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Décisions | Chambre pénale de recours

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PS/69/2023

ACPR/630/2023 du 11.08.2023 ( PSPECI ) , REJETE

Descripteurs : TRAVAIL D'INTÉRÊT GÉNÉRAL
Normes : CP.79a

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/69/2023 ACPR/630/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 11 août 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, France, agissant en personne,

recourant,

 

contre la décision rendue le 6 juin 2023 par le Service de l’application des peines et mesures,

 

et

LE SERVICE DE L'APPLICATION DES PEINES ET MESURES, route des Acacias 82, 1227 Carouge - case postale 1629, 1211 Genève 26,

 

Et

LE MINISTERE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3

intimés.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 16 juin 2023, A______ recourt contre la décision du 6 juin 2023, notifiée à une date que le dossier ne permet pas de déterminer, par laquelle le Service de l’application des peines et mesures (ci-après ; SAPEM) a refusé l’exécution de sa peine privative de liberté – de 148 jours – sous la forme d’un travail d’intérêt général (ci-après : TIG).

Le recourant conclut à l’annulation de la décision querellée et à ce qu'il soit autorisé à exécuter sa peine sous la forme d'un TIG ou de la semi-détention.

b. Par ordonnance du 29 juin 2023 (OCPR/43/2023), la Direction de la procédure a accordé l'effet suspensif demandé par courrier du 26 précédent.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ a été condamné pour infraction à la LEI ainsi que pour contravention à la LStup par ordonnances pénales du 14 juillet 2020, à une peine privative de liberté de 60 jours, sous déduction de 2 jours de détention avant jugement, et du 31 décembre 2020, à une peine privative de liberté de 20 jours, sous déduction de 1 jour de détention avant jugement.

L'intéressé doit dès lors subir un solde de 77 jours de peine privative de liberté.

b. Le 24 mars 2021, A______ a demandé à exécuter ses peines sous la forme d'un TIG.

c. Le 3 mai 2021, le Service de probation et d'insertion (ci-après, SPI) a transmis un préavis négatif, retenant que A______ ne bénéficiait d'aucune autorisation de séjour en Suisse.

C. Dans sa décision querellée, le SAPEM retient que A______ ne remplit pas les conditions légales et règlementaires pour bénéficier de l'exécution de ses peines sous la forme du TIG, ne bénéficiant pas d'autorisation de séjour ou de travail en Suisse et n'ayant aucune attache sur le territoire helvétique.

D. a. À l’appui de son recours, A______ soutient que sa mère, B______, l'hébergeait au chemin 1______ no. ______, à C______ [GE], et qu'il avait trouvé un travail d'été pour "un poste de courtier" à Genève. Il a joint un document manuscrit, soi-disant, de sa mère se disant prête à l'héberger pour qu'il puisse exécuter le TIG, aucune adresse n'étant mentionnée; un livret de circulation français au nom de cette dernière; les e-mails de deux sociétés déclinant ses offres de candidature.

b. Dans ses observations, le SAPEM relève qu'à teneur du courriel du 27 juin 2023 de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après; OCPM), B______ était inconnue de ses registres; A______ avait uniquement produit une attestation d'hébergement écrite de la main de sa mère sans produire aucun contrat de bail. Ce dernier n'avait jamais été titulaire d'une autorisation de séjour ni d'un permis frontalier et n'avait par conséquent, jamais résidé ou travaillé en Suisse. Par ailleurs, A______ semblait projeter de séjourner à Genève uniquement dans le but d'exécuter son éventuel TIG et regagner son domicile français à l'issue de l'exécution.

Les deux postulations, effectuées par A______ dans le cadre de ses recherches d'emploi sur le territoire suisse, n'attestaient pas d'une volonté de s'installer en Suisse de façon pérenne; elles étaient en effet récentes puisque les réponses négatives lui étaient parvenues les 26 mai et 13 juin 2023; cette dernière était incomplète, n'indiquant pas si la postulation avait été formulée pour un poste en Suisse, ne mentionnait pas le nom de A______ et avait été envoyée à une adresse e-mail différente de celle du 26 mai 2023.

c. Le Ministère public conclut au rejet du recours en application de la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 145 IV 10).

d. A______ réplique. Sa mère était en possession d'un carnet de circulation lui permettant "de stationner dans les places désignées c'est pour cela qu'elle ne possède pas de bail à son nom, juste un ticket de caisse".

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une décision rendue par le SAPEM, dans une matière pour laquelle il est compétent (art. 40 al. 1 et 5 al. 2 let. e LaCP [ E 4 10]), sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 42 al. 1 LaCP et 52 al. 2 du Règlement sur les formes alternatives d'exécution des peines du 13 décembre 2017 [RFAEP ; E 4 55.13]), les art. 379 à 397 CPP s'appliquant par analogie (art. 42 al. 2 LaCP), et émaner du condamné visé par la décision querellée, qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de la décision entreprise (art. 382 CPP).

