 En l'espèce, l'ordonnance impartissant à l'appelante un délai pour rétablir la situation légale n'a pas été valablement notifiée à celle-ci, qui n'a pas pu se déterminer sur la requête de l'intimé. Avant la reddition du jugement, l'appelante avait saisi le Registre du commerce d'une réquisition d'inscription d'un administrateur domicilié à Genève, bénéficiaire d'un permis B, à teneur du timbre humide figurant sur dite réquisition. C'est dans l'ignorance de ces éléments que le premier juge a rendu la décision querellée, l'appelante n'ayant pas eu l'occasion de l'en informer, puisque non atteinte par l'ordonnance du 23 septembre 2023.

Il résulte de ce qui précède que le jugement entrepris sera annulé et la cause renvoyée au Tribunal pour qu'il donne à l'appelante la possibilité de se déterminer sur la requête de l'intimé.

Il n'y a dès lors pas à statuer sur la conclusion de l'appelante en restitution du délai.

3. Compte tenu du renvoi de la cause au Tribunal, les frais de l'appel, y compris la décision sur effet suspensif, seront laissés à la charge de l'Etat de Genève. L'avance opérée par l'appelante lui sera restituée.

Il n'y pas lieu à l'allocation de dépens, l'intimé comparant en personne et n'en ayant pas sollicité.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 1er décembre 2023 par A______ SA contre le jugement JTPI/13510/2023 rendu le 20 novembre 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/19648/2023–10 SFC.

Au fond :

Annule ce jugement.

Renvoie la cause au Tribunal de première instance pour instruction et nouvelle décision.

Déboute les parties de toutes autres conclusions d'appel.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de l'appel à 600 fr. et les laisse à la charge de l'Etat de Genève.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer à A______ SA la somme de 600 fr.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.