2.             Le recourant fait grief au SAPEM d’avoir refusé l’exécution de sa peine sous forme de TIG.

2.1.       Selon l'art. 79al. 1 CP, s'il n'y a pas lieu de craindre que le condamné s'enfuie ou commette d'autres infractions, les peines suivantes peuvent, à sa demande, être exécutées sous la forme d'un travail d'intérêt général : une peine privative de liberté de six mois au plus (let. a) ; un solde de peine de six mois au plus après imputation de la détention avant jugement (let. b) ; une peine pécuniaire ou une amende (let. c). Le travail d'intérêt général doit être accompli au profit d'institutions sociales, d'œuvres d’utilité publique ou de personnes dans le besoin. Il n’est pas rémunéré (art. 79a al. 3 CP).

Cette disposition a été introduite avec la réforme du droit des sanctions, entrée en vigueur le 1er janvier 2018 (RO 2016 1249). Auparavant, le TIG n'était pas un mode d'exécution de la peine, mais un type de peine en soi (cf. art. 37 ss aCP). La modification a eu pour conséquence que c'est désormais l'autorité d'exécution, et non plus le juge du fond, qui est compétente pour accorder le TIG (art. 375 CP ; cf. Y. JEANNERET, La réforme de la réforme du droit des sanctions : la peine à la peine?, RPS 133/2015 345 ss, p. 354). Le Message du Conseil fédéral précise que, pour le reste, le TIG reste régi par les mêmes règles que sous l'ancien droit (Message du 4 avril 2012 relatif à la modification du CP et du CPM [réforme du droit des sanctions], FF 2012 4410, ch. 1.4.4 p. 4402).

2.2.       Dans son arrêt du 26 juillet 2022 (ACPR/500/2022), la Chambre de céans a déjà retenu que le TIG ne pouvait être refusé en raison de la seule absence d’une autorisation de séjour, en Suisse.

2.3.       En l'espèce, le SAPEM s'est fondé, pour rendre la décision querellée, sur la situation administrative du recourant, en particulier sur le fait qu'il n'était titulaire d'aucune autorisation de séjour ou de travail sur le territoire suisse. Ce faisant, l'autorité d'exécution paraît avoir refusé le bénéfice du TIG sur la base d'une condition qui ne ressort pas du droit fédéral, mais du droit cantonal et intercantonal, en l'occurrence les art. 8 al. 2 du Règlement sur l’exécution des peines sous la forme du travail d’intérêts général (RTIG ; E 4 55.09) et 18 let. b du Règlement sur les formes alternatives d’exécution des peines (RFAEP ; E 4 55.13), qui exigent toujours que le condamné étranger fournisse une attestation de séjour en Suisse. Ces dispositions ne sont que des scories de l'ancien art. 6 let. d RTIG et ne sauraient, sous peine de violer la primauté du droit fédéral et la solution mise en place dans l'ATF 145 IV 10, avoir de portée propre.

Dès lors, le SAPEM ne pouvait refuser le TIG au seul motif que le recourant n'était pas titulaire d'une autorisation de séjour ou de travail.

2.4.       Cela étant, il reste que, pour qu'une peine puisse être exécutée sous la forme de TIG, il doit être prévisible que l'intéressé puisse, cas échéant après l'exécution de la sanction, poursuivre son évolution en Suisse, en maintenant ses liens sociaux et/ou professionnels avec ce pays. C'est la raison d'être du TIG, qui ressort de la jurisprudence rendue en application de l'ancien droit des sanctions (cf. ACPR/500/2002 du 26 juillet 2022 consid. 3.2. ), laquelle conserve sa pertinence dans le cadre de l'art. 79a CP (cf. ACPR/500/2002 du 26 juillet 2022 consid. 3.1. ) et ne relève non pas du droit cantonal ou intercantonal, mais fédéral. Il ressort par ailleurs de la lettre de l’art. 79a CP qu’un TIG n’est envisageable qu’en l’absence d’un risque de récidive.

Or, en l’espèce, le recourant soutient que sa mère serait domiciliée en Suisse, ce qui est contredit par l'OCPM, et a été condamné à deux reprises pour infraction à la LEI. Ses recherches de travail en Suisse apparaissent circonstancielles au vu de la date des postulations soumises et de leur faible nombre, et se sont vues refusées. Il est ainsi douteux que le recourant souhaite créer des liens professionnels et sociaux en Suisse, au sens de la jurisprudence. Le refus du TIG est ainsi conforme à l’art. 79a CP.

Il est précisé que cette absence de travail en Suisse ne lui permet pas de solliciter une exécution de peines en semi-détention.

3.             Justifiée, la décision querellée sera donc confirmée par substitution de motifs.

4.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, au Service de l’application des peines et mesures et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Corinne CHAPPUIS BUGNON, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PS/69/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

Total

CHF

900.00